Route du blues. (1) Memphis ville Soul Man & Woman
« Regardez un peu la bagnole que je me suis payé !.. » À Memphis en visitant Graceland ou le Musée Stax on tombe à un moment où un autre sur l’auto de rêve, signe clinquant et signature de la réussite de la star. Une Rolls Phantom IV pour Elvis le King, une Cadillac calandre et chromes en or massif pour Isaac Hayes, le Black Moses.
La ville semble endormie dans la chaleur moite de cette fin de semaine. Au bord du Mississippi, dans le parc emménagés entre les deux ponts qui marquent la frontière avec l’Arkansas on ne rencontre que quelques touristes. Le steamboat, grand bateau blanc aux roues à aube prétextes attend des clients aux abonnés absents. Plus loin, sur le même quai à l’entrée du Centre d’Information de la ville, l’immense statue sépia donne déjà rendez vous avec BB King et son immortelle Gibson, Lucille. Le guitariste disparu, icône du Delta Blues, de la ville, du conté, de l’Etat impose sa présence à la ville, le conté, tout l’Etat innervé par le fleuve. Du fleuve immense justement, on remonte (physiquement) vers dowtown pour retrouver Beale Street, coeur battant de la ville. La rue demeure étrangement calme là encore. Accompagnés sans le savoir avec la présence habituelle en ce lieu de deux ou trois voitures de police, quelques spectateurs locaux ou non alanguis sur le bitume du Square WC Hardy, trompettiste ici sacralisé père du blues, écoutent plus ou moins attentivement douze mesures répétées en boucle. Et le traditionnel chant chaud de la voix qui va avec. Au passage Il faut prendre le temps d’une visite à l’expo permanente du photographe Ernest C Withers. Les photos en noir et blanc, saisissantes, pleine d’émotion permettent de relier le blues, ses héros de Memphis à la petite et grande histoire sociale ou politique de cette musique à celle de la ségrégation, de de la lutte pour les droits civiques de la communauté noire du sud de l’Amérique des sixties. De relier logiquement, naturellement, intelligemment le sort de BB à celui de Martin Luther du même nom.
L’heure est venue, sur Beale Street toujours évidemment mais cette fois avec la foule au rendez vous, d’entrer dans les murs du BB King Blues Club. Au programme ce soir, concert d’un Blues All Stars. Parterre comble -sauf un carré de piste réservé à la danse au pied du podium-, tables toutes occupées à l’étage surplombant la scène. Un annonceur chargé de la retape clame haut le nom de l’établissement, celui du fondateur (exactement le même process qu’auparavant lors des concerts du guitariste avec cette drôle de façon de scander séparément les syllabes de son nom précédé de l’éternel titre « Mister B…B…KIng ! ») Quartet classique rehaussé de deux cuivres. Produit carré, travaillé sans y paraître. La musique sonne soul autant que blues, coloration naturelle par moments pixellisée funk: manière plus efficacité garantie, la partie se joue en deux sets gagnants, standards du genre parsemés de titres du « maitre “…avec en bonus le le piment d’un moment particulier fixé en champ/contrechamp tel un making off sur un tournage. Sur la piste réservée s’affairaient au premier set les danseurs électrisés par le rythme, mélange de couples noirs ou blancs. Dès le début du second set une trentaine de nouveaux entrants envahissent et mobilisent tout l’espace danse. Plutôt jeunes ceux la, arrangées et cravatés, verre à la main pour se déhancher et danser. Mais tous blancs pour l’occasion. Une fête de mariage sans doute. Un bruit de verre cassé soudain. Un espace se fait sur la piste, certains et surtout certaines s’affairent à dénicher puis ramasser tant bien que mal les bouts de verre. Quant soudain surgi de nulle part survient un serveur plongé dans un drôle de ballet. Élancé, vif, élégant il manie de concert et avec virtuosité une pelle et une brosse pour cueillir les bouts de verre…tout en se déplaçant en rythme sous la musique en courant continu funky à souhait il fait glisser ses pieds alternativement, chacun sur une serpillère humide. Mode Fred Astaire du nettoyage express slalomant entre les danseurs en action festive. Un danseur étoile black impromptu au beau milieu de fêtards whasps à souhait !
