BENJAMIN MOUSSAY QUARTET MHJC au Triton
Benjamin Moussay (piano), Daniel Humair (batterie), François Jeanneau (saxophones soprano), Bruno Chevillon (contrebasse)
Les Lilas, Le Triton, 20 mai 2022, 20h30
Un événement exceptionnel, dans le cadre du compagnonnage du pianiste Benjamin Moussay avec Le Triton : l’occasion pour lui d’inviter des musiciens qui sont, dit-il, les héros de sa jeunesse. François Jeanneau, qui dirigeait le département de Jazz du Conservatoire National Supérieur de Paris quand le pianiste y terminait sa formation ; un musicien qu’il avait déjà accueilli dans son groupe ici même, au Triton. Daniel Humair et Bruno Chevillon, avec qui il avait joué en trio dans ce même lieu. Mais cette rencontre en quartette est une première. Le répertoire sera majoritairement emprunté aux compositions signées par le saxophoniste et le batteur pour le fameux trio Humair-Jeanneau-Texier, emblème musical de la fin des années 70, et qui fait encore référence dans le paysage européen.
Le concert commence par un sorte de répons entre la batterie et le sax soprano, puis le quartette s’engage dans un tissage fourni de notes, de rythmes et de timbres qui nous rappelle que la musique, comme toute activité artistique, et plus largement humaine, est une tension constante entre la matière et l’idée. Et c’est le solo de piano qui va échapper à ce dilemme en fracturant par instants tous les codes.
Les classiques du fameux trio H.J.T. (des différentes époques : fin des années 70, et 1990) vont se succéder, et parfois s’entremêler : Bram van Velde, Suite éolienne, Maghreb de canard, Zipper’s teaseuse, Arfia…. Il y aura aussi des compositions de Benjamin Moussay, et pour conclure le fameux Akagera, cosigné naguère par les trois membres du trio H.J.T.
Le tempo sera souvent vif, et l’effervescence maximale. L’interaction est constante entre les quatre musiciens, totalement investis et manifestement heureux de ce moment de musique. Daniel Humair est en grande forme, et dans un passage en trio, tandis que François Jeanneau s’est écarté à cour pour offrir ses trois partenaires à nos regards, je vois le visage du batteur s’illuminer d’une expression extatique : Benjamin Moussay se lance, sans filet, dans des traits insensés, Bruno Chevillon attise le feu, et je vois sur le visage de Daniel Humair cette expression qu’il avait naguère, au plus fort des échanges avec Joachim Kühn et Jean-François Jenny-Clark. Illusion furtive du vieil amateur que je suis ? Peut-être….
François Jeanneau aura constamment, en binôme avec Daniel Humair, joué le rôle de pivot de cette belle rencontre, entre mémoire et urgence d’un présent qui s’affirme.
En rappel, nous auront droit à une impro collective et, après un tintement de cymbale faussement conclusif, à une ultime composition. On espère déjà retrouver ce groupe, tant le bonheur de l’écouter fut intense.
Xavier Prévost
Le concert a été filmé. sera prochainement disponible en VOD sur le site du Triton