Jazz in Marciac. Un trio atypique
La nécessaire concision à laquelle je faisais allusion hier sera aujourd’hui de mise. En effet, le programme de ce 27 juillet est la copie conforme de celui que proposait à Marseille, le 23 de ce mois, le Festival de Jazz des cinq Continents. Thierry Quenum en a rendu compte sur ce blog et il suffit de se reporter à ses commentaires. Les quelques remarques qui suivent, loin de se substituer à eux, viendront seulement les compléter.
ACS : Geri Allen (p), Esperanza Spalding (b), Terri Lyne Carrington (dm).
Wayne Shorter Quartet : Wayne Shorter (ts, ss), Danilo Perez (p), John Patitucci (b), Brian Blade (dm).
Chapiteau, 27 juillet.
Atypique, le trio ACS, et pas seulement parce qu’il est exclusivement féminin, ce qui demeure anecdotique. Du reste, la chose n’est pas si neuve. Au début des années 80, la tromboniste Melba Liston avait constitué pour une tournée un orchestre de femmes qui interprétait ses arrangements et au sein duquel officiait, à la batterie, Dottie Dodgion. Cela pour la petite histoire et pour apporter une contribution au thème « Rien de nouveau sous le soleil »..
Ce qui est nouveau avec Geri Allen et ses deux partenaires, c’est l’absence de leadership. La hiérarchie traditionnelle qui accorde la prééminence au piano se trouve ici battue en brèche, chacune apportant sa pierre à l’édification d’un répertoire qui emprunte largement à Wayne Shorter. A commencer par Fall, exposé au piano de façon minimaliste, Geri Allen se contentant de suggérer des pistes, de jouer sur les silences, d’ouvrir à ses complices des espaces. Voilà qui, d’entrée, donne le ton et laisse deviner à la fois la teneur du concert et le fonctionnement du trio.
Esperanza Spalding en est la plaque tournante, et d’abord par sa position « géographique » médiane, à mi-chemin du piano et de la batterie entre lesquels elle joue les relais. Elle délaisse la basse électrique pour se consacrer exclusivement à la contrebasse, ce qui n’est pas pour nous déplaire. Dissimulant sa coiffure afro sous un chapeau qui accentue son aspect juvénile et lui donne un petit air espiègle, elle se multiplie de façon parfois profuse, fait valoir l’aisance à laquelle elle nous a habitués, se risque dans un vocal un peu hasardeux sur Unconditional Love, une composition de la pianiste. Celle-ci, à l’inverse, se cantonne dans un lyrisme contenu (Beautiful Friendship) que sa sobriété rend d’autant plus efficace.
Quant à Terri Lyne Carrington, elle prend une part active dans l’élaboration de chacune des pièces dont elle souligne les articulations (Infant Eyes), à la fois précise et inventive, relançant les débats avec une pertinence jamais en défaut. En somme, un all-stars, rigoureux dans sa démarche. Original et séduisant. Pour le répertoire, outre Nothing Like You et le Miss Ann d’Eric Dolphy, Nefertiti et Virgo de Shorter. Histoire d’offrir un prélude au saxophoniste.
Sur Wayne Shorter, rien à ajouter au commentaire que je lui ai consacré après son concert du 16 juillet à Juan-les-Pins et auquel je renvoie les lecteurs qui ont eu la bénévolence de me suivre jusqu’ici. Même déroulement, même répertoire, à la virgule près (Zero Gravity, Water Babies, Lotus, Plaza Real, Adventures Aboard The Golden Mean…). Seule différence, et de taille : au fil du concert, et pour la plus grande joie d’un Patitucci souvent hilare, le saxophoniste sort de sa réserve, se livre à des développements plus étoffés dont l’acmé est ponctuée par les feux d’artifice que Brian Blade fait jaillir de ses cymbales.
Une montée en puissance qui témoigne de la joie de jouer du quasi-octogénaire et de ses trois complices. Au point qu’au terme d’une prestation exceptionnellement longue, il ne faudra pas moins de trois rappels pour que le quartette se résolve à quitter la scène.
Ce soir, changement de style et d’atmosphère avec Virginie Teychené et George Benson.
