Malta Jazz Festival, 1° soir. La Valette, Malte, 17/07
On arrive un peu en retard sur le port principal de La Valette (où a lieu le Malta Jazz Festival) car on s’est attardé sur la terrasse de l’excellent restaurant Aziamendi, où l’Office du Tourisme de Malte nous a invités avec une amabilité confondante, mes confrères européens et moi. Et, à peine descendus du van, on entend de loin que le son du groupe maltais qui débute traditionnellement les soirées du festival est nettement plus consistant que celui des formations locales que j’avais eu l’occasion d’entendre l’été dernier.
Paul Abela Quintet: Abela (p), Gabriele Comeglio (as), Marc Galea (g), Ryan Abela (b), Charles « City » Gatt (dm); Laurent Coq Dialogue Trio: Coq (p), Ralph Lavital (g), Nicolas Pelage (voc); Tom Harrell « Colors of Dreams »: Harrell (tp, bugle), Jaleel Shaw (as), Wayne Escoffery (ts), Ugonna Okegwo (b), Esperanza Spalding (b, voc), Johnathan Blake (dm).
La sonorité tranchante de l’altiste italien Gabriele Comeglio, entre autres, et la fermeté de son articulation sont perceptibles à une distance appréciable. De plus près, une fois installé, on ne changera pas d’avis à propos de ce musicien au-dessus du lot, même si le groupe dans son ensemble a davantage de difficulté à tenir la distance, chaque musicien ayant du mal à marquer de sa personnalité les thèmes soft-bop (pour les distinguer du hard bop) de Paul Abela, le pianiste-leader dont les capacités de compositeur surpassent largement ses talents de soliste.
Avec le trio de Laurent Coq (qui entame son concert avec une superbe version de “Silence” en hommage à Charlie Haden, disparu récemment) on entre dans une autre dimension. Mélodique, tout d’abord, et pas seulement par la grâce du chant de Nicolas Pélage — agile, gracile, bondissant et en même temps investi d’une force tellurique — mais aussi parce que chaque membre du groupe a un son bien à lui, qui irrigue l’ensemble et lui donne vie. Rythmique ensuite, car tous trois sont des maîtres du tempo qu’ils étirent ou resserrent en un magma dansant aux ondulations irrésistibles. Et il faut voir la façon dont Laurent Coq compense l’absence de basse par un jeu de main gauche d’une vigueur impressionnante. Enfin parce que nous avons ici affaire à trois solistes de premier ordre — entre autres Ralph Lavital, tout en nuances — qui, s’ils savent magnifiquement accompagner leurs comparses, s’envolent et nous emportent vraiment — et je ne mâche pas mes mots, puisqu’au moment où j’écris et où ils jouent un énorme et silencieux paquebot de croisière sort du port de La Valette, longeant majestueusement la scène à une encablure de distance — quand ils prennent leur liberté, sans jamais sombrer dans le bavardage, concentrés sur l’histoire qu’ils ont à raconter, que ce soit en trio ou — sur deux thèmes — en duo. Du travail d’orfèvres !
On semble encore monter d’un cran avec le groupe de Tom Harrell, qui démarre par un tempo enlevé sur lequel Esperanza Spalding prend dès le début un solo en scat virevoltant à souhait. Le ton est donné : sur une base mélodico-harmonique souvent assez simple, enrichie de riffs efficaces et soutenue par le vrombissement tellurique de deux contrebasses, Tom Harrell réussit à construire des morceaux accrocheurs, grâce notamment à l’investissement de solistes dévoués à sa cause. Sans autre prétention que de faire vivre un post-hardbop qui, ailleurs, affiche souvent d’emblée ses limites, le trompettiste montre que la foi et le savoir-faire sont capables de maintenir le genre sous perfusion quelque temps encore. Mais, en l’occurrence, pas même la durée d’un concert ce soir-ci. Car, après la surprise initiale du gros son de groupe, le sextet tombe vite dans les clichés tant au niveau des solos que des compos, et on se lasse. Dommage ! Thierry Quénum
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On arrive un peu en retard sur le port principal de La Valette (où a lieu le Malta Jazz Festival) car on s’est attardé sur la terrasse de l’excellent restaurant Aziamendi, où l’Office du Tourisme de Malte nous a invités avec une amabilité confondante, mes confrères européens et moi. Et, à peine descendus du van, on entend de loin que le son du groupe maltais qui débute traditionnellement les soirées du festival est nettement plus consistant que celui des formations locales que j’avais eu l’occasion d’entendre l’été dernier.
