Blida pour Vegan Dallas au Césaré de Bétheny (Reims Jazz Festival)
Non, ami lecteur du blog de Jazzmagazine, ce n’est pas un message crypté à décoder avec des outils high tech dignes des services de renseignement . C’est seulement une preuve supplémentaire de l’éclectisme de la programmation du Reims Jazz Festival qui en est à sa 22ème édition. Le directeur artistique Francis Le Bras a une vision ouverte du jazz et des musiques actuelles et il aime entraîner un public qu’il a su fidéliser dans des lieux qu’il squatte, selon ses propres termes, de l’Opéra au caveau Mumm, du centre St Ex au Césaré www.cesare-cncm.com, centre national de création musicale qui « ose l’expérience sonore ». Son directeur Philippe Le Goff nous apprend qu’il existe 6 structures de ce type en France, le GMEM à Marseille, le GRAME à Lyon, La Muse en circuit à Alfortville, le GMEA à Albi et le CIRM à Nice. C’est donc au Césaré de la commune de Bétheny qui jouxte la cité rémoise que les quatre musiciens et la rétroprojectionniste de VEGAN DALLAS www.vegandallas.net ont effectué une résidence d’une semaine avant de nous présenter leur création en avant-première du D’jazz Nevers Festival. Ils captent l’air ambiant de notre époque dans ce programme insolite et néanmoins mélodique.
VEGAN DALLAS Benjamin Flament (percussions, électronique), Julien Chamla (batterie, harpebasse électrique), Richard Comte (guitare préparée, objets, voix), Simon Henocq (électronique, machines), Adrian Bourget (sonorisation, mise en espace),Julie Lardrot (rétroprojection d’objets animés). Vendredi 23 octobre.
On le sait, « l’oeil écoute ». Le dispositif scénique est ce que l’on remarque en premier, surtout après avoir vu le studio d’enregistrement où trônent des pièces rares, un reVox (marque suisse de matériel audio), des Moogs, un Phantom qui aurait pu servir à la musique des films horrifiques de John Carpenter. Des percussions et batteries très bizarres occupent la scène devant une installation de Julie Landrot, des plus surprenantes : un écran monté sur deux ailes de papillon en fils de viscose blanc collés, commandés en Alsace sous la référence « choucroute »-ça ne s’invente pas, sur lesquels elle projette son travail, avec le système des enseignants « old school », le rétro et les transparents de couleur. La jeune femme, qui est aussi costumière, vient de l’école Boulle, célèbre pour son enseignement des arts appliqués, département Design de l’espace. Elle fait également tourner, en musique, avec un rétroviseur qui lui permet de suivre le travail du batteur situé derrière elle, des instruments de dinette, bols, assiettes rainurées; elle mélange dans divers ustensiles, huiles, bulles de savon, encres colorées. Cette cuisine dont elle me donnera après le concert quelques recettes, est du plus bel effet : couleurs, formes, matières, s’animent et fusionnent, comme des paramécies sous une lame de microscope, quand on voyait s’agiter les cellules en liberté. Ce qui convient à la musique très organique ( le VEGAN du nom du groupe, en écho à ce régime alimentaire plutôt radical) qui se fait devant nous. Chaque forme sonore et visuelle est montrée en train de muter, introduisant un élément de suspense dans cette métamorphose. Et Dallas, me direz-vous? Ces jeunes gens sont tout de même influencés, entre autres, par certains éléments de la mythologie américaine ( musique, espaces, western…) et à ma grande surprise, le premier morceau installe une atmosphère digne des Shadows, une chevauchée épique dans l’ouest fordien. Alors que le guitariste limougeot Richard Comte joue sa partie, en tirant à l’archet des sons de sa guitare, le batteur Julien Chamla joue surtout de la harpe basse électrique, faisant face à un curieux percussionniste dont l’attirail est constitué de bols de cuisine en étain ou inox, d’équerres de métal, de billes de fer et d’abats-jour sans lampe. Benjamin Flament use de cet appareil comme d’un vibraphone dont il a par ailleurs la pratique. Batteur et percussionniste se répondent sur des rythmiques complexes, plus par leur enchevêtrement que par le choix des mesures Sur le fil, en perpétuel décalage. Le dernier de la bande, Simon Hénocq, qui n’est pas le frère du batteur Benjamin Henocq, vient de l’électro accoustique, joue des claviers et catalyse l’énergie. C’est un Fablab sonore que l’on voit évoluer devant nous, où les musiciens, acteurs de nombreux groupes par ailleurs, ont décidé de réunir leurs fantasmes sonores dans des compositions collectives. Il en résulte une musique exigeante, fluide et forte, jamais inaudible : des sons urbains, de la pop western, de l’indus antillais, sur des principes de transe (gnawas). Les compositions envahissent l’espace, plein comme un oeuf (encore un concert « sold out »), planent et nous transportent tous. Car il y a de la beauté et de la poésie dans les gestes de ces musiciens, concentrés et lumineux, jusque dans la manière théâtralisée de se présenter l’un l’autre. Voilà un spectacle vif, frais, une musique qui n’ est pas réservée aux seuls initiés d’aujourd’hui et aux profanes de demain. La soirée se finit devant quelques blidas. Le saviez vous, ce sont les petits verres à champagne les plus utilisés ici, fabriqués dans la région, du nom de leur ville d’expédition en Algérie, où ils devenaient des verres à thé, plus ou moins décorés?
