Michel Petrucciani nous a quittés le 6 janvier 1999. Chaque jour jusqu’au 25 janvier, date de la sortie du nouveau numéro de Jazz Magazine dont il fera la Une, retrouvez en vingt épisodes la vie incroyable de ce pianiste hors norme, telle qu’il l’avait racontée à Fred Goaty à l’été 1998.
« Avant “Music”, je vendais entre 10 et 20 000 disques aux Etats-Unis et moins de 10 000 en France. C’était bien, mais pas extraordinaire. Et puis j’ai fait ce disque, avec un groupe “électrique”, pour une musique un peu plus “facile”, je suis entré un peu plus dans la chanson, et sorti un peu du jazz. Le mot “facile” ne me gêne pas, j’avais envie de faire une musique plus accessible, des chansons plus que des thèmes de jazz. Ç’a été le début de ma carrière en tant que compositeur de chansons, d’une musique parfaitement lisible. Très vite, j’ai été très critiqué, à cause de cette musique, à cause de ce groupe électrique… Dans “Music”, il y avait Looking Up, et Eric, qui était encore producteur, m’a dit : « Il n’est pas mal ton petit morceau mais on va le mettre à la fin… » Je lui ai répondu : « T’es fou, ce morceau est super ! On va le mettre en premier ! » J’y tenais absolument. Et il a beaucoup plu, d’emblée. Je suis passé à 90 000 albums vendus en France ! Mais je ne m’en suis pas vraiment aperçu, je ne recevais que peu de royautés, à cause de mon contrat merdique… J’en ai vendu à peu près 100 000 aux Etats-Unis. Ça devenait sérieux. Un jour, un ami, qui était manager de Johnny Clegg, est allé dans les bureaux de EMI pour signer un contrat et, à la réception, il a vu un énorme agrandissement de la pochette de “Music” ! Il m’a appelé : « Michel, tu es une star, ils ont mis ta photo à l’entrée des bureaux ! » A partir de là, j’ai fait tout ce que j’ai voulu avec Blue Note. Quand j’arrivais dans les bureaux, tout le monde s’affolait. Ce n’était plus « Attendez, on va voir s’il est là… » : les portes s’ouvraient en grand. Dès que ça marche, on vous parle autrement dans une boîte, et pas qu’aux Etats-Unis. C’est partout pareil. Ça m’a aussi ouvert les portes pour les concerts, j’étais beaucoup plus demandé, je touchais plus d’argent. J’étais sorti du cadre du “pianiste de jazz”, j’étais devenu un peu plus populaire à ce moment-là en tout cas. Moi, je joue pour les gens. Je ne suis pas assez prétentieux pour dire qu’il faut être un connaisseur absolu pour apprécier ma musique. Sans faire la putain, je veux toucher les gens. Pourquoi le jazz devrait-il être réservé à une élite ? Après “Music”, il y a eu le Manhattan Project avec Wayne Shorter, le bassiste Stanley Clarke, la chanteuse Rachelle Ferrell… C’est le batteur Lenny White qui avait organisé cette rencontre. Il avait d’abord pensé à McCoy Tyner au piano. Mais McCoy, je pense, a dû avoir des exigences financières excessives. Lenny, qui avait fait “Music” avec moi, a dit aux gars de Blue Note qu’on pouvait compter sur moi, et qu’en plus j’étais de la maison ! J’ai reçu un coup de fil de Lundvall alors que j’étais en tournée en France. Il m’a proposé de venir trois ou quatre jours à New York pour faire un disque. C’était très bien payé : je crois que j’ai eu le cachet que devait avoir McCoy au départ, 26 000 dollars, et un aller-retour en Concorde ! J’ai dit oui tout de suite. Je suis arrivé, on a répété et fait le disque et la vidéo en trois jours. J’ai aimé ça. J’ai adoré travailler avec Stanley Clarke, un type très sympa. J’aime beaucoup toute la partie électrique du disque, mais pas quand Stanley joue de la contrebasse. Et Wayne [Shorter], superbe… Blue Note avait bien fait les choses, nous avions chacun une loge, et tous un cadeau personnalisé. Moi, en tant que Français, ils m’avaient offert deux superbes bouteilles de Bordeaux, avec un petit mot. A un moment, Wayne est venu me voir : « Michel, je pourrais te parler après la session ? » Je me suis dit : « Il va peut-être me proposer du boulot, on va peut-être faire quelque chose ensemble… » J’étais content. L’enregistrement terminé, il revient : « Je peux te voir maintenant Michel ? – Bien sûr, Wayne ! » Et le voilà qui montre du doigt mes deux bouteilles et me demande s’il peut les emporter. J’ai dit oui, et hop, il s’est sauvé avec. Tout le monde croit que ma vie s’est déroulée très facilement, mais j’ai eu aussi des déceptions. C’en était une. » (À suivre.)