Paul Abela Quintet: Abela (p), Gabriele Comeglio (as), Marc Galea (g), Ryan Abela (b), Charles « City » Gatt (dm); Laurent Coq Dialogue Trio: Coq (p), Ralph Lavital (g), Nicolas Pelage (voc); Tom Harrell « Colors of Dreams »: Harrell (tp, bugle), Jaleel Shaw (as), Wayne Escoffery (ts), Ugonna Okegwo (b), Esperanza Spalding (b, voc), Johnathan Blake (dm).
La sonorité tranchante de l’altiste italien Gabriele Comeglio, entre autres, et la fermeté de son articulation sont perceptibles à une distance appréciable. De plus près, une fois installé, on ne changera pas d’avis à propos de ce musicien au-dessus du lot, même si le groupe dans son ensemble a davantage de difficulté à tenir la distance, chaque musicien ayant du mal à marquer de sa personnalité les thèmes soft-bop (pour les distinguer du hard bop) de Paul Abela, le pianiste-leader dont les capacités de compositeur surpassent largement ses talents de soliste.
Avec le trio de Laurent Coq (qui entame son concert avec une superbe version de “Silence” en hommage à Charlie Haden, disparu récemment) on entre dans une autre dimension. Mélodique, tout d’abord, et pas seulement par la grâce du chant de Nicolas Pélage — agile, gracile, bondissant et en même temps investi d’une force tellurique — mais aussi parce que chaque membre du groupe a un son bien à lui, qui irrigue l’ensemble et lui donne vie. Rythmique ensuite, car tous trois sont des maîtres du tempo qu’ils étirent ou resserrent en un magma dansant aux ondulations irrésistibles. Et il faut voir la façon dont Laurent Coq compense l’absence de basse par un jeu de main gauche d’une vigueur impressionnante. Enfin parce que nous avons ici affaire à trois solistes de premier ordre — entre autres Ralph Lavital, tout en nuances — qui, s’ils savent magnifiquement accompagner leurs comparses, s’envolent et nous emportent vraiment — et je ne mâche pas mes mots, puisqu’au moment où j’écris et où ils jouent un énorme et silencieux paquebot de croisière sort du port de La Valette, longeant majestueusement la scène à une encablure de distance — quand ils prennent leur liberté, sans jamais sombrer dans le bavardage, concentrés sur l’histoire qu’ils ont à raconter, que ce soit en trio ou — sur deux thèmes — en duo. Du travail d’orfèvres !
On semble encore monter d’un cran avec le groupe de Tom Harrell, qui démarre par un tempo enlevé sur lequel Esperanza Spalding prend dès le début un solo en scat virevoltant à souhait. Le ton est donné : sur une base mélodico-harmonique souvent assez simple, enrichie de riffs efficaces et soutenue par le vrombissement tellurique de deux contrebasses, Tom Harrell réussit à construire des morceaux accrocheurs, grâce notamment à l’investissement de solistes dévoués à sa cause. Sans autre prétention que de faire vivre un post-hardbop qui, ailleurs, affiche souvent d’emblée ses limites, le trompettiste montre que la foi et le savoir-faire sont capables de maintenir le genre sous perfusion quelque temps encore. Mais, en l’occurrence, pas même la durée d’un concert ce soir-ci. Car, après la surprise initiale du gros son de groupe, le sextet tombe vite dans les clichés tant au niveau des solos que des compos, et on se lasse. Dommage ! Thierry Quénum
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On arrive un peu en retard sur le port principal de La Valette (où a lieu le Malta Jazz Festival) car on s’est attardé sur la terrasse de l’excellent restaurant Aziamendi, où l’Office du Tourisme de Malte nous a invités avec une amabilité confondante, mes confrères européens et moi. Et, à peine descendus du van, on entend de loin que le son du groupe maltais qui débute traditionnellement les soirées du festival est nettement plus consistant que celui des formations locales que j’avais eu l’occasion d’entendre l’été dernier.
