Jazz in Marciac. Echos du Bis
Le Off (on dit ici le Bis), c’est une véritable institution. Il remonte, sinon à la plus haute Antiquité chère à Alexandre Vialatte, du moins à un temps où JIM n’avait pas encore atteint les confins du gigantisme. C’est dire que des générations de musiciens s’y sont succédé. Certains, et non des moindres, y ont fait leurs premières armes avant de connaître la notoriété. Au fil des ans, il a cru et embelli, s’est diversifié, a élargi sa palette en même temps que son audience.
Particularités, d’abord la gratuité. Un élément non négligeable. Ensuite, la durée. Vingt jours bien comptés, pour la présente édition. Soit, de onze à vingt heures, un nombre considérable de concerts quotidiens, sur la place de l’Hôtel-de-Ville et au Lac. Sans compter, plus tard dans la soirée, le club attenant au grand chapiteau. Quelque cinquante groupes de nature et de styles très divers. Une telle abondance méritait bien qu’on s’y arrêtât.
Je précise tout de suite que ces coups de coeur ne prétendent pas plus à l’exhaustivité qu’ils ne constituent un palmarès. C’est souvent le hasard (une bribe de chorus entendu qui incite à s’arrêter pour en entendre plus) qui les a provoqués.
Dmitry Baevsky Quartet. Dmitry Baevsky (as), Alain Jean-Marie (p), Gilles Naturel (b), Philippe Soirat (dm).
La seule composition du quartette est déjà un gage de qualité. Entouré de valeurs sûres, le jeune Baevsky – combien de temps insistera-t-on encore sur sa jeunesse ? – confirme toutes les qualités décelées chez ce disciple avéré de Charlie Parker. Son orthodoxie bop va jusqu’au choix des thèmes, devenus, pour la plupart, des standards. Il les interprète avec une flamme intacte, prouvant par là qu’il est possible de renouveler de fond en comble un matériau qu’on eût cru, bien à tort, usé. Et que dire du rôle capital joué par Alain Jean-Marie, dont chacune des interventions reste un modèle de swing et de délicatesse ?
Jean-Michel Proust Quintet. Jean-Michel Proust (ts), Fabien Mary (tp), Pierre Christophe (p), Cédric Caillaud (b), François Laudet (dm).
De même aurait-on mauvaise grâce à reprocher à l’ensemble de Jean-Michel Proust de plonger dans l’histoire du jazz pour en extraire des pépites. En l’occurrence la période hard bop qui fournit au label Blue Note quelques-uns de ses albums les plus fameux. Hank Mobley, Sonny Stitt, Dexter Gordon, autant de compositeurs dont l’esprit, et pas seulement la lettre, sont ressuscités avec talent et conviction. Les deux soufflants s’épaulent à merveille, et pas seulement pour l’exposé des thèmes à l’unisson. Quant à la rythmique, valeureuse, elle compte en Pierre Christophe un pianiste subtil. Sa version de Do Nothing Till You Hear From Me méritait à elle seule une écoute attentive.
Philippe Léogé (p).
Philippe Léogé s’était produit ici même l’an dernier, en duo avec le saxophoniste Jean-Marc Padovani. Il se livre cette année à l’exercice périlleux du solo. Aventuré, surtout en plein air et devant une assistance copieuse. Gageure tenue. Il captive et retient l’auditoire. C’est un pianiste complet pour qui les harmonies les plus audacieuses n’ont pas de secret. Et un improvisateur capable de coudre ensemble, sans que soient visibles les points de suture, Monk et Nougaro, Cécile et Nardis, Nat’s Blue et La Fiesta. Il allie l’expérience et l’enthousiasme. Un album enregistré dans les mêmes conditions en 2006 (« Léo. G Piano Live ») permet de prolonger le plaisir.
Christophe Lier Organ Trio. Christophe Lier (org), Hervé Rousseaux (ts, ss, cl, fl), Jean-Louis Escalle (dm).
