Au New Morning, Carla Bley vs Donald Trump
En compagnie de Chet Doxas et d’un Dave Douglas en très grande forme, Carla Bley a donné un concert vibrant, énergique, avec une véhémence manifestement aiguisée par la situation politique aux Etats-Unis.
Carla Bley (p), Dave Douglas (tp), Steve Swallow (b), Chet Doxas (ts et cl), Jim Doxas (dm), Au New Morning le 20 novembre 2017
Dès le premier morceau, Dave Douglas se sent obligé de se justifier. En Français, il se livre à une mise au point : « Nous ne faisons pas partie des Etats-Uniens qui ont élu le grand orange! ». La situation politique a sans doute compté dans l’envie de Carla Bley de remonter sur son cheval pour une tournée de quelques dates. Et l’on a bien senti dans la suite musicale qu’elle a composée pour l’occasion (nous y reviendrons) à quel point le contexte de l’Amérique trumpienne l’affligeait…
Mais les raisons de ce retour sur scène sont aussi de nature purement musicale. Carla Bley avait été séduite par le groupe Riverside où officient son vieil ami Dave Douglas et le saxophoniste et clarinettiste canadien Chet Doxas. Admirative, elle avait déclaré que cette musique lui rappelait « Ornette Coleman et Don Cherry jouant ensemble » (inestimable compliment). Steve Swallow et Carla Bley se sont donc greffés sur le groupe. Dave Douglas a pris sa plus belle plume pour composer quelques morceaux dédiés à Carla, et hop hop, la petite équipe a fait son baluchon et pris la route.
Ornette Coleman et Don Cherry vraiment? Le jeu de Dave Douglas est très différent de celui de Don Cherry. Mais la description de Carla Bley correspond bien à l’esprit d’une musique où la flamme et la vitalité priment sur les arrangements léchés. Par ailleurs, la complémentarité entre Dave Douglas et Chet Doxas se révèle exceptionnelle dès les premiers morceaux, avec un Dave Douglas volontiers adepte de la ligne claire, tandis que Chet Doxas s’exprime au ténor avec une sorte de surchauffe véhémente, se transformant en geyser d’arpèges en folie, comme s’il voulait embrasser plusieurs chemins harmoniques en même temps. La concision de l’un, l’exubérance de l’autre, ce contraste fonctionne superbement. Quant à Carla Bley et Steve Swallow, ils se glissent à pas feutrés dans cette entente musicale.
Steve Swallow, avec toujours ce son de basse miraculeux, si précis dans les graves, si doux et impérieux à la fois, impose sa présence délicate.
Carla Bley, longtemps complexée par ses aptitudes d’instrumentiste, me fait une impression un peu différente de la dernière fois où je l’avais écoutée. Elle paraît plus confiante en son jeu, plus fluide, avec un swing gracieux et délicat qui me semble-t-il se réfère plus à Hank Jones qu’à Monk. Elle joue avec une concentration impressionnante.
Le répertoire se compose donc de classiques de Carla Bley (le merveilleux Ida Lupino ouvre le concert, et Floater le conclut). Entre les deux, des compositions de Dave Douglas (Now and Again, View from a bird, Milieu Song, Incremental Tango). Dans tous ces morceaux, on peut entendre Dave Douglas dans une grande variété de registres, capable avec une aisance souveraine de sonner bop, latin, ou même presque New Orleans. Son timbre richement cuivré fait merveille dans les graves (de toute évidence, pour reprendre la distinction de Jacques Réda dans Autobiographie du Jazz, Dave Douglas ressortit de la catégorie des souffleurs de cuivre plutôt que celle des souffleurs de verre).
Au milieu du 2e set, on quitte les compositions de Dave Douglas pour une toute nouvelle suite de Carla Bley (on sait qu’elle adore les suites en trois parties) qui est en réalité sa réaction musicale au contexte politique actuel de l’Amérique. Cela commence par une introduction assez dramatique au piano, puis la mélodie se lève progressivement, avec un incroyable solo de Chet Douglas (poussé par son frère Jim à la batterie), qui donne tout et le reste, passant de l’indignation à la plainte, jusqu’à mimer avec son saxophone des sortes de sanglots, avant qu’une mélodie ne vienne se poser sur cette douleur comme un baume. C’est un sommet de ce concert. A la fin de la pièce, Dave Douglas, ému, glisse à un petit mot à Carla: « Very profound peace! ». Et elle, faisant allusion à l’Amérique trumpienne : « Oh, it’s so sad… ».