Ceci conté, retour à la musique. Dans l’orchestre réuni pour l’occasion ressortent deux chefs de file. Un jeune chanteur d’abord Jérome Chismons, aussi à l’aise sur les ballades qu’à manier boogie-woogie woogie ou climats soul. Bon dans le choix des couleurs à donner à la voix, à l’aise dans l’exercice de l’entertainement, proximité avec le public oblige. Même qualité dans le métier du guitariste, avec un indéniable brio quelque soit le contexte, feeling de blues ballade ou tempo en accéléré. Harold Smith a fait le chemin inverse des bluesmen d’autrefois partis du Delta pour émigrer vers le nord « Je suis de Chicago mais je suis descendu à Memphis pour une question de boulot. Ici dans la ville j’ai davantage d’occasions de jouer. J’ai joué dans l’orchestre de BB King. Je connaissais donc son club. Ici on touche à l’essentiel de la black music : blues, soul, funk…Mais bon moi ce que j’adore, j’avoue c’est le be bop! Des guitaristes comme Barney Kessel, Herb Ellis, Joe Pass me font rêver Je jouais souvent ce type de musique à Chicago. Mais bon fallait assurer le travail d’abord. Alors je suis parti pour Memphis » Pour terminer le set, loin des notes coulées de ses héros boppers cool le guitariste déchaîne un torrent de phrases électriques saturées sur Purple rain, dans la trace de Prince et Hendrix dont il se régale à reproduire in extenso l’hymne US Star Spangle Banner avec force distorsion et effet feed back. Sur la piste, collés serrés les invités du mariage lèvent tous leurs portable en mode d’adhésion ou reconnaissance.
À Memphis ou ailleurs aux États Unis dans les musées consacrés à un artiste il faut du temps pour parcourir toutes les étapes, s’arrêter devant chaque stand, lire toutes les notices, écouter les extraits de disques ou CD, regarder toutes les vidéos, les témoignages sur la vie du sujet traité. On sent les moyens. La documentation réunie est énorme. La surface nécessaire imposante. On s’étonne du côté vieillot désuet des machines du studio Sun Records dans lequel Sam Phillips producteur un peu sorcier à magnifié la musique de de Presley, Carl Perkins et lancé Ike Turner. On sort rincé du kilomètre de couloir au Stax Museum perdu dans une zone pavillonnaire loin du Mississippî au bout de mille images fixes ou animées, autant de sons, des milliers d’objets pour raconter l’histoire de ce label mythique qui a fait les soul men ou women de Rufus Thomas à Otis Redding en passant par Booker T and the MG’S ou Arteha Franklin. On revient à la lumière et la chaleur d’un après midi moite comme hébété, troublé des clichés ingurgités des centaines de mètres carrés durant peuplés des flashs de la vie de l’icône du rock and roll dans ce Graceland passé de l’état de propriété d’Elvis à un mémorial à la gloire éternelle du King. On quitte enfin le Civil Rights Museum imprégné d’émotions et de questions sur cette décade entre années soixante et soixante dix ou l’Amérique a tenté d’exorciser entre violence et mobilisation citoyenne pacifique un trop plein de ségrégation raciale un siècle après l’abolition de l’esclavage. Avec pour image symbole, la fenêtre de la salle de bain d’un appartement minable d’où le tireur a ciblé Martin Luther King se reposant, sur le balcon de sa chambre à l’hotel Lorraine d’un meeting harassant dans la vile en faveur des droits des afro-américains. Quelques minutes avant de mourrir sous les balles il venait de demander à un ami de lui faire écouter une chanson d’un disque Stax qu’il aimait particulièrement…
Robert Latxague
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« Regardez un peu la bagnole que je me suis payé !.. » À Memphis en visitant Graceland ou le Musée Stax on tombe à un moment où un autre sur l’auto de rêve, signe clinquant et signature de la réussite de la star. Une Rolls Phantom IV pour Elvis le King, une Cadillac calandre et chromes en or massif pour Isaac Hayes, le Black Moses.