Paul Abela Quintet: Abela (p), Gabriele Comeglio (as), Marc Galea (g), Ryan Abela (b), Charles « City » Gatt (dm); Laurent Coq Dialogue Trio: Coq (p), Ralph Lavital (g), Nicolas Pelage (voc); Tom Harrell « Colors of Dreams »: Harrell (tp, bugle), Jaleel Shaw (as), Wayne Escoffery (ts), Ugonna Okegwo (b), Esperanza Spalding (b, voc), Johnathan Blake (dm).
La sonorité tranchante de l’altiste italien Gabriele Comeglio, entre autres, et la fermeté de son articulation sont perceptibles à une distance appréciable. De plus près, une fois installé, on ne changera pas d’avis à propos de ce musicien au-dessus du lot, même si le groupe dans son ensemble a davantage de difficulté à tenir la distance, chaque musicien ayant du mal à marquer de sa personnalité les thèmes soft-bop (pour les distinguer du hard bop) de Paul Abela, le pianiste-leader dont les capacités de compositeur surpassent largement ses talents de soliste.
Avec le trio de Laurent Coq (qui entame son concert avec une superbe version de “Silence” en hommage à Charlie Haden, disparu récemment) on entre dans une autre dimension. Mélodique, tout d’abord, et pas seulement par la grâce du chant de Nicolas Pélage — agile, gracile, bondissant et en même temps investi d’une force tellurique — mais aussi parce que chaque membre du groupe a un son bien à lui, qui irrigue l’ensemble et lui donne vie. Rythmique ensuite, car tous trois sont des maîtres du tempo qu’ils étirent ou resserrent en un magma dansant aux ondulations irrésistibles. Et il faut voir la façon dont Laurent Coq compense l’absence de basse par un jeu de main gauche d’une vigueur impressionnante. Enfin parce que nous avons ici affaire à trois solistes de premier ordre — entre autres Ralph Lavital, tout en nuances — qui, s’ils savent magnifiquement accompagner leurs comparses, s’envolent et nous emportent vraiment — et je ne mâche pas mes mots, puisqu’au moment où j’écris et où ils jouent un énorme et silencieux paquebot de croisière sort du port de La Valette, longeant majestueusement la scène à une encablure de distance — quand ils prennent leur liberté, sans jamais sombrer dans le bavardage, concentrés sur l’histoire qu’ils ont à raconter, que ce soit en trio ou — sur deux thèmes — en duo. Du travail d’orfèvres !
On semble encore monter d’un cran avec le groupe de Tom Harrell, qui démarre par un tempo enlevé sur lequel Esperanza Spalding prend dès le début un solo en scat virevoltant à souhait. Le ton est donné : sur une base mélodico-harmonique souvent assez simple, enrichie de riffs efficaces et soutenue par le vrombissement tellurique de deux contrebasses, Tom Harrell réussit à construire des morceaux accrocheurs, grâce notamment à l’investissement de solistes dévoués à sa cause. Sans autre prétention que de faire vivre un post-hardbop qui, ailleurs, affiche souvent d’emblée ses limites, le trompettiste montre que la foi et le savoir-faire sont capables de maintenir le genre sous perfusion quelque temps encore. Mais, en l’occurrence, pas même la durée d’un concert ce soir-ci. Car, après la surprise initiale du gros son de groupe, le sextet tombe vite dans les clichés tant au niveau des solos que des compos, et on se lasse. Dommage ! Thierry Quénum
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On arrive un peu en retard sur le port principal de La Valette (où a lieu le Malta Jazz Festival) car on s’est attardé sur la terrasse de l’excellent restaurant Aziamendi, où l’Office du Tourisme de Malte nous a invités avec une amabilité confondante, mes confrères européens et moi. Et, à peine descendus du van, on entend de loin que le son du groupe maltais qui débute traditionnellement les soirées du festival est nettement plus consistant que celui des formations locales que j’avais eu l’occasion d’entendre l’été dernier.