Tout au long du concert, Dave Douglas et Chet Doxas n’ont cessé, après leurs chorus, de glisser un oeil du côté de la grande dame longiligne et voûtée, planquée derrière sa frange, en guettant de sa part un sourire, un mot, une approbation. A la fin, ils ont remercié le public du New Morning d’être venus les écouter, mais ne soyons pas dupes: c’est pour elle qu’ils ont joué ce soir.
texte: JF Mondot
Dessins: Annie-Claire Alvoët (autres dessins, gravures, peintures, sur le jazz ou d’autres sujets, à découvrir sur son site www.annie-claire.com ceux qui souhaiteraient acquérir un des dessins figurant sur ce blog peuvent s’adresser à la dessinatrice à l’adresse suivante: annie_claire@hotmail.com Prix modestes sauf pour les DRH et les taxidermistes;
En compagnie de Chet Doxas et d’un Dave Douglas en très grande forme, Carla Bley a donné un concert vibrant, énergique, avec une véhémence manifestement aiguisée par la situation politique aux Etats-Unis.
Carla Bley (p), Dave Douglas (tp), Steve Swallow (b), Chet Doxas (ts et cl), Jim Doxas (dm), Au New Morning le 20 novembre 2017
Dès le premier morceau, Dave Douglas se sent obligé de se justifier. En Français, il se livre à une mise au point : « Nous ne faisons pas partie des Etats-Uniens qui ont élu le grand orange! ». La situation politique a sans doute compté dans l’envie de Carla Bley de remonter sur son cheval pour une tournée de quelques dates. Et l’on a bien senti dans la suite musicale qu’elle a composée pour l’occasion (nous y reviendrons) à quel point le contexte de l’Amérique trumpienne l’affligeait…
Mais les raisons de ce retour sur scène sont aussi de nature purement musicale. Carla Bley avait été séduite par le groupe Riverside où officient son vieil ami Dave Douglas et le saxophoniste et clarinettiste canadien Chet Doxas. Admirative, elle avait déclaré que cette musique lui rappelait « Ornette Coleman et Don Cherry jouant ensemble » (inestimable compliment). Steve Swallow et Carla Bley se sont donc greffés sur le groupe. Dave Douglas a pris sa plus belle plume pour composer quelques morceaux dédiés à Carla, et hop hop, la petite équipe a fait son baluchon et pris la route.
Ornette Coleman et Don Cherry vraiment? Le jeu de Dave Douglas est très différent de celui de Don Cherry. Mais la description de Carla Bley correspond bien à l’esprit d’une musique où la flamme et la vitalité priment sur les arrangements léchés. Par ailleurs, la complémentarité entre Dave Douglas et Chet Doxas se révèle exceptionnelle dès les premiers morceaux, avec un Dave Douglas volontiers adepte de la ligne claire, tandis que Chet Doxas s’exprime au ténor avec une sorte de surchauffe véhémente, se transformant en geyser d’arpèges en folie, comme s’il voulait embrasser plusieurs chemins harmoniques en même temps. La concision de l’un, l’exubérance de l’autre, ce contraste fonctionne superbement. Quant à Carla Bley et Steve Swallow, ils se glissent à pas feutrés dans cette entente musicale.
Steve Swallow, avec toujours ce son de basse miraculeux, si précis dans les graves, si doux et impérieux à la fois, impose sa présence délicate.
Carla Bley, longtemps complexée par ses aptitudes d’instrumentiste, me fait une impression un peu différente de la dernière fois où je l’avais écoutée. Elle paraît plus confiante en son jeu, plus fluide, avec un swing gracieux et délicat qui me semble-t-il se réfère plus à Hank Jones qu’à Monk. Elle joue avec une concentration impressionnante.
