Bergamo Jazz, première soirée. Bergame, Italie, 17 mars.
Faut-il venir en Italie pour voir jouer Franco D’Andrea ? Apparemment non, puisque le pianiste est annoncé au Sunside dans une semaine ! Tant pis : l’invitation du festival de Bergame a été acceptée bien avant l’annonce du programme du club parisien — ou plutôt tant mieux, puisque D’Andrea ne se produit pas dans les mêmes formations dans les deux lieux.
Franco D’Andrea Trio « Tradition today » + invité : Franco D’Andrea (p), Daniele D’Agaro (cl), Mauro Ottolini (tb) + Han Bennink (caisse-claire) ; Ryan Keberle & Catharsis : Ryan Keberle (tb), Camila Meza (voc), Mike Rodriguez (tp), Jorge Roeder (b), Eric Doob (d). Teatro Sociale.
Ce soir, c’est donc son trio plus invité. Un invité encombrant par sa stature et sa gestique, mais pas par son instrument : une simple caisse-claire qu’on dirait sortie d’une brocante. On aura reconnu Han Bennink. Et ça débute sur une sorte de ragtime, la clarinette et le trombone enlevant le thème avec une vivacité redoutable tandis que la caisse-claire fait sa folle (tout en maintenant un tempo impeccable) tantôt aux baguettes, tantôt aux balais. Au début, le piano semble avoir du mal à s’extraire de ce brouet « primitif », mais il trouve vite sa place : celle du seul instrument harmonique de ce quartet de bric et de broc qui revisite la préhistoire du jazz en en faisant suinter toute la sève juvénile. Ce qui est formidable, dans cette mise à nu de quatre virtuoses, c’est qu’ils montrent que leurs instruments — souvent devenus hypersophistiqués au niveau du jeu au fil des âges — gardent, à l’état brut, un potentiel expressif, sensoriel, inattendu… phénoménal. Comme si on voyait des animaux apprivoisés — des singes savants… — révéler ce qui ne les a jamais quittés sous le vernis civilisé, poli… (du verbe polir, raboter, dépouiller de ses aspérités : ne l’oublions pas !). Une opération de « dépolissage » salutaire en ces temps de boboïsation du jazz ! Prévisible, l’invitation faite à Dave Douglas de se joindre au quartet, ne donna rien de bien intéressant. On ne rompt pas impunément la magie de la « preuve par quatre ».
L’ai-je dit : ce quartet impeccable se nomme « Tradition today ». Ce qui suit s’appelle « Catharsis ». Vous avez fait du grec au lycée, non ? Ne me décevez pas !
Avec le tromboniste Ryan Keberle on entre justement dans la dimension géographiquement expansionniste du jazz d’aujourd’hui, qui est le contraire de la profondeur ludique et « brute » dont nous parlions à l’instant : c’est jeune, ça joue les thèmes de son dernier disque (sorti sur le label de D. Douglas, enventalasortiduconcertofcourse), ça joue pour la 1° fois en Europe (tiens, dans un festival dont le directeur artistique est Dave D.: suivez l’affaire, mon cher Watson !), ça s’inspire de musiques d’Amérique du sud (que Keberle a beaucoup jouées à… NYC), ça chante en espagnol… bref c’est joli, exotique et, à mes oreilles, totalement ennuyeux. Parce que ça sent le « projet » à plein nez, certes porté à bout de bras par de petits virtuoses sortis d’une ou l’autre de ces écoles de jazz qui pullulent partout-partout. Ca épate par sa mise en place impeccable de propreté mais ça ne raconte rien sinon : « écoutez comme nous sommes jolis à entendre ! ». Question tripes (et, sur ce plan, l’histoire de l’Amérique du sud et comment l’ont traitée les USA, y’a qu’à se pencher et se servir !) vous repasserez. Ici on est au rayon gentils bobos blancs urbains de l’Amérique… du nord… Mais je deviens méchant, là. Non ? Dites-moi. Allez, soyez cool ! Thierry Quénum|Faut-il venir en Italie pour voir jouer Franco D’Andrea ? Apparemment non, puisque le pianiste est annoncé au Sunside dans une semaine ! Tant pis : l’invitation du festival de Bergame a été acceptée bien avant l’annonce du programme du club parisien — ou plutôt tant mieux, puisque D’Andrea ne se produit pas dans les mêmes formations dans les deux lieux.