Il y a quelques années, j’ai découvert Christophe Lier. Il pratiquait, au piano, le second degré de fort réjouissante façon, sur des thèmes de Monk et de Bud Powell qu’il cuisinait à sa sauce. Le voici à l’orgue Hammond, flanqué d’un saxophoniste expérimenté et d’un batteur à toute épreuve. La formule est rodée. Dans les années 60, Lonnie Smith et Lou Donaldson, Larry Young et Hank Mobley, bien d’autres encore, l’ont portée à son point d’excellence. Sans parler, évidemment, de Jimmy Smith dont l’association avec Jackie McLean, entre autres, reste dans les mémoires. De tout cela, Christophe Lier a fait son miel – comment en serait-il autrement ? Il a toutefois une approche de son instrument moins agressive que celle des hard boppers. Sa méthode de dressage pour maîtriser cet animal rétif s’appuie sur la délicatesse plus que sur la force. Les belles mélodies qu’il compose (Le Quatre-Quarts aux Pruneaux, This Place Where I’ve Never Been) y trouvent leur compte. Chacune baigne dans un climat particulier, avec, parfois, des réminiscences orientales. Lier fait une grande partie de sa carrière en Chine et en Extrême-Orient et ceci explique sans doute cela. Que ce trio attachant ne soit pas plus connu en France reste une des énigmes non résolues à ce jour.
Le festival bis se poursuit jusqu’au 15. Avec des perspectives on ne peut plus riantes. Y sont attendus, entre autres, le Swingtime de Claude Tissendier, le New Orleans Swing Sextet de Tommy Sancton et, cerise sur le gâteau, le Quartette de Virginie Teychené. Combien de « grands » festivals s’enorgueilliraient de telles affiches !
Jacques Aboucaya
|
Le Off (on dit ici le Bis), c’est une véritable institution. Il remonte, sinon à la plus haute Antiquité chère à Alexandre Vialatte, du moins à un temps où JIM n’avait pas encore atteint les confins du gigantisme. C’est dire que des générations de musiciens s’y sont succédé. Certains, et non des moindres, y ont fait leurs premières armes avant de connaître la notoriété. Au fil des ans, il a cru et embelli, s’est diversifié, a élargi sa palette en même temps que son audience.
Particularités, d’abord la gratuité. Un élément non négligeable. Ensuite, la durée. Vingt jours bien comptés, pour la présente édition. Soit, de onze à vingt heures, un nombre considérable de concerts quotidiens, sur la place de l’Hôtel-de-Ville et au Lac. Sans compter, plus tard dans la soirée, le club attenant au grand chapiteau. Quelque cinquante groupes de nature et de styles très divers. Une telle abondance méritait bien qu’on s’y arrêtât.
Je précise tout de suite que ces coups de coeur ne prétendent pas plus à l’exhaustivité qu’ils ne constituent un palmarès. C’est souvent le hasard (une bribe de chorus entendu qui incite à s’arrêter pour en entendre plus) qui les a provoqués.
Dmitry Baevsky Quartet. Dmitry Baevsky (as), Alain Jean-Marie (p), Gilles Naturel (b), Philippe Soirat (dm).
La seule composition du quartette est déjà un gage de qualité. Entouré de valeurs sûres, le jeune Baevsky – combien de temps insistera-t-on encore sur sa jeunesse ? – confirme toutes les qualités décelées chez ce disciple avéré de Charlie Parker. Son orthodoxie bop va jusqu’au choix des thèmes, devenus, pour la plupart, des standards. Il les interprète avec une flamme intacte, prouvant par là qu’il est possible de renouveler de fond en comble un matériau qu’on eût cru, bien à tort, usé. Et que dire du rôle capital joué par Alain Jean-Marie, dont chacune des interventions reste un modèle de swing et de délicatesse ?
Jean-Michel Proust Quintet. Jean-Michel Proust (ts), Fabien Mary (tp), Pierre Christophe (p), Cédric Caillaud (b), François Laudet (dm).
De même aurait-on mauvaise grâce à reprocher à l’ensemble de Jean-Michel Proust de plonger dans l’histoire du jazz pour en extraire des pépites. En l’occurrence la période hard bop qui fournit au label Blue Note quelques-uns de ses albums les plus fameux. Hank Mobley, Sonny Stitt, Dexter Gordon, autant de compositeurs dont l’esprit, et pas seulement la lettre, sont ressuscités avec talent et conviction. Les deux soufflants s’épaulent à merveille, et pas seulement pour l’exposé des thèmes à l’unisson. Quant à la rythmique, valeureuse, elle compte en Pierre Christophe un pianiste subtil. Sa version de Do Nothing Till You Hear From Me méritait à elle seule une écoute attentive.
Philippe Léogé (p).