La ville semble endormie dans la chaleur moite de cette fin de semaine. Au bord du Mississippi, dans le parc emménagés entre les deux ponts qui marquent la frontière avec l’Arkansas on ne rencontre que quelques touristes. Le steamboat, grand bateau blanc aux roues à aube prétextes attend des clients aux abonnés absents. Plus loin, sur le même quai à l’entrée du Centre d’Information de la ville, l’immense statue sépia donne déjà rendez vous avec BB King et son immortelle Gibson, Lucille. Le guitariste disparu, icône du Delta Blues, de la ville, du conté, de l’Etat impose sa présence à la ville, le conté, tout l’Etat innervé par le fleuve. Du fleuve immense justement, on remonte (physiquement) vers dowtown pour retrouver Beale Street, coeur battant de la ville. La rue demeure étrangement calme là encore. Accompagnés sans le savoir avec la présence habituelle en ce lieu de deux ou trois voitures de police, quelques spectateurs locaux ou non alanguis sur le bitume du Square WC Hardy, trompettiste ici sacralisé père du blues, écoutent plus ou moins attentivement douze mesures répétées en boucle. Et le traditionnel chant chaud de la voix qui va avec. Au passage Il faut prendre le temps d’une visite à l’expo permanente du photographe Ernest C Withers. Les photos en noir et blanc, saisissantes, pleine d’émotion permettent de relier le blues, ses héros de Memphis à la petite et grande histoire sociale ou politique de cette musique à celle de la ségrégation, de de la lutte pour les droits civiques de la communauté noire du sud de l’Amérique des sixties. De relier logiquement, naturellement, intelligemment le sort de BB à celui de Martin Luther du même nom.
L’heure est venue, sur Beale Street toujours évidemment mais cette fois avec la foule au rendez vous, d’entrer dans les murs du BB King Blues Club. Au programme ce soir, concert d’un Blues All Stars. Parterre comble -sauf un carré de piste réservé à la danse au pied du podium-, tables toutes occupées à l’étage surplombant la scène. Un annonceur chargé de la retape clame haut le nom de l’établissement, celui du fondateur (exactement le même process qu’auparavant lors des concerts du guitariste avec cette drôle de façon de scander séparément les syllabes de son nom précédé de l’éternel titre « Mister B…B…KIng ! ») Quartet classique rehaussé de deux cuivres. Produit carré, travaillé sans y paraître. La musique sonne soul autant que blues, coloration naturelle par moments pixellisée funk: manière plus efficacité garantie, la partie se joue en deux sets gagnants, standards du genre parsemés de titres du « maitre “…avec en bonus le le piment d’un moment particulier fixé en champ/contrechamp tel un making off sur un tournage. Sur la piste réservée s’affairaient au premier set les danseurs électrisés par le rythme, mélange de couples noirs ou blancs. Dès le début du second set une trentaine de nouveaux entrants envahissent et mobilisent tout l’espace danse. Plutôt jeunes ceux la, arrangées et cravatés, verre à la main pour se déhancher et danser. Mais tous blancs pour l’occasion. Une fête de mariage sans doute. Un bruit de verre cassé soudain. Un espace se fait sur la piste, certains et surtout certaines s’affairent à dénicher puis ramasser tant bien que mal les bouts de verre. Quant soudain surgi de nulle part survient un serveur plongé dans un drôle de ballet. Élancé, vif, élégant il manie de concert et avec virtuosité une pelle et une brosse pour cueillir les bouts de verre…tout en se déplaçant en rythme sous la musique en courant continu funky à souhait il fait glisser ses pieds alternativement, chacun sur une serpillère humide. Mode Fred Astaire du nettoyage express slalomant entre les danseurs en action festive. Un danseur étoile black impromptu au beau milieu de fêtards whasps à souhait !
