Cuadernos de Jazz, 25e anniversaire à Madrid
En guise de présentation elle est censée donner l’ordre du jour de cette soirée spéciale. Pourtant à la simple évocation du prénom de son mari disparu, la Directrice des Cuadernos del Jazz s’affiche émue aux larmes. Plus tard dans la soirée, au départ du second concert Ramon Lopez lui fait un cadeau surprise: un tableau peinture sur photographie traçant le portrait saisissant de Raul Mao époux co-fondateur de la revue espagnole. A Maria Antonia cette fois l’émotion lui traverse le corps. Le premier coup de cymbale intervient une délivrance.
Concert hommage à Raul Mao et 25e anniversaire de la revue Cuaderonos de Jazz
Clamores, Madrid, 30 avril
Agusti Fernández (p), Lucía Martinez (dm)
Joachim Kuhn (p), Ramon Lopez (dm, perc), Ernesto Aurignac (as)
Des notes pour la plupart éclatées. Telles des météorites lâchées dans l’espace sans espoir de les revoir un jour intactes. Phrases lâchées, taillées, satellisées entières ou quasi pulvérisées. Ainsi exposée dans l’instant présent la musique d’Agusti Fernandez relève de la volcanologie. Née à même le clavier elle procède par éruptions successives saillies du ventre du piano. L’improvisation totale, volontariste, militante s’affirme comme une doxa sans exception. Assis devant son clavier, ou debout les mains plongées dans le réseau des cordes il s’active. Toute construction, fut-elle fugace, s’oblige à une déconstruction prochaine « Le pianiste joue dans les extrêmes » analyse un autre musicien espagnol présent dans la salle. En complément, en contrepoint Lucia Martinez oeuvre dans le même sens. Ses caisses, ses cymbales ne se limitent en aucune façon à un rôle uniquement rythmique. Dans cette formule en duo toute initiative de la batterie, des percussions, des gadgets ou accessoires annexes sont autant d’occasion de sources, de métamorphoses sonores. Simplement la percussion de Lucia Martinez révèle une caractéristique féminine, nuancée, subtile, teintée de couleurs moirées. On peut y sentir qui sait comme une manière d’apaisement. Il y a de l’écoute entre les deux protagonistes. Beaucoup de regard aussi pour prendre l’information. De la rencontre fortuite naît une forme de complicité immédiate. Et lorsqu’au final, hommage parmi les hommages, Agusti Fernandez livre, seul, tout en délicatesse une de ses compositions, La Processó que « Raul Mao aimait particulièrement », l’émotion ambiante monte encore d’un cran.
Clamores a fait le plein pour cette occasion unique, exceptionnelle « Exceptionnelle oui à plus d’un titre remarque Baldo Martinez, bassiste et figure du jazz contemporain en Espagne. Un concert unique, une musique aussi libre partagée par deux orchestres successifs: on aura rarement entendu cela dans ce lieu, à Madrid et même en Espagne en général » Des musiciens, des producteurs, des journalistes: le petit mundillo du jazz est présent ce soir là. La célébration du souvenir de Raul Mao, fondateur et directeur de Cuadernos de Jazz qui a paru en version papier vingt années durant avant de se perpétue désormais exclusivement sur le web (cuadernosdejazz.com) aura servi d’une certaine façon de totem pour une musique à ce jour d’une audience encore très limitée dans la péninsule ibérique.
