Jazz sur le Vif : CHRISTOPHE MARGUET Quartet, MARC COPLAND Trio
Encore une soirée prometteuse du côté de Jazz sur le Vif. Le chroniqueur, distrait, arrive vers 16h30 pour la balance du trio de Marc Copland…. mais elle a eu lieu dès 14h ! C’est au tour du groupe de Christophe Marguet d’officier : ambiance détendue mais studieuse. Le concert s’annonce bien
Christophe Marguet ‘Happy Hours’ pendant la balance)
CHRISTOPHE MARGUET ‘Happy Hours Quartet’
Yoann Loustalot (trompette, bugle), Julien Touéry (piano), Hélène Labarrière (contrebasse), Christophe Marguet (batterie, composition)
Paris, Maison de la Radio (et de la Musique), 27 novembre 2021, 19h30
Le groupe joue le répertoire de son disque éponyme («Happy Hours», label Mélodie en sous-sol / l’autre distribution). Ce CD, qui évoque les heures joyeuses, a été conçu avant la pandémie, mais il est sorti au premier confinement, en mars 2020. Qu’à cela ne tienne : les heures heureuses sont bien là, avec des musiques qui respirent l’espoir, et des compositions élaborées dont la plupart seront dans le registre de la vivacité. La plupart, mais pas toutes : le premier thème, Beauté cachée, est teinté de mélancolie, un registre dans lequel Yoann Loustalot fait mouche, à la trompette comme au bugle. Puis, après une intro de piano lumineuse comme les mélodies folky du disque «Facing You» (Jarrett, 1972), le piano s’emballe, et le solo de trompette, vif lui aussi, garde une couleur nostalgique. Le thème, Dear Don, salue la mémoire de Don Cherry. C’est maintenant un clin d’œil au très vénéré Paul Motian, sur un thème à la hauteur de la référence, et de très beaux échanges entre les solistes. L’évocation suivante se tournera vers le peintre Zao Wou-Ki : introduction mystère, sonorités d’ailleurs, puis le thème prend son essor. Au titre suivant une envolée vertigineuse du piano en trio conduira vers une trompette sereine et lyrique. Toujours la finesse et la musicalité portent ce répertoire aux élans presque irrépressibles, jusqu’à la fin du concert. En rappel, on sera du côté du soul jazz de la fin des années 50, et du premier Hancock, celui de 1962. Une fête en somme, avec ce qu’il faut de langueur.
Le concert du groupe de Christophe Marguet sera diffusé sur France Musique le samedi 1er janvier 2022 à 19h dans l’émission ‘Jazz Club’
À l’origine le programme de la saison ‘Jazz sur le Vif’ annonçait le quartette «Little Big» du pianiste Aaron Parks. Mais la tournée a été annulée. Ce sera donc le trio de Marc Copland : une aubaine, pour nous qui n’avions pu l’écouter qu’en club. Ici ce sera sur un grand piano de concert, avec des conditions parfaites. Piano un peu agressif dans le haut-médium (la sonorisation, plus que l’instrument) mais bon, je chipote, et cela n’a pas altéré mon plaisir.
MARC COPLAND Trio
Marc Copland (piano), Phil Donkin (contrebasse), Jonas Burgwinkel (batterie)
Paris, Maison de la Radio (et de la Musique), 27 novembre 2021, 21h
Pour nous c’est un nouveau trio : on avait écouté le pianiste récemment avec ce même batteur allemand, mais le bassiste britannique est un nouveau venu. Le premier thème commence par une intro de piano seul. Un accord arpégé plein de mystère, puis quelques dissonances, et une note bien timbrée dans l’aigu pour satisfaire l’impérialisme du retour à la tonique…. Que la fête commence ! Ce qui va surgir, c’est Chim Chim Cher-ee , immortalisé au cinéma (Mary Poppins) par Julie Andrews et dans le jazz par Coltrane. C’est un dialogue secret, crescendo, avec la basse et la batterie, avec des va-et-vient autour du thème, comme une sorte de leitmotiv. Grande liberté musicale. Puis c’est une composition de Drew Gress (également bassiste du trio avec le même batteur). C’est un dialogue, ou plutôt un trilogue, très construit, mais avec des échappées hardies, et un solo de batterie accompagné avec rebond par le piano et la basse, solo qui servira de coda. C’est maintenant Greensleeves, une des ballades favorites de Marc Copland, très réharmonisée, et comme souvent très différente de ses versions antérieures. Un régal qui nous entraîne loin, vers un ailleurs inespéré. Suivront un thème qu’il avait enregistré avec John Abercrombie, et Cantaloupe Island de Hancock, Blue in Green de Bill Evans (souvent crédité à Miles Davis)…. Chaque fois c’est une approche singulière qui, comme c’est le cas dans le meilleur du jazz, nous offre une vision inédite, un renouvellement constant. Bref ce concert fut un pur moment de bonheur musical. Merci Marc Copland !
Xavier Prévost
Le concert du groupe de Marc Copland sera diffusé ultérieurement sur France Musique