Le diablotin Miguel Zenon
Miguel Zenón a quelque chose du diablotin sortant des boîtes de notre enfance : une certaine forme de crâne, des mouvements, une effervescence. Tout cela excepté son regard rempli de bonté et de générosité. À l’image de sa musique.
Mercredi 6 juillet 2017, Duc des Lombards, Paris (75), 2d set
Miguel Zenón “Tipico”
Miguel Zenón (as), Luis Perdomo (p), Hans Glawischnig (cb), Henry Cole (dr).
Il y a presque dix ans, je découvrais au Sunside le groupe de Miguel Zenón qui se composait déjà des mêmes personnalités. J’en conserve un souvenir vif argent. J’avais été ébloui par la maîtrise phénoménale du groupe et surtout par leur extraordinaire vitalité, donnant sans compter, comme si leur vie en dépendait.
Il y a dix ans Mr. Z. chauffait à blanc son public, et ce soir il le cueille à froid. C’est bien simple, je n’ai pu me raccrocher à ni à l’harmonie, ni à la métrique, ni à la structure. Tandis que je me trouvais au premier étage, les musiciens voguaient déjà au milieu du firmament. Dans ce cas, il faut s’imprégner du flux, et plonger au cœur de cet investissement énergétique, ce que je fis. S’agissait-il d’un morceau-étalon, pour indiquer que le niveau de l’ensemble se situer au moins là ? Quoi qu’il en soit plus le concert avança, moins j’eus cette sensation de perte complète des repères.
Dès la pièce suivante, la clave était repérable. Je pus alors mieux apprécier l’évolution du groupe en dix ans. Il est relativement rare qu’une formation de ce type reste unie si longtemps. D’autant que la formation joue très fréquemment, comme à la fin du concert me le confia Laurent Coq venu écouter ses amis (il a enregistré en 2011 un magnifique album avec Miguel Zenón autour de l’œuvre de Julio Cortázar, Rayuela). Le groupe possède de ce fait une très forte cohésion, et surtout une grande maturité, la démonstration n’étant pas de mise, au contraire du choix judicieux et de l’intervention à propos.
De façon inattendue, le groupe sans Miguel Zenón se lança ensuite dans une improvisation totale, façon Quartette de Wayne Shorter (référence spirituelle du groupe, davantage que musicale d’ailleurs) puis plus proche du free de Cecil Taylor. Miguel Zenón hésite à entrer en piste. « Est-ce le bon moment ? » semble-t-il penser. Une note de Luis Perdomo : c’est le signal. Le diablotin sort de sa boîte et exécute un thème à l’unisson du pianiste, par vagues hyper rapides. S’ensuit un solo de l’altiste aux portes du free jusqu’à ce qu’il finisse par franchir le seuil. Que c’est beau le free lorsqu’il est joué ainsi, décidément ! Après le retour du thème, Miguel Zenón se lance dans une cadence solo. Avec le plus grand naturel, elle échoue sur la plage mélancolique du XXXX de Chico Buarque. Après le feu du free, le sens mélodique de Miguel Zenón fait fondre tout le monde. La dernière fois que j’ai entendu jouer une bossa nova lente avec une telle chaleur, c’était par le trio de Brad Mehldau reprenant Tres Palabras. La bossa débouche à son tour sur un duo saxophone/piano d’une qualité d’écoute hors norme. Lorsque le tandem Hans Glawischnig/Henry Cole rejoint le duo, le jeu musical permute. Avec pour base une immuable pulsation lente, les rythmiciens confectionnent une étude de rythme improbable, avec des illusions de tempos surimposés sans cesse changeants, des équivalences rythmiques redoutables. Dans ce cas précis, si l’on devait faire un parallèle avec le Quartette de Wayne Shorter, il me semble qu’Henry Cole a la même position que celle de Danilo Perez : il suggère des virages, indique la voie à prendre, oriente le discours. Pendant tout ce temps, Miguel Zenón danse en jouant. Ce fut une véritable apothéose. Vivement que je les revoie dans dix ans !|Miguel Zenón a quelque chose du diablotin sortant des boîtes de notre enfance : une certaine forme de crâne, des mouvements, une effervescence. Tout cela excepté son regard rempli de bonté et de générosité. À l’image de sa musique.