Franco D’Andrea Trio « Tradition today » + invité : Franco D’Andrea (p), Daniele D’Agaro (cl), Mauro Ottolini (tb) + Han Bennink (caisse-claire) ; Ryan Keberle & Catharsis : Ryan Keberle (tb), Camila Meza (voc), Mike Rodriguez (tp), Jorge Roeder (b), Eric Doob (d). Teatro Sociale.
Ce soir, c’est donc son trio plus invité. Un invité encombrant par sa stature et sa gestique, mais pas par son instrument : une simple caisse-claire qu’on dirait sortie d’une brocante. On aura reconnu Han Bennink. Et ça débute sur une sorte de ragtime, la clarinette et le trombone enlevant le thème avec une vivacité redoutable tandis que la caisse-claire fait sa folle (tout en maintenant un tempo impeccable) tantôt aux baguettes, tantôt aux balais. Au début, le piano semble avoir du mal à s’extraire de ce brouet « primitif », mais il trouve vite sa place : celle du seul instrument harmonique de ce quartet de bric et de broc qui revisite la préhistoire du jazz en en faisant suinter toute la sève juvénile. Ce qui est formidable, dans cette mise à nu de quatre virtuoses, c’est qu’ils montrent que leurs instruments — souvent devenus hypersophistiqués au niveau du jeu au fil des âges — gardent, à l’état brut, un potentiel expressif, sensoriel, inattendu… phénoménal. Comme si on voyait des animaux apprivoisés — des singes savants… — révéler ce qui ne les a jamais quittés sous le vernis civilisé, poli… (du verbe polir, raboter, dépouiller de ses aspérités : ne l’oublions pas !). Une opération de « dépolissage » salutaire en ces temps de boboïsation du jazz ! Prévisible, l’invitation faite à Dave Douglas de se joindre au quartet, ne donna rien de bien intéressant. On ne rompt pas impunément la magie de la « preuve par quatre ».
L’ai-je dit : ce quartet impeccable se nomme « Tradition today ». Ce qui suit s’appelle « Catharsis ». Vous avez fait du grec au lycée, non ? Ne me décevez pas !
Avec le tromboniste Ryan Keberle on entre justement dans la dimension géographiquement expansionniste du jazz d’aujourd’hui, qui est le contraire de la profondeur ludique et « brute » dont nous parlions à l’instant : c’est jeune, ça joue les thèmes de son dernier disque (sorti sur le label de D. Douglas, enventalasortiduconcertofcourse), ça joue pour la 1° fois en Europe (tiens, dans un festival dont le directeur artistique est Dave D.: suivez l’affaire, mon cher Watson !), ça s’inspire de musiques d’Amérique du sud (que Keberle a beaucoup jouées à… NYC), ça chante en espagnol… bref c’est joli, exotique et, à mes oreilles, totalement ennuyeux. Parce que ça sent le « projet » à plein nez, certes porté à bout de bras par de petits virtuoses sortis d’une ou l’autre de ces écoles de jazz qui pullulent partout-partout. Ca épate par sa mise en place impeccable de propreté mais ça ne raconte rien sinon : « écoutez comme nous sommes jolis à entendre ! ». Question tripes (et, sur ce plan, l’histoire de l’Amérique du sud et comment l’ont traitée les USA, y’a qu’à se pencher et se servir !) vous repasserez. Ici on est au rayon gentils bobos blancs urbains de l’Amérique… du nord… Mais je deviens méchant, là. Non ? Dites-moi. Allez, soyez cool ! Thierry Quénum|Faut-il venir en Italie pour voir jouer Franco D’Andrea ? Apparemment non, puisque le pianiste est annoncé au Sunside dans une semaine ! Tant pis : l’invitation du festival de Bergame a été acceptée bien avant l’annonce du programme du club parisien — ou plutôt tant mieux, puisque D’Andrea ne se produit pas dans les mêmes formations dans les deux lieux.
