Jazz en Comminges 2021 (3)
Dimanche 31 octobre à 20h30 au Parc des Expositions du Comminges, Saint-Gaudens (31)
Hugh Coltman « Who’s Happy »
Hugh Coltman : voix ; Gaël Rakotondrabe : claviers ; Raphaël Chassin : batterie ; Freddy Koella : guitare ; Didier Havet : soubassophone ; Jerry Edwards : trombone ; Jerôme Etcheberry : trompette ; Frédéric Couderc : sax, clarinette ; Anne Paceo : batterie.
Assister à un concert de Hugh Coltman c’est un peu comme regarder un film de James Bond à la Nouvelle-Orléans. Le chanteur britannique et son groupe parviennent à faire cohabiter deux énergies à priori contradictoires. La première est véritablement dansante et rappelle les premiers âges du jazz grâce aux claves assurées par le duo soubassophone/batterie et aux improvisations collectives ou parties plus écrites du trio de soufflants. Mais la nature de cette vitalité dansante est très malléable. L’imposant saxophone baryton vient parfois se substituer à la clarinette et la guitare rythmique de Freddy Koella quitte son rôle de « pompe » pour prendre des accents variés, du funky le plus tendu au blues rock urbain dans grandes villes anglaises.
Mais la réelle singularité de ce groupe vient sûrement de son mystère, du côté épique et fantaisiste qui me rappelle l’univers de James Bond à presque chaque morceau. Les accords mélangeant mineur et majeur, la trompette bouchée ainsi que les crescendos et arrêts brusques nous immergent instantanément dans la peau d’un espion en plein cœur de l’action. Il faut dire que Hugh Coltman n’y est pas pour rien. Son jeu d’acteur à la fois comique et dramatique met en valeur une voix entraînante dont la diction précise donne à ses chansons un quelque chose qui vous saisit immédiatement.
Pour le dernier morceau puis le rappel, une invitée de marque est conviée à prendre la batterie. Anne Paceo – assise juste à côté de moi – se lève et rejoint la scène pour un final tout à fait détonnant. On se croirait presque dans « Les Aristochats », la foule danse, frappe et ri tandis que Hugh Coltman s’agite dans tous les sens : à un centimètre du bord de la scène puis la seconde d’après imite le solo de trompette avant d’aller danser frénétiquement contre la batterie de Anne Paceo. La sortie pittoresque des musiciens à la queue leu leu clôt avec humour ce concert et nous permet enfin de reprendre notre souffle.
Dimanche 31 octobre à 20h30 au Parc des Expositions du Comminges, Saint-Gaudens (31)
Nola Spirit Big Band Brass
Dominique Rieux : direction musicale ; David Cayrou : co-direction ; Gead Mulheran : chant ; Tony Amouroux, Dominique Rieux, Cyril Latour : trompettes ; Baptiste Techer, Guillaume Cerretto, Olivier Lachurie : trombones ; Christophe Mouly, Jean Michel Cabrol, Pascal Pezot, David Cayrou : saxophones ; Andre Neufert : batterie ; Gregoire Oboldouieff : basse ; Florent Hortal : guitare ; Thierry Olle : clavier ; Angelique Larqué : danse.
Et du souffle, il va y en avoir, puissant et en grand nombre ! À la vue de cette horde de musiciens (14 d’entrée de jeu, puis 16), je sors par réflexes mes bouchons et me campe fermement devant la scène pour prendre quelques photos. Le décompte se fait entendre et le premier accord nous donne le ton : un énorme son massif, riche et homogène. On dit que la première impression est celle qui reste en mémoire et je sais dès lors que le Nola Spirit Big Band co-dirigé par Dominique Rieux et David Cayrou va nous en mettre plein la vue et plein les oreilles pour le reste de la soirée.
Mais c’était sans compter l’apparition inopinée de la talentueuse danseuse Angie Larquet qui, à travers trois costumes différents, nous fait la démonstration d’un éventail de mouvements à couper le souffle. De la tenue dorée brillant de mille feux et chapeau haut de forme rose à un sobre ensemble noir uni, la danseuse troque tour à tour des pas swingés pour des gestes plus sauvages, presque de combat. L’autre agréable surprise est l’entrée sur scène du crooner anglais Gead Mulheran, véritable showmen qui passe avec facilité et panache du répertoire de la comédie musicale à celui de la variété.
Le set est divisé en deux parties. La première reprend partiellement ou totalement des standards. Mais pour être honnête, le tout est tellement arrangé, agencé, réécrit qu’il est parfois difficile de reconnaître le matériau initial, et cela ne gêne en aucun cas. L’écriture est limpide, les sections s’enchaînent avec facilité entre parties chantées, tutti et solos. De toute manière la machine à swing sert de liant et soutient l’orchestre de bout en bout. La seconde partie est plus tournée vers la variété et nous voilà à taper du pied sur un James Brown revisité façon Brass Band.
Au micro, David Cayrou parle d’énergies positives, de résiliences véhiculées dans la musique de la Nouvelle-Orléans. Je crois que ce dernier concert a rempli son rôle à la perfection en apportant toute la festivité qu’un jazz en orchestre peut donner et en prouvant qu’on peut concilier des matériaux simples et efficaces à des arrangements riches et soignés sans jamais perdre de vue l’objectif principal : la joie à travers la musique !
Nathan Arnoult