A venir de très nombreux concerts jusqu’à la fin du festival le 7 novembre. Allez sur le site de [Djaz] 51www.djaz51.com et n’oubliez pas de suivre les travaux d’Alain Julien, l’oeil du festival dans son reportage PERSISTANCE RETINIENNE.
Sophie Chambon
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Non, ami lecteur du blog de Jazzmagazine, ce n’est pas un message crypté à décoder avec des outils high tech dignes des services de renseignement . C’est seulement une preuve supplémentaire de l’éclectisme de la programmation du Reims Jazz Festival qui en est à sa 22ème édition. Le directeur artistique Francis Le Bras a une vision ouverte du jazz et des musiques actuelles et il aime entraîner un public qu’il a su fidéliser dans des lieux qu’il squatte, selon ses propres termes, de l’Opéra au caveau Mumm, du centre St Ex au Césaré www.cesare-cncm.com, centre national de création musicale qui « ose l’expérience sonore ». Son directeur Philippe Le Goff nous apprend qu’il existe 6 structures de ce type en France, le GMEM à Marseille, le GRAME à Lyon, La Muse en circuit à Alfortville, le GMEA à Albi et le CIRM à Nice. C’est donc au Césaré de la commune de Bétheny qui jouxte la cité rémoise que les quatre musiciens et la rétroprojectionniste de VEGAN DALLAS www.vegandallas.net ont effectué une résidence d’une semaine avant de nous présenter leur création en avant-première du D’jazz Nevers Festival. Ils captent l’air ambiant de notre époque dans ce programme insolite et néanmoins mélodique.
VEGAN DALLAS Benjamin Flament (percussions, électronique), Julien Chamla (batterie, harpebasse électrique), Richard Comte (guitare préparée, objets, voix), Simon Henocq (électronique, machines), Adrian Bourget (sonorisation, mise en espace),Julie Lardrot (rétroprojection d’objets animés). Vendredi 23 octobre.
On le sait, « l’oeil écoute ». Le dispositif scénique est ce que l’on remarque en premier, surtout après avoir vu le studio d’enregistrement où trônent des pièces rares, un reVox (marque suisse de matériel audio), des Moogs, un Phantom qui aurait pu servir à la musique des films horrifiques de John Carpenter. Des percussions et batteries très bizarres occupent la scène devant une installation de Julie Landrot, des plus surprenantes : un écran monté sur deux ailes de papillon en fils de viscose blanc collés, commandés en Alsace sous la référence « choucroute »-ça ne s’invente pas, sur lesquels elle projette son travail, avec le système des enseignants « old school », le rétro et les transparents de couleur. La jeune femme, qui est aussi costumière, vient de l’école Boulle, célèbre pour son enseignement des arts appliqués, département Design de l’espace. Elle fait également tourner, en musique, avec un rétroviseur qui lui permet de suivre le travail du batteur situé derrière elle, des instruments de dinette, bols, assiettes rainurées; elle mélange dans divers ustensiles, huiles, bulles de savon, encres colorées. Cette cuisine dont elle me donnera après le concert quelques recettes, est du plus bel effet : couleurs, formes, matières, s’animent et fusionnent, comme des paramécies sous une lame de microscope, quand on voyait s’agiter les cellules en liberté. Ce qui convient à la musique très organique ( le VEGAN du nom du groupe, en écho à ce régime alimentaire plutôt radical) qui se fait devant nous. Chaque forme sonore et visuelle est montrée en train de muter, introduisant un élément de suspense dans cette métamorphose. Et Dallas, me direz-vous? Ces jeunes gens sont tout de même influencés, entre autres, par certains éléments de la mythologie américaine ( musique, espaces, western…) et à ma grande surprise, le premier morceau installe une atmosphère