Echoes of Prince au New Morning : New Power Generation
Echoes Of, c’est un groupe de 10 musiciens de haut vol qui se propose d’explorer et de synthétiser le son d’une ville emblématique du funk. A chaque projet, la ville mise en lumière change, et un chanteur différent vient les rejoinder pour en devenir en quelque sorte l’ambassadeur.
Enfonçons une porte ouverte : a priori, cette soirée avait tout d’une mission impossible. De tous les artistes qu’il est simultanément le plus facile d’admirer et difficile de rendre un hommage un tant soit peu crédible, Prince est sans doute le meilleur exemple. Piocher dans son immense discographie, encore mal délimitée à ce jour, est un casse-tête. Le faire dans un club prestigieux, qui évoque forcément aux fans du natif de Minneapolis d’indélébiles souvenirs de ses multiples passages dans la capitale, n’arrange rien. La était tâche est donc de taille.
Sur scène, 3 écrans sur lesquels seront projetés tout au long du spectacle des vidéos de cette plongée dans la musique de Prince complètent les instruments déjà disposés de cette formation adaptée pour l’occasion : basse, batterie et percussions, guitare, claviers, trompette, sax et trombone. Comme l’explique le batteur et leader, Jeeb’s Paliès, la volonté est de créer une véritable immersion dans la musique : “On ne voulait pas faire dans la pâle copie, et on avait la volonté de proposer un vrai spectacle et pas un simple concert, en y apportant notre touche personnelle avec de la video, des costumes, des chorégraphies, et tout faire s’enchaîner sans interruptions. C’est un vrai show !”
Malgré nos plus sincères efforts, nous n’avons pas pu faire de photo à « 1999 ».
Et s’il nous confiait avant le concert avoir sélectionné les morceaux les plus funky de Prince, le premier morceau du set, accompagné d’un groupe de choriste qui avait assuré la 1ère partie, donnera l’occasion au chanteur Malca de faire entendre pour la première fois son falsetto frappant de ressemblance avec celui pourtant inimitable de Prince. A travers sa gestuelle et son timbre, il devient vite évident qu’il lui voue une grande admiration et a fourni un énorme travail d’appropriation de sa sonorité et de ses mouvements, soigneusement étudiés jusque dans leurs moindres details (au point de nous gratifier, vers la fin du set, d’une de ces disparitions éclair dont Prince avait le secret…).
La set list mêle habilement tubes incontournables et morceaux un peu moins connus. Loin de certains projets qui ont autrement moins fait honneur à la musique du génie de Minneapolis, la qualité d’exécution et l’énergie dégagée témoigne d’une vraie connaissance et surtout d’un véritable amour de son univers. Ici, pas de caricature. Ouf. Mais cela peut-il suffire ?
Bien entendu, ici comme ailleurs, on ne demande pas aux musiciens de remplacer l’irremplaçable. Mais la sincérité et la qualité sont là. Surtout, leur jeu montre qu’avant d’être un groupe de reprise « des autres », Echoes Of est un vrai ensemble à la rythmique parfaitement huilée, et dont tous les membres se sont aussi révélés de redoutables solistes. Et force est de constater que ça fonctionne.
Très vite, la musique aidant, on se défait de la méfiance – légitime – dont on s’était blindés par avance pour éviter le sentiment de déception que les “hommages à” peuvent procurer. Le reste du public, qui compte un nombre non négligeable de fans, à certainement l’air d’y trouver son compte. Fans de la première heure et neophytes s’époumonent d’une même voix, et toute cette salle bien remplie bondit littéralement de haut en bas pratiquement tout au long de cette heure de concert. L’un des spectateurs en particulier pousse des cris princiens plus vrai que nature, qui rivalisent avec ceux du chanteur —et presque avec ceux de Prince lui-même — et en fermant les yeux, on se surprend à se demander si on n’a pas là un aperçu de ce à quoi pouvait ressembler une soiréeau New Morning avec Sa Majesté, lorsqu’elle était encore, si l’on ose dire, parmi nous.
Mission accomplie donc ? Tandis que le chanteur s’éclipse sur l’avant dernier morceau du set, la voix de Prince, que le groupe se charge d’accompagner, surgit des hauts parleurs. L’air de nous rappeler qu’il ne s’agissait depuis le début que de continuer à explorer et à revivifier l’inépuisable discographie du King of Funk, qui n’avait rien perdu de son charme ce soir-là.• Yazid Kouloughli
Photo en une : © Quentin Bazoulet