CLAUDE TCHAMITCHIAN ‘Ways Out Quintet’ au Triton
Premier concert de l’année au Triton (qui généralement reprend un peu plus tard en janvier), et malgré cette date précoce, et une pluie dissuasive, du monde dans la salle
CLAUDE TCHAMITCHIAN ‘Ways Out Quintet’
Claude Tchamitchian (contrebasse, composition), Régis Huby (violon, effets), Daniel Erdmann (saxophone ténor), Rémi Charmasson (guitare), Christophe Marguet (batterie)
Les Lilas, Le Triton, 8 janvier 2022, 20h30
Retrouvailles pour le groupe, augmenté d’un nouveau membre (Daniel Erdmann), près de 10 ans après la parution du premier disque («Ways Out», Abalone Productions), et en attendant le prochain, déjà enregistré, qui paraîtra en avril. Un répertoire médité pendant les rebondissements de la pandémie et qui, même si l’embellie nous semble encore parfois plus que lointaine, se veut porteur d’espoir.
Entrée mystère, et en douceur, par la batterie jouée au mailloches, progressivement rejointe par des sons graves du violon, puis par les autres instruments. Sur un ostinato de basse, c’est bientôt l’envol des solistes : sax ténor puis violon, stimulés par le jeu du batteur (figures constamment variées, inventives, souvent inattendues). Après l’effervescence, une impro de guitare ramène un lyrisme tranquille mais dense. Le décor est posé : cette musique repose sur une fine dramaturgie, servie par de très belles compositions, lesquelles préservent des espaces de liberté, individuelle ou collective. Dans le titre suivant, une sorte de stop chorus concerté, entre la contrebasse et le sax, va nous conduire vers un tutti d’une belle ampleur. Je ne sais pas pourquoi, je ressens cette musique comme ‘poing levé, main sur le cœur…. ou cœur sur le main’ !
Plus loin une transition sur un solo de batterie, solo lent et riche de timbres inouïs. Dramaturgie toujours, avant la foudre. Plus loin encore un bourdon conjoint à l’archet de la basse et du violon, lequel s’évade, libre de tonalité, et la basse lui répond par une sorte de contrechant. Vient à présent une suite, dont la première partie fait hommage à Charles Mingus, en une musique très collective qui bouscule les codes : il y a place pour chacun, dans une sorte de récit. Non pas une narration. Plutôt une dramaturgie, quand les affects prennent le pas sur les événements. Puis ce sera une suite en hommage à Jacques Thollot, avec une ligne mélodique très tendue, comme dans le disque «Cinq Hops» (1978) : lyrisme exacerbé, à la mémoire d’un Ange du bizarre qui s’appelait Jacques T. Tout s’enflamme, on croirait un concert de rock progressif. Je ne vais pas vous narrer tous les épisodes, les rebonds, les solistes qui m’ont tous ébloui. Rappelés avec chaleur, les musiciens nous ont offert une évocation nostalgique des bals perdus. Quelle soirée bon sang ! Vivement le disque, en avril, et dans la même période un concert au Studio de l’Ermitage. Ways Out : on fera à nouveau une excursion hors des sentiers battus.
Xavier Prévost
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Le concert a été capté en vidéo ; il sera en ligne sur le site duTriton