Le monde est Stone
Nous avons lu l’autobiographie de Sly Stone. Compte-rendu d’un livre essentiel.
Par Fred Goaty
Ainsi, Sly Stone, l’un des derniers génies (sur)vivants sur cette terre, vient de publier son autobiographie. Elle porte le même titre que l’une de ses plus célèbres chansons, celle qui entre Papa’s Got A Brand New Bag de James Brown et Kiss de Prince forme un triangle parfait, aux pointes éternellement vives : Thank You (Falettinme Be Mice Elf Agin).
Pour l’instant, elle n’est disponible qu’en anglais. Sera-t-elle traduite en français dans un avenir proche ? On en doute, hélas. (On compte cependant sur les Éditions Allia, qui en 2000 avaient publié Sly Stone : le mythe de Staggerlee de Greil Marcus.)
Alors n’attendez pas, plongez-vous à cœur perdu – il n’en battra que plus fort – dans ces 300 pages qui reflètent parfaitement l’homme et la musique de Sylvester Stewart, alias Sly, Sly Stone : elles sont tour à tour poétiques, brumeuses, édifiantes, touchantes, psychotropes, sardoniques, mystérieuses, et pour tout dire fascinantes. Et magnifiquement écrites, avec l’aide, qu’on imagine aussi précieuse que décisive, de Ben Greeman.
« Life is a record. But where do you drop the needle ? »
Si vous espérez moult détails sur l’enregistrement des chefs-d’œuvre qui font l’inaltérable richesse de la discographie de Sly et de sa Family Stone, optez plutôt pour Sly And The Family Stone, A Oral History de Joel Selvin (Avon Music, 1998). Mais, malgré tout, ne passez pas, surtout pas à côté de ce livre, souvent très proche, dans le ton, de l’autobiographie de Miles Davis (que Sly, vu son amour du jazz, évoque plus d’une fois). Sly ? Humble mais determiné, habité vingt-quatre heures sur vingt-quatre par la musique, sûr de son influence : « Norman Whitfield had moved on from Classic Motown to what people were calling “psychedelic soul”. It sounded familiar : cloud mine. »
Sa vision du monde était définitivement en Noirs & Blancs, c’était non négociable, n’en déplut aux Black Panthers : « Music didn’t have a color. All I could see was notes, styles, and ideas » (ça, c’était Sly le DJ de la radio KSOL qui parlait : le leader de la Family Stone porta le même message, celui d’un créateur hors norme, d’un musicien philosophe, tranquillement rebelle. Merci pour tout, Sly.