Journal intime invite Marc Ducret à Treignac
Treignac est un village de Corrèze non loin du Plateau de Millevaches. Il n’est donc pas étonnant que Thierry Mazaud et l’association dont il est le président aient créé un festival, Kind of Belou, qui fleure bon l’indépendance de pensée. Il suffit de citer les « têtes d’affiche » des trois soirées qui composaient le festival du 1e au 3 août dernier : solos de Fanny Lasfargues puis de Julien Desprez ; Journal intime avec Marc Ducret, dont les lignes suivantes rendent compte ; enfin, Michel Portal-Vincent Peirani duo.
Festival « Kind of Belou », Treignac (19), salle des fêtes, 2 août 2014
Journal intime + Marc Ducret « Extension des feux »
Sylvain Bardiau (tp), Matthias Mahler (tb), Frédéric Gastard (sax basse), Marc Ducret (elg)
Dans une salle des fêtes un peu vieillotte, le public bigarré du soir s’est rassemblé en nombre important, du jazzfan pointu venu au beau milieu du Limousin pour assister tout spécialement à ce concert, et bien sûr des locaux, jeunes comme anciens, qui, pour une part, n’ont pas la moindre idée du jazz au XXIe siècle mais se font une joie de participer à la vie culturelle de leur ville de coeur. Dès les premières notes émises par les souffleurs, je suis rassuré sur la qualité acoustique de la grande pièce, d’un seul tenant, dont je craignais les résonances, cela sans doute grâce à la précision du sonorisateur du festival.
Le répertoire donné par le quartette est celui d’ »Extension des feux », le dernier album, sublime, de Journal intime. La première des trois suites, Orage à tonnerre, démontre d’emblée le talent de Fred Gastard comme compositeur. Du choral hiératique initial, progressant de manière irrésistible, jusqu’aux coups de tonnerre terminaux en passant par les plages répétitives de la section centrale, son écriture se révèle remarquablement inspirée, intelligente, audacieuse. Artisan plus que compétent de l’orchestration, il possède en outre une capacité unique à faire sonner son ensemble tantôt comme de la musique de chambre, tantôt tel un big band, le son énorme de Matthias Mahler claquant littéralement sur les murs de la salle.
De surcroit, son écriture se trouve magnifiée par des improvisateurs de tout premier ordre. La deuxième suite, Chroïd, débuta par exemple par un duo trompette-saxophone basse, les deux musiciens se retrouvant, sans s’être soufflé le mot, sur une même note pédale, le sax basse dans le médium et la trompette dans un registre extrême grave. Peu à peu, tout bouge et prend forme, la transition entre les parties improvisées et écrites se réalisant avec le plus parfait naturel. Et soudain tout se stabilise, stagne, se bloque. Cet espace-temps ainsi créé offre la possibilité à Marc Ducret de donner l’un de ces solos dont il détient seul le secret, sensuel et aux mille nuances infimes. Plus loin, le guitariste accompagnera de manière tout aussi inspirée un solo de Fred Gastard, par de simples grésillements de jack, rappelant de la sorte au passage qu’il est l’auteur de Sur l’électricité.
Á la fin de l’exécution de la dernière suite, Les 38 lunes, je constate combien j’ai pris plaisir à entendre en concert ce qui m’a tant fasciné sur disque. Aucune déception, comme il arrive parfois dans de telles circonstances, bien au contraire : cela sonne un peu autrement, mais jamais moins bien ! D’ailleurs, à aucun moment je n’ai senti l’absence de Vincent Peirani (invité lui aussi sur “Extension des feux”) comme un manque. Le plus remarquable se situe certainement au niveau de l’intensité, toujours embrasée, tenue par les quatre musiciens pendant plus d’une heure de musique quasiment non-stop ! Fred Gastard danse avec son saxophone basse ; mêmes les moins happés se trouvent comme hypnotisés par les prouesses de Matthias Mahler ; Sylvain Bardiau sidère ; comme à son habitude, Marc Ducret est grand, tout simplement.
Conquis, le public enthousiaste réclame un bis, cette demande de l’auditoire ne relevant manifestement pas cette fois d’une habitude quasi pavlovienne. Il a alors droit à Angel, de Jimi Hendrix.
