David Virelles et Ralph Alessi au Winter Jast Fest
Le deuxième week-end de janvier ont lieu à New York l’APAP, rencontres de programmateurs et d’agents, et le Winter Jazz Fest qui, d’édition en édition, devient de plus en plus tentaculaire – il est désormais réparti sur une dizaine de sites avec, entre entre autres une scène dédiée au jazz des années 1920, une autre à la fusion, le “French Corner”, et puis, deux soirs durant, dans l’auditorium flambant neuf du bâtiment le plus récent de la New School, la scène ECM (featuring Manfred Eicher assis au premier rang).
Le son, bien sûr, est impeccable. A chaque heure un nouvel artiste, en désordre : le quartette de Mark Turner, celui de Chris Potter, le nouveau projet de Theo Bleckmann, Avishai Cohen (le trompettiste), Tim Berne… Une seule femme sur deux soirs de musique : la pianiste Kris Davis avec Michael Formanek.
Le plus beau concert était souvent le dernier, entre minuit et une heure et demie du matin, parce que le public clairsemé avait finalement renoncé à être partout à la fois. La musique se nourrissait de fatigue et de silence. Le premier soir, le groupe du pianiste David Virelles joua sa musique tirée de la tradition sacrée cubaine. Au trio – Matt Brewer à la basse et Eric McPherson à la batterie – s’ajoutaient un maître de cérémonie, le percussionniste Ramon Diaz, et un autre percussionniste de passage. La musique superposait l’harmonie dense et dissonante du pianiste et les chants sacrés cubains, et se suspendait parfois en ostinati hypnotiques. David Virelles utilisait son toucher pour tirer du piano des résonnances brutales ou très douces, avec une densité qui donnait l’illusion d’entendre plusieurs instruments. Tout était joué avec le calme et l’intensité poignante du cérémonial, une pureté totale d’intention, sans effets, sans spectacle contraint, sans retenue.
Le lendemain, Ralph Alessi présentait la musique de son nouvel album ECM, “Quiver”, avec le pianiste David Virelles – à la place de Gary Versace, qui joue sur le disque – et une section rythmique en passe de devenir légendaire : Drew Gress à la contrebasse et Nasheet Waits à la batterie. (Gary Versace, un autre maître peu connu, a pris la place de David Virelles pour la semaine d’Alessi au Vanguard qui suivait le Winter Jazz Fest.) Emacié, austère, Ralph Alessi est l’un des plus grands maîtres actuels de l’instrument : intonation, richesse de la palette sonore, absence de déchet dans le vocabulaire mélodique. Ses musiciens sont abreuvés de culture et leur identité musicale est polie comme un diamant. Nasheet Waits a l’énergie et le rebond du swing, mais reste toujours sur la brèche, dans une spontanéité totale. Drew Gress joue avec un mélange surprenant de force et d’humilité – quand le concert se termine, il s’excuse comme s’il était rattrapé par ses créanciers…
Le plaisir est d’autant plus grand qu’il n’est pas immédiat : les lignes mélodiques sont parfois accidentées, mais elles s’arrêtent aussi longuement sur des harmonies élégiaques, et ni la difficulté, ni l’évidence de cette musique n’ont d’autre but que d’exprimer et de magnifier l’expérience du compositeur. La pulsation est mouvante, comme située au centre du cercle formé par les musiciens. Quoique peu nombreux, le public, a goûté à la vraie joie de communier avec des grands musiciens. • Guilhem Flouzat
NET Winter Jazz Fest, le site|Le deuxième week-end de janvier ont lieu à New York l’APAP, rencontres de programmateurs et d’agents, et le Winter Jazz Fest qui, d’édition en édition, devient de plus en plus tentaculaire – il est désormais réparti sur une dizaine de sites avec, entre entre autres une scène dédiée au jazz des années 1920, une autre à la fusion, le “French Corner”, et puis, deux soirs durant, dans l’auditorium flambant neuf du bâtiment le plus récent de la New School, la scène ECM (featuring Manfred Eicher assis au premier rang).
Le son, bien sûr, est impeccable. A chaque heure un nouvel artiste, en désordre : le quartette de Mark Turner, celui de Chris Potter, le nouveau projet de Theo Bleckmann, Avishai Cohen (le trompettiste), Tim Berne… Une seule femme sur deux soirs de musique : la pianiste Kris Davis avec Michael Formanek.
