Jazz live
Publié le 20 Déc 2016

David Eskenazy trio au Sunside

portrait-david-eskenazy-carré-HD

Mardi dernier, le trio de David Eskenazy donnait un suberbe concert au Sunside à l’occasion de la sortie de leur deuxième disque Longing for Gravity (chez ophelia-records, tous renseignements sur www.david-eskenazy-trio.com )
David Eskenazy (contrebasse), Clément Griffault (piano), Julien Grégoire (batterie), Le Sunside, 13 décembre 2016

La première chose qui me frappe dans ce trio de jeunes musiciens, c’est la forte complémentarité entre David Eskenazy, contrebassiste et compositeur, et son pianiste Clément Griffault. Eskenazy sait lester ses notes, et leur conférer poids, volume, relief. Il parvient ainsi à une intensité très forte sans se départir jamais d’une grande sobriété. Il apporte un ancrage terrien et organique qui est quasiment un manifeste esthétique: On retrouve en effet cette dimension dans plusieurs titres de l’album (Tellur, Tectonique intérieure) et surtout dans le titre, Longing for Gravity, avec cette double dimension de la gravité: à la fois la force d’attraction qui fait tomber des pommes sur le chapeau d’Isaac Newton et main glacée qui serre les gorges et enrhume les coeurs.
Quant au pianiste Clément Griffault, il a épaté tous les auditeurs présents ce soir-là au Sunside. Il sait l’art de l’apesanteur et de la note suspendue. Il joue avec le silence comme on jouerait avec le feu. Il a des rubatos à mourir, et des nuances incroyables dans ses pianissimo, comme un peintre qui serait capable d’étendre sa palette chromatique jusqu’à l’ultra-violet. A certains moment, c’est si fin et si subtil, c’est si lyrique et si fragile, que l’on se demande s’il s’agit de piano joué ou de piano rêvé. Quant au batteur, Julien Grégoire, il s’insère entre la terre et le ciel avec beaucoup de liberté et de finesse, partage avec ses collègues le refus de la note ou du geste de trop. Il a de merveilleuses trouvailles poético-rythmiques au début du morceau « Dialogue avec les vents d’en haut ».
La répartition des rôles entre les trois musiciens est assez limpide. David Eskenazy, compositeur de tous les morceaux, a l’élégance de ne pas se tailler la part du lion. Il met au contraire très en avant son pianiste (qui a beaucoup de parties écrites) et lâche la bride à son batteur Julien Grégoire, électron libre du trio. Le contrebassiste se situe à mi-chemin de la liberté conditionnelle octroyé à son pianiste et du blanc-seing accordé à son batteur. Tous trois jouent une musique dense, compact, tendue, pleine de complexités harmoniques et rythmiques cachées, avec un goût prononcé pour les virages en épingles à cheveux. C’est le cas dans Bretagne, le premier morceau joué par le trio, qui s’apparente à une sorte de squash musical, avec ces sprints intenses et nerveux qui naissent sous les doigts du pianiste Clément Griffault, avant que la dimension musculaire ne bascule progressivement dans une sorte d’alanguissement. Après le concert il raconte le principe de composition de ce titre: « On a voulu adopter ce côté un peu énervé, un peu métal si on veut, et le faire déboucher sur un truc plus lent avec la basse qui fait des phrases élastiques, un peu rubatos. C’est un peu le principe de certains morceaux de musique contemporaine. J’utilise un quadrillage rythmique très rigoureux mais sans barre de mesure. Ca permet d’insérer des phrases lentes dans un tempo très rapide. Du coup, on a une respiration dans un truc qui groove… ». Dans Beauty and the beast, c’est un peu le même principe, David Eskenazy joue sur les contrastes et fait s’affronter le yin et le yang. Il explique: « C’est une compo en sept temps. Tout est construit sur une espèce d’ostinato un peu rock qu’on joue au début, puis qu’on rejoue en le modifiant de plein de façons différentes. A un moment le début du cycle harmonique se retrouve même au milieu. j’aime bien ces petits jeux de constructions…mais j’aime surtout quand ça ne se voit pas! » dit il, avec un peu d’inquiétude dans la voix, comme un marionettiste qui se serait laissé à aller à trop parler de fils, de cordes, de cables.
Parmi les très beaux moments du trio, je retiens également celui, sur Michel Strogoff, je crois, où les nuances que trouve le pianiste dans les pianissimo donnent le sentiment d’un clavier que l’on entend dans le lointain, tandis que la contrebasse est présente par vagues, comme si les deux musiciens se livraient à un intrigant jeu de présence-absence. Un beau trio , qui a su se construire un chemin original, et inventer une densité poétique qui lui est propre.