C’est pourtant facile de proposer une musique de très haute qualité qui saisit, grâce à (en ce moment, beaucoup diraient, hélas, « malgré »…) son exigence artistique, un auditoire autant de néophytes que d’amateurs : invitez Journal intime !
|
Treignac est un village de Corrèze non loin du Plateau de Millevaches. Il n’est donc pas étonnant que Thierry Mazaud et l’association dont il est le président aient créé un festival, Kind of Belou, qui fleure bon l’indépendance de pensée. Il suffit de citer les « têtes d’affiche » des trois soirées qui composaient le festival du 1e au 3 août dernier : solos de Fanny Lasfargues puis de Julien Desprez ; Journal intime avec Marc Ducret, dont les lignes suivantes rendent compte ; enfin, Michel Portal-Vincent Peirani duo.
Festival « Kind of Belou », Treignac (19), salle des fêtes, 2 août 2014
Journal intime + Marc Ducret « Extension des feux »
Sylvain Bardiau (tp), Matthias Mahler (tb), Frédéric Gastard (sax basse), Marc Ducret (elg)
Dans une salle des fêtes un peu vieillotte, le public bigarré du soir s’est rassemblé en nombre important, du jazzfan pointu venu au beau milieu du Limousin pour assister tout spécialement à ce concert, et bien sûr des locaux, jeunes comme anciens, qui, pour une part, n’ont pas la moindre idée du jazz au XXIe siècle mais se font une joie de participer à la vie culturelle de leur ville de coeur. Dès les premières notes émises par les souffleurs, je suis rassuré sur la qualité acoustique de la grande pièce, d’un seul tenant, dont je craignais les résonances, cela sans doute grâce à la précision du sonorisateur du festival.
Le répertoire donné par le quartette est celui d’ »Extension des feux », le dernier album, sublime, de Journal intime. La première des trois suites, Orage à tonnerre, démontre d’emblée le talent de Fred Gastard comme compositeur. Du choral hiératique initial, progressant de manière irrésistible, jusqu’aux coups de tonnerre terminaux en passant par les plages répétitives de la section centrale, son écriture se révèle remarquablement inspirée, intelligente, audacieuse. Artisan plus que compétent de l’orchestration, il possède en outre une capacité unique à faire sonner son ensemble tantôt comme de la musique de chambre, tantôt tel un big band, le son énorme de Matthias Mahler claquant littéralement sur les murs de la salle.
De surcroit, son écriture se trouve magnifiée par des improvisateurs de tout premier ordre. La deuxième suite, Chroïd, débuta par exemple par un duo trompette-saxophone basse, les deux musiciens se retrouvant, sans s’être soufflé le mot, sur une même note pédale, le sax basse dans le médium et la trompette dans un registre extrême grave. Peu à peu, tout bouge et prend forme, la transition entre les parties improvisées et écrites se réalisant avec le plus parfait naturel. Et soudain tout se stabilise, stagne, se bloque. Cet espace-temps ainsi créé offre la possibilité à Marc Ducret de donner l’un de ces solos dont il détient seul le secret, sensuel et aux mille nuances infimes. Plus loin, le guitariste accompagnera de manière tout aussi inspirée un solo de Fred Gastard, par de simples grésillements de jack, rappelant de la sorte au passage qu’il est l’auteur de Sur l’électricité.
Á la fin de l’exécution de la dernière suite, Les 38 lunes, je constate combien j’ai pris plaisir à entendre en concert ce qui m’a tant fasciné sur disque. Aucune déception, comme il arrive parfois dans de telles circonstances, bien au contraire : cela sonne un peu autrement, mais jamais moins bien ! D’ailleurs, à aucun moment je n’ai senti l’absence de Vincent Peirani (invité lui aussi sur “Extension des feux”) comme un manque. Le plus remarquable se situe certainement au niveau de l’intensité, toujours embrasée, tenue par les quatre musiciens pendant plus d’une heure de musique quasiment non-stop ! Fred Gastard danse avec son saxophone basse ; mêmes les moins happés se trouvent comme hypnotisés par les prouesses de Matthias Mahler ; Sylvain Bardiau sidère ; comme à son habitude, Marc Ducret est grand, tout simplement.
Conquis, le public enthousiaste réclame un bis, cette demande de l’auditoire ne relevant manifestement pas cette fois d’une habitude quasi pavlovienne. Il a alors droit à Angel, de Jimi Hendrix.
