Jazz live
Publié le 2 Déc 2015

Ralph Moore au Sunside

Soirée mainstream au Sunside avec la venue depuis bien longtemps sur le sol français de Ralph Moore, un ancien de chez Art Blakey ou Horace Silver, et qui a enregistré avec McCoy Tyner, Oscar Peterson, Ray Brown… Cela faisait longtemps que je n’avais pas pris une cure de hardbop. L’occasion me semblait bonne. Elle le fut.

 Mardi 1e novembre 2015, Paris (75), Sunside

Ralph Moore and Friends

Ralph Moore, Michael Cheret (ts), Olivier Truchot (p), Fabien Marcoz (cb), Andrea Michelutti (dm).

Est-ce à cause des récents tragiques événements que les musiciens débutèrent le concert par S.O.S. de Wes Montgomery ? En tout cas, rien de plaintif dans cette entame sur les chapeaux de roue, un « tour de chauffe très chaud » comme le désigna à l’issue de l’interprétation Michael Cheret. Ni de symdrôme du « vendredi 13 » auprès du public venu nombreux.

Dès la deuxième pièce entamée, Proclamation (une composition de Geoff Keezer que Ralph Moore a enregistré avec le pianiste sur le premier album sous son nom de Roy Hargrove), quatre éléments caractéristiques s’imposaient à mon esprit, et qui se confirmèrent avec la suite du concert :

a) l’interaction : de par la posture stylistique adoptée, elle me sembla être souvent à sens unique, les accompagnateurs réagissant, soulignant les propos du soliste, celui-ci ne relevant pas les propositions de ses partenaires, propositions peu nombreuses du fait même qu’ils se positionnaient d’emblée en soutien. Ou comment un positionnement tacite, implicite, entraîne une sorte de boucle pas nécessairement vertueuse.

b) Dès deux saxophonistes, celui qui m’aspira/m’inspira le plus fut en fait Michael Cheret, car moins linéaire que Ralph Moore (au phrasé un peu trop systématique, liant les notes par deux en débit rapide), et surtout par un vocabulaire plus large, tant au niveau de l’harmonie que du placement rythmique, certains accents m’évoquant des ténors « mainstream progressiste »  – si je puis me permettre cette nouvelle étiquette qui, comme les autres, ne veut plus rien dire – tels que Jerry Bergonzi ou Walt Weiskopf.

c) L’ensemble me parut manquer de nuances, le batteur et même Ralph Moore n’éprouvant pas le besoin de jouer en-dessous d’un niveau sonore élevé, mais surtout stagnant sur la même dynamique au lieu de la varier quelque peu. Mauvais procès, d’ailleurs peut-être, car l’idiome réclame sans doute cela ? En tout cas, je pose la question.

d) Pour autant, le groupe me sembla extrêmement soudé, faisant preuve d’une grande cohérence autant sonore que d’esprit. Et plus le concert avança, plus ce sentiment s’affermit. J’en compris la raison lorsqu’au deuxième set, Michael Cheret expliqua qu’il s’agissait du dernier concert d’une série qu’ils avaient en train de mener depuis une semaine. Raison pour laquelle cette réunion ne s’apparenta pas, loin s’en faut, à une de ces jam sessions à l’arrachée qui peuvent parfois se révéler désastreuse. La construction du programme, par exemple, fut extrêmement soignée, réfléchie. The Infant Song, une belle ballade de Gigi Gryce, suivie de Hopscoth, un up tempo de Ralph Moore, refermèrent ainsi le premier set (au lieu des rebattu All the Things You Are ou Autumn Leaves). Sur cette dernière composition de Moore, le pianiste Olivier Truchot réalisa un très bon solo, à l’image de sa prestation globale : très mélodique, de ce lyrisme propre à certains hardboppers, tel Kenny Barron par exemple, qui chante avec aisance sur tempo élevé.

Le deuxième débuta avec Full Way, une autre pièce de Ralph Moore qui m’entraîna à modifier mon jugement un peu trop rapide sur le ténor anglais. En effet, celui-ci réalisa un solo très bien construit, en partant du grave de son instrument, et en élaborant une narration pas à pas toujours plus irrésistible. Si jusqu’alors le jazz réalisé pouvait davantage être rattaché à celui de la grande tradition hardbop des années 1960, avec les reprises d’Outlook du tromboniste Steve Davis et la valse d’Horace Silver Barbara, il me sembla que l’on passa aux années 1970, avec ce je-ne-sais-quoi qui évoqua en moi l’Eastern Rebellion de Cedar Walton, notamment la mouture avec Bob Berg.