Jacques Aboucaya
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La nécessaire concision à laquelle je faisais allusion hier sera aujourd’hui de mise. En effet, le programme de ce 27 juillet est la copie conforme de celui que proposait à Marseille, le 23 de ce mois, le Festival de Jazz des cinq Continents. Thierry Quenum en a rendu compte sur ce blog et il suffit de se reporter à ses commentaires. Les quelques remarques qui suivent, loin de se substituer à eux, viendront seulement les compléter.
ACS : Geri Allen (p), Esperanza Spalding (b), Terri Lyne Carrington (dm).
Wayne Shorter Quartet : Wayne Shorter (ts, ss), Danilo Perez (p), John Patitucci (b), Brian Blade (dm).
Chapiteau, 27 juillet.
Atypique, le trio ACS, et pas seulement parce qu’il est exclusivement féminin, ce qui demeure anecdotique. Du reste, la chose n’est pas si neuve. Au début des années 80, la tromboniste Melba Liston avait constitué pour une tournée un orchestre de femmes qui interprétait ses arrangements et au sein duquel officiait, à la batterie, Dottie Dodgion. Cela pour la petite histoire et pour apporter une contribution au thème « Rien de nouveau sous le soleil »..
Ce qui est nouveau avec Geri Allen et ses deux partenaires, c’est l’absence de leadership. La hiérarchie traditionnelle qui accorde la prééminence au piano se trouve ici battue en brèche, chacune apportant sa pierre à l’édification d’un répertoire qui emprunte largement à Wayne Shorter. A commencer par Fall, exposé au piano de façon minimaliste, Geri Allen se contentant de suggérer des pistes, de jouer sur les silences, d’ouvrir à ses complices des espaces. Voilà qui, d’entrée, donne le ton et laisse deviner à la fois la teneur du concert et le fonctionnement du trio.
Esperanza Spalding en est la plaque tournante, et d’abord par sa position « géographique » médiane, à mi-chemin du piano et de la batterie entre lesquels elle joue les relais. Elle délaisse la basse électrique pour se consacrer exclusivement à la contrebasse, ce qui n’est pas pour nous déplaire. Dissimulant sa coiffure afro sous un chapeau qui accentue son aspect juvénile et lui donne un petit air espiègle, elle se multiplie de façon parfois profuse, fait valoir l’aisance à laquelle elle nous a habitués, se risque dans un vocal un peu hasardeux sur Unconditional Love, une composition de la pianiste. Celle-ci, à l’inverse, se cantonne dans un lyrisme contenu (Beautiful Friendship) que sa sobriété rend d’autant plus efficace.
Quant à Terri Lyne Carrington, elle prend une part active dans l’élaboration de chacune des pièces dont elle souligne les articulations (Infant Eyes), à la fois précise et inventive, relançant les débats avec une pertinence jamais en défaut. En somme, un all-stars, rigoureux dans sa démarche. Original et séduisant. Pour le répertoire, outre Nothing Like You et le Miss Ann d’Eric Dolphy, Nefertiti et Virgo de Shorter. Histoire d’offrir un prélude au saxophoniste.
Sur Wayne Shorter, rien à ajouter au commentaire que je lui ai consacré après son concert du 16 juillet à Juan-les-Pins et auquel je renvoie les lecteurs qui ont eu la bénévolence de me suivre jusqu’ici. Même déroulement, même répertoire, à la virgule près (Zero Gravity, Water Babies, Lotus, Plaza Real, Adventures Aboard The Golden Mean…). Seule différence, et de taille : au fil du concert, et pour la plus grande joie d’un Patitucci souvent hilare, le saxophoniste sort de sa réserve, se livre à des développements plus étoffés dont l’acmé est ponctuée par les feux d’artifice que Brian Blade fait jaillir de ses cymbales.
Une montée en puissance qui témoigne de la joie de jouer du quasi-octogénaire et de ses trois complices. Au point qu’au terme d’une prestation exceptionnellement longue, il ne faudra pas moins de trois rappels pour que le quartette se résolve à quitter la scène.
Ce soir, changement de style et d’atmosphère avec Virginie Teychené et George Benson.