Le répertoire se compose donc de classiques de Carla Bley (le merveilleux Ida Lupino ouvre le concert, et Floater le conclut). Entre les deux, des compositions de Dave Douglas (Now and Again, View from a bird, Milieu Song, Incremental Tango). Dans tous ces morceaux, on peut entendre Dave Douglas dans une grande variété de registres, capable avec une aisance souveraine de sonner bop, latin, ou même presque New Orleans. Son timbre richement cuivré fait merveille dans les graves (de toute évidence, pour reprendre la distinction de Jacques Réda dans Autobiographie du Jazz, Dave Douglas ressortit de la catégorie des souffleurs de cuivre plutôt que celle des souffleurs de verre).
Au milieu du 2e set, on quitte les compositions de Dave Douglas pour une toute nouvelle suite de Carla Bley (on sait qu’elle adore les suites en trois parties) qui est en réalité sa réaction musicale au contexte politique actuel de l’Amérique. Cela commence par une introduction assez dramatique au piano, puis la mélodie se lève progressivement, avec un incroyable solo de Chet Douglas (poussé par son frère Jim à la batterie), qui donne tout et le reste, passant de l’indignation à la plainte, jusqu’à mimer avec son saxophone des sortes de sanglots, avant qu’une mélodie ne vienne se poser sur cette douleur comme un baume. C’est un sommet de ce concert. A la fin de la pièce, Dave Douglas, ému, glisse à un petit mot à Carla: « Very profound peace! ». Et elle, faisant allusion à l’Amérique trumpienne : « Oh, it’s so sad… ».
Tout au long du concert, Dave Douglas et Chet Doxas n’ont cessé, après leurs chorus, de glisser un oeil du côté de la grande dame longiligne et voûtée, planquée derrière sa frange, en guettant de sa part un sourire, un mot, une approbation. A la fin, ils ont remercié le public du New Morning d’être venus les écouter, mais ne soyons pas dupes: c’est pour elle qu’ils ont joué ce soir.
texte: JF Mondot
Dessins: Annie-Claire Alvoët (autres dessins, gravures, peintures, sur le jazz ou d’autres sujets, à découvrir sur son site www.annie-claire.com ceux qui souhaiteraient acquérir un des dessins figurant sur ce blog peuvent s’adresser à la dessinatrice à l’adresse suivante: annie_claire@hotmail.com Prix modestes sauf pour les DRH et les taxidermistes;
En compagnie de Chet Doxas et d’un Dave Douglas en très grande forme, Carla Bley a donné un concert vibrant, énergique, avec une véhémence manifestement aiguisée par la situation politique aux Etats-Unis.
Carla Bley (p), Dave Douglas (tp), Steve Swallow (b), Chet Doxas (ts et cl), Jim Doxas (dm), Au New Morning le 20 novembre 2017
Dès le premier morceau, Dave Douglas se sent obligé de se justifier. En Français, il se livre à une mise au point : « Nous ne faisons pas partie des Etats-Uniens qui ont élu le grand orange! ». La situation politique a sans doute compté dans l’envie de Carla Bley de remonter sur son cheval pour une tournée de quelques dates. Et l’on a bien senti dans la suite musicale qu’elle a composée pour l’occasion (nous y reviendrons) à quel point le contexte de l’Amérique trumpienne l’affligeait…
Mais les raisons de ce retour sur scène sont aussi de nature purement musicale. Carla Bley avait été séduite par le groupe Riverside où officient son vieil ami Dave Douglas et le saxophoniste et clarinettiste canadien Chet Doxas. Admirative, elle avait déclaré que cette musique lui rappelait « Ornette Coleman et Don Cherry jouant ensemble » (inestimable compliment). Steve Swallow et Carla Bley se sont donc greffés sur le groupe. Dave Douglas a pris sa plus belle plume pour composer quelques morceaux dédiés à Carla, et hop hop, la petite équipe a fait son baluchon et pris la route.
Ornette Coleman et Don Cherry vraiment? Le jeu de Dave Douglas est très différent de celui de Don Cherry. Mais la description de Carla Bley correspond bien à l’esprit d’une musique où la flamme et la vitalité priment sur les arrangements léchés. Par ailleurs, la complémentarité entre Dave Douglas et Chet Doxas se révèle exceptionnelle dès les premiers morceaux, avec un Dave Douglas volontiers adepte de la ligne claire, tandis que Chet Doxas s’exprime au ténor avec une sorte de surchauffe véhémente, se transformant en geyser d’arpèges en folie, comme s’il voulait embrasser plusieurs chemins harmoniques en même temps. La concision de l’un, l’exubérance de l’autre, ce contraste fonctionne superbement. Quant à Carla Bley et Steve Swallow, ils se glissent à pas feutrés dans cette entente musicale.