Mercredi 6 juillet 2017, Duc des Lombards, Paris (75), 2d set
Miguel Zenón “Tipico”
Miguel Zenón (as), Luis Perdomo (p), Hans Glawischnig (cb), Henry Cole (dr).
Il y a presque dix ans, je découvrais au Sunside le groupe de Miguel Zenón qui se composait déjà des mêmes personnalités. J’en conserve un souvenir vif argent. J’avais été ébloui par la maîtrise phénoménale du groupe et surtout par leur extraordinaire vitalité, donnant sans compter, comme si leur vie en dépendait.
Il y a dix ans Mr. Z. chauffait à blanc son public, et ce soir il le cueille à froid. C’est bien simple, je n’ai pu me raccrocher à ni à l’harmonie, ni à la métrique, ni à la structure. Tandis que je me trouvais au premier étage, les musiciens voguaient déjà au milieu du firmament. Dans ce cas, il faut s’imprégner du flux, et plonger au cœur de cet investissement énergétique, ce que je fis. S’agissait-il d’un morceau-étalon, pour indiquer que le niveau de l’ensemble se situer au moins là ? Quoi qu’il en soit plus le concert avança, moins j’eus cette sensation de perte complète des repères.
Dès la pièce suivante, la clave était repérable. Je pus alors mieux apprécier l’évolution du groupe en dix ans. Il est relativement rare qu’une formation de ce type reste unie si longtemps. D’autant que la formation joue très fréquemment, comme à la fin du concert me le confia Laurent Coq venu écouter ses amis (il a enregistré en 2011 un magnifique album avec Miguel Zenón autour de l’œuvre de Julio Cortázar, Rayuela). Le groupe possède de ce fait une très forte cohésion, et surtout une grande maturité, la démonstration n’étant pas de mise, au contraire du choix judicieux et de l’intervention à propos.
De façon inattendue, le groupe sans Miguel Zenón se lança ensuite dans une improvisation totale, façon Quartette de Wayne Shorter (référence spirituelle du groupe, davantage que musicale d’ailleurs) puis plus proche du free de Cecil Taylor. Miguel Zenón hésite à entrer en piste. « Est-ce le bon moment ? » semble-t-il penser. Une note de Luis Perdomo : c’est le signal. Le diablotin sort de sa boîte et exécute un thème à l’unisson du pianiste, par vagues hyper rapides. S’ensuit un solo de l’altiste aux portes du free jusqu’à ce qu’il finisse par franchir le seuil. Que c’est beau le free lorsqu’il est joué ainsi, décidément ! Après le retour du thème, Miguel Zenón se lance dans une cadence solo. Avec le plus grand naturel, elle échoue sur la plage mélancolique du XXXX de Chico Buarque. Après le feu du free, le sens mélodique de Miguel Zenón fait fondre tout le monde. La dernière fois que j’ai entendu jouer une bossa nova lente avec une telle chaleur, c’était par le trio de Brad Mehldau reprenant Tres Palabras. La bossa débouche à son tour sur un duo saxophone/piano d’une qualité d’écoute hors norme. Lorsque le tandem Hans Glawischnig/Henry Cole rejoint le duo, le jeu musical permute. Avec pour base une immuable pulsation lente, les rythmiciens confectionnent une étude de rythme improbable, avec des illusions de tempos surimposés sans cesse changeants, des équivalences rythmiques redoutables. Dans ce cas précis, si l’on devait faire un parallèle avec le Quartette de Wayne Shorter, il me semble qu’Henry Cole a la même position que celle de Danilo Perez : il suggère des virages, indique la voie à prendre, oriente le discours. Pendant tout ce temps, Miguel Zenón danse en jouant. Ce fut une véritable apothéose. Vivement que je les revoie dans dix ans !|Miguel Zenón a quelque chose du diablotin sortant des boîtes de notre enfance : une certaine forme de crâne, des mouvements, une effervescence. Tout cela excepté son regard rempli de bonté et de générosité. À l’image de sa musique.