Pour clore ce set, le contrebassiste Nicolas Sabato et le batteur Philippe Soirat furent invités à venir faire la jam. Le prétexte choisi fut un décalque de Now’s the Time avec une grille de blues trafiquée (après la 5e mesure, bien sûr). Immédiatement le son d’ensemble s’avéra différent. Les exposés à deux ténors restèrent magnifiques, mais le drive fut à la fois plus léger, rebondi (voir du côté du batteur) et posé sur un matelas solide et large (voir du côté de la contrebasse, même si Nicolas Sabato s’avéra un improvisateur moins « soliste » que Fabien Marcoz).

 

Généreux, les musiciens offrirent encore ensuite un dernier set auquel je ne pouvais assister du fait de l’heure déjà tardive. Je le regrettais car j’avais passé de bons moments auprès de ses artisans aux beaux ouvrages. 

 

PROCHAINEMENT AU SUNSIDE (à ne rater sous aucun prétexte ! ) : 10 et 11 décembre : Duo Dave Liebman / Martial Solal !!!!!!!!!

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Soirée mainstream au Sunside avec la venue depuis bien longtemps sur le sol français de Ralph Moore, un ancien de chez Art Blakey ou Horace Silver, et qui a enregistré avec McCoy Tyner, Oscar Peterson, Ray Brown… Cela faisait longtemps que je n’avais pas pris une cure de hardbop. L’occasion me semblait bonne. Elle le fut.

 Mardi 1e novembre 2015, Paris (75), Sunside

Ralph Moore and Friends

Ralph Moore, Michael Cheret (ts), Olivier Truchot (p), Fabien Marcoz (cb), Andrea Michelutti (dm).

Est-ce à cause des récents tragiques événements que les musiciens débutèrent le concert par S.O.S. de Wes Montgomery ? En tout cas, rien de plaintif dans cette entame sur les chapeaux de roue, un « tour de chauffe très chaud » comme le désigna à l’issue de l’interprétation Michael Cheret. Ni de symdrôme du « vendredi 13 » auprès du public venu nombreux.

Dès la deuxième pièce entamée, Proclamation (une composition de Geoff Keezer que Ralph Moore a enregistré avec le pianiste sur le premier album sous son nom de Roy Hargrove), quatre éléments caractéristiques s’imposaient à mon esprit, et qui se confirmèrent avec la suite du concert :

a) l’interaction : de par la posture stylistique adoptée, elle me sembla être souvent à sens unique, les accompagnateurs réagissant, soulignant les propos du soliste, celui-ci ne relevant pas les propositions de ses partenaires, propositions peu nombreuses du fait même qu’ils se positionnaient d’emblée en soutien. Ou comment un positionnement tacite, implicite, entraîne une sorte de boucle pas nécessairement vertueuse.

b) Dès deux saxophonistes, celui qui m’aspira/m’inspira le plus fut en fait Michael Cheret, car moins linéaire que Ralph Moore (au phrasé un peu trop systématique, liant les notes par deux en débit rapide), et surtout par un vocabulaire plus large, tant au niveau de l’harmonie que du placement rythmique, certains accents m’évoquant des ténors « mainstream progressiste »  – si je puis me permettre cette nouvelle étiquette qui, comme les autres, ne veut plus rien dire – tels que Jerry Bergonzi ou Walt Weiskopf.

c) L’ensemble me parut manquer de nuances, le batteur et même Ralph Moore n’éprouvant pas le besoin de jouer en-dessous d’un niveau sonore élevé, mais surtout stagnant sur la même dynamique au lieu de la varier quelque peu. Mauvais procès, d’ailleurs peut-être, car l’idiome réclame sans doute cela ? En tout cas, je pose la question.

d) Pour autant, le groupe me sembla extrêmement soudé, faisant preuve d’une grande cohérence autant sonore que d’esprit. Et plus le concert avança, plus ce sentiment s’affermit. J’en compris la raison lorsqu’au deuxième set, Michael Cheret expliqua qu’il s’agissait du dernier concert d’une série qu’ils avaient en train de mener depuis une semaine. Raison pour laquelle cette réunion ne s’apparenta pas, loin s’en faut, à une de ces jam sessions à l’arrachée qui peuvent parfois se révéler désastreuse. La construction du programme, par exemple, fut extrêmement soignée, réfléchie. The Infant Song, une belle ballade de Gigi Gryce, suivie de Hopscoth, un up tempo de Ralph Moore, refermèrent ainsi le premier set (au lieu des rebattu All the Things You Are ou Autumn Leaves). Sur cette dernière composition de Moore, le pianiste Olivier Truchot réalisa un très bon solo, à l’image de sa prestation globale : très mélodique, de ce lyrisme propre à certains hardboppers, tel Kenny Barron par exemple, qui chante avec aisance sur tempo élevé.

