Au Sunset, 3 ténors pour Bex & Goubert
Séduit par le disque Trois Ténors pour Bex et Goubert [Menuau, Merel, Ripoche] «Fleurette Africaine» (Tinker Label / l’autre distribution), paru en juin,
le chroniqueur voulait entendre ‘sur le vif’ cette belle brochette de saxophonistes de l’Ouest de la France au côté des effervescents Emmanuel Bex et Simon Goubert. Ce qui fut fait rue des Lombards, pour une beau moment de jazz intensément vivant
TROIS TÉNORS pour Emmanuel Bex & Simon Goubert
Pierrick Menuau, Pierre-Yves Merel, François Ripoche (saxophones ténors), Emmanuel Bex (orgue), Simon Goubert (batterie)
Paris, Sunset, 20 décembre 2022
Une plongée dans le Sunset, sous le Sunside, comme au bon vieux temps des années 80 (l’arrivée du chroniqueur dans ‘la capitale’, quand le rez-de-chaussée accueillait un restaurant), et une bouffée salutaire de jazz presque à l‘ancienne, quand la technologie et les formatages n’avaient pas nivelé une partie du paysage jazzistique. L’idée de ce trio de sax est venue à Pierrick Menuau d’une rencontre qu’il fit à Washington D.C., pendant ses années de formation. Il était allé écouter un saxophoniste nommé Clyde Dickerson (mort en 2003) au sein d’un groupe baptisé ‘A Lester Young Tribute’, avec deux autres ténors, Byron Morris et Ron Holloway. Des trois ténors de ce soir, deux m’étaient déjà connus depuis pas mal d’années (j’avais eu le plaisir de les présenter sur scène) ; mais j’avais découvert Pierre-Yves Merel sur le récent disque cité en introduction. Sur scène les trois saxophonistes dissimulent à notre regard Simon Goubert, retranché derrières ses fûts (et ses cymbales haut-perchées), tandis qu’Emmanuel Bex officie à cour derrière son orgue augmenté.
Ils commencent up tempo, avec le premier titre du disque : plus qu’un tour de chauffe, c’est un manifeste : ça va barder. Et c’est une chase digne de la grande époque, un duel d’invention et de funambulisme. L’amateur jubile ! Le concert ne déroule pas le disque dans l’ordre, car voici Blue Rose, écrit par Duke Ellington pour Rosemary Clooney en 1956 : une intro à l’orgue, un solo d’esprit mainstream par Pierrick Menuau, puis un autre, plus transgressif, de Pierre-Yves Merel. Les saxophonistes jouent leur palette, et pour chacun il y a plus d’une couleur…. Maintenant c’est une composition du dernier nommé : intro de batterie avec un festival de timbres aux mille couleurs. Exposé par l’orgue, jeu en section des sax : les arrangements, signés par le clarinettiste tourangeau Olivier Thémines, sont très subtils. D’autres solos des sax, avec au fil du concert des échanges explosifs de chacun avec la batterie de Simon Goubert. Il y aura aussi un duo totalement déjanté entre Simon et Emmanuel Bex : du Grand Jazz Vivant !!!
Au début du second set, African Flower du Duke, introduit par un récital de mailloches sur les peaux : régal ! Je ne vais pas vous narrer par le menu ce concert, d’autant que, vers 22h35, il m’a fallu déserter et courir pour attraper le dernier RER (sempiternels travaux de soirée….). Je croyais avoir tout prévu : ligne 4 du métro fermée à 22h15, je prévoyais la 14…. mais elle est en travaux ! Je cours jusqu’au RER ‘B’, et finalement je rejoins la correspondance avec le dernier RER pour ma destination sur la ‘E’. Calvaire coutumier du jazzophile de la Banlieue Est, mais la soirée, même écourtée, valait franchement la peine !
Xavier Prévost