JF Mondot

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Mardi dernier, le trio de David Eskenazy donnait un suberbe concert au Sunside à l’occasion de la sortie de leur deuxième disque Longing for Gravity (chez ophelia-records, tous renseignements sur www.david-eskenazy-trio.com )
David Eskenazy (contrebasse), Clément Griffault (piano), Julien Grégoire (batterie), Le Sunside, 13 décembre 2016

La première chose qui me frappe dans ce trio de jeunes musiciens, c’est la forte complémentarité entre David Eskenazy, contrebassiste et compositeur, et son pianiste Clément Griffault. Eskenazy sait lester ses notes, et leur conférer poids, volume, relief. Il parvient ainsi à une intensité très forte sans se départir jamais d’une grande sobriété. Il apporte un ancrage terrien et organique qui est quasiment un manifeste esthétique: On retrouve en effet cette dimension dans plusieurs titres de l’album (Tellur, Tectonique intérieure) et surtout dans le titre, Longing for Gravity, avec cette double dimension de la gravité: à la fois la force d’attraction qui fait tomber des pommes sur le chapeau d’Isaac Newton et main glacée qui serre les gorges et enrhume les coeurs.
Quant au pianiste Clément Griffault, il a épaté tous les auditeurs présents ce soir-là au Sunside. Il sait l’art de l’apesanteur et de la note suspendue. Il joue avec le silence comme on jouerait avec le feu. Il a des rubatos à mourir, et des nuances incroyables dans ses pianissimo, comme un peintre qui serait capable d’étendre sa palette chromatique jusqu’à l’ultra-violet. A certains moment, c’est si fin et si subtil, c’est si lyrique et si fragile, que l’on se demande s’il s’agit de piano joué ou de piano rêvé. Quant au batteur, Julien Grégoire, il s’insère entre la terre et le ciel avec beaucoup de liberté et de finesse, partage avec ses collègues le refus de la note ou du geste de trop. Il a de merveilleuses trouvailles poético-rythmiques au début du morceau « Dialogue avec les vents d’en haut ».
La répartition des rôles entre les trois musiciens est assez limpide. David Eskenazy, compositeur de tous les morceaux, a l’élégance de ne pas se tailler la part du lion. Il met au contraire très en avant son pianiste (qui a beaucoup de parties écrites) et lâche la bride à son batteur Julien Grégoire, électron libre du trio. Le contrebassiste se situe à mi-chemin de la liberté conditionnelle octroyé à son pianiste et du blanc-seing accordé à son batteur. Tous trois jouent une musique dense, compact, tendue, pleine de complexités harmoniques et rythmiques cachées, avec un goût prononcé pour les virages en épingles à cheveux. C’est le cas dans Bretagne, le premier morceau joué par le trio, qui s’apparente à une sorte de squash musical, avec ces sprints intenses et nerveux qui naissent sous les doigts du pianiste Clément Griffault, avant que la dimension musculaire ne bascule progressivement dans une sorte d’alanguissement. Après le concert il raconte le principe de composition de ce titre: « On a voulu adopter ce côté un peu énervé, un peu métal si on veut, et le faire déboucher sur un truc plus lent avec la basse qui fait des phrases élastiques, un peu rubatos. C’est un peu le principe de certains morceaux de musique contemporaine. J’utilise un quadrillage rythmique très rigoureux mais sans barre de mesure. Ca permet d’insérer des phrases lentes dans un tempo très rapide. Du coup, on a une respiration dans un truc qui groove… ». Dans Beauty and the beast, c’est un peu le même principe, David Eskenazy joue sur les contrastes et fait s’affronter le yin et le yang. Il explique: « C’est une compo en sept temps. Tout est construit sur une espèce d’ostinato un peu rock qu’on joue au début, puis qu’on rejoue en le modifiant de plein de façons différentes. A un moment le début du cycle harmonique se retrouve même au milieu. j’aime bien ces petits jeux de constructions…mais j’aime surtout quand ça ne se voit pas! » dit il, avec un peu d’inquiétude dans la voix, comme un marionettiste qui se serait laissé à aller à trop parler de fils, de cordes, de cables.
Parmi les très beaux moments du trio, je retiens également celui, sur Michel Strogoff, je crois, où les nuances que trouve le pianiste dans les pianissimo donnent le sentiment d’un clavier que l’on entend dans le lointain, tandis que la contrebasse est présente par vagues, comme si les deux musiciens se livraient à un intrigant jeu de présence-absence. Un beau trio , qui a su se construire un chemin original, et inventer une densité poétique qui lui est propre.

