DAVID LINX Quartet invite NGUÊN LÊ
Dans le cadre d’Act’Art en Fête (https://www.actart77.com/event/actart-en-fete/), festival pluridisciplinaire de Seine-et-Marne, au milieu d’une manifestation gratuite de trois jours où théâtre et cinéma côtoyaient cirque, exposition et concerts, le Château de Coupvray accueillait une belle soirée de jazz.
Act’Art se donne notamment pour mission de diffuser l’art et la culture en milieu rural. Cette fois c’est à Coupvray, vers le Nord du département. La ruralité, dans cette communauté de commune (Val d’Europe) rattachée à la ville nouvelle de Marne-la-Vallée, est une notion relative. Coupvray accueille sur son territoire une partie des emprises de Disneyland Paris. Le village comptait moins de 700 habitants au début des années 60, et aujourd’hui près de 3.000, car comme dans tout l’espace francilien, les lotissements ont fleuri à la périphérie du village. Le nombreux public présent est pour une bonne part venu en voisin pour ce concert, sous le chapiteau dressé dans le parc du Château, non loin des ruines de l’ancienne demeure des Rohan-Guéméné.
DAVID LINX QUARTE INVITE NGUYÊN LÊ
David Linx(voix), Nguyên Lê (guitare), Grégory Privat (piano), Chris Jennings (contrebasse), Arnaud Dolmen, batterie
Coupvray, Parc du Château, 1er octobre 2022, 22h30
Premier titre sans l’invité, et déjà David Linx donne sa pleine mesure : fluidité confondante entre le phrasé sur le texte et l’improvisation, dynamique large, sauts de registres aussi virtuoses qu’empreints de naturel, expressivité maximale qui donne à chaque personne dans le public le sentiment que l’histoire qui se joue est pour elle seule. Et des lignes mélodiques sinueuses sur des harmonies en perpétuel mouvement, avec de fréquents passages de témoin à ses partenaires, en douceur, pour qu’advienne l’expression individuelle et l’improvisation, et en toute liberté : du Grand Art.
Quand Nguyên Lê entre en scène pour la deuxième chanson, c’est comme un joute d’expressivité : le guitariste cultive une grande vocalité dans ses phrases instrumentales, et c’est un constant dialogue sur ce terrain avec le chanteur. Grégory Privat a la part belle quand David Linx lui ouvre l’espace pour des improvisations qui très vite deviennent paroxystiques : une sorte de folie musicale s’empare du piano. Arnaud Dolmen et Chris Jennings ne sont pas de reste : aux aguets dans la stimulation, et en totale effervescence quand s’ouvre l’espace du solo. Pour l’un des des thèmes, David Linx commence par une sorte de harangue, un parler-chanter qui me rappelle furtivement Gil Scott-Heron. Puis c’est le décollage vers un espace très libre où tout le groupe est à la fête. Nous aurons aussi un duo voix-guitare (comme ils l’avaient fait pour le disque «Be My Guest» du chanteur, publié l’an dernier) : toujours ce dialogue de vocalité entre les deux musiciens. Au fil du concert, une foule de petits miracles musicaux se produisent, par exemple sur la ballade On the Other Side of Time (album «Skin in the Game»), quand la phrase chantée vient se fondre, decrescendo, dans l’impro de guitare, avant que que le tempo se marque en claquements de mains, et que la guitare prenne son essor, mi-rock, mi-blues, vers d’autres vertiges. Et en fin de soirée, nous voilà partis vers une intensité de soul music, où la voix de David Linx fait merveille. Bref ce fut, du début à la fin du concert, un grand moment de musique !
Xavier Prévost