Le plus beau concert était souvent le dernier, entre minuit et une heure et demie du matin, parce que le public clairsemé avait finalement renoncé à être partout à la fois. La musique se nourrissait de fatigue et de silence. Le premier soir, le groupe du pianiste David Virelles joua sa musique tirée de la tradition sacrée cubaine. Au trio – Matt Brewer à la basse et Eric McPherson à la batterie – s’ajoutaient un maître de cérémonie, le percussionniste Ramon Diaz, et un autre percussionniste de passage. La musique superposait l’harmonie dense et dissonante du pianiste et les chants sacrés cubains, et se suspendait parfois en ostinati hypnotiques. David Virelles utilisait son toucher pour tirer du piano des résonnances brutales ou très douces, avec une densité qui donnait l’illusion d’entendre plusieurs instruments. Tout était joué avec le calme et l’intensité poignante du cérémonial, une pureté totale d’intention, sans effets, sans spectacle contraint, sans retenue.
Le lendemain, Ralph Alessi présentait la musique de son nouvel album ECM, “Quiver”, avec le pianiste David Virelles – à la place de Gary Versace, qui joue sur le disque – et une section rythmique en passe de devenir légendaire : Drew Gress à la contrebasse et Nasheet Waits à la batterie. (Gary Versace, un autre maître peu connu, a pris la place de David Virelles pour la semaine d’Alessi au Vanguard qui suivait le Winter Jazz Fest.) Emacié, austère, Ralph Alessi est l’un des plus grands maîtres actuels de l’instrument : intonation, richesse de la palette sonore, absence de déchet dans le vocabulaire mélodique. Ses musiciens sont abreuvés de culture et leur identité musicale est polie comme un diamant. Nasheet Waits a l’énergie et le rebond du swing, mais reste toujours sur la brèche, dans une spontanéité totale. Drew Gress joue avec un mélange surprenant de force et d’humilité – quand le concert se termine, il s’excuse comme s’il était rattrapé par ses créanciers…
Le plaisir est d’autant plus grand qu’il n’est pas immédiat : les lignes mélodiques sont parfois accidentées, mais elles s’arrêtent aussi longuement sur des harmonies élégiaques, et ni la difficulté, ni l’évidence de cette musique n’ont d’autre but que d’exprimer et de magnifier l’expérience du compositeur. La pulsation est mouvante, comme située au centre du cercle formé par les musiciens. Quoique peu nombreux, le public, a goûté à la vraie joie de communier avec des grands musiciens. • Guilhem Flouzat
NET Winter Jazz Fest, le site|Le deuxième week-end de janvier ont lieu à New York l’APAP, rencontres de programmateurs et d’agents, et le Winter Jazz Fest qui, d’édition en édition, devient de plus en plus tentaculaire – il est désormais réparti sur une dizaine de sites avec, entre entre autres une scène dédiée au jazz des années 1920, une autre à la fusion, le “French Corner”, et puis, deux soirs durant, dans l’auditorium flambant neuf du bâtiment le plus récent de la New School, la scène ECM (featuring Manfred Eicher assis au premier rang).
Le son, bien sûr, est impeccable. A chaque heure un nouvel artiste, en désordre : le quartette de Mark Turner, celui de Chris Potter, le nouveau projet de Theo Bleckmann, Avishai Cohen (le trompettiste), Tim Berne… Une seule femme sur deux soirs de musique : la pianiste Kris Davis avec Michael Formanek.
Le plus beau concert était souvent le dernier, entre minuit et une heure et demie du matin, parce que le public clairsemé avait finalement renoncé à être partout à la fois. La musique se nourrissait de fatigue et de silence. Le premier soir, le groupe du pianiste David Virelles joua sa musique tirée de la tradition sacrée cubaine. Au trio – Matt Brewer à la basse et Eric McPherson à la batterie – s’ajoutaient un maître de cérémonie, le percussionniste Ramon Diaz, et un autre percussionniste de passage. La musique superposait l’harmonie dense et dissonante du pianiste et les chants sacrés cubains, et se suspendait parfois en ostinati hypnotiques. David Virelles utilisait son toucher pour tirer du piano des résonnances brutales ou très douces, avec une densité qui donnait l’illusion d’entendre plusieurs instruments. Tout était joué avec le calme et l’intensité poignante du cérémonial, une pureté totale d’intention, sans effets, sans spectacle contraint, sans retenue.
