Jazz live
Publié le 19 Juil 2014

Malta Jazz Festival, 2° soir. La Valette, Malte, 18/07

Malte a vu naître un ténor lyrique de réputation internationale, Joseph Calleja, qui revient chaque année donner un concert dans son île natale. Du fait de ce concert annuel, qui constitue un des événements culturels majeurs de la saison estivale, les routes de La Valette se trouvent embouteillées de façon exceptionnelle, et fort peu lyrique. En conséquence de quoi, une brochette de journalistes britanniques, espagnol, allemand, français — tous gens de bonne volonté et éventuellement amateurs de chant lyrique si on les sollicite gentiment, mais pas ce soir — arrivent une bonne heure en retard à la deuxième soirée du Malta Jazz Festival, juste au moment où le groupe local qui débute chacune de ces soirées joue ses dernières notes.

Kneebody : Shane Endsley (tp), Ben Wendel (ts), Adam Benjamin (claviers), Nate Wood (elb), Mark Giuliana (dm) ; Mehliana : Brad Mehldau (p, claviers), Mark Giuliana (dm).

Il ne reste plus qu’à casser une graine en attendant que s’installe la formation suivante, Kneebody, présentée de façon dithyrambique dans le programme, mais que je n’ai personnellement jamais entendue ni sur disque ni sur scène. Le gros son initial peut effectivement être bluffant, de prime abord. Mais quand on cherche par la suite à quoi s’accrocher, on se trouve à la peine. Une basse électrique obsédante et une batterie envahissante soutiennent l’ensemble, mais les thèmes manquent cruellement d’invention mélodique et de finesse. Quant aux solos du ténor et du trompettiste, ils sonnent comme des morceaux de bravoure dépourvus de propos autre que démonstratif. Significativement, le seul semblant de ballade du répertoire sera appesanti par un drumming plombé, une ligne mélodique exposée platement à l’unisson et une totale absence d’improvisation, ce qui réduisit la durée dudit morceau à quelques minutes à peine. De bons musiciens de studio s’évertuant à réaliser une séance d’enregistrement en se préoccupant plus de technique que de musique en auraient fait autant. Mais nous, simples êtres humains de chair et de sang et éprouvant des sentiments, est-ce cela que nous attendons, là, au bord de la mer d’où tout — mais pas ça — est venu jadis ?

Déjà vers la fin du concert de Kneebody et encore davantage lors de la pause précédant celui de Mehliana, de l’autre côté du bras de mer au bord duquel a lieu le MJF on commençait à célébrer dieu sait quoi par un magnifique feu d’artifice dont on se demandait comment l’ombrageux Mehldau et son compère récidiviste Mark Giuliana allaient apprécier l’éventualité qu’il se prolonge durant leur performance en duo. Heureusement, le timing de l’organisation du festival fit que le pianiste et le batteur ne commencèrent à jouer qu’une fois les craquements et détonations d’en face se furent tus. On ne peut nier à Brad Mehldau un talent de mélodiste et, que ce soit au piano ou au Rhodes, il produisit durant ce concert quelques beaux passages lyriques. Le problème est qu’on comprend mal la volonté d’enrober tout cela dans un fatras de nappes électroniques grésillantes et de batterie survitaminée, en faisant tourner inlassablement les mêmes trames harmoniques simplistes et éculées. Autant dire que les plus chenus d’entre nous regrettèrent amèrement le bon vieux temps d’Emerson, Lake & Palmer ! Il y a presque quelque chose de schizophrénique à vouloir faire cohabiter ainsi deux univers aussi opposés : une veine mélodique qui sombre parfois dans le new age le plus niaiseux et un jazz-rock brutal et mécanique. Le fantasme de la belle et la bête, peut-être ? Thierry Quénum

 

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Malte a vu naître un ténor lyrique de réputation internationale, Joseph Calleja, qui revient chaque année donner un concert dans son île natale. Du fait de ce concert annuel, qui constitue un des événements culturels majeurs de la saison estivale, les routes de La Valette se trouvent embouteillées de façon exceptionnelle, et fort peu lyrique. En conséquence de quoi, une brochette de journalistes britanniques, espagnol, allemand, français — tous gens de bonne volonté et éventuellement amateurs de chant lyrique si on les sollicite gentiment, mais pas ce soir — arrivent une bonne heure en retard à la deuxième soirée du Malta Jazz Festival, juste au moment où le groupe local qui débute chacune de ces soirées joue ses dernières notes.

Kneebody : Shane Endsley (tp), Ben Wendel (ts), Adam Benjamin (claviers), Nate Wood (elb), Mark Giuliana (dm) ; Mehliana : Brad Mehldau (p, claviers), Mark Giuliana (dm).

