FESTIVAL JAZZ A SETE 2024
15 AU 21 JUILLET
CINQ A SETE
Bravo et merci à Louis Martinez pour la qualité et la diversité de la programmation de la 29 ème édition du Festival Jazz à Sète. Du jazz pluriel et moderne, singulier et grand public, et surtout du jazz métissé, ouvert à toutes les musiques et à toutes les émotions, car il s’agit d’un festival au grand cœur !
Louis Martinez
Le public du Théâtre de la Mer – déchaîné et particulièrement festif – ne s’y est pas trompé, il s’est levé et a dansé tous les soirs…
Pour ma part, j’ai sélectionné cinq coups de cœur correspondants à cinq concerts absolument incontournables et particulièrement réussis de bout en bout.
Lundi 15 juillet
C’est le groupe Knower qui devait ouvrir le festival, mais Louis Cole – le batteur et leader de la formation – est tombé gravement malade et a dû annuler tous ses concerts de l’été. Louis Martinez a eu l’excellente idée de remplacer au pied levé Knower par le quintette du saxophoniste Léon Phal.
Léon Phal
Un musicien qui connait bien les lieux car il était venu présenter son album précédent sur la scène du Théâtre de la Mer en 2021. Et c’est pour le plaisir de tous que Léon Phal et ses amis (le trompettiste Zacharie Ksyk, le claviériste Gauthier Toux, le contrebassiste Rémi Bouyssière et le batteur Arthur Alard) ont présenté avec brio leur dernier album « Stress Kill » au public de Sète. Un son de groupe remarquable, des solistes inventifs et une musique énergique et festive qui manie avec subtilité le groove et l’électro jazz en n’oubliant jamais les racines des grands quintettes du hard-bop (Cannonball Adderley en tête !).
Le Quintette de Léon Phal (photo : Lionel Eskenazi)
Mardi 16 juillet
Attention, les choses sérieuses commencent avec l’arrivée d’une grande star américaine avec une carrière phénoménale qui s’étale sur plus de trente ans ! Il s’agit de la bassiste, chanteuse et compositrice Meshell Ndegeocello qui n’a d’ailleurs jamais eu l’égo d’une star et revendique surtout son appartenance à un groupe de musiciens (aussi talentueux les uns que les autres) : Sur son Tee-Shirt, est inscrit : « Meshell Ndegeocello est UN GROUPE ! ».
Meshell Ndegeocello et ses musiciens
Un groupe passionnant et fusionnel qui mixe avec bonheur chansons pop, folk, soul, groove, et jazz. Une musique riche et dense jouée avec beaucoup d’élégance et de finesse. Pour ceux qui l’ont vue à Jazz à la Villette en septembre dernier – sur le même répertoire – sachez que ce concert à Sète était dix fois mieux, c’est-à-dire : ENORME !
Meshell Ndegeocello (photo : Philippe Laurent)
Mercredi 17 juillet
Il est né le 07.07.77 et dès qu’il est arrivé sur la scène du Théâtre de la Mer, il a donné sa date de naissance en précisant qu’il aimait le chiffre 7 et donc la ville de Sète ! Il s’agit du saxophoniste, compositeur et surtout maintenant chanteur (et quel chanteur !) Thomas de Pourquery.
Thomas de Pourquery
2024 est une année importante pour lui avec un nouveau projet discographique aux accents résolument électro-pop : « Let The Monster Fall » et un nouveau groupe. Il s’agit d’un quintette explosif avec deux vieux complices rythmiques (qui jouaient avec lui dans le groupe DPZ) : l’excellent bassiste et maître du groove Sylvain Daniel – que tout le monde s’arrache – et le fabuleux métronome humain au jeu plein de bruit et de fureur : David Aknin. Un savent fou : Etienne Jaumet, qui maîtrise à la perfection de vieux synthétiseurs modulaires et embouche de temps à autre un saxophone ténor, et enfin une très grande jeune femme : Akemi Fujimori –mi belge, mi japonaise- qui gère différents claviers et assure les chœurs. Un groupe fabuleux qui réussit à créer un son très singulier et cohérent en mettant en avant les très belles mélodies pop des chansons de Thomas (qui nous trottent vite dans la tête) autour d’un groove funky implacable. Thomas de Pourquery est un véritable jazzman, c’est-à-dire qu’il ne propose jamais le même concert et qu’il ne joue jamais à l’identique les morceaux de son album (contrairement aux musiciens pop). Pour donner du piquant et de l’originalité à son concert, il a convié la brillante chanteuse Camelia Jordana à chanter avec lui sur quelques titres, ainsi que son complice trompettiste du Supersonic : Fabrice Martinez.
Thomas de Pourquery et ses musiciens (photo : Lionel Eskenazi)
Jeudi 18 juillet
Une soirée placée sous le signe des droits civiques et de l’égalité des races avec le très beau projet « People Of Earth » du collectif Black Lives – deux ans après avoir enfoncé le clou avec « From Generation to Generation ».
Reggie Washington (photo : Pascal Martos)
Un collectif emmené par le bassiste Reggie Washington, sous la houlette de la productrice Stefany Calembert, qui réunit neuf musiciens exceptionnels et trois vocalistes fabuleux (Sharrif Simmons, Christie Dashiell et Tutu Puoane).
Sharrif Simmons, Christie Dashiell et Tutu Puoane (photo : Lionel Eskenazi)
Aux saxophones : Pierrick Pédron et Jacques Schwarz-Bart, aux claviers : Grégory Privat et Federico Gonzalez Pena, à la guitare : David Gilmore, à la batterie : Gene Lake, au tambour ka : Sonny Troupé et aux platines : DJ Grazzhoppa.
Une partie du collectif Black Lives (photo : Lionel Eskenazi)
Un show à la musique intense et aux paroles inspirées et politisées, qui brasse avec bonheur jazz fusion, musiques caribéennes, hip-hop, soul et musiques africaines. Un très beau combat pour l’égalité, la liberté et la fraternité, autour d’une musique volcanique en ébullition permanente, servie par des musiciens de haut-vol.
Vendredi 19 juillet
Deux jours après Thomas de Pourquery, c’est au tour de son fidèle ami : le trompettiste Fabrice Martinez, de se produire sur la scène du théâtre de la Mer. « Stev’in My Mind » est un superbe projet à la fois ludique et ambitieux, qui reprend le répertoire de Stevie Wonder dans des versions instrumentales, autour de rythmes africains traditionnels, avec une claviériste funky et un guitar-héro de rock-métal ! Le résultat est tout à fait saisissant et fortement singulier.
Fabrice Martinez et ses deux musiciens africains : Romaric Nzaou et Raymond Doumbé
Fabrice Martinez est parti de l’idée que Stevie Wonder est persuadé que ces ancêtres viennent du Ghana- il y passe d’ailleurs beaucoup de temps et a désormais la nationalité ghanéenne – et qu’il s’est amusé à revisiter son répertoire des années 1970 à la moulinette africaine ! Un quintette qui déploie une belle énergie mais aussi une formidable sensualité (la version frissonnante de Visions) avec Betina Kee aux claviers, Julien Lacharme à la guitare, Raymond Doumbé à la basse et celui qui est à la base même du projet et qui propose des polyrythmies africaines saisissantes : le batteur congolais Romaric Nzaou.
Fabrice Martinez et ses musiciens (photo : Lionel Eskenazi)
Lionel Eskenazi.