Jacques Aboucaya
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La nécessaire concision à laquelle je faisais allusion hier sera aujourd’hui de mise. En effet, le programme de ce 27 juillet est la copie conforme de celui que proposait à Marseille, le 23 de ce mois, le Festival de Jazz des cinq Continents. Thierry Quenum en a rendu compte sur ce blog et il suffit de se reporter à ses commentaires. Les quelques remarques qui suivent, loin de se substituer à eux, viendront seulement les compléter.
ACS : Geri Allen (p), Esperanza Spalding (b), Terri Lyne Carrington (dm).
Wayne Shorter Quartet : Wayne Shorter (ts, ss), Danilo Perez (p), John Patitucci (b), Brian Blade (dm).
Chapiteau, 27 juillet.
Atypique, le trio ACS, et pas seulement parce qu’il est exclusivement féminin, ce qui demeure anecdotique. Du reste, la chose n’est pas si neuve. Au début des années 80, la tromboniste Melba Liston avait constitué pour une tournée un orchestre de femmes qui interprétait ses arrangements et au sein duquel officiait, à la batterie, Dottie Dodgion. Cela pour la petite histoire et pour apporter une contribution au thème « Rien de nouveau sous le soleil »..
Ce qui est nouveau avec Geri Allen et ses deux partenaires, c’est l’absence de leadership. La hiérarchie traditionnelle qui accorde la prééminence au piano se trouve ici battue en brèche, chacune apportant sa pierre à l’édification d’un répertoire qui emprunte largement à Wayne Shorter. A commencer par Fall, exposé au piano de façon minimaliste, Geri Allen se contentant de suggérer des pistes, de jouer sur les silences, d’ouvrir à ses complices des espaces. Voilà qui, d’entrée, donne le ton et laisse deviner à la fois la teneur du concert et le fonctionnement du trio.
Esperanza Spalding en est la plaque tournante, et d’abord par sa position « géographique » médiane, à mi-chemin du piano et de la batterie entre lesquels elle joue les relais. Elle délaisse la basse électrique pour se consacrer exclusivement à la contrebasse, ce qui n’est pas pour nous déplaire. Dissimulant sa coiffure afro sous un chapeau qui accentue son aspect juvénile et lui donne un petit air espiègle, elle se multiplie de façon parfois profuse, fait valoir l’aisance à laquelle elle nous a habitués, se risque dans un vocal un peu hasardeux sur Unconditional Love, une composition de la pianiste. Celle-ci, à l’inverse, se cantonne dans un lyrisme contenu (Beautiful Friendship) que sa sobriété rend d’autant plus efficace.
Quant à Terri Lyne Carrington, elle prend une part active dans l’élaboration de chacune des pièces dont elle souligne les articulations (Infant Eyes), à la fois précise et inventive, relançant les débats avec une pertinence jamais en défaut. En somme, un all-stars, rigoureux dans sa démarche. Original et séduisant. Pour le répertoire, outre Nothing Like You et le Miss Ann d’Eric Dolphy, Nefertiti et Virgo de Shorter. Histoire d’offrir un prélude au saxophoniste.
Sur Wayne Shorter, rien à ajouter au commentaire que je lui ai consacré après son concert du 16 juillet à Juan-les-Pins et auquel je renvoie les lecteurs qui ont eu la bénévolence de me suivre jusqu’ici. Même déroulement, même répertoire, à la virgule près (Zero Gravity, Water Babies, Lotus, Plaza Real, Adventures Aboard The Golden Mean…). Seule différence, et de taille : au fil du concert, et pour la plus grande joie d’un Patitucci souvent hilare, le saxophoniste sort de sa réserve, se livre à des développements plus étoffés dont l’acmé est ponctuée par les feux d’artifice que Brian Blade fait jaillir de ses cymbales.
Une montée en puissance qui témoigne de la joie de jouer du quasi-octogénaire et de ses trois complices. Au point qu’au terme d’une prestation exceptionnellement longue, il ne faudra pas moins de trois rappels pour que le quartette se résolve à quitter la scène.
Ce soir, changement de style et d’atmosphère avec Virginie Teychené et George Benson.