Michel Petrucciani nous a quittés le 6 janvier 1999. Chaque jour jusqu’au 25 janvier, date de la sortie du nouveau numéro de Jazz Magazine dont il fera la Une, retrouvez en vingt épisodes la vie incroyable de ce pianiste hors norme, telle qu’il l’avait racontée à Fred Goaty à l’été 1998.
« Je n’ai jamais été obsédé par une reconnaissance mondiale, mais Blue Note me donnait l’occasion de vivre mon rêve américain, de travailler avec des Américains dans une boîte américaine, distribuée aux Etats-Unis. J’étais arrivé à être considéré comme un musicien américain, avec des collègues américains. J’étais américain ! Beaucoup plus qu’aujourd’hui, où je me suis un peu “refrancisé”, j’ai retrouvé mes racines. En fait, le vrai début de ma notoriété avec Blue Note, c’est quand j’ai fait “Music”, en 1989. Avant, il y avait eu “Michel Plays Petrucciani”, enregistré fin 1987. Deux trios, un sur chaque face, c’était mon idée. J’avais beaucoup aimé le disque “Supertrios” de McCoy Tyner avec deux trios différents par face – Elvin Jones, Tony Williams, Ron Carter… Je voulais faire quelque chose de ce genre (il y avait encore des 33-tours avec deux faces…). Aujourd’hui, avec les CD, il faut enregistrer plus de musique, au moins une heure, alors que vingt minutes par face, c’était bien – il ne faut pas oublier que je suis du Midi, faut pas trop m’en demander, la sieste, c’est important. Sur “Michel Plays Petrucciani”, il y avait le batteur Roy Haynes. J’ai travaillé beaucoup avec lui par la suite. Au départ, je voulais Jack DeJohnette et Gary Peacock, mais Peacock m’a fait observer : « Si tu prends DeJohnette, ce sera la rythmique de Jarrett, et ça risque d’être un peu trop proche. Pourquoi ne prends-tu pas l’idole de Jack, Roy Haynes ? Si tu ne peux pas travailler avec le musicien que tu veux, travaille avec son maître… » J’appelle Roy, qui est venu tout de suite. Après le disque, nous avons fait une longue tournée internationale. Aujourd’hui encore, nous nous voyons souvent. Le producteur de “Michel Plays Petrucciani” était Eric Kressmann, mon manager à l’époque. « J’ai attendu deux ans avant d’enregistrer mon disque suivant, “Playground”. Je travaillais alors avec le claviériste Adam Holzman, qui venait de quitter le groupe de Miles Davis. Très influencé par le son de ce groupe, la période “Tutu”, je voulais faire quelque chose d’électrique, et Adam a apporté une couleur milesdavisienne dans ma musique, des sons de synthé qu’il avait programmés pour Miles. “Playground” a été mon avant-dernier disque pour Blue Note, il m’en restait un à faire, et ç’a été “Promenade With Duke”, le premier disque en solo que j’aie vraiment désiré. Et qui est encore lié à une femme… J’étais en pleine douleur, la mère de mon fils venait de me quitter. J’ai enregistré ce disque tout seul, à New York, avec Adam, en buvant pas mal de vodka, parce que j’allais vraiment mal. J’étais dans une grande maison, seul, avec la femme de chambre, une Haïtienne. C’était en pleine guerre du Golfe, on regardait la télé l’après-midi, je travaillais avec Adam. J’avais une amie italienne, Gilda Butta, que je connaissais depuis dix ans, une musicienne classique, qui était la pianiste d’Ennio Morricone. Et dans la douleur, la peine, nous nous sommes mis ensemble. Je suis tombé amoureux d’elle, et nous nous sommes mariés ! Elle m’a beaucoup appris, on jouait ensemble, du Rachmaninov. Avec elle, j’ai vraiment évolué techniquement et musicalement. Je lui avais dit que je voulais faire un disque vraiment en solo. Elle m’a beaucoup aidé. J’ai donc fait cet album en hommage à Duke Ellington, parce que c’est Duke qui m’avait donné envie de jouer du piano. Après “Promenade With Duke”, il y a eu encore un disque pour Blue Note, qui n’était pas prévu, “Michel Petrucciani – Live”. C’est moi qui l’ai produit. Comme je trouvais que le groupe tournait bien, j’ai insisté pour pouvoir en laisser un témoignage. Il y a un morceau, Miles Davis Licks, où je cite des phrases de Miles… C’est marrant, j’ai joué ce morceau avec John Scofield à Copenhague, au club Montmartre, et en lisant la partition il s’est exclamé : « Putain, ce Miles, il a vraiment une façon particulière de composer… » J’ai souri, et je lui ai dit que c’était moi qui avais écrit ça… Et puis chez Blue Note, j’ai commencé à m’emmerder. Ils avaient signé d’autres artistes, je n’étais plus le seul Européen. Or j’avais envie d’être un plus grand poisson dans un plus petit bocal… » (À suivre.)
