Jazzdor Strasbourg 29° édition, 2° soirée. Cité de la Musique 08/11
Ce qui est frappant dans le quartet d’Emile Parisien — qui commence à atteindre un âge vénérable et la maturité qui va avec — c’est sa capacité à faire de la musique passionnante à partir de petits bouts de trois fois rien.
Emile Parisien Quartet: Emile Parisien (ss, ts), Julien Touéry (p), Ivan Gélugne (b), Sylvain Darriforcq (dm).
Thomas de Pourquery Supersonic play Sun Ra: Thomas de Pourquery (as, voc), Fabrice Martinez (tp, voc), Laurent bardaine (ts, bs, voc), Frédérick Gallay (elb), Edward Perraud (dm).
Car, en gros, inutile de chercher un schéma thème/impros/thème dans leurs compositions, ni une mélodie menée jusqu’à son terme dans un ronflement d’harmonies consensuelles. Non : ils concassent, déstructurent, remodèlent en un jeu incessant où se bousculent les segments rythmiques, où une bribe mélodique apparaît, disparaît, reparaît accélérée, ralentie, décalée dans une manière de labyrinthe jouissif en diable. Et puis il y a ce son ! Son d’ensemble, bien-sûr, qui vous atteint droit au plexus dans les moments de tension extrême, mais aussi ceci : selon qu’untel ou un autre fait brièvement passer son instrument au premier plan, on se trouve face à une qualité de jeu, une densité de timbre qui ne nous apparaissait pas aussi nettement quand elle était fondue dans la masse. Et je ne parle pas nécessairement de solos au sens propre du terme, mais de la possibilité que chacun, dans un groupe de quatre, mette en avant son individualité sans chercher le morceau de bravoure, et ce parfois pendant quelques brèves secondes mais en cohérence totale avec la structure globale du morceau. On peut imaginer que cette façon de faire soit proprement fascinante. Et on imagine bien. Car entre un son de métronome brusquement déclenché par Sylvain Darrifourcq ou une ritournelle de boîte à musique qu’entonne au débotté Julien Touéry, ce ne sont pas les surprises charmantes, hilarantes, déroutantes et même… surprenantes qui manquent dans ce nouveau répertoire. Et quand ils se lancent dans un schéma qui permet aux solos de se succéder, on prend conscience du fait que ces jeunes gens qui connaissent tout de la musique de jazz, free inclus, ont trouvé une façon bien à eux de se positionner dans ce continuum. Sans répéter ce qui a déjà été fait ni se répéter eux-mêmes, sans chercher à tout prix une hypothétique originalité : juste en étant ouverts à la musicalité qui circule entre eux (et circulera bientôt ou circule déjà dans le public auquel ils offrent leur créativité réjouissante), à l’énergie qui les entoure, les traverse ou les déborde, à la sérénité qui les anime et leur évite de tomber dans les écueils que nombre d’autres « jeunes groupes de jazz » ne réussissent pas à éviter. Un rappel — au cours duquel le piano et la batterie se font bruitistes tandis qu’Emile Parisien embouche le ténor sur lequel il pépie, éructe et feule tandis qu’Ivan Gélugne maintient un ostinato paisible et tellurique — vint mettre en beauté les points sur les « i » à ceux qui n’auraient pas senti ce que je m’échine à dire ci-dessus.