C’est pourtant facile de proposer une musique de très haute qualité qui saisit, grâce à (en ce moment, beaucoup diraient, hélas, « malgré »…) son exigence artistique, un auditoire autant de néophytes que d’amateurs : invitez Journal intime !
|
Treignac est un village de Corrèze non loin du Plateau de Millevaches. Il n’est donc pas étonnant que Thierry Mazaud et l’association dont il est le président aient créé un festival, Kind of Belou, qui fleure bon l’indépendance de pensée. Il suffit de citer les « têtes d’affiche » des trois soirées qui composaient le festival du 1e au 3 août dernier : solos de Fanny Lasfargues puis de Julien Desprez ; Journal intime avec Marc Ducret, dont les lignes suivantes rendent compte ; enfin, Michel Portal-Vincent Peirani duo.
Festival « Kind of Belou », Treignac (19), salle des fêtes, 2 août 2014
Journal intime + Marc Ducret « Extension des feux »
Sylvain Bardiau (tp), Matthias Mahler (tb), Frédéric Gastard (sax basse), Marc Ducret (elg)
Dans une salle des fêtes un peu vieillotte, le public bigarré du soir s’est rassemblé en nombre important, du jazzfan pointu venu au beau milieu du Limousin pour assister tout spécialement à ce concert, et bien sûr des locaux, jeunes comme anciens, qui, pour une part, n’ont pas la moindre idée du jazz au XXIe siècle mais se font une joie de participer à la vie culturelle de leur ville de coeur. Dès les premières notes émises par les souffleurs, je suis rassuré sur la qualité acoustique de la grande pièce, d’un seul tenant, dont je craignais les résonances, cela sans doute grâce à la précision du sonorisateur du festival.
Le répertoire donné par le quartette est celui d’ »Extension des feux », le dernier album, sublime, de Journal intime. La première des trois suites, Orage à tonnerre, démontre d’emblée le talent de Fred Gastard comme compositeur. Du choral hiératique initial, progressant de manière irrésistible, jusqu’aux coups de tonnerre terminaux en passant par les plages répétitives de la section centrale, son écriture se révèle remarquablement inspirée, intelligente, audacieuse. Artisan plus que compétent de l’orchestration, il possède en outre une capacité unique à faire sonner son ensemble tantôt comme de la musique de chambre, tantôt tel un big band, le son énorme de Matthias Mahler claquant littéralement sur les murs de la salle.
De surcroit, son écriture se trouve magnifiée par des improvisateurs de tout premier ordre. La deuxième suite, Chroïd, débuta par exemple par un duo trompette-saxophone basse, les deux musiciens se retrouvant, sans s’être soufflé le mot, sur une même note pédale, le sax basse dans le médium et la trompette dans un registre extrême grave. Peu à peu, tout bouge et prend forme, la transition entre les parties improvisées et écrites se réalisant avec le plus parfait naturel. Et soudain tout se stabilise, stagne, se bloque. Cet espace-temps ainsi créé offre la possibilité à Marc Ducret de donner l’un de ces solos dont il détient seul le secret, sensuel et aux mille nuances infimes. Plus loin, le guitariste accompagnera de manière tout aussi inspirée un solo de Fred Gastard, par de simples grésillements de jack, rappelant de la sorte au passage qu’il est l’auteur de Sur l’électricité.
Á la fin de l’exécution de la dernière suite, Les 38 lunes, je constate combien j’ai pris plaisir à entendre en concert ce qui m’a tant fasciné sur disque. Aucune déception, comme il arrive parfois dans de telles circonstances, bien au contraire : cela sonne un peu autrement, mais jamais moins bien ! D’ailleurs, à aucun moment je n’ai senti l’absence de Vincent Peirani (invité lui aussi sur “Extension des feux”) comme un manque. Le plus remarquable se situe certainement au niveau de l’intensité, toujours embrasée, tenue par les quatre musiciens pendant plus d’une heure de musique quasiment non-stop ! Fred Gastard danse avec son saxophone basse ; mêmes les moins happés se trouvent comme hypnotisés par les prouesses de Matthias Mahler ; Sylvain Bardiau sidère ; comme à son habitude, Marc Ducret est grand, tout simplement.
Conquis, le public enthousiaste réclame un bis, cette demande de l’auditoire ne relevant manifestement pas cette fois d’une habitude quasi pavlovienne. Il a alors droit à Angel, de Jimi Hendrix.