digne des Shadows, une chevauchée épique dans l’ouest fordien. Alors que le guitariste limougeot Richard Comte joue sa partie, en tirant à l’archet des sons de sa guitare, le batteur Julien Chamla joue surtout de la harpe basse électrique, faisant face à un curieux percussionniste dont l’attirail est constitué de bols de cuisine en étain ou inox, d’équerres de métal, de billes de fer et d’abats-jour sans lampe. Benjamin Flament use de cet appareil comme d’un vibraphone dont il a par ailleurs la pratique. Batteur et percussionniste se répondent sur des rythmiques complexes, plus par leur enchevêtrement que par le choix des mesures Sur le fil, en perpétuel décalage. Le dernier de la bande, Simon Hénocq, qui n’est pas le frère du batteur Benjamin Henocq, vient de l’électro accoustique, joue des claviers et catalyse l’énergie. C’est un Fablab sonore que l’on voit évoluer devant nous, où les musiciens, acteurs de nombreux groupes par ailleurs, ont décidé de réunir leurs fantasmes sonores dans des compositions collectives. Il en résulte une musique exigeante, fluide et forte, jamais inaudible : des sons urbains, de la pop western, de l’indus antillais, sur des principes de transe (gnawas). Les compositions envahissent l’espace, plein comme un oeuf (encore un concert « sold out »), planent et nous transportent tous. Car il y a de la beauté et de la poésie dans les gestes de ces musiciens, concentrés et lumineux, jusque dans la manière théâtralisée de se présenter l’un l’autre. Voilà un spectacle vif, frais, une musique qui n’ est pas réservée aux seuls initiés d’aujourd’hui et aux profanes de demain. La soirée se finit devant quelques blidas. Le saviez vous, ce sont les petits verres à champagne les plus utilisés ici, fabriqués dans la région, du nom de leur ville d’expédition en Algérie, où ils devenaient des verres à thé, plus ou moins décorés?
A venir de très nombreux concerts jusqu’à la fin du festival le 7 novembre. Allez sur le site de [Djaz] 51www.djaz51.com et n’oubliez pas de suivre les travaux d’Alain Julien, l’oeil du festival dans son reportage PERSISTANCE RETINIENNE.
Sophie Chambon
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Non, ami lecteur du blog de Jazzmagazine, ce n’est pas un message crypté à décoder avec des outils high tech dignes des services de renseignement . C’est seulement une preuve supplémentaire de l’éclectisme de la programmation du Reims Jazz Festival qui en est à sa 22ème édition. Le directeur artistique Francis Le Bras a une vision ouverte du jazz et des musiques actuelles et il aime entraîner un public qu’il a su fidéliser dans des lieux qu’il squatte, selon ses propres termes, de l’Opéra au caveau Mumm, du centre St Ex au Césaré www.cesare-cncm.com, centre national de création musicale qui « ose l’expérience sonore ». Son directeur Philippe Le Goff nous apprend qu’il existe 6 structures de ce type en France, le GMEM à Marseille, le GRAME à Lyon, La Muse en circuit à Alfortville, le GMEA à Albi et le CIRM à Nice. C’est donc au Césaré de la commune de Bétheny qui jouxte la cité rémoise que les quatre musiciens et la rétroprojectionniste de VEGAN DALLAS www.vegandallas.net ont effectué une résidence d’une semaine avant de nous présenter leur création en avant-première du D’jazz Nevers Festival. Ils captent l’air ambiant de notre époque dans ce programme insolite et néanmoins mélodique.
VEGAN DALLAS Benjamin Flament (percussions, électronique), Julien Chamla (batterie, harpebasse électrique), Richard Comte (guitare préparée, objets, voix), Simon Henocq (électronique, machines), Adrian Bourget (sonorisation, mise en espace),Julie Lardrot (rétroprojection d’objets animés). Vendredi 23 octobre.