Ceci conté, retour à la musique. Dans l’orchestre réuni pour l’occasion ressortent deux chefs de file. Un jeune chanteur d’abord Jérome Chismons, aussi à l’aise sur les ballades qu’à manier boogie-woogie woogie ou climats soul. Bon dans le choix des couleurs à donner à la voix, à l’aise dans l’exercice de l’entertainement, proximité avec le public oblige. Même qualité dans le métier du guitariste, avec un indéniable brio quelque soit le contexte, feeling de blues ballade ou tempo en accéléré. Harold Smith a fait le chemin inverse des bluesmen d’autrefois partis du Delta pour émigrer vers le nord « Je suis de Chicago mais je suis descendu à Memphis pour une question de boulot. Ici dans la ville j’ai davantage d’occasions de jouer. J’ai joué dans l’orchestre de BB King. Je connaissais donc son club. Ici on touche à l’essentiel de la black music : blues, soul, funk…Mais bon moi ce que j’adore, j’avoue c’est le be bop! Des guitaristes comme Barney Kessel, Herb Ellis, Joe Pass me font rêver Je jouais souvent ce type de musique à Chicago. Mais bon fallait assurer le travail d’abord. Alors je suis parti pour Memphis » Pour terminer le set, loin des notes coulées de ses héros boppers cool le guitariste déchaîne un torrent de phrases électriques saturées sur Purple rain, dans la trace de Prince et Hendrix dont il se régale à reproduire in extenso l’hymne US Star Spangle Banner avec force distorsion et effet feed back. Sur la piste, collés serrés les invités du mariage lèvent tous leurs portable en mode d’adhésion ou reconnaissance.
À Memphis ou ailleurs aux États Unis dans les musées consacrés à un artiste il faut du temps pour parcourir toutes les étapes, s’arrêter devant chaque stand, lire toutes les notices, écouter les extraits de disques ou CD, regarder toutes les vidéos, les témoignages sur la vie du sujet traité. On sent les moyens. La documentation réunie est énorme. La surface nécessaire imposante. On s’étonne du côté vieillot désuet des machines du studio Sun Records dans lequel Sam Phillips producteur un peu sorcier à magnifié la musique de de Presley, Carl Perkins et lancé Ike Turner. On sort rincé du kilomètre de couloir au Stax Museum perdu dans une zone pavillonnaire loin du Mississippî au bout de mille images fixes ou animées, autant de sons, des milliers d’objets pour raconter l’histoire de ce label mythique qui a fait les soul men ou women de Rufus Thomas à Otis Redding en passant par Booker T and the MG’S ou Arteha Franklin. On revient à la lumière et la chaleur d’un après midi moite comme hébété, troublé des clichés ingurgités des centaines de mètres carrés durant peuplés des flashs de la vie de l’icône du rock and roll dans ce Graceland passé de l’état de propriété d’Elvis à un mémorial à la gloire éternelle du King. On quitte enfin le Civil Rights Museum imprégné d’émotions et de questions sur cette décade entre années soixante et soixante dix ou l’Amérique a tenté d’exorciser entre violence et mobilisation citoyenne pacifique un trop plein de ségrégation raciale un siècle après l’abolition de l’esclavage. Avec pour image symbole, la fenêtre de la salle de bain d’un appartement minable d’où le tireur a ciblé Martin Luther King se reposant, sur le balcon de sa chambre à l’hotel Lorraine d’un meeting harassant dans la vile en faveur des droits des afro-américains. Quelques minutes avant de mourrir sous les balles il venait de demander à un ami de lui faire écouter une chanson d’un disque Stax qu’il aimait particulièrement…
Robert Latxague
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« Regardez un peu la bagnole que je me suis payé !.. » À Memphis en visitant Graceland ou le Musée Stax on tombe à un moment où un autre sur l’auto de rêve, signe clinquant et signature de la réussite de la star. Une Rolls Phantom IV pour Elvis le King, une Cadillac calandre et chromes en or massif pour Isaac Hayes, le Black Moses.