Thomas de Pourquery et son Supersonic, c’est d’emblée une dose d’énergie à la limite de ce que peuvent supporter les organismes fragilisés des habitants de notre planète perdue. Ce qui nous sauve et vient apporter la bouffée d’air que réclament nous pauvres poumons terriens, c’est le chant, souvent collectif, toujours angélique, et si rare dans le jazz moderne (car confisqué par les androïdes rétrogrades de la galaxie Vocaljazz). Quant aux générations qui précédèrent les Médéric et autres Thomas, qui les a jamais vus chanter, engoncées qu’elles étaient majoritairement dans leur free jazz appliqué ou leur post-bop sans humour. Bref, une fois passée la salve sonore initiale et ingéré l’air salvateur, l’on pénètre dans l’antre du fils (putatif) du Sun. On y trouve quelques ballades à prendre au fond du temps, un calypso déjanté à enfourcher en solitaire et à bride abattue, bientôt rejoint par la rythmique puis par toute la bande embarquée dans une chevauchée stratosphérique, un riff free obsessionnel emmené à pleine puissance par un baryton fou, une rengaine gnan-gnan transcendée par un arrangement malin/marrant, un hymne intersidéral retentissant, qui mute en séquence répétitive à la Philip Glass puis en séance de bruitage, et aussi pas mal de poussière d’étoiles et autre bric à brac astral de première bourre. On n’a donc guère le temps de s’ennuyer lors de ce voyage vers Saturne. Il faut dire que — contrairement aux précédentes générations d’apprentis spationautes coincés dans leurs combinaisons étriquées et trop étanches au groove — on bénéficie de tout le confort moderne et d’une approche du sujet aussi virtuose que décomplexée sur ce nouveau TDP (Thomas de Pourquery, bien sûr) livré avec sa rampe de lancement. Un véhicule qu’on ne saurait trop conseiller à chacun d’acquérir tant que l’espace interplanétaire reste libre d’accès. Thierry Quénum
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Ce qui est frappant dans le quartet d’Emile Parisien — qui commence à atteindre un âge vénérable et la maturité qui va avec — c’est sa capacité à faire de la musique passionnante à partir de petits bouts de trois fois rien.
Emile Parisien Quartet: Emile Parisien (ss, ts), Julien Touéry (p), Ivan Gélugne (b), Sylvain Darriforcq (dm).
Thomas de Pourquery Supersonic play Sun Ra: Thomas de Pourquery (as, voc), Fabrice Martinez (tp, voc), Laurent bardaine (ts, bs, voc), Frédérick Gallay (elb), Edward Perraud (dm).
Car, en gros, inutile de chercher un schéma thème/impros/thème dans leurs compositions, ni une mélodie menée jusqu’à son terme dans un ronflement d’harmonies consensuelles. Non : ils concassent, déstructurent, remodèlent en un jeu incessant où se bousculent les segments rythmiques, où une bribe mélodique apparaît, disparaît, reparaît accélérée, ralentie, décalée dans une manière de labyrinthe jouissif en diable. Et puis il y a ce son ! Son d’ensemble, bien-sûr, qui vous atteint droit au plexus dans les moments de tension extrême, mais aussi ceci : selon qu’untel ou un autre fait brièvement passer son instrument au premier plan, on se trouve face à une qualité de jeu, une densité de timbre qui ne nous apparaissait pas aussi nettement quand elle était fondue dans la masse. Et je ne parle pas nécessairement de solos au sens propre du terme, mais de la possibilité que chacun, dans un groupe de quatre, mette en avant son individualité sans chercher le morceau de bravoure, et ce parfois pendant quelques brèves secondes mais en cohérence totale avec la structure globale du morceau. On peut imaginer que cette façon de faire soit proprement fascinante. Et on imagine bien. Car entre un son de métronome brusquement déclenché par Sylvain Darrifourcq ou une ritournelle de boîte à musique qu’entonne au débotté Julien Touéry, ce ne sont pas les surprises charmantes, hilarantes, déroutantes et même… surprenantes qui manquent dans ce nouveau répertoire. Et quand ils se lancent dans un schéma qui permet aux solos de se succéder, on prend conscience du fait que ces jeunes gens qui connaissent tout de la musique de jazz, free inclus, ont trouvé une façon bien à eux de se positionner dans ce continuum. Sans répéter ce qui a déjà été fait ni se répéter eux-mêmes, sans chercher à tout prix une hypothétique originalité : juste en étant ouverts à la musicalité qui circule entre eux (et circulera bientôt ou circule déjà dans le public auquel ils offrent leur créativité réjouissante), à l’énergie qui les entoure, les traverse ou les déborde, à la sérénité qui les anime et leur évite de tomber dans les écueils que nombre d’autres « jeunes groupes de jazz » ne réussissent pas à éviter. Un rappel — au cours duquel le piano et la batterie se font bruitistes tandis qu’Emile Parisien embouche le ténor sur lequel il pépie, éructe et feule tandis qu’Ivan Gélugne maintient un ostinato paisible et tellurique — vint mettre en beauté les points sur les « i » à ceux qui n’auraient pas senti ce que je m’échine à dire ci-dessus.
