JAZZ à VIALAS : CAMILLE BERTAULT Trio
Dernière escale pour le promeneur festivalier du Languedoc (et des Cévennes), et ultime visite, pour cette année, au festival Jazz à Vialas. Un orage en Ardèche à 14h, et ici à Vialas vers 16h. Mais le ciel s’est éclairci, et les concerts auront bien lieu en plein air, un peu plus tard que prévu
Le ciel de Vialas vers 19h
Ce sera ce soir pour écouter la plus récente recrue du collectif de musiciens qui anime le festival : la chanteuse Camille Bertault
La soirée commence, vers 19h45, par la jam session quotidienne, animée aujourd’hui par le trompettiste Florent Briqué, entouré de Lionel Dandine au piano numérique, Samuel Hubert à la contrebasse, et Max Briard à la batterie. Quelques standards de Broadway, et des standards du jazz, période hard bop et soul jazz : Dat Dere de Bobby Timmons, Nica’s Dream écrit par Horace Silver…. Beau moment de jazz, tendance label Blue Note, et régal pour l’amateur.
Avant le concert de 20h30 (il sera en fait 21h30), le nouveau président du festival présente sur scène les bénévoles, qui rendent possible ce petit miracle d’un festival aux concerts gratuits, avec une belle affiche, dans un village qui comptait plus de 2000 habitants au dix-neuvième siècle, et aujourd’hui moins de 500 hors saison
CAMILLE BERTAULT Trio
Camille Bertault (voix), Julien Alour (trompette, bugle), Fady Farah (orgue)
Vialas, Maison du Temps Libre, 5 août 2022, 21h30
La chanteuse (improvisatrice, compositrice, auteure/autrice -bref elle écrit ses textes….-) va nous offrir non seulement des thèmes issus de son disque «Le Tigre» (enregistré en 2019) mais aussi des précédents (millésimes 2015 & 2017) ; et des titres qu’elle a enregistrés avec Julien Alour, et des chansons inédites au disque. Après Je suis un arbre, ce seront trois autres chansons également tirées du récent disque, avec en duo Je vieillis, mélange d’humour et de mélancolie qu’un récent public de festival avait trouvé choquant, alors qu’ici les spectateurs ont pris la pleine mesure de cette belle chanson. Chanson, chanson de jazz, jazz chanté en français (mais pas que….). l’expressivité est intense, la voix est formidablement maîtrisée, et libre cependant ; les textes respirent la pertinence prosodique, l’articulation exacte au service de la musique, et réciproquement ; les mélodies sont sinueuses, harmoniquement tendues, riches de chromatismes et d’inventivité ; et la présence de la vocaliste rend les auditeurs captifs. Sur une composition de Julien Alour elle va chanter, sans paroles, la partie de saxophone qui incombait pour le disque à François Théberge. Pour une évocation très personnelle de New York, elle donne dans l’intro, avec la voix, une évocation saisissante des sirènes de police et d’ambulance qui sillonnent la Grosse Pomme de jour comme de nuit. Puis elle nous surprend, en duo avec la trompette, par une version très révisée musicalement, mais dans le respect du texte, du Brassens de Je m’suis fait tout p’tit : tempo d’enfer, syncopes à tous les étages : vivant et virtuose ! En duo avec le bugle, rejoint ensuite par l’orgue de Fady Farah, ce sera maintenant Inutil Paisagem, de Tom Jobim : amour de la langue du Brésil. Après une composition de Julien Alour, issue d’un disque du trompettiste auquel Camille Bertault a participé, l’’organiste et la chanteuse quittent la scène, laissant Julien Alour seul sur scène.
Camille Bertault a interpellé le sonorisateur pour savoir si le piano numérique est toujours sonorisé sur l’autre scène, celle de la jam session. C’est le cas, et le duo piano-voix s’y installe pour un vertige pianistico-vocal sur une Variation Golberg de Bach (la première ?)
Puis le trio reprend ses droits, avec des compositions originales (de Camille, et de Julien), et aussi On The Sunny Side Of The Street, dans la plus pure tradition, renouvelée.
Public conquis, et rappel chaleureux, pour une version française, sur un texte de la chanteuse, de ‘Round About Midnight. Décidément, cette musicienne-chanteuse-et-improvisatrice a un talent considérable, et je m’étonne qu’elle soit davantage sollicitée à l’étranger que par les festivals français : les programmateurs d’ici auraient-ils négligé de l’écouter vraiment ?
Xavier Prévost