La ville semble endormie dans la chaleur moite de cette fin de semaine. Au bord du Mississippi, dans le parc emménagés entre les deux ponts qui marquent la frontière avec l’Arkansas on ne rencontre que quelques touristes. Le steamboat, grand bateau blanc aux roues à aube prétextes attend des clients aux abonnés absents. Plus loin, sur le même quai à l’entrée du Centre d’Information de la ville, l’immense statue sépia donne déjà rendez vous avec BB King et son immortelle Gibson, Lucille. Le guitariste disparu, icône du Delta Blues, de la ville, du conté, de l’Etat impose sa présence à la ville, le conté, tout l’Etat innervé par le fleuve. Du fleuve immense justement, on remonte (physiquement) vers dowtown pour retrouver Beale Street, coeur battant de la ville. La rue demeure étrangement calme là encore. Accompagnés sans le savoir avec la présence habituelle en ce lieu de deux ou trois voitures de police, quelques spectateurs locaux ou non alanguis sur le bitume du Square WC Hardy, trompettiste ici sacralisé père du blues, écoutent plus ou moins attentivement douze mesures répétées en boucle. Et le traditionnel chant chaud de la voix qui va avec. Au passage Il faut prendre le temps d’une visite à l’expo permanente du photographe Ernest C Withers. Les photos en noir et blanc, saisissantes, pleine d’émotion permettent de relier le blues, ses héros de Memphis à la petite et grande histoire sociale ou politique de cette musique à celle de la ségrégation, de de la lutte pour les droits civiques de la communauté noire du sud de l’Amérique des sixties. De relier logiquement, naturellement, intelligemment le sort de BB à celui de Martin Luther du même nom.
L’heure est venue, sur Beale Street toujours évidemment mais cette fois avec la foule au rendez vous, d’entrer dans les murs du BB King Blues Club. Au programme ce soir, concert d’un Blues All Stars. Parterre comble -sauf un carré de piste réservé à la danse au pied du podium-, tables toutes occupées à l’étage surplombant la scène. Un annonceur chargé de la retape clame haut le nom de l’établissement, celui du fondateur (exactement le même process qu’auparavant lors des concerts du guitariste avec cette drôle de façon de scander séparément les syllabes de son nom précédé de l’éternel titre « Mister B…B…KIng ! ») Quartet classique rehaussé de deux cuivres. Produit carré, travaillé sans y paraître. La musique sonne soul autant que blues, coloration naturelle par moments pixellisée funk: manière plus efficacité garantie, la partie se joue en deux sets gagnants, standards du genre parsemés de titres du « maitre “…avec en bonus le le piment d’un moment particulier fixé en champ/contrechamp tel un making off sur un tournage. Sur la piste réservée s’affairaient au premier set les danseurs électrisés par le rythme, mélange de couples noirs ou blancs. Dès le début du second set une trentaine de nouveaux entrants envahissent et mobilisent tout l’espace danse. Plutôt jeunes ceux la, arrangées et cravatés, verre à la main pour se déhancher et danser. Mais tous blancs pour l’occasion. Une fête de mariage sans doute. Un bruit de verre cassé soudain. Un espace se fait sur la piste, certains et surtout certaines s’affairent à dénicher puis ramasser tant bien que mal les bouts de verre. Quant soudain surgi de nulle part survient un serveur plongé dans un drôle de ballet. Élancé, vif, élégant il manie de concert et avec virtuosité une pelle et une brosse pour cueillir les bouts de verre…tout en se déplaçant en rythme sous la musique en courant continu funky à souhait il fait glisser ses pieds alternativement, chacun sur une serpillère humide. Mode Fred Astaire du nettoyage express slalomant entre les danseurs en action festive. Un danseur étoile black impromptu au beau milieu de fêtards whasps à souhait !
