BRUNO ANGELINI-DANIEL ERDMANN «La dernière nuit»

Premier concert à l’horaire du couvre feu pour la Dynamo des Banlieues Bleues, et début de soirée d’une forte intensité musicale et émotionnelle

Bruno Angelini (piano), Daniel Erdmann (saxophone ténor)

Pantin, La Dynamo, 19 octobre 2020, 19h

En prélude, Bruno Angelini dit quelques mots à propos de la genèse de ce programme musical très particulier, évoquant deux jeunes gens, Sophie Scholl et son frère Hans, qui incarnèrent l’opposition allemande à Hitler en 1943, et qui furent condamnés à mort pour avoir distribué des tracts hostiles au régime nazi. Bruno rappelle le premier concert spectacle, en 2017, sur un texte d’Alban Lefranc, qui a imaginé le songe de Sophie Scholl au cours de la nuit qui précéda l’exécution. Le concert, comme le disque publié voici quelques mois («La dernière nuit», Angelini-Erdmann AE 001, disponible sur les plateformes), est une évocation purement musicale de cet événement, et du texte qui le relate.

Le propos n’est pas d’illustrer, mais bien d’évoquer, au sens originel de ce terme : faire parler les esprits. Ce pourrait être aussi une invocation, une sorte d’incantation profane, une évasion spirituelle vers l’humanisme et la beauté. La musique prend à toutes les sources du jazz et de la musique improvisée d’aujourd’hui : développement modal sur des canevas qui portent à la méditation, lignes mélodiques fragmentées aux intervalles distendus qui tendent vers le sérialisme, mais aussi douceur des ballades, avec l’intensité expressive et la liberté du jazz. Mélancolie, tristesse, révolte mais aussi espoir se laissent entendre dans cette musique.

Nous public sommes happés, et captifs de cette intensité, et à la fin de chaque séquence, un long silence précède de chaleureux applaudissements, comme si l’on craignait de troubler l’intensité de cette cérémonie secrète. Bref, ce fut un concentré de beauté, de densité musicale et d’expression au plus haut niveau.