Jean-Michel Bernard
Lalo Schifrin, paroles et musiques
Entre concert en piano solo et récit de ce grand arrangeur avec qui il a collaboré et lié une indéfectible amitié, JEAN-MICHEL BERNARD rendra hommage à Lalo Schifrin le 30 janvier prochain au Sunset dans le cadre de Jazz Magazine le Club. Rencontre.
Comment avez-vous découvert puis rencontré Lalo Schiffrin ?
J’ai découvert sa musique vers 8-9 ans grâce au feuilleton Mannix, avec Bill Connors dans le premier rôle, qui passait le soir. C’était l’une des rares choses que j’avais le droit de regarder. J’adorais la musique du générique qu’avait composée Lalo Schifrin, sans savoir si cette valse très rapide était du jazz ou non, et qui était très inhabituelle pour une série policière. Ma partie préférée c’était ce pont formidable, ce qui l’a enchanté quand je lui ai dit bien des années plus tard.
Des années après, un producteur de Radio France me demande si je peux écrire pour l’Orchestre de Lyon à l’occasion d’une soirée hommage à Lalo Schifrin où sont attendus Dizzy Gillespie, les compositeurs Georges Delerue et Francis Lay… Je n’avais pratiquement jamais fait ce genre de travail mais j’ai accepté, et en raccrochant je me suis dit que j’étais complètement fou d’avoir dit oui ! Avec l’aide de mon ami Jacques Loussier j’ai réussi. J’ai rencontré Lalo Schifrin à Paris, avant de le retrouver à Cannes où il a dirigé mon arrangement de sa musique, et dans la foulée j’ai enregistré mon premier album symphonique. Mais le vrai déclencheur a été le concert donné au festival de La Baule,en 2016, dont a découlé tout ce qui est arrivé par la suite, jusqu’au concert au Sunside le 30 janvier prochain.
Vous avez aussi longuement travaillé avec Ray Charles qui vous tenait en haute estime, ou encore Ennio Morricone… Au-delà du savoir-faire technique, qu’est-ce que ces figures apprécient chez un collaborateur ?
J’ai moins connu Ennio Morricone mais Lalo et Ray Charles avaient un humour incroyable, c’étaient des gens brillantissimes intellectuellement, très lucides sur leur carrière et leur époque. Lalo est le compositeur dont je me sentais le plus proche car je suis moi-même de culture classique au départ, tout en étant très lié au jazz, et mon amour de l’improvisation a d’ailleurs fait le désespoir de quelques professeurs au conservatoire ! Lui a dirigé des orchestres classiques jusqu’à la fin de sa carrière, c’a été un élève d’Olivier Messaien, mais quand on se retrouvait tous les deux il voulait qu’on improvise ensemble sur du Ravel ou du Debussy. On a eu un cheminement assez proche même si c’est une légende de la musique et que je suis bien loin de ça, mais on était faits pour se rencontrer, quelque part.
Comment allez-vous aborder cet hommage à Lalo Schifrin seul face au clavier le 30 janvier au Sunset ?
La force de la musique de Lalo est qu’elle n’est pas du tout démodée, et elle est tellement puissante qu’elle marche autant avec un orchestre de cent musiciens qu’au piano. Ce n’est pas simple même si certaines pièces sont très pianistiques, et comme Lalo est pianiste de formation, il construit tout à partir du clavier. En plus de sa musique, je vais jouer des pièces comme Play Piano Play d’Erroll Garner, la version d’Art Tatum de Tiger Rag ou même de compositeurs proches de lui, comme John Williams ou Jerry Goldsmith qui travaillaient dans le même bâtiment à la grande époque du cinéma hollywoodien. Et je raconterai, un peu comme dans un spectacle de stand-up, des histoires sur Lalo et son univers. Au micro : Yazid Kouloughli
Réservez vos places pour le concert du mardi 30 janvier au Sunside !
Photo © Giovanni Cittadini Cesi