Le deuxième débuta avec Full Way, une autre pièce de Ralph Moore qui m’entraîna à modifier mon jugement un peu trop rapide sur le ténor anglais. En effet, celui-ci réalisa un solo très bien construit, en partant du grave de son instrument, et en élaborant une narration pas à pas toujours plus irrésistible. Si jusqu’alors le jazz réalisé pouvait davantage être rattaché à celui de la grande tradition hardbop des années 1960, avec les reprises d’Outlook du tromboniste Steve Davis et la valse d’Horace Silver Barbara, il me sembla que l’on passa aux années 1970, avec ce je-ne-sais-quoi qui évoqua en moi l’Eastern Rebellion de Cedar Walton, notamment la mouture avec Bob Berg.

Pour clore ce set, le contrebassiste Nicolas Sabato et le batteur Philippe Soirat furent invités à venir faire la jam. Le prétexte choisi fut un décalque de Now’s the Time avec une grille de blues trafiquée (après la 5e mesure, bien sûr). Immédiatement le son d’ensemble s’avéra différent. Les exposés à deux ténors restèrent magnifiques, mais le drive fut à la fois plus léger, rebondi (voir du côté du batteur) et posé sur un matelas solide et large (voir du côté de la contrebasse, même si Nicolas Sabato s’avéra un improvisateur moins « soliste » que Fabien Marcoz).

 

Généreux, les musiciens offrirent encore ensuite un dernier set auquel je ne pouvais assister du fait de l’heure déjà tardive. Je le regrettais car j’avais passé de bons moments auprès de ses artisans aux beaux ouvrages. 

 

PROCHAINEMENT AU SUNSIDE (à ne rater sous aucun prétexte ! ) : 10 et 11 décembre : Duo Dave Liebman / Martial Solal !!!!!!!!!

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Soirée mainstream au Sunside avec la venue depuis bien longtemps sur le sol français de Ralph Moore, un ancien de chez Art Blakey ou Horace Silver, et qui a enregistré avec McCoy Tyner, Oscar Peterson, Ray Brown… Cela faisait longtemps que je n’avais pas pris une cure de hardbop. L’occasion me semblait bonne. Elle le fut.

 Mardi 1e novembre 2015, Paris (75), Sunside

Ralph Moore and Friends

Ralph Moore, Michael Cheret (ts), Olivier Truchot (p), Fabien Marcoz (cb), Andrea Michelutti (dm).

Est-ce à cause des récents tragiques événements que les musiciens débutèrent le concert par S.O.S. de Wes Montgomery ? En tout cas, rien de plaintif dans cette entame sur les chapeaux de roue, un « tour de chauffe très chaud » comme le désigna à l’issue de l’interprétation Michael Cheret. Ni de symdrôme du « vendredi 13 » auprès du public venu nombreux.

Dès la deuxième pièce entamée, Proclamation (une composition de Geoff Keezer que Ralph Moore a enregistré avec le pianiste sur le premier album sous son nom de Roy Hargrove), quatre éléments caractéristiques s’imposaient à mon esprit, et qui se confirmèrent avec la suite du concert :

a) l’interaction : de par la posture stylistique adoptée, elle me sembla être souvent à sens unique, les accompagnateurs réagissant, soulignant les propos du soliste, celui-ci ne relevant pas les propositions de ses partenaires, propositions peu nombreuses du fait même qu’ils se positionnaient d’emblée en soutien. Ou comment un positionnement tacite, implicite, entraîne une sorte de boucle pas nécessairement vertueuse.

b) Dès deux saxophonistes, celui qui m’aspira/m’inspira le plus fut en fait Michael Cheret, car moins linéaire que Ralph Moore (au phrasé un peu trop systématique, liant les notes par deux en débit rapide), et surtout par un vocabulaire plus large, tant au niveau de l’harmonie que du placement rythmique, certains accents m’évoquant des ténors « mainstream progressiste »  – si je puis me permettre cette nouvelle étiquette qui, comme les autres, ne veut plus rien dire – tels que Jerry Bergonzi ou Walt Weiskopf.

