Alexis Avakian au Sunside
Le sextet d’Alexis Avakian célébrait au Sunset la sortie de son album Miasin.
Alexis Avakian (saxophones et flûte), Ludovic Allainmat (piano), Mauro Gargano (basse), Fabrice Moreau (batterie), Artyom Minasyan (duduk), Rusan Filiztec (saz), mardi 19 mars 2019 au Sunside 75004 Paris.
Le saxophoniste Alexis Avakian trace sa route. Avec cohérence mais en se renouvelant. Depuis trois albums (en comptant Miasin, qui vient de sortir) il tente d’incorporer la tradition arménienne à une musique fermement ancrée dans le jazz, sans édulcorer ni l’une ni l’autre. La tradition arménienne, c’est celle du saz (joué par Miqayel Voskanyan sur l’album, et par Rusan Filiztec ce soir) , et surtout celle du duduk, cet instrument à fleur de peau, à fleur de chant, joué par le virtuose Artyom Minasyan, qui semble de plus en plus à l’aise au sein du groupe, et dont le travail sur l’instrument est de plus en plus varié, comme si la fréquentation des jazzmen l’amenait à explorer de nouveaux territoires. En dehors de ces deux musiciens, c’est une formation de jazz classique, avec une rythmique emmenée par le solide Mauro Gargano, l’inventif Fabrice Moreau, et le délicat Ludovic Allainmat, dont le swing perlé éblouit à chaque intervention.
Quant au leader Alexis Avakian, il apporte son lyrisme dans des interventions sobres et tranchantes où l’influence coltranienne est clairement assumée. C’est lui qui est l’auteur, comme sur les précédents disques, de la quasi-totalité des compositions. Il a une vraie « patte », un véritable univers de compositeur. Ses compositions, à la fois chaleureuses et mélancoliques, déploient leurs spirales avec une belle grâce mélodique. Sur son dernier album Boulevard des Grands Pins et Adieu Mon drôle étaient de très belles réussites. Sur Miasin, Yaoundé et Gugo’s Joke sont de la même qualité d’inspiration. Avec le duduk et le saz, cette musique mélodique et émotive touche rapidement le public. A la fin du premier set, il fait déjà très chaud dans la salle du Sunside. Lorsque duduk et saz sortent momentanément de scène, l’émotion baisse parfois d’un cran, et c’est sans doute un point sur lequel le groupe doit encore faire quelques réglages. Mais à cette petite réserve près, ce jazz infusé de mélancolie arménienne fait décidément mouche.
JF Mondot