Franco D’Andrea Trio « Tradition today » + invité : Franco D’Andrea (p), Daniele D’Agaro (cl), Mauro Ottolini (tb) + Han Bennink (caisse-claire) ; Ryan Keberle & Catharsis : Ryan Keberle (tb), Camila Meza (voc), Mike Rodriguez (tp), Jorge Roeder (b), Eric Doob (d). Teatro Sociale.
Ce soir, c’est donc son trio plus invité. Un invité encombrant par sa stature et sa gestique, mais pas par son instrument : une simple caisse-claire qu’on dirait sortie d’une brocante. On aura reconnu Han Bennink. Et ça débute sur une sorte de ragtime, la clarinette et le trombone enlevant le thème avec une vivacité redoutable tandis que la caisse-claire fait sa folle (tout en maintenant un tempo impeccable) tantôt aux baguettes, tantôt aux balais. Au début, le piano semble avoir du mal à s’extraire de ce brouet « primitif », mais il trouve vite sa place : celle du seul instrument harmonique de ce quartet de bric et de broc qui revisite la préhistoire du jazz en en faisant suinter toute la sève juvénile. Ce qui est formidable, dans cette mise à nu de quatre virtuoses, c’est qu’ils montrent que leurs instruments — souvent devenus hypersophistiqués au niveau du jeu au fil des âges — gardent, à l’état brut, un potentiel expressif, sensoriel, inattendu… phénoménal. Comme si on voyait des animaux apprivoisés — des singes savants… — révéler ce qui ne les a jamais quittés sous le vernis civilisé, poli… (du verbe polir, raboter, dépouiller de ses aspérités : ne l’oublions pas !). Une opération de « dépolissage » salutaire en ces temps de boboïsation du jazz ! Prévisible, l’invitation faite à Dave Douglas de se joindre au quartet, ne donna rien de bien intéressant. On ne rompt pas impunément la magie de la « preuve par quatre ».
L’ai-je dit : ce quartet impeccable se nomme « Tradition today ». Ce qui suit s’appelle « Catharsis ». Vous avez fait du grec au lycée, non ? Ne me décevez pas !
Avec le tromboniste Ryan Keberle on entre justement dans la dimension géographiquement expansionniste du jazz d’aujourd’hui, qui est le contraire de la profondeur ludique et « brute » dont nous parlions à l’instant : c’est jeune, ça joue les thèmes de son dernier disque (sorti sur le label de D. Douglas, enventalasortiduconcertofcourse), ça joue pour la 1° fois en Europe (tiens, dans un festival dont le directeur artistique est Dave D.: suivez l’affaire, mon cher Watson !), ça s’inspire de musiques d’Amérique du sud (que Keberle a beaucoup jouées à… NYC), ça chante en espagnol… bref c’est joli, exotique et, à mes oreilles, totalement ennuyeux. Parce que ça sent le « projet » à plein nez, certes porté à bout de bras par de petits virtuoses sortis d’une ou l’autre de ces écoles de jazz qui pullulent partout-partout. Ca épate par sa mise en place impeccable de propreté mais ça ne raconte rien sinon : « écoutez comme nous sommes jolis à entendre ! ». Question tripes (et, sur ce plan, l’histoire de l’Amérique du sud et comment l’ont traitée les USA, y’a qu’à se pencher et se servir !) vous repasserez. Ici on est au rayon gentils bobos blancs urbains de l’Amérique… du nord… Mais je deviens méchant, là. Non ? Dites-moi. Allez, soyez cool ! Thierry Quénum|Faut-il venir en Italie pour voir jouer Franco D’Andrea ? Apparemment non, puisque le pianiste est annoncé au Sunside dans une semaine ! Tant pis : l’invitation du festival de Bergame a été acceptée bien avant l’annonce du programme du club parisien — ou plutôt tant mieux, puisque D’Andrea ne se produit pas dans les mêmes formations dans les deux lieux.
