Concert à la bougie au Sunside : PIERRE de BETHMANN
Soirée événement au Sunside (on en parle même le lendemain aux infos sur les médias généralistes !) : le premier concert à la bougie du club historique de la Rue des Lombards. C’est dans l’air du temps (sobriété civique, alourdissement des factures d’énergie….). L’art et la musique répondraient-ils à l’injonction ambiante ? En fait, cette initiative a trouvé sa source, voici quelques mois, lors d’une panne d’électricité qui conduisit à terminer le concert sans sono ni lumière….
PIERRE de BETHMANN (piano solo)
Paris, Sunside, 3 janvier 2023, 19h30
L’essentiel réside, comme toujours, dans la musique. Sans sonorisation, le piano donne la vérité de ses ressources naturelles. Et l’instrument est de belle qualité. L’obscurité favorise la communication intime entre le piano et le pianiste, entre le pianiste et le public, entre la musique et les personnes qui l’écoutent. Silence absolu dans la salle (là où souvent, dans les clubs – voire les salles de concert – le bavardage peut faire écran sonore….). Quelques sobres mots du pianiste, et le concert commence. On dirait que l’on va aller du côté de Debussy. Mais non, c’est Chaud froid, titre éponyme du récent disque paru chez Paradis Improvisé. Puis on va vers autre chose : une pompe limpide de la main gauche tandis que la dextre s’émancipe des formalités tonales, avec aussi quelques dissonances monkiennes , assumées. D’ailleurs Monk va suivre, avec une version très libre d’ Introspection. Puis d’autres thèmes du récent solo, parfois issus de versions antérieures en groupe. Et des standards, traités avec un amour libre tel que le jazz le pratique depuis son origine avec bonheur. Grand moment de piano, de musique, et d’intimité partagée avec le public. La salle est pleine, comme dans la chanson de Nougaro (À bout de souffle, 1965) : «La boîte était pleine comme un œuf….», mais on n’est pas au défunt Living Room, près des Champs-Élysées ; la suite de la chanson disait «…. deux ou trois jazzmen faisaient le bœuf». Il y aura bien une jam session pour le second set mais le chroniqueur sera parti prendre le dernier RER, aujourd’hui un peu après 22h, alors que les horaires affichés en gare annoncent un service jusqu’à une heure du mat’ : calvaire récurrent du jazzophile qui aimerait être encore noctambule. Mais quel beau moment de musique que ce clair solo dans l’obscurité !
Xavier Prévost
L’expérience du ‘concert à la bougie’ sera renouvelée au Sunside un mardi par mois jusqu’en mars, puis chaque semaine à partir d’avril