Joie : “The Purple Album”, le meilleur album de Whitesnake depuis “Slip Of The Tongue” est réédité en “Special Gold Edition”, double CD + blu-ray ou double LP, au choix. « You know we had no time / We could not even try / You know we had no tiiiiime » : ça vous dit quelque chose n’est-ce pas ?
Si on nous avait dit en 1984, l’année de “Perfect Strangers” de Deep Purple et de “Slide It In” de Whitesnake, que trente-et-un plus tard le groupe de David Coverdale enregistrerait un album de reprises du groupe de Ritchie Blackmore & Co, on aurait levé les yeux au ciel et répondu quelque chose comme : « Improbable, impensable, impossible. » Il est vrai que l’idée est presque sacrilège : certes, tout le monde peut reprendre du Deep Purple, mais que Whitesnake le fasse a quelque chose d’un brin incestueux. Après tout, David Coverdale est un enfant de Deep Purple, et son combo l’est tout autant.
Et pourtant…
“The Purple Album”, né en 2015 d’une réunion tuée dans l’œuf entre David Coverdale et Ritchie Blackmore afin de rendre hommage à l’organiste de Deep Purple Jon Lord, était tout simplement le meilleur album de Whitesnake depuis “Slip Of The Tongue”. Pourquoi ? Parce que même si tous les disques qu’ils ont publiés ensuite sont dignes d’intérêt, aucun ne contient de classiques instantanés comparables à ceux de leur songbook des années 1978-1989. Quant aux chansons du Deep Purple Mark III, époque “Burn” et “Stormbringer”, et Mark IV (“Come Taste The Band”, sans Blackmore, remplacé par Tommy Bolin), elles sont encore plus profondément ancrées dans la mémoire des fans. Des deux groupes.
À ses débuts, pour étoffer sa set list, Whitesnake reprenait deux chansons de “Burn”, Mistreaded et Might Just Take Your Life. Par la suite, le groupe du natif de Saltburn-By-The-Sea avait su se bâtir un répertoire suffisamment fort pour remiser au rayon souvenir les classiques vintage de Deep Purple, aussi exceptionnels soient-ils.
Seulement voilà : le temps qui passe – en 2015, David Coverdale avait déjà 64 ans – donne parfois envie d’appuyer sur la touche rewind histoire de retrouver des émotions d’antan. Alors, quand la perspective de chanter à nouveau aux côtés de Ritchie Blackmore a fini par s’éloigner après quelques emails échangés entre managements, le flamboyant chanteur s’est approprié cette idée et a décidé de réenregistrer quinze chansons puisées dans les trois classic albums de Deep Purple cités plus haut.
Et ce qui ressemblait de prime abord à une idée incongrue s’est révélée être une excellente initiative. Car avec ses guitaristes Reb Beach et Joe Hoekstra, son bassiste Michael Delvin et son inamovible batteur Tommy Aldridge, Coverdale a réinjecté dans ces classiques old school l’“énergie du bel espoir” : celui de se dire que le hard-rock bluesy est le plus efficace des élixirs de jouvence, et que rechanter Burn, Lady Double Dealer, Love Child, Holy Man ou You Fool No One avec de nouveaux arrangements rétro-modernes valait sans doute le coup. Well done, lads : tout cela était magnifique en 2015, et l’est encore en 2023. Comme dirait Coverdale, ça valait le coup de les « snake ’em up » ces grandes chansons de Deep Purple.
Surtout que cette “Special Gold Edition” Revisited (l’ordre des chansons a été changé), Remixed et Remastered réserve de chouettes surprises, sous la forme de nombreux bonus : remixes (Stormbringer Punch In The Nuts Mix, tout un programme), versions live ou alternatives, telle le touchant remake de Soldier Of Fortune Featuring The Hook City String…
Autres pépites : la cassette retrouvée chez feue la maman de David C. avec les cinq morceaux que les lads de Purple avaient reçu en 1973 – après l’avoir écoutée, Ian Paice avait appelé son pote Ritchie pour lui dire qu’ils avaient peut-être trouvé le chanteur susceptible de remplacer Ian Gillan. D’autant plus qu’à cette cassette désormais légendaire avait été ajoutée une photo de David C. en… boy scout ! Avec la mention suivante : « Comme vous pouvez le voir, je suis toujours prêt. » Good Lord ! Quelques mois plus tard, Coverdale faisait cependant ses débuts fracassants dans l’album “Burn”, and the rest is history…
Quant au blu-ray, il déborde évidemment de vidéos et d’un documentaire Behind The Scenes. Spécial bonus : David Coverdale parle de chaque chanson et livre quelques savoureuses anecdotes.
Enfin, saluons l’élégance de David Coverdale, qui dédicace You Fool No One ainsi : « In loving memory of Jeff Beck. »
CD/BLU-RAY/LP Whitesnake : “The Purple Album” (Rhino / Warner).
Photos : X/DR (Rhino).