Michel Petrucciani nous a quittés le 6 janvier 1999. Chaque jour jusqu’au 25 janvier, date de la sortie du nouveau numéro de Jazz Magazine dont il fera la Une, retrouvez en vingt épisodes la vie incroyable de ce pianiste hors norme, telle qu’il l’avait racontée à Fred Goaty à l’été 1998.
« J’ai eu beaucoup d’aventures, je reste rarement plus de cinq ans avec la même femme. Au bout d’un moment je m’ennuie. J’ai besoin de renouveau, toujours. D’une émotion nouvelle. J’en souffre éperdument. C’est aussi pour cela que je crée sans cesse des nouveaux groupes, que je bouge tout le temps. Dès que je sens poindre la routine, je m’emmerde, je me tape la tête contre les murs. Pourtant, écrire des chansons m’excite toujours – je dis “chansons”, pas “thèmes”, ni “morceaux”. Je ne suis jamais blasé, mais au bout d’un moment je m’ennuie de tout. Paradoxalement, je suis très fidèle en amitié, j’ai des amis de vingt ans. J’ai besoin de ça, mais mon coeur me dit autre chose. Ma tête me dit « Arrête ! », mais mon cœur me souffle « Moi, je ne peux pas vivre autrement… » J’aime toutes les femmes… Louis Armstrong disait : « Je me suis marié sept fois et je les aime toutes ! » Je garde une forte amitié pour celles avec qui j’ai vécu. Je vois la mère de mon fils, Alexandre, presque tous les jours. En juillet 1986, j’ai enregistré “Power Of Three”, mon deuxième disque pour Blue Note, avec le guitariste Jim Hall et le saxophoniste Wayne Shorter. Il y a là un son nouveau, j’aime l’originalité qui s’en dégage. Un trio guitare-piano-saxophone, ça ne s’était encore jamais fait ! Je considère Wayne Shorter comme un des plus grands compositeurs du XXe siècle, et je trouve très flatteur qu’il soit dans un de mes disques. Jim, j’ai adoré travailler avec lui. Ce disque reste pour moi une pièce de collection, et une rencontre exceptionnelle. Les titres de mes albums, c’est presque toujours moi qui les impose, c’est peut-être le seul truc que je regarde avant l’argent ! Quand je signe un contrat, j’exige une totale liberté quant aux titres de mes disques ! Il n’empêche que le super titre de “Power Of Three”, ce n’est pas moi qui l’ai trouvé, c’est Wayne. Wayne est un fan de science-fiction, et il était en train de lire un livre qui s’appelait Power Of Three. Il a simplement dit : « Tiens, ça, c’est nous, power of three ! » Wayne est très particulier, il faut arriver à le comprendre pour pouvoir le suivre. Il plane… Quand il raconte des histoires drôles, il est souvent le seul à rire : personne ne les comprend. » (À suivre.)
Michel Petrucciani nous a quittés le 6 janvier 1999. Chaque jour jusqu’au 25 janvier, date de la sortie du nouveau numéro de Jazz Magazine dont il fera la Une, retrouvez en vingt épisodes la vie incroyable de ce pianiste hors norme, telle qu’il l’avait racontée à Fred Goaty à l’été 1998.
« En octobre 1984, j’ai encore enregistré en solo pour OWL, “Note’N Notes”, avec des parties de piano en overdub. Puis, en janvier de l’année suivante, j’ai enregistré “Cold Blues” en duo avec Ron McClure. J’aime beaucoup ce disque, on l’a fait dans le studio newyorkais du pianiste Fred Hersch. À l’époque, je voyais Ron presque tous les jours, on jouait tout le temps ensemble. Nous nous étions rencontrés dans un club, il y jouait avec le groupe Quest. Nous nous sommes enregistrés en duo, comme ça, pour voir, et avons trouvé ça tellement bien que je l’ai proposé à Jean-Jacques. Ça lui a plu tout de suite, et il l’a publié. On l’a appelé “Cold Blues” parce qu’il faisait un froid de canard ce jour-là à New York. De la neige partout ! Entre Ron et moi, il y avait une véritable amitié. J’ai quatre ou cinq vrais amis musiciens à New York : le guitariste John Abercrombie, le saxophoniste Joe Lovano, le batteur Jack DeJohnette, le contrebassiste Dave Holland et Ron. Ils forment comme une famille. “Cold Blues” a été mon dernier disque pour Jean-Jacques. Il faut évoluer : avec lui c’était super, intéressant, mais je voulais quelque chose de plus grand, de mondial ! Jean-Jacques, c’est mes débuts, ces premières amours qu’on n’oublie jamais, le tremplin de toute ma vie musicale. Avant de signer avec Blue Note, j’ai enregistré “Darn That Dream”, un trio “familial”, avec mon père et mon frère. J’ai reçu zéro centime de royautés des ventes de ce disque et ma famille pas davantage. L’arnaque totale ! Mais je suis sûr qu’il y a des gens qui se sont fait des sous, car ce disque, je le vois partout, on me le donne à dédicacer au Japon, en Allemagne… C’est comme “Estate”, que j’avais enregistré avec Aldo Romano et Furio Di Castri à Rome, en 1982… Je demande toujours aux gens où ils ont trouvé ces disques un peu obscurs, comme “Darn That Dream” ou “Estate”.