Thomas de Pourquery et son Supersonic, c’est d’emblée une dose d’énergie à la limite de ce que peuvent supporter les organismes fragilisés des habitants de notre planète perdue. Ce qui nous sauve et vient apporter la bouffée d’air que réclament nous pauvres poumons terriens, c’est le chant, souvent collectif, toujours angélique, et si rare dans le jazz moderne (car confisqué par les androïdes rétrogrades de la galaxie Vocaljazz). Quant aux générations qui précédèrent les Médéric et autres Thomas, qui les a jamais vus chanter, engoncées qu’elles étaient majoritairement dans leur free jazz appliqué ou leur post-bop sans humour. Bref, une fois passée la salve sonore initiale et ingéré l’air salvateur, l’on pénètre dans l’antre du fils (putatif) du Sun. On y trouve quelques ballades à prendre au fond du temps, un calypso déjanté à enfourcher en solitaire et à bride abattue, bientôt rejoint par la rythmique puis par toute la bande embarquée dans une chevauchée stratosphérique, un riff free obsessionnel emmené à pleine puissance par un baryton fou, une rengaine gnan-gnan transcendée par un arrangement malin/marrant, un hymne intersidéral retentissant, qui mute en séquence répétitive à la Philip Glass puis en séance de bruitage, et aussi pas mal de poussière d’étoiles et autre bric à brac astral de première bourre. On n’a donc guère le temps de s’ennuyer lors de ce voyage vers Saturne. Il faut dire que — contrairement aux précédentes générations d’apprentis spationautes coincés dans leurs combinaisons étriquées et trop étanches au groove — on bénéficie de tout le confort moderne et d’une approche du sujet aussi virtuose que décomplexée sur ce nouveau TDP (Thomas de Pourquery, bien sûr) livré avec sa rampe de lancement. Un véhicule qu’on ne saurait trop conseiller à chacun d’acquérir tant que l’espace interplanétaire reste libre d’accès. Thierry Quénum
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Ce qui est frappant dans le quartet d’Emile Parisien — qui commence à atteindre un âge vénérable et la maturité qui va avec — c’est sa capacité à faire de la musique passionnante à partir de petits bouts de trois fois rien.
Emile Parisien Quartet: Emile Parisien (ss, ts), Julien Touéry (p), Ivan Gélugne (b), Sylvain Darriforcq (dm).
Thomas de Pourquery Supersonic play Sun Ra: Thomas de Pourquery (as, voc), Fabrice Martinez (tp, voc), Laurent bardaine (ts, bs, voc), Frédérick Gallay (elb), Edward Perraud (dm).
Car, en gros, inutile de chercher un schéma thème/impros/thème dans leurs compositions, ni une mélodie menée jusqu’à son terme dans un ronflement d’harmonies consensuelles. Non : ils concassent, déstructurent, remodèlent en un jeu incessant où se bousculent les segments rythmiques, où une bribe mélodique apparaît, disparaît, reparaît accélérée, ralentie, décalée dans une manière de labyrinthe jouissif en diable. Et puis il y a ce son ! Son d’ensemble, bien-sûr, qui vous atteint droit au plexus dans les moments de tension extrême, mais aussi ceci : selon qu’untel ou un autre fait brièvement passer son instrument au premier plan, on se trouve face à une qualité de jeu, une densité de timbre qui ne nous apparaissait pas aussi nettement quand elle était fondue dans la masse. Et je ne parle pas nécessairement de solos au sens propre du terme, mais de la possibilité que chacun, dans un groupe de quatre, mette en avant son individualité sans chercher le morceau de bravoure, et ce parfois pendant quelques brèves secondes mais en cohérence totale avec la structure globale du morceau. On peut imaginer que cette façon de faire soit proprement fascinante. Et on imagine bien. Car entre un son de métronome brusquement déclenché par Sylvain Darrifourcq ou une ritournelle de boîte à musique qu’entonne au débotté Julien Touéry, ce ne sont pas les surprises charmantes, hilarantes, déroutantes et même… surprenantes qui manquent dans ce nouveau répertoire. Et quand ils se lancent dans un schéma qui permet aux solos de se succéder, on prend conscience du fait que ces jeunes gens qui connaissent tout de la musique de jazz, free inclus, ont trouvé une façon bien à eux de se positionner dans ce continuum. Sans répéter ce qui a déjà été fait ni se répéter eux-mêmes, sans chercher à tout prix une hypothétique originalité : juste en étant ouverts à la musicalité qui circule entre eux (et circulera bientôt ou circule déjà dans le public auquel ils offrent leur créativité réjouissante), à l’énergie qui les entoure, les traverse ou les déborde, à la sérénité qui les anime et leur évite de tomber dans les écueils que nombre d’autres « jeunes groupes de jazz » ne réussissent pas à éviter. Un rappel — au cours duquel le piano et la batterie se font bruitistes tandis qu’Emile Parisien embouche le ténor sur lequel il pépie, éructe et feule tandis qu’Ivan Gélugne maintient un ostinato paisible et tellurique — vint mettre en beauté les points sur les « i » à ceux qui n’auraient pas senti ce que je m’échine à dire ci-dessus.