Emotion, figure totémique, engagement total sur l’instrument: ces mots conviennent bien à Joachim Kuhn, second protagoniste avec son trio de la soirée Clamores. Construction et déconstruction à nouveau en phases enchainées à dessein. Le pianiste allemand vivant à Ibiza ajoute au beau milieu de ses vagues harmoniques et série de furies rythmiques un lyrisme de tout les instants. Des compositions originales « Transmitting » comme une ode à la danse; des clins d’oeil respectueux mais personnellement inspirés vis à vis’ Ornette Coleman « Homogenous Emotions », et le très dense « Researching has no limit »; un hommage amical lui aussi à la figure célébrée « Raul: In Memory » Toute la matière musicale de ce set est mise au service du trio. Le jazz selon Joachim -« une série de plateformes préconçues mise à à disposition des musiciens pour qu’ils s’en saisissent et les transforment »- évolue sous le souffle de vents porteurs. Source de richesses et de surprises toujours. Car le moins que l’on puisse dire du musicien allemand c’est qu’il est, en live, imprévisible. Souffle, un mot qui va bien avec la manière du jeune musicien espagnol Ernesto Aurignac présent pour la première fois aux côtés du pianiste allemand. Un son de sax alto très présent, épais, tranchant au besoin. Une inspiration clairement située du côté d’Ornette carre parfaitement avec la matière jouée. De la force et une certaine forme de finesse cumulées. Troisième composante du trio et comparse habituel de Kuhn, Ramon Lopez est un « monumento » de musicalité. Accentuations, ponctuation, art de souligner ou de relancer, le batteur originaire d’Alicante depuis longtemps a dompté toutes les nécessité de la percussion. Sa complicité établie avec Joachim Kuhn lui permet en outre de de deviner donc d’anticiper, toutes mimiques bues, les intentions, les inflexions, l’inspiration donc du pianiste leader;
Dans la salle, petite silhouette aux habits sombre, Maria Antonia Garcia pensait sans doute que cette célébration intitulée Soñando con Jazz ne représentait finalement pas seulement un rêve. Mais l(espace d’une
nuit madrilène de printemps une musique portée par des musiciens amis, bienveillants. Le jazz comme une humanité.
Robert Latxague
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En guise de présentation elle est censée donner l’ordre du jour de cette soirée spéciale. Pourtant à la simple évocation du prénom de son mari disparu, la Directrice des Cuadernos del Jazz s’affiche émue aux larmes. Plus tard dans la soirée, au départ du second concert Ramon Lopez lui fait un cadeau surprise: un tableau peinture sur photographie traçant le portrait saisissant de Raul Mao époux co-fondateur de la revue espagnole. A Maria Antonia cette fois l’émotion lui traverse le corps. Le premier coup de cymbale intervient une délivrance.
Concert hommage à Raul Mao et 25e anniversaire de la revue Cuaderonos de Jazz
Clamores, Madrid, 30 avril
Agusti Fernández (p), Lucía Martinez (dm)
Joachim Kuhn (p), Ramon Lopez (dm, perc), Ernesto Aurignac (as)
Des notes pour la plupart éclatées. Telles des météorites lâchées dans l’espace sans espoir de les revoir un jour intactes. Phrases lâchées, taillées, satellisées entières ou quasi pulvérisées. Ainsi exposée dans l’instant présent la musique d’Agusti Fernandez relève de la volcanologie. Née à même le clavier elle procède par éruptions successives saillies du ventre du piano. L’improvisation totale, volontariste, militante s’affirme comme une doxa sans exception. Assis devant son clavier, ou debout les mains plongées dans le réseau des cordes il s’active. Toute construction, fut-elle fugace, s’oblige à une déconstruction prochaine « Le pianiste joue dans les extrêmes » analyse un autre musicien espagnol présent dans la salle. En complément, en contrepoint Lucia Martinez oeuvre dans le même sens. Ses caisses, ses cymbales ne se limitent en aucune façon à un rôle uniquement rythmique. Dans cette formule en duo toute initiative de la batterie, des percussions, des gadgets ou accessoires annexes sont autant d’occasion de sources, de métamorphoses sonores. Simplement la percussion de Lucia Martinez révèle une caractéristique féminine, nuancée, subtile, teintée de couleurs moirées. On peut y sentir qui sait comme une manière d’apaisement. Il y a de l’écoute entre les deux protagonistes. Beaucoup de regard aussi pour prendre l’information. De la rencontre fortuite naît une forme de complicité immédiate. Et lorsqu’au final, hommage parmi les hommages, Agusti Fernandez livre, seul, tout en délicatesse une de ses compositions, La Processó que « Raul Mao aimait particulièrement », l’émotion ambiante monte encore d’un cran.
Clamores a fait le plein pour cette occasion unique, exceptionnelle « Exceptionnelle oui à plus d’un titre remarque Baldo Martinez, bassiste et figure du jazz contemporain en Espagne. Un concert unique, une musique aussi libre partagée par deux orchestres successifs: on aura rarement entendu cela dans ce lieu, à Madrid et même en Espagne en général » Des musiciens, des producteurs, des journalistes: le petit mundillo du jazz est présent ce soir là. La célébration du souvenir de Raul Mao, fondateur et directeur de Cuadernos de Jazz qui a paru en version papier vingt années durant avant de se perpétue désormais exclusivement sur le web (cuadernosdejazz.com) aura servi d’une certaine façon de totem pour une musique à ce jour d’une audience encore très limitée dans la péninsule ibérique.