Ceci conté, retour à la musique. Dans l’orchestre réuni pour l’occasion ressortent deux chefs de file. Un jeune chanteur d’abord Jérome Chismons, aussi à l’aise sur les ballades qu’à manier boogie-woogie woogie ou climats soul. Bon dans le choix des couleurs à donner à la voix, à l’aise dans l’exercice de l’entertainement, proximité avec le public oblige. Même qualité dans le métier du guitariste, avec un indéniable brio quelque soit le contexte, feeling de blues ballade ou tempo en accéléré. Harold Smith a fait le chemin inverse des bluesmen d’autrefois partis du Delta pour émigrer vers le nord « Je suis de Chicago mais je suis descendu à Memphis pour une question de boulot. Ici dans la ville j’ai davantage d’occasions de jouer. J’ai joué dans l’orchestre de BB King. Je connaissais donc son club. Ici on touche à l’essentiel de la black music : blues, soul, funk…Mais bon moi ce que j’adore, j’avoue c’est le be bop! Des guitaristes comme Barney Kessel, Herb Ellis, Joe Pass me font rêver Je jouais souvent ce type de musique à Chicago. Mais bon fallait assurer le travail d’abord. Alors je suis parti pour Memphis » Pour terminer le set, loin des notes coulées de ses héros boppers cool le guitariste déchaîne un torrent de phrases électriques saturées sur Purple rain, dans la trace de Prince et Hendrix dont il se régale à reproduire in extenso l’hymne US Star Spangle Banner avec force distorsion et effet feed back. Sur la piste, collés serrés les invités du mariage lèvent tous leurs portable en mode d’adhésion ou reconnaissance.
À Memphis ou ailleurs aux États Unis dans les musées consacrés à un artiste il faut du temps pour parcourir toutes les étapes, s’arrêter devant chaque stand, lire toutes les notices, écouter les extraits de disques ou CD, regarder toutes les vidéos, les témoignages sur la vie du sujet traité. On sent les moyens. La documentation réunie est énorme. La surface nécessaire imposante. On s’étonne du côté vieillot désuet des machines du studio Sun Records dans lequel Sam Phillips producteur un peu sorcier à magnifié la musique de de Presley, Carl Perkins et lancé Ike Turner. On sort rincé du kilomètre de couloir au Stax Museum perdu dans une zone pavillonnaire loin du Mississippî au bout de mille images fixes ou animées, autant de sons, des milliers d’objets pour raconter l’histoire de ce label mythique qui a fait les soul men ou women de Rufus Thomas à Otis Redding en passant par Booker T and the MG’S ou Arteha Franklin. On revient à la lumière et la chaleur d’un après midi moite comme hébété, troublé des clichés ingurgités des centaines de mètres carrés durant peuplés des flashs de la vie de l’icône du rock and roll dans ce Graceland passé de l’état de propriété d’Elvis à un mémorial à la gloire éternelle du King. On quitte enfin le Civil Rights Museum imprégné d’émotions et de questions sur cette décade entre années soixante et soixante dix ou l’Amérique a tenté d’exorciser entre violence et mobilisation citoyenne pacifique un trop plein de ségrégation raciale un siècle après l’abolition de l’esclavage. Avec pour image symbole, la fenêtre de la salle de bain d’un appartement minable d’où le tireur a ciblé Martin Luther King se reposant, sur le balcon de sa chambre à l’hotel Lorraine d’un meeting harassant dans la vile en faveur des droits des afro-américains. Quelques minutes avant de mourrir sous les balles il venait de demander à un ami de lui faire écouter une chanson d’un disque Stax qu’il aimait particulièrement…
Robert Latxague
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« Regardez un peu la bagnole que je me suis payé !.. » À Memphis en visitant Graceland ou le Musée Stax on tombe à un moment où un autre sur l’auto de rêve, signe clinquant et signature de la réussite de la star. Une Rolls Phantom IV pour Elvis le King, une Cadillac calandre et chromes en or massif pour Isaac Hayes, le Black Moses.