Philippe Léogé s’était produit ici même l’an dernier, en duo avec le saxophoniste Jean-Marc Padovani. Il se livre cette année à l’exercice périlleux du solo. Aventuré, surtout en plein air et devant une assistance copieuse. Gageure tenue. Il captive et retient l’auditoire. C’est un pianiste complet pour qui les harmonies les plus audacieuses n’ont pas de secret. Et un improvisateur capable de coudre ensemble, sans que soient visibles les points de suture, Monk et Nougaro, Cécile et Nardis, Nat’s Blue et La Fiesta. Il allie l’expérience et l’enthousiasme. Un album enregistré dans les mêmes conditions en 2006 (« Léo. G Piano Live ») permet de prolonger le plaisir.
Christophe Lier Organ Trio. Christophe Lier (org), Hervé Rousseaux (ts, ss, cl, fl), Jean-Louis Escalle (dm).
Il y a quelques années, j’ai découvert Christophe Lier. Il pratiquait, au piano, le second degré de fort réjouissante façon, sur des thèmes de Monk et de Bud Powell qu’il cuisinait à sa sauce. Le voici à l’orgue Hammond, flanqué d’un saxophoniste expérimenté et d’un batteur à toute épreuve. La formule est rodée. Dans les années 60, Lonnie Smith et Lou Donaldson, Larry Young et Hank Mobley, bien d’autres encore, l’ont portée à son point d’excellence. Sans parler, évidemment, de Jimmy Smith dont l’association avec Jackie McLean, entre autres, reste dans les mémoires. De tout cela, Christophe Lier a fait son miel – comment en serait-il autrement ? Il a toutefois une approche de son instrument moins agressive que celle des hard boppers. Sa méthode de dressage pour maîtriser cet animal rétif s’appuie sur la délicatesse plus que sur la force. Les belles mélodies qu’il compose (Le Quatre-Quarts aux Pruneaux, This Place Where I’ve Never Been) y trouvent leur compte. Chacune baigne dans un climat particulier, avec, parfois, des réminiscences orientales. Lier fait une grande partie de sa carrière en Chine et en Extrême-Orient et ceci explique sans doute cela. Que ce trio attachant ne soit pas plus connu en France reste une des énigmes non résolues à ce jour.
Le festival bis se poursuit jusqu’au 15. Avec des perspectives on ne peut plus riantes. Y sont attendus, entre autres, le Swingtime de Claude Tissendier, le New Orleans Swing Sextet de Tommy Sancton et, cerise sur le gâteau, le Quartette de Virginie Teychené. Combien de « grands » festivals s’enorgueilliraient de telles affiches !
Jacques Aboucaya
|
Le Off (on dit ici le Bis), c’est une véritable institution. Il remonte, sinon à la plus haute Antiquité chère à Alexandre Vialatte, du moins à un temps où JIM n’avait pas encore atteint les confins du gigantisme. C’est dire que des générations de musiciens s’y sont succédé. Certains, et non des moindres, y ont fait leurs premières armes avant de connaître la notoriété. Au fil des ans, il a cru et embelli, s’est diversifié, a élargi sa palette en même temps que son audience.
Particularités, d’abord la gratuité. Un élément non négligeable. Ensuite, la durée. Vingt jours bien comptés, pour la présente édition. Soit, de onze à vingt heures, un nombre considérable de concerts quotidiens, sur la place de l’Hôtel-de-Ville et au Lac. Sans compter, plus tard dans la soirée, le club attenant au grand chapiteau. Quelque cinquante groupes de nature et de styles très divers. Une telle abondance méritait bien qu’on s’y arrêtât.
Je précise tout de suite que ces coups de coeur ne prétendent pas plus à l’exhaustivité qu’ils ne constituent un palmarès. C’est souvent le hasard (une bribe de chorus entendu qui incite à s’arrêter pour en entendre plus) qui les a provoqués.
Dmitry Baevsky Quartet. Dmitry Baevsky (as), Alain Jean-Marie (p), Gilles Naturel (b), Philippe Soirat (dm).