Jacques Aboucaya
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La nécessaire concision à laquelle je faisais allusion hier sera aujourd’hui de mise. En effet, le programme de ce 27 juillet est la copie conforme de celui que proposait à Marseille, le 23 de ce mois, le Festival de Jazz des cinq Continents. Thierry Quenum en a rendu compte sur ce blog et il suffit de se reporter à ses commentaires. Les quelques remarques qui suivent, loin de se substituer à eux, viendront seulement les compléter.
ACS : Geri Allen (p), Esperanza Spalding (b), Terri Lyne Carrington (dm).
Wayne Shorter Quartet : Wayne Shorter (ts, ss), Danilo Perez (p), John Patitucci (b), Brian Blade (dm).
Chapiteau, 27 juillet.
Atypique, le trio ACS, et pas seulement parce qu’il est exclusivement féminin, ce qui demeure anecdotique. Du reste, la chose n’est pas si neuve. Au début des années 80, la tromboniste Melba Liston avait constitué pour une tournée un orchestre de femmes qui interprétait ses arrangements et au sein duquel officiait, à la batterie, Dottie Dodgion. Cela pour la petite histoire et pour apporter une contribution au thème « Rien de nouveau sous le soleil »..
Ce qui est nouveau avec Geri Allen et ses deux partenaires, c’est l’absence de leadership. La hiérarchie traditionnelle qui accorde la prééminence au piano se trouve ici battue en brèche, chacune apportant sa pierre à l’édification d’un répertoire qui emprunte largement à Wayne Shorter. A commencer par Fall, exposé au piano de façon minimaliste, Geri Allen se contentant de suggérer des pistes, de jouer sur les silences, d’ouvrir à ses complices des espaces. Voilà qui, d’entrée, donne le ton et laisse deviner à la fois la teneur du concert et le fonctionnement du trio.
Esperanza Spalding en est la plaque tournante, et d’abord par sa position « géographique » médiane, à mi-chemin du piano et de la batterie entre lesquels elle joue les relais. Elle délaisse la basse électrique pour se consacrer exclusivement à la contrebasse, ce qui n’est pas pour nous déplaire. Dissimulant sa coiffure afro sous un chapeau qui accentue son aspect juvénile et lui donne un petit air espiègle, elle se multiplie de façon parfois profuse, fait valoir l’aisance à laquelle elle nous a habitués, se risque dans un vocal un peu hasardeux sur Unconditional Love, une composition de la pianiste. Celle-ci, à l’inverse, se cantonne dans un lyrisme contenu (Beautiful Friendship) que sa sobriété rend d’autant plus efficace.
Quant à Terri Lyne Carrington, elle prend une part active dans l’élaboration de chacune des pièces dont elle souligne les articulations (Infant Eyes), à la fois précise et inventive, relançant les débats avec une pertinence jamais en défaut. En somme, un all-stars, rigoureux dans sa démarche. Original et séduisant. Pour le répertoire, outre Nothing Like You et le Miss Ann d’Eric Dolphy, Nefertiti et Virgo de Shorter. Histoire d’offrir un prélude au saxophoniste.
Sur Wayne Shorter, rien à ajouter au commentaire que je lui ai consacré après son concert du 16 juillet à Juan-les-Pins et auquel je renvoie les lecteurs qui ont eu la bénévolence de me suivre jusqu’ici. Même déroulement, même répertoire, à la virgule près (Zero Gravity, Water Babies, Lotus, Plaza Real, Adventures Aboard The Golden Mean…). Seule différence, et de taille : au fil du concert, et pour la plus grande joie d’un Patitucci souvent hilare, le saxophoniste sort de sa réserve, se livre à des développements plus étoffés dont l’acmé est ponctuée par les feux d’artifice que Brian Blade fait jaillir de ses cymbales.
Une montée en puissance qui témoigne de la joie de jouer du quasi-octogénaire et de ses trois complices. Au point qu’au terme d’une prestation exceptionnellement longue, il ne faudra pas moins de trois rappels pour que le quartette se résolve à quitter la scène.
Ce soir, changement de style et d’atmosphère avec Virginie Teychené et George Benson.
Jacques Aboucaya