On le sait, « l’oeil écoute ». Le dispositif scénique est ce que l’on remarque en premier, surtout après avoir vu le studio d’enregistrement où trônent des pièces rares, un reVox (marque suisse de matériel audio), des Moogs, un Phantom qui aurait pu servir à la musique des films horrifiques de John Carpenter. Des percussions et batteries très bizarres occupent la scène devant une installation de Julie Landrot, des plus surprenantes : un écran monté sur deux ailes de papillon en fils de viscose blanc collés, commandés en Alsace sous la référence « choucroute »-ça ne s’invente pas, sur lesquels elle projette son travail, avec le système des enseignants « old school », le rétro et les transparents de couleur. La jeune femme, qui est aussi costumière, vient de l’école Boulle, célèbre pour son enseignement des arts appliqués, département Design de l’espace. Elle fait également tourner, en musique, avec un rétroviseur qui lui permet de suivre le travail du batteur situé derrière elle, des instruments de dinette, bols, assiettes rainurées; elle mélange dans divers ustensiles, huiles, bulles de savon, encres colorées. Cette cuisine dont elle me donnera après le concert quelques recettes, est du plus bel effet : couleurs, formes, matières, s’animent et fusionnent, comme des paramécies sous une lame de microscope, quand on voyait s’agiter les cellules en liberté. Ce qui convient à la musique très organique ( le VEGAN du nom du groupe, en écho à ce régime alimentaire plutôt radical) qui se fait devant nous. Chaque forme sonore et visuelle est montrée en train de muter, introduisant un élément de suspense dans cette métamorphose. Et Dallas, me direz-vous? Ces jeunes gens sont tout de même influencés, entre autres, par certains éléments de la mythologie américaine ( musique, espaces, western…) et à ma grande surprise, le premier morceau installe une atmosphère digne des Shadows, une chevauchée épique dans l’ouest fordien. Alors que le guitariste limougeot Richard Comte joue sa partie, en tirant à l’archet des sons de sa guitare, le batteur Julien Chamla joue surtout de la harpe basse électrique, faisant face à un curieux percussionniste dont l’attirail est constitué de bols de cuisine en étain ou inox, d’équerres de métal, de billes de fer et d’abats-jour sans lampe. Benjamin Flament use de cet appareil comme d’un vibraphone dont il a par ailleurs la pratique. Batteur et percussionniste se répondent sur des rythmiques complexes, plus par leur enchevêtrement que par le choix des mesures Sur le fil, en perpétuel décalage. Le dernier de la bande, Simon Hénocq, qui n’est pas le frère du batteur Benjamin Henocq, vient de l’électro accoustique, joue des claviers et catalyse l’énergie. C’est un Fablab sonore que l’on voit évoluer devant nous, où les musiciens, acteurs de nombreux groupes par ailleurs, ont décidé de réunir leurs fantasmes sonores dans des compositions collectives. Il en résulte une musique exigeante, fluide et forte, jamais inaudible : des sons urbains, de la pop western, de l’indus antillais, sur des principes de transe (gnawas). Les compositions envahissent l’espace, plein comme un oeuf (encore un concert « sold out »), planent et nous transportent tous. Car il y a de la beauté et de la poésie dans les gestes de ces musiciens, concentrés et lumineux, jusque dans la manière théâtralisée de se présenter l’un l’autre. Voilà un spectacle vif, frais, une musique qui n’ est pas réservée aux seuls initiés d’aujourd’hui et aux profanes de demain. La soirée se finit devant quelques blidas. Le saviez vous, ce sont les petits verres à champagne les plus utilisés ici, fabriqués dans la région, du nom de leur ville d’expédition en Algérie, où ils devenaient des verres à thé, plus ou moins décorés?
A venir de très nombreux concerts jusqu’à la fin du festival le 7 novembre. Allez sur le site de [Djaz] 51www.djaz51.com et n’oubliez pas de suivre les travaux d’Alain Julien, l’oeil du festival dans son reportage PERSISTANCE RETINIENNE.
Sophie Chambon
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Non, ami lecteur du blog de Jazzmagazine, ce n’est pas un message crypté à décoder avec des outils high tech dignes des services de renseignement . C’est seulement une preuve supplémentaire de l’éclectisme de la programmation du Reims Jazz Festival qui en est à sa 22ème édition. Le directeur artistique Francis Le Bras a une vision ouverte du jazz et des musiques actuelles et il aime entraîner un public qu’il a su fidéliser dans des lieux qu’il squatte, selon ses propres termes, de l’Opéra au caveau Mumm, du centre St Ex au Césaré www.cesare-cncm.com, centre national de création musicale qui « ose l’expérience sonore ». Son directeur Philippe Le Goff nous apprend qu’il existe 6 structures de ce type en France, le GMEM à Marseille, le GRAME à Lyon, La Muse en circuit à Alfortville, le GMEA à Albi et le CIRM à Nice. C’est donc au Césaré de la commune de Bétheny qui jouxte la cité rémoise que les quatre musiciens et la rétroprojectionniste de VEGAN DALLAS www.vegandallas.net ont effectué une résidence d’une semaine avant de nous présenter leur création en avant-première du D’jazz Nevers Festival. Ils captent l’air ambiant de notre époque dans ce programme insolite et néanmoins mélodique.