Il ne reste plus qu’à casser une graine en attendant que s’installe la formation suivante, Kneebody, présentée de façon dithyrambique dans le programme, mais que je n’ai personnellement jamais entendue ni sur disque ni sur scène. Le gros son initial peut effectivement être bluffant, de prime abord. Mais quand on cherche par la suite à quoi s’accrocher, on se trouve à la peine. Une basse électrique obsédante et une batterie envahissante soutiennent l’ensemble, mais les thèmes manquent cruellement d’invention mélodique et de finesse. Quant aux solos du ténor et du trompettiste, ils sonnent comme des morceaux de bravoure dépourvus de propos autre que démonstratif. Significativement, le seul semblant de ballade du répertoire sera appesanti par un drumming plombé, une ligne mélodique exposée platement à l’unisson et une totale absence d’improvisation, ce qui réduisit la durée dudit morceau à quelques minutes à peine. De bons musiciens de studio s’évertuant à réaliser une séance d’enregistrement en se préoccupant plus de technique que de musique en auraient fait autant. Mais nous, simples êtres humains de chair et de sang et éprouvant des sentiments, est-ce cela que nous attendons, là, au bord de la mer d’où tout — mais pas ça — est venu jadis ?

Déjà vers la fin du concert de Kneebody et encore davantage lors de la pause précédant celui de Mehliana, de l’autre côté du bras de mer au bord duquel a lieu le MJF on commençait à célébrer dieu sait quoi par un magnifique feu d’artifice dont on se demandait comment l’ombrageux Mehldau et son compère récidiviste Mark Giuliana allaient apprécier l’éventualité qu’il se prolonge durant leur performance en duo. Heureusement, le timing de l’organisation du festival fit que le pianiste et le batteur ne commencèrent à jouer qu’une fois les craquements et détonations d’en face se furent tus. On ne peut nier à Brad Mehldau un talent de mélodiste et, que ce soit au piano ou au Rhodes, il produisit durant ce concert quelques beaux passages lyriques. Le problème est qu’on comprend mal la volonté d’enrober tout cela dans un fatras de nappes électroniques grésillantes et de batterie survitaminée, en faisant tourner inlassablement les mêmes trames harmoniques simplistes et éculées. Autant dire que les plus chenus d’entre nous regrettèrent amèrement le bon vieux temps d’Emerson, Lake & Palmer ! Il y a presque quelque chose de schizophrénique à vouloir faire cohabiter ainsi deux univers aussi opposés : une veine mélodique qui sombre parfois dans le new age le plus niaiseux et un jazz-rock brutal et mécanique. Le fantasme de la belle et la bête, peut-être ? Thierry Quénum

 

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Malte a vu naître un ténor lyrique de réputation internationale, Joseph Calleja, qui revient chaque année donner un concert dans son île natale. Du fait de ce concert annuel, qui constitue un des événements culturels majeurs de la saison estivale, les routes de La Valette se trouvent embouteillées de façon exceptionnelle, et fort peu lyrique. En conséquence de quoi, une brochette de journalistes britanniques, espagnol, allemand, français — tous gens de bonne volonté et éventuellement amateurs de chant lyrique si on les sollicite gentiment, mais pas ce soir — arrivent une bonne heure en retard à la deuxième soirée du Malta Jazz Festival, juste au moment où le groupe local qui débute chacune de ces soirées joue ses dernières notes.

Kneebody : Shane Endsley (tp), Ben Wendel (ts), Adam Benjamin (claviers), Nate Wood (elb), Mark Giuliana (dm) ; Mehliana : Brad Mehldau (p, claviers), Mark Giuliana (dm).

Il ne reste plus qu’à casser une graine en attendant que s’installe la formation suivante, Kneebody, présentée de façon dithyrambique dans le programme, mais que je n’ai personnellement jamais entendue ni sur disque ni sur scène. Le gros son initial peut effectivement être bluffant, de prime abord. Mais quand on cherche par la suite à quoi s’accrocher, on se trouve à la peine. Une basse électrique obsédante et une batterie envahissante soutiennent l’ensemble, mais les thèmes manquent cruellement d’invention mélodique et de finesse. Quant aux solos du ténor et du trompettiste, ils sonnent comme des morceaux de bravoure dépourvus de propos autre que démonstratif. Significativement, le seul semblant de ballade du répertoire sera appesanti par un drumming plombé, une ligne mélodique exposée platement à l’unisson et une totale absence d’improvisation, ce qui réduisit la durée dudit morceau à quelques minutes à peine. De bons musiciens de studio s’évertuant à réaliser une séance d’enregistrement en se préoccupant plus de technique que de musique en auraient fait autant. Mais nous, simples êtres humains de chair et de sang et éprouvant des sentiments, est-ce cela que nous attendons, là, au bord de la mer d’où tout — mais pas ça — est venu jadis ?