La seule composition du quartette est déjà un gage de qualité. Entouré de valeurs sûres, le jeune Baevsky – combien de temps insistera-t-on encore sur sa jeunesse ? – confirme toutes les qualités décelées chez ce disciple avéré de Charlie Parker. Son orthodoxie bop va jusqu’au choix des thèmes, devenus, pour la plupart, des standards. Il les interprète avec une flamme intacte, prouvant par là qu’il est possible de renouveler de fond en comble un matériau qu’on eût cru, bien à tort, usé. Et que dire du rôle capital joué par Alain Jean-Marie, dont chacune des interventions reste un modèle de swing et de délicatesse ?
Jean-Michel Proust Quintet. Jean-Michel Proust (ts), Fabien Mary (tp), Pierre Christophe (p), Cédric Caillaud (b), François Laudet (dm).
De même aurait-on mauvaise grâce à reprocher à l’ensemble de Jean-Michel Proust de plonger dans l’histoire du jazz pour en extraire des pépites. En l’occurrence la période hard bop qui fournit au label Blue Note quelques-uns de ses albums les plus fameux. Hank Mobley, Sonny Stitt, Dexter Gordon, autant de compositeurs dont l’esprit, et pas seulement la lettre, sont ressuscités avec talent et conviction. Les deux soufflants s’épaulent à merveille, et pas seulement pour l’exposé des thèmes à l’unisson. Quant à la rythmique, valeureuse, elle compte en Pierre Christophe un pianiste subtil. Sa version de Do Nothing Till You Hear From Me méritait à elle seule une écoute attentive.
Philippe Léogé (p).
Philippe Léogé s’était produit ici même l’an dernier, en duo avec le saxophoniste Jean-Marc Padovani. Il se livre cette année à l’exercice périlleux du solo. Aventuré, surtout en plein air et devant une assistance copieuse. Gageure tenue. Il captive et retient l’auditoire. C’est un pianiste complet pour qui les harmonies les plus audacieuses n’ont pas de secret. Et un improvisateur capable de coudre ensemble, sans que soient visibles les points de suture, Monk et Nougaro, Cécile et Nardis, Nat’s Blue et La Fiesta. Il allie l’expérience et l’enthousiasme. Un album enregistré dans les mêmes conditions en 2006 (« Léo. G Piano Live ») permet de prolonger le plaisir.
Christophe Lier Organ Trio. Christophe Lier (org), Hervé Rousseaux (ts, ss, cl, fl), Jean-Louis Escalle (dm).
Il y a quelques années, j’ai découvert Christophe Lier. Il pratiquait, au piano, le second degré de fort réjouissante façon, sur des thèmes de Monk et de Bud Powell qu’il cuisinait à sa sauce. Le voici à l’orgue Hammond, flanqué d’un saxophoniste expérimenté et d’un batteur à toute épreuve. La formule est rodée. Dans les années 60, Lonnie Smith et Lou Donaldson, Larry Young et Hank Mobley, bien d’autres encore, l’ont portée à son point d’excellence. Sans parler, évidemment, de Jimmy Smith dont l’association avec Jackie McLean, entre autres, reste dans les mémoires. De tout cela, Christophe Lier a fait son miel – comment en serait-il autrement ? Il a toutefois une approche de son instrument moins agressive que celle des hard boppers. Sa méthode de dressage pour maîtriser cet animal rétif s’appuie sur la délicatesse plus que sur la force. Les belles mélodies qu’il compose (Le Quatre-Quarts aux Pruneaux, This Place Where I’ve Never Been) y trouvent leur compte. Chacune baigne dans un climat particulier, avec, parfois, des réminiscences orientales. Lier fait une grande partie de sa carrière en Chine et en Extrême-Orient et ceci explique sans doute cela. Que ce trio attachant ne soit pas plus connu en France reste une des énigmes non résolues à ce jour.
Le festival bis se poursuit jusqu’au 15. Avec des perspectives on ne peut plus riantes. Y sont attendus, entre autres, le Swingtime de Claude Tissendier, le New Orleans Swing Sextet de Tommy Sancton et, cerise sur le gâteau, le Quartette de Virginie Teychené. Combien de « grands » festivals s’enorgueilliraient de telles affiches !
Jacques Aboucaya
|
Le Off (on dit ici le Bis), c’est une véritable institution. Il remonte, sinon à la plus haute Antiquité chère à Alexandre Vialatte, du moins à un temps où JIM n’avait pas encore atteint les confins du gigantisme. C’est dire que des générations de musiciens s’y sont succédé. Certains, et non des moindres, y ont fait leurs premières armes avant de connaître la notoriété. Au fil des ans, il a cru et embelli, s’est diversifié, a élargi sa palette en même temps que son audience.