Emotion, figure totémique, engagement total sur l’instrument: ces mots conviennent bien à Joachim Kuhn, second protagoniste avec son trio de la soirée Clamores. Construction et déconstruction à nouveau en phases enchainées à dessein. Le pianiste allemand vivant à Ibiza ajoute au beau milieu de ses vagues harmoniques et série de furies rythmiques un lyrisme de tout les instants. Des compositions originales « Transmitting » comme une ode à la danse; des clins d’oeil respectueux mais personnellement inspirés vis à vis’ Ornette Coleman « Homogenous Emotions », et le très dense « Researching has no limit »; un hommage amical lui aussi à la figure célébrée « Raul: In Memory » Toute la matière musicale de ce set est mise au service du trio. Le jazz selon Joachim -« une série de plateformes préconçues mise à à disposition des musiciens pour qu’ils s’en saisissent et les transforment »- évolue sous le souffle de vents porteurs. Source de richesses et de surprises toujours. Car le moins que l’on puisse dire du musicien allemand c’est qu’il est, en live, imprévisible. Souffle, un mot qui va bien avec la manière du jeune musicien espagnol Ernesto Aurignac présent pour la première fois aux côtés du pianiste allemand. Un son de sax alto très présent, épais, tranchant au besoin. Une inspiration clairement située du côté d’Ornette carre parfaitement avec la matière jouée. De la force et une certaine forme de finesse cumulées. Troisième composante du trio et comparse habituel de Kuhn, Ramon Lopez est un « monumento » de musicalité. Accentuations, ponctuation, art de souligner ou de relancer, le batteur originaire d’Alicante depuis longtemps a dompté toutes les nécessité de la percussion. Sa complicité établie avec Joachim Kuhn lui permet en outre de de deviner donc d’anticiper, toutes mimiques bues, les intentions, les inflexions, l’inspiration donc du pianiste leader;
Dans la salle, petite silhouette aux habits sombre, Maria Antonia Garcia pensait sans doute que cette célébration intitulée Soñando con Jazz ne représentait finalement pas seulement un rêve. Mais l(espace d’une
nuit madrilène de printemps une musique portée par des musiciens amis, bienveillants. Le jazz comme une humanité.
Robert Latxague
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En guise de présentation elle est censée donner l’ordre du jour de cette soirée spéciale. Pourtant à la simple évocation du prénom de son mari disparu, la Directrice des Cuadernos del Jazz s’affiche émue aux larmes. Plus tard dans la soirée, au départ du second concert Ramon Lopez lui fait un cadeau surprise: un tableau peinture sur photographie traçant le portrait saisissant de Raul Mao époux co-fondateur de la revue espagnole. A Maria Antonia cette fois l’émotion lui traverse le corps. Le premier coup de cymbale intervient une délivrance.
Concert hommage à Raul Mao et 25e anniversaire de la revue Cuaderonos de Jazz
Clamores, Madrid, 30 avril
Agusti Fernández (p), Lucía Martinez (dm)
Joachim Kuhn (p), Ramon Lopez (dm, perc), Ernesto Aurignac (as)
Des notes pour la plupart éclatées. Telles des météorites lâchées dans l’espace sans espoir de les revoir un jour intactes. Phrases lâchées, taillées, satellisées entières ou quasi pulvérisées. Ainsi exposée dans l’instant présent la musique d’Agusti Fernandez relève de la volcanologie. Née à même le clavier elle procède par éruptions successives saillies du ventre du piano. L’improvisation totale, volontariste, militante s’affirme comme une doxa sans exception. Assis devant son clavier, ou debout les mains plongées dans le réseau des cordes il s’active. Toute construction, fut-elle fugace, s’oblige à une déconstruction prochaine « Le pianiste joue dans les extrêmes » analyse un autre musicien espagnol présent dans la salle. En complément, en contrepoint Lucia Martinez oeuvre dans le même sens. Ses caisses, ses cymbales ne se limitent en aucune façon à un rôle uniquement rythmique. Dans cette formule en duo toute initiative de la batterie, des percussions, des gadgets ou accessoires annexes sont autant d’occasion de sources, de métamorphoses sonores. Simplement la percussion de Lucia Martinez révèle une caractéristique féminine, nuancée, subtile, teintée de couleurs moirées. On peut y sentir qui sait comme une manière d’apaisement. Il y a de l’écoute entre les deux protagonistes. Beaucoup de regard aussi pour prendre l’information. De la rencontre fortuite naît une forme de complicité immédiate. Et lorsqu’au final, hommage parmi les hommages, Agusti Fernandez livre, seul, tout en délicatesse une de ses compositions, La Processó que « Raul Mao aimait particulièrement », l’émotion ambiante monte encore d’un cran.