Déjà vers la fin du concert de Kneebody et encore davantage lors de la pause précédant celui de Mehliana, de l’autre côté du bras de mer au bord duquel a lieu le MJF on commençait à célébrer dieu sait quoi par un magnifique feu d’artifice dont on se demandait comment l’ombrageux Mehldau et son compère récidiviste Mark Giuliana allaient apprécier l’éventualité qu’il se prolonge durant leur performance en duo. Heureusement, le timing de l’organisation du festival fit que le pianiste et le batteur ne commencèrent à jouer qu’une fois les craquements et détonations d’en face se furent tus. On ne peut nier à Brad Mehldau un talent de mélodiste et, que ce soit au piano ou au Rhodes, il produisit durant ce concert quelques beaux passages lyriques. Le problème est qu’on comprend mal la volonté d’enrober tout cela dans un fatras de nappes électroniques grésillantes et de batterie survitaminée, en faisant tourner inlassablement les mêmes trames harmoniques simplistes et éculées. Autant dire que les plus chenus d’entre nous regrettèrent amèrement le bon vieux temps d’Emerson, Lake & Palmer ! Il y a presque quelque chose de schizophrénique à vouloir faire cohabiter ainsi deux univers aussi opposés : une veine mélodique qui sombre parfois dans le new age le plus niaiseux et un jazz-rock brutal et mécanique. Le fantasme de la belle et la bête, peut-être ? Thierry Quénum

 

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Malte a vu naître un ténor lyrique de réputation internationale, Joseph Calleja, qui revient chaque année donner un concert dans son île natale. Du fait de ce concert annuel, qui constitue un des événements culturels majeurs de la saison estivale, les routes de La Valette se trouvent embouteillées de façon exceptionnelle, et fort peu lyrique. En conséquence de quoi, une brochette de journalistes britanniques, espagnol, allemand, français — tous gens de bonne volonté et éventuellement amateurs de chant lyrique si on les sollicite gentiment, mais pas ce soir — arrivent une bonne heure en retard à la deuxième soirée du Malta Jazz Festival, juste au moment où le groupe local qui débute chacune de ces soirées joue ses dernières notes.

Kneebody : Shane Endsley (tp), Ben Wendel (ts), Adam Benjamin (claviers), Nate Wood (elb), Mark Giuliana (dm) ; Mehliana : Brad Mehldau (p, claviers), Mark Giuliana (dm).

Il ne reste plus qu’à casser une graine en attendant que s’installe la formation suivante, Kneebody, présentée de façon dithyrambique dans le programme, mais que je n’ai personnellement jamais entendue ni sur disque ni sur scène. Le gros son initial peut effectivement être bluffant, de prime abord. Mais quand on cherche par la suite à quoi s’accrocher, on se trouve à la peine. Une basse électrique obsédante et une batterie envahissante soutiennent l’ensemble, mais les thèmes manquent cruellement d’invention mélodique et de finesse. Quant aux solos du ténor et du trompettiste, ils sonnent comme des morceaux de bravoure dépourvus de propos autre que démonstratif. Significativement, le seul semblant de ballade du répertoire sera appesanti par un drumming plombé, une ligne mélodique exposée platement à l’unisson et une totale absence d’improvisation, ce qui réduisit la durée dudit morceau à quelques minutes à peine. De bons musiciens de studio s’évertuant à réaliser une séance d’enregistrement en se préoccupant plus de technique que de musique en auraient fait autant. Mais nous, simples êtres humains de chair et de sang et éprouvant des sentiments, est-ce cela que nous attendons, là, au bord de la mer d’où tout — mais pas ça — est venu jadis ?

Déjà vers la fin du concert de Kneebody et encore davantage lors de la pause précédant celui de Mehliana, de l’autre côté du bras de mer au bord duquel a lieu le MJF on commençait à célébrer dieu sait quoi par un magnifique feu d’artifice dont on se demandait comment l’ombrageux Mehldau et son compère récidiviste Mark Giuliana allaient apprécier l’éventualité qu’il se prolonge durant leur performance en duo. Heureusement, le timing de l’organisation du festival fit que le pianiste et le batteur ne commencèrent à jouer qu’une fois les craquements et détonations d’en face se furent tus. On ne peut nier à Brad Mehldau un talent de mélodiste et, que ce soit au piano ou au Rhodes, il produisit durant ce concert quelques beaux passages lyriques. Le problème est qu’on comprend mal la volonté d’enrober tout cela dans un fatras de nappes électroniques grésillantes et de batterie survitaminée, en faisant tourner inlassablement les mêmes trames harmoniques simplistes et éculées. Autant dire que les plus chenus d’entre nous regrettèrent amèrement le bon vieux temps d’Emerson, Lake & Palmer ! Il y a presque quelque chose de schizophrénique à vouloir faire cohabiter ainsi deux univers aussi opposés : une veine mélodique qui sombre parfois dans le new age le plus niaiseux et un jazz-rock brutal et mécanique. Le fantasme de la belle et la bête, peut-être ? Thierry Quénum