Thomas de Pourquery et son Supersonic, c’est d’emblée une dose d’énergie à la limite de ce que peuvent supporter les organismes fragilisés des habitants de notre planète perdue. Ce qui nous sauve et vient apporter la bouffée d’air que réclament nous pauvres poumons terriens, c’est le chant, souvent collectif, toujours angélique, et si rare dans le jazz moderne (car confisqué par les androïdes rétrogrades de la galaxie Vocaljazz). Quant aux générations qui précédèrent les Médéric et autres Thomas, qui les a jamais vus chanter, engoncées qu’elles étaient majoritairement dans leur free jazz appliqué ou leur post-bop sans humour. Bref, une fois passée la salve sonore initiale et ingéré l’air salvateur, l’on pénètre dans l’antre du fils (putatif) du Sun. On y trouve quelques ballades à prendre au fond du temps, un calypso déjanté à enfourcher en solitaire et à bride abattue, bientôt rejoint par la rythmique puis par toute la bande embarquée dans une chevauchée stratosphérique, un riff free obsessionnel emmené à pleine puissance par un baryton fou, une rengaine gnan-gnan transcendée par un arrangement malin/marrant, un hymne intersidéral retentissant, qui mute en séquence répétitive à la Philip Glass puis en séance de bruitage, et aussi pas mal de poussière d’étoiles et autre bric à brac astral de première bourre. On n’a donc guère le temps de s’ennuyer lors de ce voyage vers Saturne. Il faut dire que — contrairement aux précédentes générations d’apprentis spationautes coincés dans leurs combinaisons étriquées et trop étanches au groove — on bénéficie de tout le confort moderne et d’une approche du sujet aussi virtuose que décomplexée sur ce nouveau TDP (Thomas de Pourquery, bien sûr) livré avec sa rampe de lancement. Un véhicule qu’on ne saurait trop conseiller à chacun d’acquérir tant que l’espace interplanétaire reste libre d’accès. Thierry Quénum
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Ce qui est frappant dans le quartet d’Emile Parisien — qui commence à atteindre un âge vénérable et la maturité qui va avec — c’est sa capacité à faire de la musique passionnante à partir de petits bouts de trois fois rien.
Emile Parisien Quartet: Emile Parisien (ss, ts), Julien Touéry (p), Ivan Gélugne (b), Sylvain Darriforcq (dm).
Thomas de Pourquery Supersonic play Sun Ra: Thomas de Pourquery (as, voc), Fabrice Martinez (tp, voc), Laurent bardaine (ts, bs, voc), Frédérick Gallay (elb), Edward Perraud (dm).