Mercredi 6 juillet 2017, Duc des Lombards, Paris (75), 2d set
Miguel Zenón “Tipico”
Miguel Zenón (as), Luis Perdomo (p), Hans Glawischnig (cb), Henry Cole (dr).
Il y a presque dix ans, je découvrais au Sunside le groupe de Miguel Zenón qui se composait déjà des mêmes personnalités. J’en conserve un souvenir vif argent. J’avais été ébloui par la maîtrise phénoménale du groupe et surtout par leur extraordinaire vitalité, donnant sans compter, comme si leur vie en dépendait.
Il y a dix ans Mr. Z. chauffait à blanc son public, et ce soir il le cueille à froid. C’est bien simple, je n’ai pu me raccrocher à ni à l’harmonie, ni à la métrique, ni à la structure. Tandis que je me trouvais au premier étage, les musiciens voguaient déjà au milieu du firmament. Dans ce cas, il faut s’imprégner du flux, et plonger au cœur de cet investissement énergétique, ce que je fis. S’agissait-il d’un morceau-étalon, pour indiquer que le niveau de l’ensemble se situer au moins là ? Quoi qu’il en soit plus le concert avança, moins j’eus cette sensation de perte complète des repères.
Dès la pièce suivante, la clave était repérable. Je pus alors mieux apprécier l’évolution du groupe en dix ans. Il est relativement rare qu’une formation de ce type reste unie si longtemps. D’autant que la formation joue très fréquemment, comme à la fin du concert me le confia Laurent Coq venu écouter ses amis (il a enregistré en 2011 un magnifique album avec Miguel Zenón autour de l’œuvre de Julio Cortázar, Rayuela). Le groupe possède de ce fait une très forte cohésion, et surtout une grande maturité, la démonstration n’étant pas de mise, au contraire du choix judicieux et de l’intervention à propos.
De façon inattendue, le groupe sans Miguel Zenón se lança ensuite dans une improvisation totale, façon Quartette de Wayne Shorter (référence spirituelle du groupe, davantage que musicale d’ailleurs) puis plus proche du free de Cecil Taylor. Miguel Zenón hésite à entrer en piste. « Est-ce le bon moment ? » semble-t-il penser. Une note de Luis Perdomo : c’est le signal. Le diablotin sort de sa boîte et exécute un thème à l’unisson du pianiste, par vagues hyper rapides. S’ensuit un solo de l’altiste aux portes du free jusqu’à ce qu’il finisse par franchir le seuil. Que c’est beau le free lorsqu’il est joué ainsi, décidément ! Après le retour du thème, Miguel Zenón se lance dans une cadence solo. Avec le plus grand naturel, elle échoue sur la plage mélancolique du XXXX de Chico Buarque. Après le feu du free, le sens mélodique de Miguel Zenón fait fondre tout le monde. La dernière fois que j’ai entendu jouer une bossa nova lente avec une telle chaleur, c’était par le trio de Brad Mehldau reprenant Tres Palabras. La bossa débouche à son tour sur un duo saxophone/piano d’une qualité d’écoute hors norme. Lorsque le tandem Hans Glawischnig/Henry Cole rejoint le duo, le jeu musical permute. Avec pour base une immuable pulsation lente, les rythmiciens confectionnent une étude de rythme improbable, avec des illusions de tempos surimposés sans cesse changeants, des équivalences rythmiques redoutables. Dans ce cas précis, si l’on devait faire un parallèle avec le Quartette de Wayne Shorter, il me semble qu’Henry Cole a la même position que celle de Danilo Perez : il suggère des virages, indique la voie à prendre, oriente le discours. Pendant tout ce temps, Miguel Zenón danse en jouant. Ce fut une véritable apothéose. Vivement que je les revoie dans dix ans !|Miguel Zenón a quelque chose du diablotin sortant des boîtes de notre enfance : une certaine forme de crâne, des mouvements, une effervescence. Tout cela excepté son regard rempli de bonté et de générosité. À l’image de sa musique.