Après le disque pour Elektra Musician enregistré avec Charles Lloyd, “At Montreux”, Bruce Lundvall, qui était alors président de WEA, avait dit dans une interview parue dans Jazz Magazine : « Si un jour je deviens président d’un autre label, le premier artiste que je signerai sera Michel… » Et quelque temps après, il devenait président de Blue Note. Ils ont réactivé le label en 1985 et j’ai été le premier artiste signé. J’avais accepté sans hésiter. Quand je suis arrivé, j’ai dit : « Où est-ce qu’on signe ? », sans même lire le contrat, les conditions, rien du tout. J’étais tellement content d’être là, je ne me posais pas de questions. J’ai signé ! Un contrat à vie… Ce n’était pas terrible, un contrat de débutant, les royalties étaient nulles. Le premier disque que j’ai fait pour eux, en décembre 1985, ç’a été “Pianism”, qui n’est pas trop mal. C’était le trio avec lequel je travaillais à l’époque. De ce trio, il y avait eu auparavant un disque live au Village Vanguard, enregistré en octobre 1984. Nous l’avions coproduit. Le producteur était un certain Mike Berniker, que Blue Note m’avait assigné d’office. Je me suis un peu battu avec lui… Ils voulaient faire de moi une star, quelqu’un qui vende 500 000 disques. Ils s’étaient dit : on va prendre Michel en main et le pousser à fond. Ils avaient donc engagé ce mec, qui était producteur à Los Angeles, mais de musique un peu plus “pop”, de variétés… Sympa, oui, mais dès qu’il est arrivé il m’a dit : « Je voudrais que tu enregistres le thème de Superman… » J’ai dit non, non et non, je ne peux pas faire un truc pareil, et j’ai appelé Bruce Lundvall pour lui dire qu’il n’était pas question que je fasse ça. Bruce m’a dit qu’il allait parler à Mike, il est venu au studio, le RCA Studio, à New York. Ça s’est arrangé. Après l’enregistrement, Berniker a pris son chèque et est reparti. Le disque n’a pas trop mal marché, j’ai dû en vendre entre 10 et 15 000 aux Etats-Unis. Mon trio tournait déjà régulièrement. Le batteur, Elliott Zigmund, je l’avais rencontré à New York, à l’ouverture du club Blue Note. Il était là avec Lee Konitz. Lee m’avait reconnu et invité à monter sur scène pour jouer avec lui. Je me souviens qu’il pleuvait des cordes et que j’étais avec mon frère. On n’arrivait pas à trouver de taxi pour rentrer, et c’est Elliott qui, gentiment, nous a raccompagnés. On a bavardé, et je lui ai demandé si, au cas où je monterais un trio, ça l’intéresserait d’en faire partie. Il a dit oui et m’a donné sa carte. » (À suivre.)
Michel Petrucciani nous a quittés le 6 janvier 1999. Chaque jour jusqu’au 25 janvier, date de la sortie du nouveau numéro de Jazz Magazine dont il fera la Une, retrouvez en vingt épisodes la vie incroyable de ce pianiste hors norme, telle qu’il l’avait racontée à Fred Goaty à l’été 1998.