Clamores a fait le plein pour cette occasion unique, exceptionnelle « Exceptionnelle oui à plus d’un titre remarque Baldo Martinez, bassiste et figure du jazz contemporain en Espagne. Un concert unique, une musique aussi libre partagée par deux orchestres successifs: on aura rarement entendu cela dans ce lieu, à Madrid et même en Espagne en général » Des musiciens, des producteurs, des journalistes: le petit mundillo du jazz est présent ce soir là. La célébration du souvenir de Raul Mao, fondateur et directeur de Cuadernos de Jazz qui a paru en version papier vingt années durant avant de se perpétue désormais exclusivement sur le web (cuadernosdejazz.com) aura servi d’une certaine façon de totem pour une musique à ce jour d’une audience encore très limitée dans la péninsule ibérique.
Emotion, figure totémique, engagement total sur l’instrument: ces mots conviennent bien à Joachim Kuhn, second protagoniste avec son trio de la soirée Clamores. Construction et déconstruction à nouveau en phases enchainées à dessein. Le pianiste allemand vivant à Ibiza ajoute au beau milieu de ses vagues harmoniques et série de furies rythmiques un lyrisme de tout les instants. Des compositions originales « Transmitting » comme une ode à la danse; des clins d’oeil respectueux mais personnellement inspirés vis à vis’ Ornette Coleman « Homogenous Emotions », et le très dense « Researching has no limit »; un hommage amical lui aussi à la figure célébrée « Raul: In Memory » Toute la matière musicale de ce set est mise au service du trio. Le jazz selon Joachim -« une série de plateformes préconçues mise à à disposition des musiciens pour qu’ils s’en saisissent et les transforment »- évolue sous le souffle de vents porteurs. Source de richesses et de surprises toujours. Car le moins que l’on puisse dire du musicien allemand c’est qu’il est, en live, imprévisible. Souffle, un mot qui va bien avec la manière du jeune musicien espagnol Ernesto Aurignac présent pour la première fois aux côtés du pianiste allemand. Un son de sax alto très présent, épais, tranchant au besoin. Une inspiration clairement située du côté d’Ornette carre parfaitement avec la matière jouée. De la force et une certaine forme de finesse cumulées. Troisième composante du trio et comparse habituel de Kuhn, Ramon Lopez est un « monumento » de musicalité. Accentuations, ponctuation, art de souligner ou de relancer, le batteur originaire d’Alicante depuis longtemps a dompté toutes les nécessité de la percussion. Sa complicité établie avec Joachim Kuhn lui permet en outre de de deviner donc d’anticiper, toutes mimiques bues, les intentions, les inflexions, l’inspiration donc du pianiste leader;
Dans la salle, petite silhouette aux habits sombre, Maria Antonia Garcia pensait sans doute que cette célébration intitulée Soñando con Jazz ne représentait finalement pas seulement un rêve. Mais l(espace d’une
nuit madrilène de printemps une musique portée par des musiciens amis, bienveillants. Le jazz comme une humanité.
Robert Latxague
|
En guise de présentation elle est censée donner l’ordre du jour de cette soirée spéciale. Pourtant à la simple évocation du prénom de son mari disparu, la Directrice des Cuadernos del Jazz s’affiche émue aux larmes. Plus tard dans la soirée, au départ du second concert Ramon Lopez lui fait un cadeau surprise: un tableau peinture sur photographie traçant le portrait saisissant de Raul Mao époux co-fondateur de la revue espagnole. A Maria Antonia cette fois l’émotion lui traverse le corps. Le premier coup de cymbale intervient une délivrance.