Mercredi 6 juillet 2017, Duc des Lombards, Paris (75), 2d set
Miguel Zenón “Tipico”
Miguel Zenón (as), Luis Perdomo (p), Hans Glawischnig (cb), Henry Cole (dr).
Il y a presque dix ans, je découvrais au Sunside le groupe de Miguel Zenón qui se composait déjà des mêmes personnalités. J’en conserve un souvenir vif argent. J’avais été ébloui par la maîtrise phénoménale du groupe et surtout par leur extraordinaire vitalité, donnant sans compter, comme si leur vie en dépendait.
Il y a dix ans Mr. Z. chauffait à blanc son public, et ce soir il le cueille à froid. C’est bien simple, je n’ai pu me raccrocher à ni à l’harmonie, ni à la métrique, ni à la structure. Tandis que je me trouvais au premier étage, les musiciens voguaient déjà au milieu du firmament. Dans ce cas, il faut s’imprégner du flux, et plonger au cœur de cet investissement énergétique, ce que je fis. S’agissait-il d’un morceau-étalon, pour indiquer que le niveau de l’ensemble se situer au moins là ? Quoi qu’il en soit plus le concert avança, moins j’eus cette sensation de perte complète des repères.
Dès la pièce suivante, la clave était repérable. Je pus alors mieux apprécier l’évolution du groupe en dix ans. Il est relativement rare qu’une formation de ce type reste unie si longtemps. D’autant que la formation joue très fréquemment, comme à la fin du concert me le confia Laurent Coq venu écouter ses amis (il a enregistré en 2011 un magnifique album avec Miguel Zenón autour de l’œuvre de Julio Cortázar, Rayuela). Le groupe possède de ce fait une très forte cohésion, et surtout une grande maturité, la démonstration n’étant pas de mise, au contraire du choix judicieux et de l’intervention à propos.
De façon inattendue, le groupe sans Miguel Zenón se lança ensuite dans une improvisation totale, façon Quartette de Wayne Shorter (référence spirituelle du groupe, davantage que musicale d’ailleurs) puis plus proche du free de Cecil Taylor. Miguel Zenón hésite à entrer en piste. « Est-ce le bon moment ? » semble-t-il penser. Une note de Luis Perdomo : c’est le signal. Le diablotin sort de sa boîte et exécute un thème à l’unisson du pianiste, par vagues hyper rapides. S’ensuit un solo de l’altiste aux portes du free jusqu’à ce qu’il finisse par franchir le seuil. Que c’est beau le free lorsqu’il est joué ainsi, décidément ! Après le retour du thème, Miguel Zenón se lance dans une cadence solo. Avec le plus grand naturel, elle échoue sur la plage mélancolique du XXXX de Chico Buarque. Après le feu du free, le sens mélodique de Miguel Zenón fait fondre tout le monde. La dernière fois que j’ai entendu jouer une bossa nova lente avec une telle chaleur, c’était par le trio de Brad Mehldau reprenant Tres Palabras. La bossa débouche à son tour sur un duo saxophone/piano d’une qualité d’écoute hors norme. Lorsque le tandem Hans Glawischnig/Henry Cole rejoint le duo, le jeu musical permute. Avec pour base une immuable pulsation lente, les rythmiciens confectionnent une étude de rythme improbable, avec des illusions de tempos surimposés sans cesse changeants, des équivalences rythmiques redoutables. Dans ce cas précis, si l’on devait faire un parallèle avec le Quartette de Wayne Shorter, il me semble qu’Henry Cole a la même position que celle de Danilo Perez : il suggère des virages, indique la voie à prendre, oriente le discours. Pendant tout ce temps, Miguel Zenón danse en jouant. Ce fut une véritable apothéose. Vivement que je les revoie dans dix ans !