« Mon premier disque américain a été “100 Hearts”, produit par George Wein, qui s’occupait alors de mes affaires aux Etats-Unis. Il avait créé un label, et les premiers à enregistrer ont été moi et le pianiste Michel Camilo, dont George était un fervent admirateur. Il a voulu, lui aussi, que j’enregistre en solo. Au verso de la pochette du 33-tours, il y a une photo de moi, habillé en chinois et prise dans le quartier chinois, que j’aime bien. Il y en a une autre, de Pierre Lhomme, où je ressemble un peu à Miles, je trouve, avec mes lunettes noires – Pierre est un ami chef opérateur, qui a notamment travaillé sur Cyrano de Bergerac, le film de Jean-Paul Rappeneau. Jean-Jacques Pussiau faisait un peu la gueule que j’enregistre aux Etats-Unis. En fait, toute ma famille française a fait la gueule quand je suis parti : Pussiau, Aldo… Je revenais régulièrement mais j’étais barré dans un trip américain – depuis, j’en suis revenu. Mais à cette époque, j’adorais tout ce qui était américain, je me disais que les Français faisaient chier… Je n’avais pas oublié la France, mais je me sentais plus à l’aise avec le mode de pensée américain. Aujourd’hui je suis français, c’est ma patrie, et américain d’adoption. Je vis à New York, ma copine a un appartement à Paris. Je fais souvent l’aller-retour, mais je ne suis presque jamais à Paris. A New York, je suis chez moi, pas à Paris. En 1985, quand j’ai quitté définitivement Charles Lloyd, je me suis installé à New York, à Manhattan. Je venais de quitter Erlinda, ma première femme. A New York, je me suis vraiment intégré au monde du jazz. Les clubs, les boîtes de nuit, les hanging out de cinq heures du matin, parler, jouer, jammer… C’était LA grande ville, et je ne pensais plus du tout à la campagne californienne. J’y ai rencontré tout le monde. J’ai parlé avec Sonny Ro lins ! Autre rencontre décisive : Gil Evans. J’étais parti en presque vacances avec le contrebassiste Ron McClure – encore une rencontre importante – pour un engagement d’une semaine, tous frais payés, à Saint-Barthélémy, dans les Caraïbes. Nous jouions tous les soirs en duo, j’étais au piano électrique, on s’éclatait ! Et qui vois-je arriver dans ce petit club avec sa femme ? Gil Evans ! Il était en vacances. Nous avons passé la soirée à discuter et sommes devenus amis. Par la suite, il me téléphonait souvent, comme ça, sans raison particulière, et j’allais l’écouter le lundi soir au Sweet Basil avec son big band. Un jour, il m’a envoyé un livre dont le titre était Michel, un livre religieux. Peu de temps après, il m’appelle et me dit : « Michel, je voulais juste te parler, je crois que je vais partir quelque part… Je voulais te dire que je t’aime beaucoup… Bon courage dans ta musique. » Il est mort l’après-midi… Rien que d’en parler, ça me fait quelque chose. Pourtant, nous n’avons jamais joué ensemble. Je crois avoir touché des gens, qui ont manifesté une certaine admiration pour moi, comme si je leur avais donné une leçon de courage. Je sais que Gil, en tout cas, je l’avais touché. Mais ce n’était pas musical… » (À suivre.)
Michel Petrucciani nous a quittés le 6 janvier 1999. Chaque jour jusqu’au 25 janvier, date de la sortie du nouveau numéro de Jazz Magazine dont il fera la Une, retrouvez en vingt épisodes la vie incroyable de ce pianiste hors norme, telle qu’il l’avait racontée à Fred Goaty à l’été 1998.
« Quelque temps plus tard, j’ai rencontré, je ne sais plus ni où ni comment, le contrebassiste Charlie Haden. J’ai adoré travailler avec lui. Nous avons tourné en duo : San Francisco, Santa Barbara, Los Angeles… À cette époque, j’étais discret, je n’osais pas poser trop de questions à ces musiciens, j’avais peur d’être impertinent. Aujourd’hui, je n’hésite plus à le faire. Mais, souvent, ils se racontaient sans se faire prier. Charles Lloyd, par exemple, parlait beaucoup de sa jeunesse, quand il jouait avec Cannonball Adderley. La drogue les avait marqués aussi, ils en parlaient souvent. Récemment, j’ai revu Lloyd, et je lui ai posé des questions sur des modes, des gammes particulières : phrygiens, doriens, lydiens… Sa culture est considérable dans ce domaine, il a beaucoup travaillé tout ça. Quand je lui ai demandé : « Explique-moi ton truc, là… » Il a été très fier et très content ! Alors qu’à mes débuts avec lui, j’aurais craint de l’ennuyer. Aujourd’hui nous jouons un peu dans la même cour, je ne me sens plus dans un rapport élève-professeur, et je lui demande ces informations comme un service. C’est comme l’école du bouddhisme : tu laisses parler le maître, tu ne poses pas de questions, tu le laisses te donner des conseils. S’il t’en donne, c’est qu’il estime que tu en as besoin. S’il ne t’en donne pas, c’est que selon lui tu n’en n’as pas besoin. Moi qui ai été élevé à la dure je respecte ça. D’ailleurs, dans l’école de musique que je rêve de créer – ce serait l’œuvre de ma vie ! –, je voudrais qu’on enseigne ainsi, avec ce rapport maître-élève. Le maître peut passer une journée avec toi et ne rien te dire. Aujourd’hui, ne serait-ce que par rapport à ma génération, les jeunes ont tellement d’informations… Mon fils [Alexandre NDR], qui