CLAUD TERRANOVA : Trio + Symphonique
On est juste en face du Théâtre de la Commune d’Aubervilliers, pour un concert où se mêlaient Debussy (Prélude à l’après-midi d’un faune), Ravel (Shéhérazade), De Falla (Les Tréteaux de Maître Pierre)…. et une création du pianiste Claude Terranova pour trio de jazz et orchestre symphonique.
Cela se passait dans le cadre des 50 ans du Conservatoire d’Aubervilliers, le CRR 93 Jack Ralite : le Conservatoire à Rayonnement Régional porte désormais le nom d’un ancien ministre communiste, qui n’officia pas à la culture mais à la santé, et fut pourtant un activiste de la culture (tendance ‘élitaire pour Tous’, comme disait Antoine Vitez), à l’Assemblée Nationale, et dans cette ville dont il fut maire.
CLAUDE TERRANOVA : Langages (pour trio de jazz & Orchestre Symphonique)
Claude Terranova (piano, composition), François Laizeau (batterie), Volodia Lambert (contrebasse)
Orchestre Symphonique du CRR 93 Jack Ralite, direction Alexandre Grandé
Aubervilliers, CRR 93 Jack Ralite, 22 avril, 17h
L’œuvre, en création, a déjà été donnée la veille, vendredi soir, lors du premier concert, et elle ouvre à nouveau le programme. Comme le pluriel de son titre l’annonce, elle mêle les langages : ceux des musiques dites savantes du 20ème siècle (et du 21ème naissant), du jazz, avec aussi des échos des musiques populaires et traditionnelles d’ici et d’ailleurs.
Le trio associe le compositeur, pianiste, qui enseigne le jazz dans ce conservatoire ; un contrebassiste que l’on commence à découvrir dans les groupes de jazz, et qui a été formé ici-même ; et un batteur qui est une référence dans le jazz d’ici, et même d’ailleurs.
L’entrée en musique se fait par l’orchestre, et plus précisément d’abord par des notes éparses, de la flûte, des clarinettes, rejointes ensuite par un cor, une percussion. Hors de tout centre de tonalité, l’impression est que, si toutes ces notes étaient liées, cela pourrait faire une phrase de Bartók sur tempo lent. Viennent les cordes, harmonies tendues, et fragments thématiques (illusion? Je crois entendre citer une chanson des siècles passés : J’ai du bon tabac). La cymbale de la batterie annonce l’entrée du piano, et du trio, qui va embarquer tout l’orchestre dans un tourbillon hypnotique. Le jazz est là, et même un peu de jazz fusion, avec ses motifs récurrents, ses éclats et ses contrastes. Le piano s’exprime avec force, et là encore je crois entendre le retour de J’ai du bon tabac….. Solo de la contrebasse-jazz à l’archet, et du piano aussi, l’un et l’autre un peu ‘à l’orientale’. La musique s’émaille de rythmes impairs. Tous ces langages cohabitent, parfois en alternance, parfois en osmose. Belle adéquation de l’écriture et des interprètes (le trio, et l’orchestre, lequel est aussi totalement investi). Projet ambitieux, résultat convaincant : c’est une réussite.
Xavier Prévost