c) L’ensemble me parut manquer de nuances, le batteur et même Ralph Moore n’éprouvant pas le besoin de jouer en-dessous d’un niveau sonore élevé, mais surtout stagnant sur la même dynamique au lieu de la varier quelque peu. Mauvais procès, d’ailleurs peut-être, car l’idiome réclame sans doute cela ? En tout cas, je pose la question.

d) Pour autant, le groupe me sembla extrêmement soudé, faisant preuve d’une grande cohérence autant sonore que d’esprit. Et plus le concert avança, plus ce sentiment s’affermit. J’en compris la raison lorsqu’au deuxième set, Michael Cheret expliqua qu’il s’agissait du dernier concert d’une série qu’ils avaient en train de mener depuis une semaine. Raison pour laquelle cette réunion ne s’apparenta pas, loin s’en faut, à une de ces jam sessions à l’arrachée qui peuvent parfois se révéler désastreuse. La construction du programme, par exemple, fut extrêmement soignée, réfléchie. The Infant Song, une belle ballade de Gigi Gryce, suivie de Hopscoth, un up tempo de Ralph Moore, refermèrent ainsi le premier set (au lieu des rebattu All the Things You Are ou Autumn Leaves). Sur cette dernière composition de Moore, le pianiste Olivier Truchot réalisa un très bon solo, à l’image de sa prestation globale : très mélodique, de ce lyrisme propre à certains hardboppers, tel Kenny Barron par exemple, qui chante avec aisance sur tempo élevé.

Le deuxième débuta avec Full Way, une autre pièce de Ralph Moore qui m’entraîna à modifier mon jugement un peu trop rapide sur le ténor anglais. En effet, celui-ci réalisa un solo très bien construit, en partant du grave de son instrument, et en élaborant une narration pas à pas toujours plus irrésistible. Si jusqu’alors le jazz réalisé pouvait davantage être rattaché à celui de la grande tradition hardbop des années 1960, avec les reprises d’Outlook du tromboniste Steve Davis et la valse d’Horace Silver Barbara, il me sembla que l’on passa aux années 1970, avec ce je-ne-sais-quoi qui évoqua en moi l’Eastern Rebellion de Cedar Walton, notamment la mouture avec Bob Berg.

Pour clore ce set, le contrebassiste Nicolas Sabato et le batteur Philippe Soirat furent invités à venir faire la jam. Le prétexte choisi fut un décalque de Now’s the Time avec une grille de blues trafiquée (après la 5e mesure, bien sûr). Immédiatement le son d’ensemble s’avéra différent. Les exposés à deux ténors restèrent magnifiques, mais le drive fut à la fois plus léger, rebondi (voir du côté du batteur) et posé sur un matelas solide et large (voir du côté de la contrebasse, même si Nicolas Sabato s’avéra un improvisateur moins « soliste » que Fabien Marcoz).

 

Généreux, les musiciens offrirent encore ensuite un dernier set auquel je ne pouvais assister du fait de l’heure déjà tardive. Je le regrettais car j’avais passé de bons moments auprès de ses artisans aux beaux ouvrages. 

 

PROCHAINEMENT AU SUNSIDE (à ne rater sous aucun prétexte ! ) : 10 et 11 décembre : Duo Dave Liebman / Martial Solal !!!!!!!!!

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Soirée mainstream au Sunside avec la venue depuis bien longtemps sur le sol français de Ralph Moore, un ancien de chez Art Blakey ou Horace Silver, et qui a enregistré avec McCoy Tyner, Oscar Peterson, Ray Brown… Cela faisait longtemps que je n’avais pas pris une cure de hardbop. L’occasion me semblait bonne. Elle le fut.

 Mardi 1e novembre 2015, Paris (75), Sunside

Ralph Moore and Friends

Ralph Moore, Michael Cheret (ts), Olivier Truchot (p), Fabien Marcoz (cb), Andrea Michelutti (dm).

Est-ce à cause des récents tragiques événements que les musiciens débutèrent le concert par S.O.S. de Wes Montgomery ? En tout cas, rien de plaintif dans cette entame sur les chapeaux de roue, un « tour de chauffe très chaud » comme le désigna à l’issue de l’interprétation Michael Cheret. Ni de symdrôme du « vendredi 13 » auprès du public venu nombreux.