n’a que 8 ans, maîtrise l’Internet, le téléphone… Pour moi, à son âge, il n’était pas question de mettre un doigt sur le téléphone ! C’était pour les grands ! De temps en temps, si c’était Mamie qui appelait, on me la passait, mais en me tenant le combiné ! À travers la forme d’éducation musicale que j’ai reçue, je crois que je peux très modestement me considérer comme un des derniers musiciens d’expérience, parce que j’ai appris comme les grands, les derniers grands maîtres. A l’américaine aussi : content d’avoir un boulot, content de jouer, d’avoir un conseil. Un certain savoir, un certain respect. Tiens, Miles Davis, c’est lui qui m’a appelé, la première fois, chez moi, quand je vivais à Brooklyn. J’avais fait un concert avec Roy Haynes et Gary Peacock, au Newport Jazz Festival, et c’était passé à la télé. (À la même époque, je jouais en quartette au Sweet Basil, à New York, avec Jim Hall à la guitare, Ron Carter à la basse et Al Foster à la batterie : pas mal non ?) Donc je décroche le téléphone et j’entends une voix, celle de Miles, qui me dit : « Keep on playing, man, you sound good… » Et le soir je joue avec Al, qui me dit : « C’était sympa le coup de fil de Miles, hein ? C’est moi qui lui ai filé ton numéro… On était ensemble quand il t’a appelé… » En fait, ils regardaient ce concert à la télé, et Miles lui avait dit : « Donne-moi son numéro ! » Je n’étais pas peu fier. Par la suite, j’ai vu Miles, je lui ai parlé deux ou trois fois, nous avons partagé le même plateau, la même soirée, en Pologne, puis à Troyes. Il était toujours très gentil avec les musiciens. Un jour, j’ai dit à Al : « Demande-lui si je ne pourrais pas venir chez lui… » J’avais envie de lui rendre visite, pour étudier, lui demander des trucs, des conseils. Il le faisait, mais surtout avec ses musiciens, et je ne faisais pas partie de son groupe. Il a dit à Al Foster : « You tell this little motherfucker that if he comes to my house, I would love him so much that he’ll think he is God or something. » Il pensait qu’il allait tellement m’aimer que j’allais me prendre pour Dieu, ou je ne sais quoi… Je ne suis donc jamais allé chez Miles ! » (À suivre.)
Michel Petrucciani nous a quittés le 6 janvier 1999. Chaque jour jusqu’au 25 janvier, date de la sortie du nouveau numéro de Jazz Magazine dont il fera la Une, retrouvez en vingt épisodes la vie incroyable de ce pianiste hors norme, telle qu’il l’avait racontée à Fred Goaty à l’été 1998.
« En mai 1982, j’ai enregistré “Toot Sweet” en duo avec le saxophoniste alto Lee Konitz. C’est marrant, je ne me souviens pas du tout de la séance. Mais le disque n’est pas mal, il y a un climat. Konitz apporte une couleur, une saveur très particulière. C’était une idée de Jean- Jacques. Moi, j’ai fait ce que j’ai pu derrière, et voilà. Pussiau m’avait dit : « J’aime beaucoup Lee et je t’entends bien jouer avec lui. Est-ce que tu aimerais ça ? » Tu parles ! J’étais vachement fier. Enregistrer avec Konitz ! J’ai cru qu’il ne voudrait pas, mais il a dit d’accord. Deux mois plus tard, j’ai enquatregistré pour la première fois avec Charles Lloyd lors du festival de Montreux. Sur le recto de la pochette, il y a une photo : à cette époque je ne marchais pas tout seul, ma femme me portait – Charles aussi – pour m’amener sur scène. Je pesais 25 kilos, aujourd’hui j’en fais 41, je suis trop gros ! Ma femme, une indienne navajo, je l’avais épousée là-bas. On s’est mariés un peu comme dans le film Green Card avec Gérard Depardieu : on a flirté, on sortait beaucoup, et je lui ai demandé, car je l’aimais vraiment, si elle voulait m’épouser. Elle a dit non. Je lui ai dit : « Epouse-moi, sinon je n’aurai pas la carte verte et je serai dans la merde… » Elle a fini par accepter, et nous nous sommes mariés à toute vitesse, avec juste deux témoins, sans cérémonie ni rien. Nous sommes restés ensemble cinq ans… Elle s’appelait Erlinda Montaño. En 1982, je tournais surtout avec Charles Lloyd. Son batteur, Son Ship Theus, était un géant. Je jouais un peu au directeur musical avec Charles : c’est moi qui l’ai forcé, par exemple, à jouer Very Early de Bill Evans, qui ne faisait pas partie de son répertoire. Je lui ai fait travailler six mois ce morceau – il n’arrivait pas à mettre les accords en place. Six mois jusqu’à ce qu’il arrive à le jouer. Il le trouvait bien, mais il disait qu’il préférait jouer modal. Par la suite, j’ai habité à côté de chez lui. Avec sa femme, c’était un peu ma famille. J’ai fait entrer dans le groupe Palle Danielsson, car Charles avait toujours des bassistes qui jouaient faux. Je lui ai dit qu’il fallait absolument en changer, sinon j’allais me casser. J’ai rencontré Palle lors d’un dîner avec Geneviève Peyrègne et Aldo. Palle m’a laissé ses coordonnées et j’ai annoncé à Charles qu’il y avait un contrebassiste qu’il fallait absolument engager. Son nom ne lui disait rien… Je lui ai répondu qu’il avait joué avec Keith Jarrett – je m’étais intéressé à la carrière de Jarrett quand j’ai su que je lui avais en quelque sorte succédé auprès de Charles. Je lui ai fait écouter leur disque, il a trouvé ça super et j’ai appelé Palle… » (À suivre.)
