André Prévin and his friends
On pleure ce matin sur les ondes la mort d’André Prévin, le concertiste, le symphoniste, le compositeur de musiques de film et d’opéra. Il était aussi des nôtres, nous qui aimons le jazz comme il l’aimait mais “pas que”.
Andreas Ludwig Priwin était né le 6 avril 1929 à Berlin. Fuyant le nazisme et l’antisémitisme, sa famille s’était réfugiée à Los Angeles en 1938 où son éducation musicale l’amena rapidement à fréquenter les studios d’Hollywood, comme arrangeur, compositeur, mais aussi comme chef d’orchestre, discipline qu’il avait étudiée auprès du grand Pierre Monteux au cours de son service militaire à San Francisco de 1951 à 1952 et qu’il lui permit de diriger les orchestres symphoniques les plus prestigieux. Mais il fut aussi l’un des rares issus du sérail de la musique classique à s’imposer comme un authentique pianiste de jazz dans le monde du bebop et plus particulièrement sur la Côte Ouest où il enregistra dès 1945 pour les marques Sunset et Monarch en trio ou quartette (avec notamment le guitariste Irving Ashby, le contrebassiste Red Callender et le batteur Lee Young, frère de Lester). Il ne fut désormais plus guère une année où il ne se rende en trio pour enregistrer seul ou en formation dans les studios Victor-RCA, parfois avec les cordes d’Hollywood. En 1953, c’est pourtant pour la petite marque Tops qu’il enregistre son premier disque important “André Prévin Plays Fats Waller” en compagnie de Buddy Clark et Shelly Manne qui deviendra son batteur de prédilection et qu’il retrouve dès l’année suivante lorsqu’il sera adoubé par la crème du jazz West Coast, les Giants de Shorty Rogers (“Collaboration” chez Victor avec Milt Bernhardt, Bud Shank, Bob Cooper, Jimmy Giuffre, Curtis Counce ou Joe Mondragon…). En 1955, il est sollicité par Ella Fitzgerald pour dirigé l’orchestre de “Sweet and Hot”. Il participera à la bataille “West Coast Versus East Coast” organisée en 1956 par Leonard Feather, aux moyennes formations de Dave Pell (“Love Story”), Barney Kessel (“Music To Listen”, “Plays Carmen”), Benny Carter (“Jazz Giant”), Helen Humes (“Tain’t Nobody Business If I Do”)… Mais c’est son travail en trio (ou quartette avec guitare) sous son nom où celui de Shelly Manne (“Shelly Manne and His Friends” proclamait un premier album Contemporary de 1956) qui aura la faveur des jazzfans, souvent autour de programmes de comédies musicales (“Lil’ Abner”, “Pal Joey”, “Gigi”, “West Side Story”). On le réécoutera également en solo sur les répertoires de leurs grands compositeurs (“Songs By Vernon Duke”, “Songs by Jerome Kern”, “Plays Harold Arlen”), croisant le fer avec le pianiste Russ Freeman, Shelly Manne faisant l’arbitre (“Double Play”) ou cosignant avec Gerry Mulligan la musique du film The Suberraneans (Les Rats de cave) d’après Jack Kerouac, qu’il confia à Carmen McRae et ses fidèles amis Red Mitchell et Shelly Manne.
André Prévin est mort hier, 28 février.