Jazz live
Publié le 7 Oct 2024 • Par Xavier Prévost

Première soirée du Pégazz Jazz Festival

Après des prémices le 22 septembre à La Fonderie de Fontenay-sous-Bois, le festival battait son plein pour 3 jours dans la même ville, au Comptoir de la Halle Roublot

photo X. Prévost

Le chroniqueur devait se rendre le samedi et dimanche en Bourgogne, pour célébrer avec des potes (et potesses) la mémoire d’un Ami disparu voici tout juste 30 ans. À grand regret il s’en est donc tenu seulement à la première soirée, au demeurant riche en émotions musicales, invention et expression

photo X. Prévost

La soirée commençait avec le trio ‘Persona’, ainsi nommé par allusion à un film fameux de Bergman sorti en 1966. Et le trio accueillait la chanteuses Linda Oláh

photo Maxim François

PERSONA + LINDA OLÁH

Linda Oláh (voix), Paul Jarret (guitare), Alexandre Perrot (contrebasse), Ariel Tessier (batterie)

Fontenay-sous-Bois, Le Comptoir, 4 octobre 2024, 20h

Le trio existe depuis des années. En invitant la chanteuse, dont la faculté de métamorphoser la musique paraît sans limites, le groupe s’est donné comme matériau des standards, qu’ensemble ils ont traité avec une liberté absolue, et souvent totalement décoiffante. Autant dire que le public, tout ouïe, a pu savourer les surprises, les dérives, les vertiges mélodiques et expressifs sur lesquels ont débouché des chansons consacrées par le jazz, mais ici offertes sous des atours mystérieux, jusqu’à ce qu’un indice nous remette sur la voie. L’invention y est permanente, l’interaction entre la chanteuse et ses partenaires d’une subtilité qui ne craint pas l’audace. Bref un grand moment d’interprétation-improvisation qui a passé à la moulinette, pour une jubilation collective (entre la scène et la salle), If I Were A Bell, Some Of These Days, Just One Of These Things, etc….

photo Maxim François

GRÉGOIRE LETOUVET ‘Rose(s)’

Grégoire Letouvet, Delphine Beau, Thibault Gomez, Estreilla Besson (pianos préparés, compositions)

Fontenay-sous-Bois, Le Comptoir, 4 octobre 2024, 21h30

À l’initiative du pianiste-compositeur Grégoire Letouvet, c’est une réunion de quatre artistes qui ont passé la semaine précédente en résidence au Comptoir, autour de deux pianos (celui du lieu, et un second loué pour la circonstance), afin d’élaborer une œuvre collective sur les matériaux musicaux apportés par chacune et chacun

photo Maxim François

Au dessus des deux pianos, un écran vidéo montre les entrailles des instruments. Au commencement, tandis que Thibault Gomez est au clavier du piano situé à cour, ses trois partenaires font chanter les cordes en utilisant des crins d’archets. C’est un jeu de tensions et d’harmonie, de sons familiers et de sonorités neuves. Ils s’affaireront aussi avec maints accessoires (bois, pinces, baguettes….) pour préparer les séquences ou intervenir dans les cordes tandis que d’autres sont aux claviers. C’est d’une richesse sonore, rythmique, mélodique et harmonique qui paraît sans limites. Tout semble d’une précision folle, exécutée comme un jeu très collectif où chaque personne connaît l’instant décisif qui fera vivre l’ensemble. Les sources d’inspiration des compositrices et compositeurs sont très diverses. La prégnance du rythme est vive, nous rappelant que piano est aussi un instrument à percussion. À la faveur des différents pièces, le paysage de mes souvenirs fait ressurgir le Stravinski d’avant 1914, le Bartók d’avant 40, Ligeti (souvent), et une foule de résurgence du jazz et de la musique improvisée apparentée. Et vers la fin, un moment de belles harmonies très solennelles a fait refluer en ma mémoire le souvenir de La grande porte de Kiev, dans la version d’origine pour piano. Bref cette œuvre authentiquement collective m’est apparue comme une absolue réussite.

Xavier Prévost