Dès la deuxième pièce entamée, Proclamation (une composition de Geoff Keezer que Ralph Moore a enregistré avec le pianiste sur le premier album sous son nom de Roy Hargrove), quatre éléments caractéristiques s’imposaient à mon esprit, et qui se confirmèrent avec la suite du concert :

a) l’interaction : de par la posture stylistique adoptée, elle me sembla être souvent à sens unique, les accompagnateurs réagissant, soulignant les propos du soliste, celui-ci ne relevant pas les propositions de ses partenaires, propositions peu nombreuses du fait même qu’ils se positionnaient d’emblée en soutien. Ou comment un positionnement tacite, implicite, entraîne une sorte de boucle pas nécessairement vertueuse.

b) Dès deux saxophonistes, celui qui m’aspira/m’inspira le plus fut en fait Michael Cheret, car moins linéaire que Ralph Moore (au phrasé un peu trop systématique, liant les notes par deux en débit rapide), et surtout par un vocabulaire plus large, tant au niveau de l’harmonie que du placement rythmique, certains accents m’évoquant des ténors « mainstream progressiste »  – si je puis me permettre cette nouvelle étiquette qui, comme les autres, ne veut plus rien dire – tels que Jerry Bergonzi ou Walt Weiskopf.

c) L’ensemble me parut manquer de nuances, le batteur et même Ralph Moore n’éprouvant pas le besoin de jouer en-dessous d’un niveau sonore élevé, mais surtout stagnant sur la même dynamique au lieu de la varier quelque peu. Mauvais procès, d’ailleurs peut-être, car l’idiome réclame sans doute cela ? En tout cas, je pose la question.

d) Pour autant, le groupe me sembla extrêmement soudé, faisant preuve d’une grande cohérence autant sonore que d’esprit. Et plus le concert avança, plus ce sentiment s’affermit. J’en compris la raison lorsqu’au deuxième set, Michael Cheret expliqua qu’il s’agissait du dernier concert d’une série qu’ils avaient en train de mener depuis une semaine. Raison pour laquelle cette réunion ne s’apparenta pas, loin s’en faut, à une de ces jam sessions à l’arrachée qui peuvent parfois se révéler désastreuse. La construction du programme, par exemple, fut extrêmement soignée, réfléchie. The Infant Song, une belle ballade de Gigi Gryce, suivie de Hopscoth, un up tempo de Ralph Moore, refermèrent ainsi le premier set (au lieu des rebattu All the Things You Are ou Autumn Leaves). Sur cette dernière composition de Moore, le pianiste Olivier Truchot réalisa un très bon solo, à l’image de sa prestation globale : très mélodique, de ce lyrisme propre à certains hardboppers, tel Kenny Barron par exemple, qui chante avec aisance sur tempo élevé.

Le deuxième débuta avec Full Way, une autre pièce de Ralph Moore qui m’entraîna à modifier mon jugement un peu trop rapide sur le ténor anglais. En effet, celui-ci réalisa un solo très bien construit, en partant du grave de son instrument, et en élaborant une narration pas à pas toujours plus irrésistible. Si jusqu’alors le jazz réalisé pouvait davantage être rattaché à celui de la grande tradition hardbop des années 1960, avec les reprises d’Outlook du tromboniste Steve Davis et la valse d’Horace Silver Barbara, il me sembla que l’on passa aux années 1970, avec ce je-ne-sais-quoi qui évoqua en moi l’Eastern Rebellion de Cedar Walton, notamment la mouture avec Bob Berg.

Pour clore ce set, le contrebassiste Nicolas Sabato et le batteur Philippe Soirat furent invités à venir faire la jam. Le prétexte choisi fut un décalque de Now’s the Time avec une grille de blues trafiquée (après la 5e mesure, bien sûr). Immédiatement le son d’ensemble s’avéra différent. Les exposés à deux ténors restèrent magnifiques, mais le drive fut à la fois plus léger, rebondi (voir du côté du batteur) et posé sur un matelas solide et large (voir du côté de la contrebasse, même si Nicolas Sabato s’avéra un improvisateur moins « soliste » que Fabien Marcoz).

 

Généreux, les musiciens offrirent encore ensuite un dernier set auquel je ne pouvais assister du fait de l’heure déjà tardive. Je le regrettais car j’avais passé de bons moments auprès de ses artisans aux beaux ouvrages. 

 

PROCHAINEMENT AU SUNSIDE (à ne rater sous aucun prétexte ! ) : 10 et 11 décembre : Duo Dave Liebman / Martial Solal !!!!!!!!!