Franco D’Andrea Trio « Tradition today » + invité : Franco D’Andrea (p), Daniele D’Agaro (cl), Mauro Ottolini (tb) + Han Bennink (caisse-claire) ; Ryan Keberle & Catharsis : Ryan Keberle (tb), Camila Meza (voc), Mike Rodriguez (tp), Jorge Roeder (b), Eric Doob (d). Teatro Sociale.
Ce soir, c’est donc son trio plus invité. Un invité encombrant par sa stature et sa gestique, mais pas par son instrument : une simple caisse-claire qu’on dirait sortie d’une brocante. On aura reconnu Han Bennink. Et ça débute sur une sorte de ragtime, la clarinette et le trombone enlevant le thème avec une vivacité redoutable tandis que la caisse-claire fait sa folle (tout en maintenant un tempo impeccable) tantôt aux baguettes, tantôt aux balais. Au début, le piano semble avoir du mal à s’extraire de ce brouet « primitif », mais il trouve vite sa place : celle du seul instrument harmonique de ce quartet de bric et de broc qui revisite la préhistoire du jazz en en faisant suinter toute la sève juvénile. Ce qui est formidable, dans cette mise à nu de quatre virtuoses, c’est qu’ils montrent que leurs instruments — souvent devenus hypersophistiqués au niveau du jeu au fil des âges — gardent, à l’état brut, un potentiel expressif, sensoriel, inattendu… phénoménal. Comme si on voyait des animaux apprivoisés — des singes savants… — révéler ce qui ne les a jamais quittés sous le vernis civilisé, poli… (du verbe polir, raboter, dépouiller de ses aspérités : ne l’oublions pas !). Une opération de « dépolissage » salutaire en ces temps de boboïsation du jazz ! Prévisible, l’invitation faite à Dave Douglas de se joindre au quartet, ne donna rien de bien intéressant. On ne rompt pas impunément la magie de la « preuve par quatre ».
L’ai-je dit : ce quartet impeccable se nomme « Tradition today ». Ce qui suit s’appelle « Catharsis ». Vous avez fait du grec au lycée, non ? Ne me décevez pas !
Avec le tromboniste Ryan Keberle on entre justement dans la dimension géographiquement expansionniste du jazz d’aujourd’hui, qui est le contraire de la profondeur ludique et « brute » dont nous parlions à l’instant : c’est jeune, ça joue les thèmes de son dernier disque (sorti sur le label de D. Douglas, enventalasortiduconcertofcourse), ça joue pour la 1° fois en Europe (tiens, dans un festival dont le directeur artistique est Dave D.: suivez l’affaire, mon cher Watson !), ça s’inspire de musiques d’Amérique du sud (que Keberle a beaucoup jouées à… NYC), ça chante en espagnol… bref c’est joli, exotique et, à mes oreilles, totalement ennuyeux. Parce que ça sent le « projet » à plein nez, certes porté à bout de bras par de petits virtuoses sortis d’une ou l’autre de ces écoles de jazz qui pullulent partout-partout. Ca épate par sa mise en place impeccable de propreté mais ça ne raconte rien sinon : « écoutez comme nous sommes jolis à entendre ! ». Question tripes (et, sur ce plan, l’histoire de l’Amérique du sud et comment l’ont traitée les USA, y’a qu’à se pencher et se servir !) vous repasserez. Ici on est au rayon gentils bobos blancs urbains de l’Amérique… du nord… Mais je deviens méchant, là. Non ? Dites-moi. Allez, soyez cool ! Thierry Quénum