L’Espace Carpeaux en tête à tête avec Giovanni Mirabassi
Si “Pensieri Isolati” est l’un de ces nombreux projets qui a commencé de prendre forme pendant le confinement de mars 2020, il y a quelque chose de singulièrement différent dans la façon dont il s’est construit. Giovanni Mirabassi a proposé à ceux qui suivent ses aventures musicales de lui faire parvenir leurs “pensées isolées”, sur les réseaux sociaux, sous forme de textes de toutes sortes, de photographies, vidéos et d’images diverses, publiés sur Instagram et où il a puisé pour créer une partie du répertoire de cet album qui figure parmi les plus beaux de cette année 2021.
En première partie de ce spectacle autant visuel que sonore imaginé avec Malo Lacroix, nous avons assisté à la projection des films d’animation réalisés par les élèves de l’Ecole Estienne en collaboration avec Jazz Eleven, autour de la musique de l’album. Tous plus réussis les uns que les autres, dans un univers onirique et coloré, aérien ou aquatique et oscillant entre une simplicité presque enfantine et une mélancolie claire-obscure, c’est peut-être là une des plus belles façons de marier jazz instrumentale et vidéo, ce qui n’est pas rien pour une musique qui s’est aussi peu investie dans le clip vidéo.
Place au concert proprement dit, tandis que se découvrent les deux écrans qui servent de support à Malo Lacroix : l’un derrière le pianiste, l’autre entre lui et le public. Les projections du vidéaste traversent la salle comme des rayons de soleil transpercent des nuages à l’horizon, et se muent tantôt en album photo d’une touchante simplicité chaleureuse, tantôt en fluides qui évoquent les volutes de l’imaginaire, tandis que l’éclairage scénique, admirablement agencé, illumine le piano d’une façon pittoresque et cinématique.
Au milieu de ce monde de couleurs et de lumières, Giovanni Mirabassi s’est livré à une performance d’exception (avec notamment un Healing Waltz absolument époustouflant), laissant parler les images et la musique et ajoutant à cette sorte d’introspection collective qui a unit la salle, d’une façon autrement plus belle que l’expérience, bien triste et étrange, que nous avons tous partagée il y a déjà plus d’un an. Autant dire que nous ne saurions trop vous conseiller ce spectacle à nul autre pareil, entre cinéma de grande envergure et concert intimiste. Yazid Kouloughli
Photo © Constance Gay / sortiracourbevoie.fr