JF Mondot

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Mardi dernier, le trio de David Eskenazy donnait un suberbe concert au Sunside à l’occasion de la sortie de leur deuxième disque Longing for Gravity (chez ophelia-records, tous renseignements sur www.david-eskenazy-trio.com )
David Eskenazy (contrebasse), Clément Griffault (piano), Julien Grégoire (batterie), Le Sunside, 13 décembre 2016

La première chose qui me frappe dans ce trio de jeunes musiciens, c’est la forte complémentarité entre David Eskenazy, contrebassiste et compositeur, et son pianiste Clément Griffault. Eskenazy sait lester ses notes, et leur conférer poids, volume, relief. Il parvient ainsi à une intensité très forte sans se départir jamais d’une grande sobriété. Il apporte un ancrage terrien et organique qui est quasiment un manifeste esthétique: On retrouve en effet cette dimension dans plusieurs titres de l’album (Tellur, Tectonique intérieure) et surtout dans le titre, Longing for Gravity, avec cette double dimension de la gravité: à la fois la force d’attraction qui fait tomber des pommes sur le chapeau d’Isaac Newton et main glacée qui serre les gorges et enrhume les coeurs.
Quant au pianiste Clément Griffault, il a épaté tous les auditeurs présents ce soir-là au Sunside. Il sait l’art de l’apesanteur et de la note suspendue. Il joue avec le silence comme on jouerait avec le feu. Il a des rubatos à mourir, et des nuances incroyables dans ses pianissimo, comme un peintre qui serait capable d’étendre sa palette chromatique jusqu’à l’ultra-violet. A certains moment, c’est si fin et si subtil, c’est si lyrique et si fragile, que l’on se demande s’il s’agit de piano joué ou de piano rêvé. Quant au batteur, Julien Grégoire, il s’insère entre la terre et le ciel avec beaucoup de liberté et de finesse, partage avec ses collègues le refus de la note ou du geste de trop. Il a de merveilleuses trouvailles poético-rythmiques au début du morceau « Dialogue avec les vents d’en haut ».
La répartition des rôles entre les trois musiciens est assez limpide. David Eskenazy, compositeur de tous les morceaux, a l’élégance de ne pas se tailler la part du lion. Il met au contraire très en avant son pianiste (qui a beaucoup de parties écrites) et lâche la bride à son batteur Julien Grégoire, électron libre du trio. Le contrebassiste se situe à mi-chemin de la liberté conditionnelle octroyé à son pianiste et du blanc-seing accordé à son batteur. Tous trois jouent une musique dense, compact, tendue, pleine de complexités harmoniques et rythmiques cachées, avec un goût prononcé pour les virages en épingles à cheveux. C’est le cas dans Bretagne, le premier morceau joué par le trio, qui s’apparente à une sorte de squash musical, avec ces sprints intenses et nerveux qui naissent sous les doigts du pianiste Clément Griffault, avant que la dimension musculaire ne bascule progressivement dans une sorte d’alanguissement. Après le concert il raconte le principe de composition de ce titre: « On a voulu adopter ce côté un peu énervé, un peu métal si on veut, et le faire déboucher sur un truc plus lent avec la basse qui fait des phrases élastiques, un peu rubatos. C’est un peu le principe de certains morceaux de musique contemporaine. J’utilise un quadrillage rythmique très rigoureux mais sans barre de mesure. Ca permet d’insérer des phrases lentes dans un tempo très rapide. Du coup, on a une respiration dans un truc qui groove… ». Dans Beauty and the beast, c’est un peu le même principe, David Eskenazy joue sur les contrastes et fait s’affronter le yin et le yang. Il explique: « C’est une compo en sept temps. Tout est construit sur une espèce d’ostinato un peu rock qu’on joue au début, puis qu’on rejoue en le modifiant de plein de façons différentes. A un moment le début du cycle harmonique se retrouve même au milieu. j’aime bien ces petits jeux de constructions…mais j’aime surtout quand ça ne se voit pas! » dit il, avec un peu d’inquiétude dans la voix, comme un marionettiste qui se serait laissé à aller à trop parler de fils, de cordes, de cables.
Parmi les très beaux moments du trio, je retiens également celui, sur Michel Strogoff, je crois, où les nuances que trouve le pianiste dans les pianissimo donnent le sentiment d’un clavier que l’on entend dans le lointain, tandis que la contrebasse est présente par vagues, comme si les deux musiciens se livraient à un intrigant jeu de présence-absence. Un beau trio , qui a su se construire un chemin original, et inventer une densité poétique qui lui est propre.

