Festival unerhört ! Zürich, 15e édition (6)
Copieux quadruple programme à la Rote Fabrik, et démarrage en beauté avec le trio d’Aruan Ortiz, qui livre la prestation la plus mémorable de cette édition, dont la teneur aurait pu lui permettre de prétendre au titre de « concert de l’année », si les jeux n’étaient déjà faits (réponse au prochain numéro).
Samedi 26 novembre 2016, Rote Fabrik, Clubraum
Aruán Ortiz Trio
Aruán Ortiz (p), Brad Jones (b), Chad Taylor (dm)
L’album « Hidden Voices » dans la même configuration voyait le pianiste entouré d’Eric Revis et Gerald Cleaver pour un résultat déjà stimulant. L’association avec Brad Jones (qui arbore une barbe façon capitaine Haddock) et Chad Taylor semble lui être encore plus profitable. Ces fabuleux sidemen de Marc Ribot s’expriment ici dans un contexte acoustique et intimiste, qui rend leurs qualités respectives d’autant plus évidentes. L’aisance rythmique naturelle d’Ortiz rappelle celle d’Herbie Hancock – cependant leur style n’a rien de semblable. Dans la même catégorie, on ne peut songer qu’à Craig Taborn, Matthew Shipp, Kris Davis et Matt Mitchell, députés les plus crédibles du pianisme avancé. Le jeu de chacun se fait d’abord aussi caressant que possible, la sonorité de la contrebasse d’une rondeur à faire pâlir Ron Carter. Maturité musicale, maîtrise des horloges : les pièces avancent sans précipitation ni longueurs, en adéquation avec la forme des compositions. Toutes les notes ont leur place, chacun ne prenant la parole que pour apporter quelque chose au propos. Une écriture pensée, un concept d’ensemble et un arc crescendo, l’architecture-même des morceaux barrant en outre la route aux applaudissements intempestifs. Que demander de plus?
Gabriela Friedli (p), Claudia Ulla Binder (p)
S’ensuit une nouvelle incursion dans le champ toujours vert de la musique contemporaine. Couleurs chaudes et motifs toniques perturbés par des grondements. Il est fait usage de tout le clavier et toute la palette, entre Gustav Monk et Thelonious Klimt. On entend partout que l’Europe est à l’agonie. La lorgnette musicale raconte une toute autre histoire : composition et improvisation se portent à merveille. Il n’était pas évident non plus de capter l’attention de la salle après l’ébouriffant Ortiz : un challenge relevé avec succès.
Matthias Spillmann (tp), Reto Suhner (s), Marc Méan (p), Raffaele Bossard (b), Dominic Egli (dm)
L’enthousiasme retombe avec Mats-Up, quintette sans surprise dans la distribution des rôles. Cela commençait pourtant bien, avec l’usage de karkabous marocains, une marche trouble et des soufflants motivés. Las, au bout de trois titres, les limites sont atteintes, les balises visibles, la routine s’installe. Le claviériste est d’une discrétion excessive ; à l’inverse le batteur tire trop souvent la couverture à lui. Cette aimable fusion ne marque guère les esprits, et l’on se prend à guetter la suite avec impatience.
Rote Fabrik, Fabriktheater – Seismogram am Unerhört!
Antoine Chessex (s)
La suite, c’est à minuit dans une salle voisine. Antoine Chessex s’y produit en solo, devant les quelques braves restés là (il se fait tard et quatre concerts d’affilée font beaucoup de musique à assimiler). Chessex est un compositeur et saxophoniste très actif de l’helvète underground. Il travaille avec Frantz Loriot, Chris Corsano, Axel Dörner, tourne avec les Britanniques John Edwards et Steve Noble. S’il s’est taillé une réputation pour des sets amplifiés d’obédience « maximaliste » pour lesquels il convient de se protéger les écoutilles, il explore cette fois l’espace en souffle continu pendant quarante minutes très amènes, au gré de lents déplacements sur la scène et devant les micros. Une découverte. David Cristol
Photos : Michelle Ettlin|Copieux quadruple programme à la Rote Fabrik, et démarrage en beauté avec le trio d’Aruan Ortiz, qui livre la prestation la plus mémorable de cette édition, dont la teneur aurait pu lui permettre de prétendre au titre de « concert de l’année », si les jeux n’étaient déjà faits (réponse au prochain numéro).