Le lendemain, Ralph Alessi présentait la musique de son nouvel album ECM, “Quiver”, avec le pianiste David Virelles – à la place de Gary Versace, qui joue sur le disque – et une section rythmique en passe de devenir légendaire : Drew Gress à la contrebasse et Nasheet Waits à la batterie. (Gary Versace, un autre maître peu connu, a pris la place de David Virelles pour la semaine d’Alessi au Vanguard qui suivait le Winter Jazz Fest.) Emacié, austère, Ralph Alessi est l’un des plus grands maîtres actuels de l’instrument : intonation, richesse de la palette sonore, absence de déchet dans le vocabulaire mélodique. Ses musiciens sont abreuvés de culture et leur identité musicale est polie comme un diamant. Nasheet Waits a l’énergie et le rebond du swing, mais reste toujours sur la brèche, dans une spontanéité totale. Drew Gress joue avec un mélange surprenant de force et d’humilité – quand le concert se termine, il s’excuse comme s’il était rattrapé par ses créanciers…
Le plaisir est d’autant plus grand qu’il n’est pas immédiat : les lignes mélodiques sont parfois accidentées, mais elles s’arrêtent aussi longuement sur des harmonies élégiaques, et ni la difficulté, ni l’évidence de cette musique n’ont d’autre but que d’exprimer et de magnifier l’expérience du compositeur. La pulsation est mouvante, comme située au centre du cercle formé par les musiciens. Quoique peu nombreux, le public, a goûté à la vraie joie de communier avec des grands musiciens. • Guilhem Flouzat
NET Winter Jazz Fest, le site|Le deuxième week-end de janvier ont lieu à New York l’APAP, rencontres de programmateurs et d’agents, et le Winter Jazz Fest qui, d’édition en édition, devient de plus en plus tentaculaire – il est désormais réparti sur une dizaine de sites avec, entre entre autres une scène dédiée au jazz des années 1920, une autre à la fusion, le “French Corner”, et puis, deux soirs durant, dans l’auditorium flambant neuf du bâtiment le plus récent de la New School, la scène ECM (featuring Manfred Eicher assis au premier rang).
Le son, bien sûr, est impeccable. A chaque heure un nouvel artiste, en désordre : le quartette de Mark Turner, celui de Chris Potter, le nouveau projet de Theo Bleckmann, Avishai Cohen (le trompettiste), Tim Berne… Une seule femme sur deux soirs de musique : la pianiste Kris Davis avec Michael Formanek.
Le plus beau concert était souvent le dernier, entre minuit et une heure et demie du matin, parce que le public clairsemé avait finalement renoncé à être partout à la fois. La musique se nourrissait de fatigue et de silence. Le premier soir, le groupe du pianiste David Virelles joua sa musique tirée de la tradition sacrée cubaine. Au trio – Matt Brewer à la basse et Eric McPherson à la batterie – s’ajoutaient un maître de cérémonie, le percussionniste Ramon Diaz, et un autre percussionniste de passage. La musique superposait l’harmonie dense et dissonante du pianiste et les chants sacrés cubains, et se suspendait parfois en ostinati hypnotiques. David Virelles utilisait son toucher pour tirer du piano des résonnances brutales ou très douces, avec une densité qui donnait l’illusion d’entendre plusieurs instruments. Tout était joué avec le calme et l’intensité poignante du cérémonial, une pureté totale d’intention, sans effets, sans spectacle contraint, sans retenue.
Le lendemain, Ralph Alessi présentait la musique de son nouvel album ECM, “Quiver”, avec le pianiste David Virelles – à la place de Gary Versace, qui joue sur le disque – et une section rythmique en passe de devenir légendaire : Drew Gress à la contrebasse et Nasheet Waits à la batterie. (Gary Versace, un autre maître peu connu, a pris la place de David Virelles pour la semaine d’Alessi au Vanguard qui suivait le Winter Jazz Fest.) Emacié, austère, Ralph Alessi est l’un des plus grands maîtres actuels de l’instrument : intonation, richesse de la palette sonore, absence de déchet dans le vocabulaire mélodique. Ses musiciens sont abreuvés de culture et leur identité musicale est polie comme un diamant. Nasheet Waits a l’énergie et le rebond du swing, mais reste toujours sur la brèche, dans une spontanéité totale. Drew Gress joue avec un mélange surprenant de force et d’humilité – quand le concert se termine, il s’excuse comme s’il était rattrapé par ses créanciers…
Le plaisir est d’autant plus grand qu’il n’est pas immédiat : les lignes mélodiques sont parfois accidentées, mais elles s’arrêtent aussi longuement sur des harmonies élégiaques, et ni la difficulté, ni l’évidence de cette musique n’ont d’autre but que d’exprimer et de magnifier l’expérience du compositeur. La pulsation est mouvante, comme située au centre du cercle formé par les musiciens. Quoique peu nombreux, le public, a goûté à la vraie joie de communier avec des grands musiciens. • Guilhem Flouzat