JF Mondot

|portrait-david-eskenazy-carré-HD

Mardi dernier, le trio de David Eskenazy donnait un suberbe concert au Sunside à l’occasion de la sortie de leur deuxième disque Longing for Gravity (chez ophelia-records, tous renseignements sur www.david-eskenazy-trio.com )
David Eskenazy (contrebasse), Clément Griffault (piano), Julien Grégoire (batterie), Le Sunside, 13 décembre 2016

La première chose qui me frappe dans ce trio de jeunes musiciens, c’est la forte complémentarité entre David Eskenazy, contrebassiste et compositeur, et son pianiste Clément Griffault. Eskenazy sait lester ses notes, et leur conférer poids, volume, relief. Il parvient ainsi à une intensité très forte sans se départir jamais d’une grande sobriété. Il apporte un ancrage terrien et organique qui est quasiment un manifeste esthétique: On retrouve en effet cette dimension dans plusieurs titres de l’album (Tellur, Tectonique intérieure) et surtout dans le titre, Longing for Gravity, avec cette double dimension de la gravité: à la fois la force d’attraction qui fait tomber des pommes sur le chapeau d’Isaac Newton et main glacée qui serre les gorges et enrhume les coeurs.
Quant au pianiste Clément Griffault, il a épaté tous les auditeurs présents ce soir-là au Sunside. Il sait l’art de l’apesanteur et de la note suspendue. Il joue avec le silence comme on jouerait avec le feu. Il a des rubatos à mourir, et des nuances incroyables dans ses pianissimo, comme un peintre qui serait capable d’étendre sa palette chromatique jusqu’à l’ultra-violet. A certains moment, c’est si fin et si subtil, c’est si lyrique et si fragile, que l’on se demande s’il s’agit de piano joué ou de piano rêvé. Quant au batteur, Julien Grégoire, il s’insère entre la terre et le ciel avec beaucoup de liberté et de finesse, partage avec ses collègues le refus de la note ou du geste de trop. Il a de merveilleuses trouvailles poético-rythmiques au début du morceau « Dialogue avec les vents d’en haut ».
La répartition des rôles entre les trois musiciens est assez limpide. David Eskenazy, compositeur de tous les morceaux, a l’élégance de ne pas se tailler la part du lion. Il met au contraire très en avant son pianiste (qui a beaucoup de parties écrites) et lâche la bride à son batteur Julien Grégoire, électron libre du trio. Le contrebassiste se situe à mi-chemin de la liberté conditionnelle octroyé à son pianiste et du blanc-seing accordé à son batteur. Tous trois jouent une musique dense, compact, tendue, pleine de complexités harmoniques et rythmiques cachées, avec un goût prononcé pour les virages en épingles à cheveux. C’est le cas dans Bretagne, le premier morceau joué par le trio, qui s’apparente à une sorte de squash musical, avec ces sprints intenses et nerveux qui naissent sous les doigts du pianiste Clément Griffault, avant que la dimension musculaire ne bascule progressivement dans une sorte d’alanguissement. Après le concert il raconte le principe de composition de ce titre: « On a voulu adopter ce côté un peu énervé, un peu métal si on veut, et le faire déboucher sur un truc plus lent avec la basse qui fait des phrases élastiques, un peu rubatos. C’est un peu le principe de certains morceaux de musique contemporaine. J’utilise un quadrillage rythmique très rigoureux mais sans barre de mesure. Ca permet d’insérer des phrases lentes dans un tempo très rapide. Du coup, on a une respiration dans un truc qui groove… ». Dans Beauty and the beast, c’est un peu le même principe, David Eskenazy joue sur les contrastes et fait s’affronter le yin et le yang. Il explique: « C’est une compo en sept temps. Tout est construit sur une espèce d’ostinato un peu rock qu’on joue au début, puis qu’on rejoue en le modifiant de plein de façons différentes. A un moment le début du cycle harmonique se retrouve même au milieu. j’aime bien ces petits jeux de constructions…mais j’aime surtout quand ça ne se voit pas! » dit il, avec un peu d’inquiétude dans la voix, comme un marionettiste qui se serait laissé à aller à trop parler de fils, de cordes, de cables.
Parmi les très beaux moments du trio, je retiens également celui, sur Michel Strogoff, je crois, où les nuances que trouve le pianiste dans les pianissimo donnent le sentiment d’un clavier que l’on entend dans le lointain, tandis que la contrebasse est présente par vagues, comme si les deux musiciens se livraient à un intrigant jeu de présence-absence. Un beau trio , qui a su se construire un chemin original, et inventer une densité poétique qui lui est propre.

JF Mondot