D’Jazz Nevers, 8ème soirée : un bilan, un big bang, un little big band et un final froufroutant
Roger Fontanel fait son bilan, présente un grand projet, accueille pour conclure cette 37ème édition nivernaise l’octette de Leïla Olivesi et son invitée, la chanteuse Chloé Cailleton, puis la chanteuse Ana Carla Maza.
Face au public qui a rempli la grande salle de “La Maison”, celui qui fut le fondateur du D’Jazz Nevers Festival en 1987 présente sa soirée de clôture la tête haute, avec un taux de fréquentation qui récompense de façon inespérée le travail accompli et constitue un encouragement pour le grand chantier lancé par Roger Fontanel. Après la création en 2000 du Centre régional du jazz en Bourgogne élargi à la Franche-Comté à l’occasion de la fusion administrative des deux régions en 2016, était acté le 18 septembre dernier lors d’une assemblée générale extraordinaire l’unification de D’Jazz Nevers et du Centre régional pour créer “Big Bang”, pôle de référence Jazz en Bourgogne – Franche-Comté, carrefour se donnant pout tâche cinq champs d’action coordonnés au sein d’une même entité : diffusion, info & ressources, soutien à la création et accompagnement au développement, éducation artistique et culturelle. Cette initiative permettant de donner une visibilité plus grande et plus sûre à la vitalité du jazz en région a été depuis validée par le Ministère de la Culture et présente un calendrier 2024 en cours d’élaboration comptant déjà une soixantaine de dates : créations, concerts, clubs, interventions scolaires, masterclass et bien sûr festivals, avec Nevers comme foyer de rayonnement naturel avec son lieu de résidence pour artiste (le Café Charbon), sa saison (en matière tant de programmation que d’éducation) et son festival qui donnera lieu d’un échange avec Jazz sous les Pommiers dans le cadre des Jazz Regional Days.
Et c’est fort de cette annonce que Roger Fontanel invita la pianiste, compositrice et cheffe d’orchestre Leïla Olivesi à présenter son octette : Quentin Ghomari (trompette), Baptiste Herbin(flûtet, sax alto), Adrien Sanchez (sax ténor), Jean-Charles Richard (sax baryton et soprano), Manu Codjia (guitare électrique), Yoni Zelnik (contrebasse), Donald Kontomanou (batterie), soit un all stars relativement contrasté du jazz français, complété dans les derniers morceaux par Chloé Cailleton (chant). Après le thème titre de son dernier album “Astral” aux sonorités orchestrales moelleuses et une guitare propre à évoquer l’astral, Leïla Olivesi introduisit seule au piano Missing C.C.,double hommage à Claude Carrière qui l’initia à la musique de Duke Ellington, où elle glissa quelques belles citations “ducales” avant de faire rentrer l’orchestre et de donner la parole à Baptiste Herbin. Ce dernier, non sans avoir salué la mémoire de Johnny Hodges en guise d’entrée en matière de son premier solo, bouleverse l’héritage adderley-parkérien avec des accélérations fulgurantes en triolets ou doubles croches d’une netteté quasi staccato et d’affolantes sinuosités qui, quelques titres plus tard, contrastèrent brillamment avec le ténor d’Adrien Sanchez au cours d’une chase pleine de rebondissements. Parmi d’oniriques originaux tirés d’“Astral”, en écho à l’explicite hommage de Mary Lou entendu plus tôt, on remarqua la reprise du Scorpio de Mary Lou Williams sur une couleur orchestrale enchantée par l’apparition d’une flûte remplaçant l’alto, le baryton de Jean-Charles Richard chorusant sur un lâcher prise presque mingusien du reste de l’orchestre.
Rédigeant cet ultime compte rendu à l’issue de huit jours d’affilée de festival de Strasbourg à Nevers, et avec quarante-huit heures de retard contrairement à mes habitudes, en comptant sur une mémoire de plus en plus défaillante et des notes prises dans le noir sur un minuscule calepin où elles se sont recouvertes les unes les autres, il est possible que je mélange ici un peu les morceaux, mais je crois bien me souvenir qu’en guise de rappel, Chloé Cailleton invita le public à lui donner la réplique en guise de rappel sur l’énigmatique poème de Lucie Taïeb, Soustraire à la Lumière.
Le festival touchait alors à sa fin, et comme il est de tradition à Nevers de finir par un moment festif, c’est au frou-frou de la violoncelliste et chanteuse Ana Carla Maza et son orchestre typique que l’on s’en remit. Étant un affreux grincheux qui déteste les frou-frou, j’ai suis sorti noyer ma fatigue au bar dans quelques bulles. Franck Bergerot