C’est pourtant facile de proposer une musique de très haute qualité qui saisit, grâce à (en ce moment, beaucoup diraient, hélas, « malgré »…) son exigence artistique, un auditoire autant de néophytes que d’amateurs : invitez Journal intime !
|
Treignac est un village de Corrèze non loin du Plateau de Millevaches. Il n’est donc pas étonnant que Thierry Mazaud et l’association dont il est le président aient créé un festival, Kind of Belou, qui fleure bon l’indépendance de pensée. Il suffit de citer les « têtes d’affiche » des trois soirées qui composaient le festival du 1e au 3 août dernier : solos de Fanny Lasfargues puis de Julien Desprez ; Journal intime avec Marc Ducret, dont les lignes suivantes rendent compte ; enfin, Michel Portal-Vincent Peirani duo.
Festival « Kind of Belou », Treignac (19), salle des fêtes, 2 août 2014
Journal intime + Marc Ducret « Extension des feux »
Sylvain Bardiau (tp), Matthias Mahler (tb), Frédéric Gastard (sax basse), Marc Ducret (elg)
Dans une salle des fêtes un peu vieillotte, le public bigarré du soir s’est rassemblé en nombre important, du jazzfan pointu venu au beau milieu du Limousin pour assister tout spécialement à ce concert, et bien sûr des locaux, jeunes comme anciens, qui, pour une part, n’ont pas la moindre idée du jazz au XXIe siècle mais se font une joie de participer à la vie culturelle de leur ville de coeur. Dès les premières notes émises par les souffleurs, je suis rassuré sur la qualité acoustique de la grande pièce, d’un seul tenant, dont je craignais les résonances, cela sans doute grâce à la précision du sonorisateur du festival.
Le répertoire donné par le quartette est celui d’ »Extension des feux », le dernier album, sublime, de Journal intime. La première des trois suites, Orage à tonnerre, démontre d’emblée le talent de Fred Gastard comme compositeur. Du choral hiératique initial, progressant de manière irrésistible, jusqu’aux coups de tonnerre terminaux en passant par les plages répétitives de la section centrale, son écriture se révèle remarquablement inspirée, intelligente, audacieuse. Artisan plus que compétent de l’orchestration, il possède en outre une capacité unique à faire sonner son ensemble tantôt comme de la musique de chambre, tantôt tel un big band, le son énorme de Matthias Mahler claquant littéralement sur les murs de la salle.
De surcroit, son écriture se trouve magnifiée par des improvisateurs de tout premier ordre. La deuxième suite, Chroïd, débuta par exemple par un duo trompette-saxophone basse, les deux musiciens se retrouvant, sans s’être soufflé le mot, sur une même note pédale, le sax basse dans le médium et la trompette dans un registre extrême grave. Peu à peu, tout bouge et prend forme, la transition entre les parties improvisées et écrites se réalisant avec le plus parfait naturel. Et soudain tout se stabilise, stagne, se bloque. Cet espace-temps ainsi créé offre la possibilité à Marc Ducret de donner l’un de ces solos dont il détient seul le secret, sensuel et aux mille nuances infimes. Plus loin, le guitariste accompagnera de manière tout aussi inspirée un solo de Fred Gastard, par de simples grésillements de jack, rappelant de la sorte au passage qu’il est l’auteur de Sur l’électricité.
Á la fin de l’exécution de la dernière suite, Les 38 lunes, je constate combien j’ai pris plaisir à entendre en concert ce qui m’a tant fasciné sur disque. Aucune déception, comme il arrive parfois dans de telles circonstances, bien au contraire : cela sonne un peu autrement, mais jamais moins bien ! D’ailleurs, à aucun moment je n’ai senti l’absence de Vincent Peirani (invité lui aussi sur “Extension des feux”) comme un manque. Le plus remarquable se situe certainement au niveau de l’intensité, toujours embrasée, tenue par les quatre musiciens pendant plus d’une heure de musique quasiment non-stop ! Fred Gastard danse avec son saxophone basse ; mêmes les moins happés se trouvent comme hypnotisés par les prouesses de Matthias Mahler ; Sylvain Bardiau sidère ; comme à son habitude, Marc Ducret est grand, tout simplement.
Conquis, le public enthousiaste réclame un bis, cette demande de l’auditoire ne relevant manifestement pas cette fois d’une habitude quasi pavlovienne. Il a alors droit à Angel, de Jimi Hendrix.
C’est pourtant facile de proposer une musique de très haute qualité qui saisit, grâce à (en ce moment, beaucoup diraient, hélas, « malgré »…) son exigence artistique, un auditoire autant de néophytes que d’amateurs : invitez Journal intime !