Michel Petrucciani nous a quittés le 6 janvier 1999. Chaque jour jusqu’au 25 janvier, date de la sortie du nouveau numéro de Jazz Magazine dont il fera la Une, retrouvez en vingt épisodes la vie incroyable de ce pianiste hors norme, telle qu’il l’avait racontée à Fred Goaty à l’été 1998.
« Un soir, donc, Charles Lloyd et sa femme Dorothy m’invitent à dîner. Grande maison… Ils nous accueillent – Trox était là aussi –, Charles s’assied, en position bouddhiste. Et on commence à parler. Sa femme traduisait, car je ne parlais toujours pas bien anglais. De toute façon, Charles n’était pas bavard, c’est sa femme qui socialisait. A un moment, il me demande : « Et qu’est-ce que tu fais, toi, dans la vie ? » Je lui réponds que j’essaie de jouer du piano… « Ah bon ? Il y en a un là… » Un Steinway modèle B ! Il y avait un moment que je n’avais pas joué sérieusement, et j’en avais envie. J’ai commencé à jouer. Ma musique avait commencé à changer : ces voyages, ces gens, ces horizons nouveaux… Mais je ne savais toujours pas qui était Charles Lloyd… Je ne connaissais même pas Keith Jarrett ! Je ne connaissais qu’Oscar Peterson, Bill Evans, Erroll Garner, Art Tatum, Thelonious Monk et Bud Powell. Même pas Herbie Hancock ! Lloyd a commencé à s’énerver : « Vous ne me connaissez pas ? Je suis célèbre, j’ai vendu beaucoup de disques ! » Il chantait, il était hystérique, il ne comprenait pas que je puisse ignorer qui il était. Il a disparu, puis est revenu derrière moi, avec son saxophone, et a fait « Pwoa, dou bi woap ! ». On a commencé à jouer, et je découvrais ce son énorme que je n’avais jamais entendu, le vrai son d’un vrai saxophoniste. Le ténor, le gros truc, Coltrane, Rollins, ce genre de volume, de graves… Et puis je vois sa femme qui se met à pleurer… On a joué de minuit à sept heures du matin, sans s’arrêter. Au milieu de la nuit, il a dit : « J’ai trouvé l’avatar du piano, le messager. J’attendais ce pianiste depuis dix ans. Je repars ! » Il a aussitôt appelé ses avocats, son manager, et n’a pas attendu longtemps pour programmer son retour. Quelques jours plus tard, on donnait un concert à Santa-Barbara, au Lobero Theatre. Me voilà en train de jouer devant 2 000 personnes aux Etats-Unis ! En quinze jours-trois semaines, je suis dans tous les journaux, Charles disant que c’était grâce à moi qu’il jouait à nouveau, que j’étais « The french wonderboy from the south of France », celui qui faisait revenir le great master après des années d’absence. Vedette en un mois ! Quand j’étais parti de Montélimar, mon père avait dit que je n’allais faire que des conneries… A mon retour, j’ai rapporté tous les journaux, avec dessus mon nom et ma photo, des cassettes des concerts… C’était la première fois que j’entendais mon nom prononcé à l’américaine : « On piano, Michel Pitroucciani… » J’étais enfin arrivé à jouer là-bas, avec des musiciens avec qui je n’aurais jamais pensé jouer de ma vie. C’était parti ! Je suis resté cinq ans avec Charles Lloyd. » (À suivre.)
Michel Petrucciani nous a quittés le 6 janvier 1999. Chaque jour jusqu’au 25 janvier, date de la sortie du nouveau numéro de Jazz Magazine dont il fera la Une, retrouvez en vingt épisodes la vie incroyable de ce pianiste hors norme, telle qu’il l’avait racontée à Fred Goaty à l’été 1998.