Samedi 26 novembre 2016, Rote Fabrik, Clubraum
Aruán Ortiz Trio
Aruán Ortiz (p), Brad Jones (b), Chad Taylor (dm)
L’album « Hidden Voices » dans la même configuration voyait le pianiste entouré d’Eric Revis et Gerald Cleaver pour un résultat déjà stimulant. L’association avec Brad Jones (qui arbore une barbe façon capitaine Haddock) et Chad Taylor semble lui être encore plus profitable. Ces fabuleux sidemen de Marc Ribot s’expriment ici dans un contexte acoustique et intimiste, qui rend leurs qualités respectives d’autant plus évidentes. L’aisance rythmique naturelle d’Ortiz rappelle celle d’Herbie Hancock – cependant leur style n’a rien de semblable. Dans la même catégorie, on ne peut songer qu’à Craig Taborn, Matthew Shipp, Kris Davis et Matt Mitchell, députés les plus crédibles du pianisme avancé. Le jeu de chacun se fait d’abord aussi caressant que possible, la sonorité de la contrebasse d’une rondeur à faire pâlir Ron Carter. Maturité musicale, maîtrise des horloges : les pièces avancent sans précipitation ni longueurs, en adéquation avec la forme des compositions. Toutes les notes ont leur place, chacun ne prenant la parole que pour apporter quelque chose au propos. Une écriture pensée, un concept d’ensemble et un arc crescendo, l’architecture-même des morceaux barrant en outre la route aux applaudissements intempestifs. Que demander de plus?
Gabriela Friedli (p), Claudia Ulla Binder (p)
S’ensuit une nouvelle incursion dans le champ toujours vert de la musique contemporaine. Couleurs chaudes et motifs toniques perturbés par des grondements. Il est fait usage de tout le clavier et toute la palette, entre Gustav Monk et Thelonious Klimt. On entend partout que l’Europe est à l’agonie. La lorgnette musicale raconte une toute autre histoire : composition et improvisation se portent à merveille. Il n’était pas évident non plus de capter l’attention de la salle après l’ébouriffant Ortiz : un challenge relevé avec succès.
Matthias Spillmann (tp), Reto Suhner (s), Marc Méan (p), Raffaele Bossard (b), Dominic Egli (dm)
L’enthousiasme retombe avec Mats-Up, quintette sans surprise dans la distribution des rôles. Cela commençait pourtant bien, avec l’usage de karkabous marocains, une marche trouble et des soufflants motivés. Las, au bout de trois titres, les limites sont atteintes, les balises visibles, la routine s’installe. Le claviériste est d’une discrétion excessive ; à l’inverse le batteur tire trop souvent la couverture à lui. Cette aimable fusion ne marque guère les esprits, et l’on se prend à guetter la suite avec impatience.
Rote Fabrik, Fabriktheater – Seismogram am Unerhört!
Antoine Chessex (s)
La suite, c’est à minuit dans une salle voisine. Antoine Chessex s’y produit en solo, devant les quelques braves restés là (il se fait tard et quatre concerts d’affilée font beaucoup de musique à assimiler). Chessex est un compositeur et saxophoniste très actif de l’helvète underground. Il travaille avec Frantz Loriot, Chris Corsano, Axel Dörner, tourne avec les Britanniques John Edwards et Steve Noble. S’il s’est taillé une réputation pour des sets amplifiés d’obédience « maximaliste » pour lesquels il convient de se protéger les écoutilles, il explore cette fois l’espace en souffle continu pendant quarante minutes très amènes, au gré de lents déplacements sur la scène et devant les micros. Une découverte. David Cristol
Photos : Michelle Ettlin|Copieux quadruple programme à la Rote Fabrik, et démarrage en beauté avec le trio d’Aruan Ortiz, qui livre la prestation la plus mémorable de cette édition, dont la teneur aurait pu lui permettre de prétendre au titre de « concert de l’année », si les jeux n’étaient déjà faits (réponse au prochain numéro).