VEGAN DALLAS Benjamin Flament (percussions, électronique), Julien Chamla (batterie, harpebasse électrique), Richard Comte (guitare préparée, objets, voix), Simon Henocq (électronique, machines), Adrian Bourget (sonorisation, mise en espace),Julie Lardrot (rétroprojection d’objets animés). Vendredi 23 octobre.
On le sait, « l’oeil écoute ». Le dispositif scénique est ce que l’on remarque en premier, surtout après avoir vu le studio d’enregistrement où trônent des pièces rares, un reVox (marque suisse de matériel audio), des Moogs, un Phantom qui aurait pu servir à la musique des films horrifiques de John Carpenter. Des percussions et batteries très bizarres occupent la scène devant une installation de Julie Landrot, des plus surprenantes : un écran monté sur deux ailes de papillon en fils de viscose blanc collés, commandés en Alsace sous la référence « choucroute »-ça ne s’invente pas, sur lesquels elle projette son travail, avec le système des enseignants « old school », le rétro et les transparents de couleur. La jeune femme, qui est aussi costumière, vient de l’école Boulle, célèbre pour son enseignement des arts appliqués, département Design de l’espace. Elle fait également tourner, en musique, avec un rétroviseur qui lui permet de suivre le travail du batteur situé derrière elle, des instruments de dinette, bols, assiettes rainurées; elle mélange dans divers ustensiles, huiles, bulles de savon, encres colorées. Cette cuisine dont elle me donnera après le concert quelques recettes, est du plus bel effet : couleurs, formes, matières, s’animent et fusionnent, comme des paramécies sous une lame de microscope, quand on voyait s’agiter les cellules en liberté. Ce qui convient à la musique très organique ( le VEGAN du nom du groupe, en écho à ce régime alimentaire plutôt radical) qui se fait devant nous. Chaque forme sonore et visuelle est montrée en train de muter, introduisant un élément de suspense dans cette métamorphose. Et Dallas, me direz-vous? Ces jeunes gens sont tout de même influencés, entre autres, par certains éléments de la mythologie américaine ( musique, espaces, western…) et à ma grande surprise, le premier morceau installe une atmosphère digne des Shadows, une chevauchée épique dans l’ouest fordien. Alors que le guitariste limougeot Richard Comte joue sa partie, en tirant à l’archet des sons de sa guitare, le batteur Julien Chamla joue surtout de la harpe basse électrique, faisant face à un curieux percussionniste dont l’attirail est constitué de bols de cuisine en étain ou inox, d’équerres de métal, de billes de fer et d’abats-jour sans lampe. Benjamin Flament use de cet appareil comme d’un vibraphone dont il a par ailleurs la pratique. Batteur et percussionniste se répondent sur des rythmiques complexes, plus par leur enchevêtrement que par le choix des mesures Sur le fil, en perpétuel décalage. Le dernier de la bande, Simon Hénocq, qui n’est pas le frère du batteur Benjamin Henocq, vient de l’électro accoustique, joue des claviers et catalyse l’énergie. C’est un Fablab sonore que l’on voit évoluer devant nous, où les musiciens, acteurs de nombreux groupes par ailleurs, ont décidé de réunir leurs fantasmes sonores dans des compositions collectives. Il en résulte une musique exigeante, fluide et forte, jamais inaudible : des sons urbains, de la pop western, de l’indus antillais, sur des principes de transe (gnawas). Les compositions envahissent l’espace, plein comme un oeuf (encore un concert « sold out »), planent et nous transportent tous. Car il y a de la beauté et de la poésie dans les gestes de ces musiciens, concentrés et lumineux, jusque dans la manière théâtralisée de se présenter l’un l’autre. Voilà un spectacle vif, frais, une musique qui n’ est pas réservée aux seuls initiés d’aujourd’hui et aux profanes de demain. La soirée se finit devant quelques blidas. Le saviez vous, ce sont les petits verres à champagne les plus utilisés ici, fabriqués dans la région, du nom de leur ville d’expédition en Algérie, où ils devenaient des verres à thé, plus ou moins décorés?
A venir de très nombreux concerts jusqu’à la fin du festival le 7 novembre. Allez sur le site de [Djaz] 51www.djaz51.com et n’oubliez pas de suivre les travaux d’Alain Julien, l’oeil du festival dans son reportage PERSISTANCE RETINIENNE.
Sophie Chambon