« J’avais un copain, Trox Drohart, qui habitait l’Ardèche, près de Montélimar. Il nous avait entendus lors du concert de 1977 avec Kenny Clarke. Le batteur que nous avions était si mauvais qu’il s’est proposé pour venir jouer avec nous. Il nous avait envoyé une lettre : « Monsieur Petrucciani, je m’appelle Trox Drohart, j’habite dans le coin, j’ai joué avec untel et untel [untel et untel c’était Tal Farlow Lee Konitz, etc.]… » Il ne jouait pas mal, et nous sommes devenus copains. On faisait des fêtes, c’était un vrai hippie. Puis il est retourné aux Etats-Unis, je ne sais plus pourquoi. De là-bas, il m’envoyait des cartes postales : « Il faut que tu viennes ici, y’a des bonnes pâtes… » Alors j’y suis allé ! Mon père ne voulait pas, mais je suis parti quand même. Mais avant de démarrer ma vie en Californie, j’ai enregistré en piano solo pour OWL, en décembre 1981 : “Date With Time”. Quand j’écoute ce disque, dont je ne me souvenais plus le lendemain de la séance, je me dis que je devrais le refaire. [“Date With Time” a été enregistré en 1981 mais n’a été publié que dix ans plus tard, NDLR] Aux Etats-Unis, mon pote Trox faisait un peu de tout pour survivre. Juste avant mon arrivée, il était en train de refaire le toit de la maison du saxophoniste Charles Lloyd. Ce côté prêt à tout, il faut le remettre dans le contexte hippie californien de l’époque… Je me suis installé à Big Sur, à côté de Monterey, dans la campagne. Trox a tout de suite dit à Charles Lloyd : « Tu devrais rencontrer Michel, il est sympa, et il joue bien du piano… » Charles voulait surtout que Trox finisse son boulot : « Occupe-toi de mon toit, et tes copains de France, pas chez moi… » À cette époque, Charles Lloyd, que je ne connaissais pas du tout, ne jouait plus. Il travaillait dans l’immobilier (il possède des terres, des maisons, beaucoup d’argent). Moi, je me suis vite retrouvé à Esalen, un institut de thérapie à Big Sur, pour gens très riches et businessmen stressés, un truc moderne où ils tapent dans des coussins en hurlant « Je te hais ! Je te hais ! » pour faire sortir la violence, la haine, l’angoisse, le stress. Ça coûte vingt ou trente mille dollars… Trox y connaissait des gens et leur a dit : « Michel va vous jouer une heure de piano pour les cours de danse et en échange vous l’hébergerez. » Bon plan ! Je me réveille le matin, après ma première nuit à l’Institut, et je vois une nana à poil devant la fenêtre. Ça faisait partie d’une thérapie. Je me dis : « Oh putain, je sens qu’on va s’amuser ! » Et je me suis bien amusé ! Trip baba cool, feux de camp, grillades… Musicalement, ce n’était pas sérieux du tout. Au bout d’une quinzaine de jours, une femme est venue me voir lors du cours de danse. Une blonde assez jolie, qui parlait bien français : « Je suis Dorothy Darr, l’épouse de Charles Lloyd, j’aime beaucoup le France… » On a commencé à sympathiser… Elle a dû dire à son mari que j’étais un mec cool, pas comme les amis habituels de Trox, pas un fou furieux avec la seringue dans le bras. Et Charles a dû répondre : “Ok, invite-le à la maison…” » (À suivre.)
Michel Petrucciani nous a quittés le 6 janvier 1999. Chaque jour jusqu’au 25 janvier, date de la sortie du nouveau numéro de Jazz Magazine dont il fera la Une, retrouvez en vingt épisodes la vie incroyable de ce pianiste hors norme, telle qu’il l’avait racontée à Fred Goaty à l’été 1998.
« Après le disque “Flash”, Aldo Romano m’a dit que tout ça n’était pas mal, mais qu’il faudrait peut-être faire un autre disque, un peu plus sérieux, et il m’a dit qu’il allait me faire rencontrer le producteur Jean-Jacques Pussiau, qui dirigeait le label OWL Records. Je suis arrivé dans le bureau de Jean-Jacques, je m’en souviens comme si c’était hier. Aldo m’a dit : « Salut Michel, je te présente Jean-Jacques… », et à Jean-Jacques : « Tu connais Michel ? On va faire un disque… » Pussiau a répondu : « Ok, quand ? » Il avait confiance en Aldo et m’a donné carte blanche. Nous sommes allés à Groningue, en Hollande, pour faire ce disque, avec cette copine dont j’étais follement amoureux. J’étais ravi d’aller à l’étranger avec elle, c’était la première fois que je l’avais trois jours pour moi seul. “Michel Petrucciani”, c’était mon premier vrai disque : Aldo à la batterie, Jean-François Jenny-Clark à la contrebasse. C’est drôle, J. F. et moi, on n’a pas flashé, on s’est même disputé, je lui ai dit qu’il ne valait pas Eddie Gomez. C’est moi qui étais con et arrogant. J.F., je le rapprocherais en fait de Gary Peacock, avec qui je n’ai pas accroché non plus, plus tard… Il a un style de contrebasse qui ne “m’enveloppe” pas. Je suis plus attiré par Paul Chambers : il me faut comme deux bras qui me serrent. Il m’avait semblé que J. F. n’était pas complètement motivé pour la séance. Il jouait aux échecs… Aldo, lui, était très motivé. Mais il prend toujours les choses à cœur. Avec Jean-Jacques, j’ai fait mon “premier” disque, avec un vrai distributeur, etc., etc. Et j’ai commencé à jouer régulièrement à Paris, le plus souvent avec Aldo. » (À suivre.)