Car, en gros, inutile de chercher un schéma thème/impros/thème dans leurs compositions, ni une mélodie menée jusqu’à son terme dans un ronflement d’harmonies consensuelles. Non : ils concassent, déstructurent, remodèlent en un jeu incessant où se bousculent les segments rythmiques, où une bribe mélodique apparaît, disparaît, reparaît accélérée, ralentie, décalée dans une manière de labyrinthe jouissif en diable. Et puis il y a ce son ! Son d’ensemble, bien-sûr, qui vous atteint droit au plexus dans les moments de tension extrême, mais aussi ceci : selon qu’untel ou un autre fait brièvement passer son instrument au premier plan, on se trouve face à une qualité de jeu, une densité de timbre qui ne nous apparaissait pas aussi nettement quand elle était fondue dans la masse. Et je ne parle pas nécessairement de solos au sens propre du terme, mais de la possibilité que chacun, dans un groupe de quatre, mette en avant son individualité sans chercher le morceau de bravoure, et ce parfois pendant quelques brèves secondes mais en cohérence totale avec la structure globale du morceau. On peut imaginer que cette façon de faire soit proprement fascinante. Et on imagine bien. Car entre un son de métronome brusquement déclenché par Sylvain Darrifourcq ou une ritournelle de boîte à musique qu’entonne au débotté Julien Touéry, ce ne sont pas les surprises charmantes, hilarantes, déroutantes et même… surprenantes qui manquent dans ce nouveau répertoire. Et quand ils se lancent dans un schéma qui permet aux solos de se succéder, on prend conscience du fait que ces jeunes gens qui connaissent tout de la musique de jazz, free inclus, ont trouvé une façon bien à eux de se positionner dans ce continuum. Sans répéter ce qui a déjà été fait ni se répéter eux-mêmes, sans chercher à tout prix une hypothétique originalité : juste en étant ouverts à la musicalité qui circule entre eux (et circulera bientôt ou circule déjà dans le public auquel ils offrent leur créativité réjouissante), à l’énergie qui les entoure, les traverse ou les déborde, à la sérénité qui les anime et leur évite de tomber dans les écueils que nombre d’autres « jeunes groupes de jazz » ne réussissent pas à éviter. Un rappel — au cours duquel le piano et la batterie se font bruitistes tandis qu’Emile Parisien embouche le ténor sur lequel il pépie, éructe et feule tandis qu’Ivan Gélugne maintient un ostinato paisible et tellurique — vint mettre en beauté les points sur les « i » à ceux qui n’auraient pas senti ce que je m’échine à dire ci-dessus.
Thomas de Pourquery et son Supersonic, c’est d’emblée une dose d’énergie à la limite de ce que peuvent supporter les organismes fragilisés des habitants de notre planète perdue. Ce qui nous sauve et vient apporter la bouffée d’air que réclament nous pauvres poumons terriens, c’est le chant, souvent collectif, toujours angélique, et si rare dans le jazz moderne (car confisqué par les androïdes rétrogrades de la galaxie Vocaljazz). Quant aux générations qui précédèrent les Médéric et autres Thomas, qui les a jamais vus chanter, engoncées qu’elles étaient majoritairement dans leur free jazz appliqué ou leur post-bop sans humour. Bref, une fois passée la salve sonore initiale et ingéré l’air salvateur, l’on pénètre dans l’antre du fils (putatif) du Sun. On y trouve quelques ballades à prendre au fond du temps, un calypso déjanté à enfourcher en solitaire et à bride abattue, bientôt rejoint par la rythmique puis par toute la bande embarquée dans une chevauchée stratosphérique, un riff free obsessionnel emmené à pleine puissance par un baryton fou, une rengaine gnan-gnan transcendée par un arrangement malin/marrant, un hymne intersidéral retentissant, qui mute en séquence répétitive à la Philip Glass puis en séance de bruitage, et aussi pas mal de poussière d’étoiles et autre bric à brac astral de première bourre. On n’a donc guère le temps de s’ennuyer lors de ce voyage vers Saturne. Il faut dire que — contrairement aux précédentes générations d’apprentis spationautes coincés dans leurs combinaisons étriquées et trop étanches au groove — on bénéficie de tout le confort moderne et d’une approche du sujet aussi virtuose que décomplexée sur ce nouveau TDP (Thomas de Pourquery, bien sûr) livré avec sa rampe de lancement. Un véhicule qu’on ne saurait trop conseiller à chacun d’acquérir tant que l’espace interplanétaire reste libre d’accès. Thierry Quénum