Concert hommage à Raul Mao et 25e anniversaire de la revue Cuaderonos de Jazz
Clamores, Madrid, 30 avril
Agusti Fernández (p), Lucía Martinez (dm)
Joachim Kuhn (p), Ramon Lopez (dm, perc), Ernesto Aurignac (as)
Des notes pour la plupart éclatées. Telles des météorites lâchées dans l’espace sans espoir de les revoir un jour intactes. Phrases lâchées, taillées, satellisées entières ou quasi pulvérisées. Ainsi exposée dans l’instant présent la musique d’Agusti Fernandez relève de la volcanologie. Née à même le clavier elle procède par éruptions successives saillies du ventre du piano. L’improvisation totale, volontariste, militante s’affirme comme une doxa sans exception. Assis devant son clavier, ou debout les mains plongées dans le réseau des cordes il s’active. Toute construction, fut-elle fugace, s’oblige à une déconstruction prochaine « Le pianiste joue dans les extrêmes » analyse un autre musicien espagnol présent dans la salle. En complément, en contrepoint Lucia Martinez oeuvre dans le même sens. Ses caisses, ses cymbales ne se limitent en aucune façon à un rôle uniquement rythmique. Dans cette formule en duo toute initiative de la batterie, des percussions, des gadgets ou accessoires annexes sont autant d’occasion de sources, de métamorphoses sonores. Simplement la percussion de Lucia Martinez révèle une caractéristique féminine, nuancée, subtile, teintée de couleurs moirées. On peut y sentir qui sait comme une manière d’apaisement. Il y a de l’écoute entre les deux protagonistes. Beaucoup de regard aussi pour prendre l’information. De la rencontre fortuite naît une forme de complicité immédiate. Et lorsqu’au final, hommage parmi les hommages, Agusti Fernandez livre, seul, tout en délicatesse une de ses compositions, La Processó que « Raul Mao aimait particulièrement », l’émotion ambiante monte encore d’un cran.
Clamores a fait le plein pour cette occasion unique, exceptionnelle « Exceptionnelle oui à plus d’un titre remarque Baldo Martinez, bassiste et figure du jazz contemporain en Espagne. Un concert unique, une musique aussi libre partagée par deux orchestres successifs: on aura rarement entendu cela dans ce lieu, à Madrid et même en Espagne en général » Des musiciens, des producteurs, des journalistes: le petit mundillo du jazz est présent ce soir là. La célébration du souvenir de Raul Mao, fondateur et directeur de Cuadernos de Jazz qui a paru en version papier vingt années durant avant de se perpétue désormais exclusivement sur le web (cuadernosdejazz.com) aura servi d’une certaine façon de totem pour une musique à ce jour d’une audience encore très limitée dans la péninsule ibérique.
Emotion, figure totémique, engagement total sur l’instrument: ces mots conviennent bien à Joachim Kuhn, second protagoniste avec son trio de la soirée Clamores. Construction et déconstruction à nouveau en phases enchainées à dessein. Le pianiste allemand vivant à Ibiza ajoute au beau milieu de ses vagues harmoniques et série de furies rythmiques un lyrisme de tout les instants. Des compositions originales « Transmitting » comme une ode à la danse; des clins d’oeil respectueux mais personnellement inspirés vis à vis’ Ornette Coleman « Homogenous Emotions », et le très dense « Researching has no limit »; un hommage amical lui aussi à la figure célébrée « Raul: In Memory » Toute la matière musicale de ce set est mise au service du trio. Le jazz selon Joachim -« une série de plateformes préconçues mise à à disposition des musiciens pour qu’ils s’en saisissent et les transforment »- évolue sous le souffle de vents porteurs. Source de richesses et de surprises toujours. Car le moins que l’on puisse dire du musicien allemand c’est qu’il est, en live, imprévisible. Souffle, un mot qui va bien avec la manière du jeune musicien espagnol Ernesto Aurignac présent pour la première fois aux côtés du pianiste allemand. Un son de sax alto très présent, épais, tranchant au besoin. Une inspiration clairement située du côté d’Ornette carre parfaitement avec la matière jouée. De la force et une certaine forme de finesse cumulées. Troisième composante du trio et comparse habituel de Kuhn, Ramon Lopez est un « monumento » de musicalité. Accentuations, ponctuation, art de souligner ou de relancer, le batteur originaire d’Alicante depuis longtemps a dompté toutes les nécessité de la percussion. Sa complicité établie avec Joachim Kuhn lui permet en outre de de deviner donc d’anticiper, toutes mimiques bues, les intentions, les inflexions, l’inspiration donc du pianiste leader;
Dans la salle, petite silhouette aux habits sombre, Maria Antonia Garcia pensait sans doute que cette célébration intitulée Soñando con Jazz ne représentait finalement pas seulement un rêve. Mais l(espace d’une
nuit madrilène de printemps une musique portée par des musiciens amis, bienveillants. Le jazz comme une humanité.
Robert Latxague