La ville semble endormie dans la chaleur moite de cette fin de semaine. Au bord du Mississippi, dans le parc emménagés entre les deux ponts qui marquent la frontière avec l’Arkansas on ne rencontre que quelques touristes. Le steamboat, grand bateau blanc aux roues à aube prétextes attend des clients aux abonnés absents. Plus loin, sur le même quai à l’entrée du Centre d’Information de la ville, l’immense statue sépia donne déjà rendez vous avec BB King et son immortelle Gibson, Lucille. Le guitariste disparu, icône du Delta Blues, de la ville, du conté, de l’Etat impose sa présence à la ville, le conté, tout l’Etat innervé par le fleuve. Du fleuve immense justement, on remonte (physiquement) vers dowtown pour retrouver Beale Street, coeur battant de la ville. La rue demeure étrangement calme là encore. Accompagnés sans le savoir avec la présence habituelle en ce lieu de deux ou trois voitures de police, quelques spectateurs locaux ou non alanguis sur le bitume du Square WC Hardy, trompettiste ici sacralisé père du blues, écoutent plus ou moins attentivement douze mesures répétées en boucle. Et le traditionnel chant chaud de la voix qui va avec. Au passage Il faut prendre le temps d’une visite à l’expo permanente du photographe Ernest C Withers. Les photos en noir et blanc, saisissantes, pleine d’émotion permettent de relier le blues, ses héros de Memphis à la petite et grande histoire sociale ou politique de cette musique à celle de la ségrégation, de de la lutte pour les droits civiques de la communauté noire du sud de l’Amérique des sixties. De relier logiquement, naturellement, intelligemment le sort de BB à celui de Martin Luther du même nom.
L’heure est venue, sur Beale Street toujours évidemment mais cette fois avec la foule au rendez vous, d’entrer dans les murs du BB King Blues Club. Au programme ce soir, concert d’un Blues All Stars. Parterre comble -sauf un carré de piste réservé à la danse au pied du podium-, tables toutes occupées à l’étage surplombant la scène. Un annonceur chargé de la retape clame haut le nom de l’établissement, celui du fondateur (exactement le même process qu’auparavant lors des concerts du guitariste avec cette drôle de façon de scander séparément les syllabes de son nom précédé de l’éternel titre « Mister B…B…KIng ! ») Quartet classique rehaussé de deux cuivres. Produit carré, travaillé sans y paraître. La musique sonne soul autant que blues, coloration naturelle par moments pixellisée funk: manière plus efficacité garantie, la partie se joue en deux sets gagnants, standards du genre parsemés de titres du « maitre “…avec en bonus le le piment d’un moment particulier fixé en champ/contrechamp tel un making off sur un tournage. Sur la piste réservée s’affairaient au premier set les danseurs électrisés par le rythme, mélange de couples noirs ou blancs. Dès le début du second set une trentaine de nouveaux entrants envahissent et mobilisent tout l’espace danse. Plutôt jeunes ceux la, arrangées et cravatés, verre à la main pour se déhancher et danser. Mais tous blancs pour l’occasion. Une fête de mariage sans doute. Un bruit de verre cassé soudain. Un espace se fait sur la piste, certains et surtout certaines s’affairent à dénicher puis ramasser tant bien que mal les bouts de verre. Quant soudain surgi de nulle part survient un serveur plongé dans un drôle de ballet. Élancé, vif, élégant il manie de concert et avec virtuosité une pelle et une brosse pour cueillir les bouts de verre…tout en se déplaçant en rythme sous la musique en courant continu funky à souhait il fait glisser ses pieds alternativement, chacun sur une serpillère humide. Mode Fred Astaire du nettoyage express slalomant entre les danseurs en action festive. Un danseur étoile black impromptu au beau milieu de fêtards whasps à souhait !