Steve Swallow, avec toujours ce son de basse miraculeux, si précis dans les graves, si doux et impérieux à la fois, impose sa présence délicate.
Carla Bley, longtemps complexée par ses aptitudes d’instrumentiste, me fait une impression un peu différente de la dernière fois où je l’avais écoutée. Elle paraît plus confiante en son jeu, plus fluide, avec un swing gracieux et délicat qui me semble-t-il se réfère plus à Hank Jones qu’à Monk. Elle joue avec une concentration impressionnante.
Le répertoire se compose donc de classiques de Carla Bley (le merveilleux Ida Lupino ouvre le concert, et Floater le conclut). Entre les deux, des compositions de Dave Douglas (Now and Again, View from a bird, Milieu Song, Incremental Tango). Dans tous ces morceaux, on peut entendre Dave Douglas dans une grande variété de registres, capable avec une aisance souveraine de sonner bop, latin, ou même presque New Orleans. Son timbre richement cuivré fait merveille dans les graves (de toute évidence, pour reprendre la distinction de Jacques Réda dans Autobiographie du Jazz, Dave Douglas ressortit de la catégorie des souffleurs de cuivre plutôt que celle des souffleurs de verre).
Au milieu du 2e set, on quitte les compositions de Dave Douglas pour une toute nouvelle suite de Carla Bley (on sait qu’elle adore les suites en trois parties) qui est en réalité sa réaction musicale au contexte politique actuel de l’Amérique. Cela commence par une introduction assez dramatique au piano, puis la mélodie se lève progressivement, avec un incroyable solo de Chet Douglas (poussé par son frère Jim à la batterie), qui donne tout et le reste, passant de l’indignation à la plainte, jusqu’à mimer avec son saxophone des sortes de sanglots, avant qu’une mélodie ne vienne se poser sur cette douleur comme un baume. C’est un sommet de ce concert. A la fin de la pièce, Dave Douglas, ému, glisse à un petit mot à Carla: « Very profound peace! ». Et elle, faisant allusion à l’Amérique trumpienne : « Oh, it’s so sad… ».
Tout au long du concert, Dave Douglas et Chet Doxas n’ont cessé, après leurs chorus, de glisser un oeil du côté de la grande dame longiligne et voûtée, planquée derrière sa frange, en guettant de sa part un sourire, un mot, une approbation. A la fin, ils ont remercié le public du New Morning d’être venus les écouter, mais ne soyons pas dupes: c’est pour elle qu’ils ont joué ce soir.
texte: JF Mondot
Dessins: Annie-Claire Alvoët (autres dessins, gravures, peintures, sur le jazz ou d’autres sujets, à découvrir sur son site www.annie-claire.com ceux qui souhaiteraient acquérir un des dessins figurant sur ce blog peuvent s’adresser à la dessinatrice à l’adresse suivante: annie_claire@hotmail.com Prix modestes sauf pour les DRH et les taxidermistes;
En compagnie de Chet Doxas et d’un Dave Douglas en très grande forme, Carla Bley a donné un concert vibrant, énergique, avec une véhémence manifestement aiguisée par la situation politique aux Etats-Unis.
Carla Bley (p), Dave Douglas (tp), Steve Swallow (b), Chet Doxas (ts et cl), Jim Doxas (dm), Au New Morning le 20 novembre 2017
Dès le premier morceau, Dave Douglas se sent obligé de se justifier. En Français, il se livre à une mise au point : « Nous ne faisons pas partie des Etats-Uniens qui ont élu le grand orange! ». La situation politique a sans doute compté dans l’envie de Carla Bley de remonter sur son cheval pour une tournée de quelques dates. Et l’on a bien senti dans la suite musicale qu’elle a composée pour l’occasion (nous y reviendrons) à quel point le contexte de l’Amérique trumpienne l’affligeait…
Mais les raisons de ce retour sur scène sont aussi de nature purement musicale. Carla Bley avait été séduite par le groupe Riverside où officient son vieil ami Dave Douglas et le saxophoniste et clarinettiste canadien Chet Doxas. Admirative, elle avait déclaré que cette musique lui rappelait « Ornette Coleman et Don Cherry jouant ensemble » (inestimable compliment). Steve Swallow et Carla Bley se sont donc greffés sur le groupe. Dave Douglas a pris sa plus belle plume pour composer quelques morceaux dédiés à Carla, et hop hop, la petite équipe a fait son baluchon et pris la route.