Samedi 26 novembre 2016, Rote Fabrik, Clubraum
Aruán Ortiz Trio
Aruán Ortiz (p), Brad Jones (b), Chad Taylor (dm)
L’album « Hidden Voices » dans la même configuration voyait le pianiste entouré d’Eric Revis et Gerald Cleaver pour un résultat déjà stimulant. L’association avec Brad Jones (qui arbore une barbe façon capitaine Haddock) et Chad Taylor semble lui être encore plus profitable. Ces fabuleux sidemen de Marc Ribot s’expriment ici dans un contexte acoustique et intimiste, qui rend leurs qualités respectives d’autant plus évidentes. L’aisance rythmique naturelle d’Ortiz rappelle celle d’Herbie Hancock – cependant leur style n’a rien de semblable. Dans la même catégorie, on ne peut songer qu’à Craig Taborn, Matthew Shipp, Kris Davis et Matt Mitchell, députés les plus crédibles du pianisme avancé. Le jeu de chacun se fait d’abord aussi caressant que possible, la sonorité de la contrebasse d’une rondeur à faire pâlir Ron Carter. Maturité musicale, maîtrise des horloges : les pièces avancent sans précipitation ni longueurs, en adéquation avec la forme des compositions. Toutes les notes ont leur place, chacun ne prenant la parole que pour apporter quelque chose au propos. Une écriture pensée, un concept d’ensemble et un arc crescendo, l’architecture-même des morceaux barrant en outre la route aux applaudissements intempestifs. Que demander de plus?
Gabriela Friedli (p), Claudia Ulla Binder (p)
S’ensuit une nouvelle incursion dans le champ toujours vert de la musique contemporaine. Couleurs chaudes et motifs toniques perturbés par des grondements. Il est fait usage de tout le clavier et toute la palette, entre Gustav Monk et Thelonious Klimt. On entend partout que l’Europe est à l’agonie. La lorgnette musicale raconte une toute autre histoire : composition et improvisation se portent à merveille. Il n’était pas évident non plus de capter l’attention de la salle après l’ébouriffant Ortiz : un challenge relevé avec succès.
Matthias Spillmann (tp), Reto Suhner (s), Marc Méan (p), Raffaele Bossard (b), Dominic Egli (dm)
L’enthousiasme retombe avec Mats-Up, quintette sans surprise dans la distribution des rôles. Cela commençait pourtant bien, avec l’usage de karkabous marocains, une marche trouble et des soufflants motivés. Las, au bout de trois titres, les limites sont atteintes, les balises visibles, la routine s’installe. Le claviériste est d’une discrétion excessive ; à l’inverse le batteur tire trop souvent la couverture à lui. Cette aimable fusion ne marque guère les esprits, et l’on se prend à guetter la suite avec impatience.
Rote Fabrik, Fabriktheater – Seismogram am Unerhört!
Antoine Chessex (s)
La suite, c’est à minuit dans une salle voisine. Antoine Chessex s’y produit en solo, devant les quelques braves restés là (il se fait tard et quatre concerts d’affilée font beaucoup de musique à assimiler). Chessex est un compositeur et saxophoniste très actif de l’helvète underground. Il travaille avec Frantz Loriot, Chris Corsano, Axel Dörner, tourne avec les Britanniques John Edwards et Steve Noble. S’il s’est taillé une réputation pour des sets amplifiés d’obédience « maximaliste » pour lesquels il convient de se protéger les écoutilles, il explore cette fois l’espace en souffle continu pendant quarante minutes très amènes, au gré de lents déplacements sur la scène et devant les micros. Une découverte. David Cristol
Photos : Michelle Ettlin|Copieux quadruple programme à la Rote Fabrik, et démarrage en beauté avec le trio d’Aruan Ortiz, qui livre la prestation la plus mémorable de cette édition, dont la teneur aurait pu lui permettre de prétendre au titre de « concert de l’année », si les jeux n’étaient déjà faits (réponse au prochain numéro).