Ceci conté, retour à la musique. Dans l’orchestre réuni pour l’occasion ressortent deux chefs de file. Un jeune chanteur d’abord Jérome Chismons, aussi à l’aise sur les ballades qu’à manier boogie-woogie woogie ou climats soul. Bon dans le choix des couleurs à donner à la voix, à l’aise dans l’exercice de l’entertainement, proximité avec le public oblige. Même qualité dans le métier du guitariste, avec un indéniable brio quelque soit le contexte, feeling de blues ballade ou tempo en accéléré. Harold Smith a fait le chemin inverse des bluesmen d’autrefois partis du Delta pour émigrer vers le nord « Je suis de Chicago mais je suis descendu à Memphis pour une question de boulot. Ici dans la ville j’ai davantage d’occasions de jouer. J’ai joué dans l’orchestre de BB King. Je connaissais donc son club. Ici on touche à l’essentiel de la black music : blues, soul, funk…Mais bon moi ce que j’adore, j’avoue c’est le be bop! Des guitaristes comme Barney Kessel, Herb Ellis, Joe Pass me font rêver Je jouais souvent ce type de musique à Chicago. Mais bon fallait assurer le travail d’abord. Alors je suis parti pour Memphis » Pour terminer le set, loin des notes coulées de ses héros boppers cool le guitariste déchaîne un torrent de phrases électriques saturées sur Purple rain, dans la trace de Prince et Hendrix dont il se régale à reproduire in extenso l’hymne US Star Spangle Banner avec force distorsion et effet feed back. Sur la piste, collés serrés les invités du mariage lèvent tous leurs portable en mode d’adhésion ou reconnaissance.
À Memphis ou ailleurs aux États Unis dans les musées consacrés à un artiste il faut du temps pour parcourir toutes les étapes, s’arrêter devant chaque stand, lire toutes les notices, écouter les extraits de disques ou CD, regarder toutes les vidéos, les témoignages sur la vie du sujet traité. On sent les moyens. La documentation réunie est énorme. La surface nécessaire imposante. On s’étonne du côté vieillot désuet des machines du studio Sun Records dans lequel Sam Phillips producteur un peu sorcier à magnifié la musique de de Presley, Carl Perkins et lancé Ike Turner. On sort rincé du kilomètre de couloir au Stax Museum perdu dans une zone pavillonnaire loin du Mississippî au bout de mille images fixes ou animées, autant de sons, des milliers d’objets pour raconter l’histoire de ce label mythique qui a fait les soul men ou women de Rufus Thomas à Otis Redding en passant par Booker T and the MG’S ou Arteha Franklin. On revient à la lumière et la chaleur d’un après midi moite comme hébété, troublé des clichés ingurgités des centaines de mètres carrés durant peuplés des flashs de la vie de l’icône du rock and roll dans ce Graceland passé de l’état de propriété d’Elvis à un mémorial à la gloire éternelle du King. On quitte enfin le Civil Rights Museum imprégné d’émotions et de questions sur cette décade entre années soixante et soixante dix ou l’Amérique a tenté d’exorciser entre violence et mobilisation citoyenne pacifique un trop plein de ségrégation raciale un siècle après l’abolition de l’esclavage. Avec pour image symbole, la fenêtre de la salle de bain d’un appartement minable d’où le tireur a ciblé Martin Luther King se reposant, sur le balcon de sa chambre à l’hotel Lorraine d’un meeting harassant dans la vile en faveur des droits des afro-américains. Quelques minutes avant de mourrir sous les balles il venait de demander à un ami de lui faire écouter une chanson d’un disque Stax qu’il aimait particulièrement…
Robert Latxague