Ornette Coleman et Don Cherry vraiment? Le jeu de Dave Douglas est très différent de celui de Don Cherry. Mais la description de Carla Bley correspond bien à l’esprit d’une musique où la flamme et la vitalité priment sur les arrangements léchés. Par ailleurs, la complémentarité entre Dave Douglas et Chet Doxas se révèle exceptionnelle dès les premiers morceaux, avec un Dave Douglas volontiers adepte de la ligne claire, tandis que Chet Doxas s’exprime au ténor avec une sorte de surchauffe véhémente, se transformant en geyser d’arpèges en folie, comme s’il voulait embrasser plusieurs chemins harmoniques en même temps. La concision de l’un, l’exubérance de l’autre, ce contraste fonctionne superbement. Quant à Carla Bley et Steve Swallow, ils se glissent à pas feutrés dans cette entente musicale.
Steve Swallow, avec toujours ce son de basse miraculeux, si précis dans les graves, si doux et impérieux à la fois, impose sa présence délicate.
Carla Bley, longtemps complexée par ses aptitudes d’instrumentiste, me fait une impression un peu différente de la dernière fois où je l’avais écoutée. Elle paraît plus confiante en son jeu, plus fluide, avec un swing gracieux et délicat qui me semble-t-il se réfère plus à Hank Jones qu’à Monk. Elle joue avec une concentration impressionnante.
Le répertoire se compose donc de classiques de Carla Bley (le merveilleux Ida Lupino ouvre le concert, et Floater le conclut). Entre les deux, des compositions de Dave Douglas (Now and Again, View from a bird, Milieu Song, Incremental Tango). Dans tous ces morceaux, on peut entendre Dave Douglas dans une grande variété de registres, capable avec une aisance souveraine de sonner bop, latin, ou même presque New Orleans. Son timbre richement cuivré fait merveille dans les graves (de toute évidence, pour reprendre la distinction de Jacques Réda dans Autobiographie du Jazz, Dave Douglas ressortit de la catégorie des souffleurs de cuivre plutôt que celle des souffleurs de verre).
Au milieu du 2e set, on quitte les compositions de Dave Douglas pour une toute nouvelle suite de Carla Bley (on sait qu’elle adore les suites en trois parties) qui est en réalité sa réaction musicale au contexte politique actuel de l’Amérique. Cela commence par une introduction assez dramatique au piano, puis la mélodie se lève progressivement, avec un incroyable solo de Chet Douglas (poussé par son frère Jim à la batterie), qui donne tout et le reste, passant de l’indignation à la plainte, jusqu’à mimer avec son saxophone des sortes de sanglots, avant qu’une mélodie ne vienne se poser sur cette douleur comme un baume. C’est un sommet de ce concert. A la fin de la pièce, Dave Douglas, ému, glisse à un petit mot à Carla: « Very profound peace! ». Et elle, faisant allusion à l’Amérique trumpienne : « Oh, it’s so sad… ».
Tout au long du concert, Dave Douglas et Chet Doxas n’ont cessé, après leurs chorus, de glisser un oeil du côté de la grande dame longiligne et voûtée, planquée derrière sa frange, en guettant de sa part un sourire, un mot, une approbation. A la fin, ils ont remercié le public du New Morning d’être venus les écouter, mais ne soyons pas dupes: c’est pour elle qu’ils ont joué ce soir.
texte: JF Mondot
Dessins: Annie-Claire Alvoët (autres dessins, gravures, peintures, sur le jazz ou d’autres sujets, à découvrir sur son site www.annie-claire.com ceux qui souhaiteraient acquérir un des dessins figurant sur ce blog peuvent s’adresser à la dessinatrice à l’adresse suivante: annie_claire@hotmail.com Prix modestes sauf pour les DRH et les taxidermistes;