Samedi 26 novembre 2016, Rote Fabrik, Clubraum
Aruán Ortiz Trio
Aruán Ortiz (p), Brad Jones (b), Chad Taylor (dm)
L’album « Hidden Voices » dans la même configuration voyait le pianiste entouré d’Eric Revis et Gerald Cleaver pour un résultat déjà stimulant. L’association avec Brad Jones (qui arbore une barbe façon capitaine Haddock) et Chad Taylor semble lui être encore plus profitable. Ces fabuleux sidemen de Marc Ribot s’expriment ici dans un contexte acoustique et intimiste, qui rend leurs qualités respectives d’autant plus évidentes. L’aisance rythmique naturelle d’Ortiz rappelle celle d’Herbie Hancock – cependant leur style n’a rien de semblable. Dans la même catégorie, on ne peut songer qu’à Craig Taborn, Matthew Shipp, Kris Davis et Matt Mitchell, députés les plus crédibles du pianisme avancé. Le jeu de chacun se fait d’abord aussi caressant que possible, la sonorité de la contrebasse d’une rondeur à faire pâlir Ron Carter. Maturité musicale, maîtrise des horloges : les pièces avancent sans précipitation ni longueurs, en adéquation avec la forme des compositions. Toutes les notes ont leur place, chacun ne prenant la parole que pour apporter quelque chose au propos. Une écriture pensée, un concept d’ensemble et un arc crescendo, l’architecture-même des morceaux barrant en outre la route aux applaudissements intempestifs. Que demander de plus?
Gabriela Friedli (p), Claudia Ulla Binder (p)
S’ensuit une nouvelle incursion dans le champ toujours vert de la musique contemporaine. Couleurs chaudes et motifs toniques perturbés par des grondements. Il est fait usage de tout le clavier et toute la palette, entre Gustav Monk et Thelonious Klimt. On entend partout que l’Europe est à l’agonie. La lorgnette musicale raconte une toute autre histoire : composition et improvisation se portent à merveille. Il n’était pas évident non plus de capter l’attention de la salle après l’ébouriffant Ortiz : un challenge relevé avec succès.
Matthias Spillmann (tp), Reto Suhner (s), Marc Méan (p), Raffaele Bossard (b), Dominic Egli (dm)
L’enthousiasme retombe avec Mats-Up, quintette sans surprise dans la distribution des rôles. Cela commençait pourtant bien, avec l’usage de karkabous marocains, une marche trouble et des soufflants motivés. Las, au bout de trois titres, les limites sont atteintes, les balises visibles, la routine s’installe. Le claviériste est d’une discrétion excessive ; à l’inverse le batteur tire trop souvent la couverture à lui. Cette aimable fusion ne marque guère les esprits, et l’on se prend à guetter la suite avec impatience.
Rote Fabrik, Fabriktheater – Seismogram am Unerhört!
Antoine Chessex (s)
La suite, c’est à minuit dans une salle voisine. Antoine Chessex s’y produit en solo, devant les quelques braves restés là (il se fait tard et quatre concerts d’affilée font beaucoup de musique à assimiler). Chessex est un compositeur et saxophoniste très actif de l’helvète underground. Il travaille avec Frantz Loriot, Chris Corsano, Axel Dörner, tourne avec les Britanniques John Edwards et Steve Noble. S’il s’est taillé une réputation pour des sets amplifiés d’obédience « maximaliste » pour lesquels il convient de se protéger les écoutilles, il explore cette fois l’espace en souffle continu pendant quarante minutes très amènes, au gré de lents déplacements sur la scène et devant les micros. Une découverte. David Cristol
Photos : Michelle Ettlin