Paul Abela Quintet: Abela (p), Gabriele Comeglio (as), Marc Galea (g), Ryan Abela (b), Charles « City » Gatt (dm); Laurent Coq Dialogue Trio: Coq (p), Ralph Lavital (g), Nicolas Pelage (voc); Tom Harrell « Colors of Dreams »: Harrell (tp, bugle), Jaleel Shaw (as), Wayne Escoffery (ts), Ugonna Okegwo (b), Esperanza Spalding (b, voc), Johnathan Blake (dm).
La sonorité tranchante de l’altiste italien Gabriele Comeglio, entre autres, et la fermeté de son articulation sont perceptibles à une distance appréciable. De plus près, une fois installé, on ne changera pas d’avis à propos de ce musicien au-dessus du lot, même si le groupe dans son ensemble a davantage de difficulté à tenir la distance, chaque musicien ayant du mal à marquer de sa personnalité les thèmes soft-bop (pour les distinguer du hard bop) de Paul Abela, le pianiste-leader dont les capacités de compositeur surpassent largement ses talents de soliste.
Avec le trio de Laurent Coq (qui entame son concert avec une superbe version de “Silence” en hommage à Charlie Haden, disparu récemment) on entre dans une autre dimension. Mélodique, tout d’abord, et pas seulement par la grâce du chant de Nicolas Pélage — agile, gracile, bondissant et en même temps investi d’une force tellurique — mais aussi parce que chaque membre du groupe a un son bien à lui, qui irrigue l’ensemble et lui donne vie. Rythmique ensuite, car tous trois sont des maîtres du tempo qu’ils étirent ou resserrent en un magma dansant aux ondulations irrésistibles. Et il faut voir la façon dont Laurent Coq compense l’absence de basse par un jeu de main gauche d’une vigueur impressionnante. Enfin parce que nous avons ici affaire à trois solistes de premier ordre — entre autres Ralph Lavital, tout en nuances — qui, s’ils savent magnifiquement accompagner leurs comparses, s’envolent et nous emportent vraiment — et je ne mâche pas mes mots, puisqu’au moment où j’écris et où ils jouent un énorme et silencieux paquebot de croisière sort du port de La Valette, longeant majestueusement la scène à une encablure de distance — quand ils prennent leur liberté, sans jamais sombrer dans le bavardage, concentrés sur l’histoire qu’ils ont à raconter, que ce soit en trio ou — sur deux thèmes — en duo. Du travail d’orfèvres !
On semble encore monter d’un cran avec le groupe de Tom Harrell, qui démarre par un tempo enlevé sur lequel Esperanza Spalding prend dès le début un solo en scat virevoltant à souhait. Le ton est donné : sur une base mélodico-harmonique souvent assez simple, enrichie de riffs efficaces et soutenue par le vrombissement tellurique de deux contrebasses, Tom Harrell réussit à construire des morceaux accrocheurs, grâce notamment à l’investissement de solistes dévoués à sa cause. Sans autre prétention que de faire vivre un post-hardbop qui, ailleurs, affiche souvent d’emblée ses limites, le trompettiste montre que la foi et le savoir-faire sont capables de maintenir le genre sous perfusion quelque temps encore. Mais, en l’occurrence, pas même la durée d’un concert ce soir-ci. Car, après la surprise initiale du gros son de groupe, le sextet tombe vite dans les clichés tant au niveau des solos que des compos, et on se lasse. Dommage ! Thierry Quénum