Particularités, d’abord la gratuité. Un élément non négligeable. Ensuite, la durée. Vingt jours bien comptés, pour la présente édition. Soit, de onze à vingt heures, un nombre considérable de concerts quotidiens, sur la place de l’Hôtel-de-Ville et au Lac. Sans compter, plus tard dans la soirée, le club attenant au grand chapiteau. Quelque cinquante groupes de nature et de styles très divers. Une telle abondance méritait bien qu’on s’y arrêtât.
Je précise tout de suite que ces coups de coeur ne prétendent pas plus à l’exhaustivité qu’ils ne constituent un palmarès. C’est souvent le hasard (une bribe de chorus entendu qui incite à s’arrêter pour en entendre plus) qui les a provoqués.
Dmitry Baevsky Quartet. Dmitry Baevsky (as), Alain Jean-Marie (p), Gilles Naturel (b), Philippe Soirat (dm).
La seule composition du quartette est déjà un gage de qualité. Entouré de valeurs sûres, le jeune Baevsky – combien de temps insistera-t-on encore sur sa jeunesse ? – confirme toutes les qualités décelées chez ce disciple avéré de Charlie Parker. Son orthodoxie bop va jusqu’au choix des thèmes, devenus, pour la plupart, des standards. Il les interprète avec une flamme intacte, prouvant par là qu’il est possible de renouveler de fond en comble un matériau qu’on eût cru, bien à tort, usé. Et que dire du rôle capital joué par Alain Jean-Marie, dont chacune des interventions reste un modèle de swing et de délicatesse ?
Jean-Michel Proust Quintet. Jean-Michel Proust (ts), Fabien Mary (tp), Pierre Christophe (p), Cédric Caillaud (b), François Laudet (dm).
De même aurait-on mauvaise grâce à reprocher à l’ensemble de Jean-Michel Proust de plonger dans l’histoire du jazz pour en extraire des pépites. En l’occurrence la période hard bop qui fournit au label Blue Note quelques-uns de ses albums les plus fameux. Hank Mobley, Sonny Stitt, Dexter Gordon, autant de compositeurs dont l’esprit, et pas seulement la lettre, sont ressuscités avec talent et conviction. Les deux soufflants s’épaulent à merveille, et pas seulement pour l’exposé des thèmes à l’unisson. Quant à la rythmique, valeureuse, elle compte en Pierre Christophe un pianiste subtil. Sa version de Do Nothing Till You Hear From Me méritait à elle seule une écoute attentive.
Philippe Léogé (p).
Philippe Léogé s’était produit ici même l’an dernier, en duo avec le saxophoniste Jean-Marc Padovani. Il se livre cette année à l’exercice périlleux du solo. Aventuré, surtout en plein air et devant une assistance copieuse. Gageure tenue. Il captive et retient l’auditoire. C’est un pianiste complet pour qui les harmonies les plus audacieuses n’ont pas de secret. Et un improvisateur capable de coudre ensemble, sans que soient visibles les points de suture, Monk et Nougaro, Cécile et Nardis, Nat’s Blue et La Fiesta. Il allie l’expérience et l’enthousiasme. Un album enregistré dans les mêmes conditions en 2006 (« Léo. G Piano Live ») permet de prolonger le plaisir.
Christophe Lier Organ Trio. Christophe Lier (org), Hervé Rousseaux (ts, ss, cl, fl), Jean-Louis Escalle (dm).
Il y a quelques années, j’ai découvert Christophe Lier. Il pratiquait, au piano, le second degré de fort réjouissante façon, sur des thèmes de Monk et de Bud Powell qu’il cuisinait à sa sauce. Le voici à l’orgue Hammond, flanqué d’un saxophoniste expérimenté et d’un batteur à toute épreuve. La formule est rodée. Dans les années 60, Lonnie Smith et Lou Donaldson, Larry Young et Hank Mobley, bien d’autres encore, l’ont portée à son point d’excellence. Sans parler, évidemment, de Jimmy Smith dont l’association avec Jackie McLean, entre autres, reste dans les mémoires. De tout cela, Christophe Lier a fait son miel – comment en serait-il autrement ? Il a toutefois une approche de son instrument moins agressive que celle des hard boppers. Sa méthode de dressage pour maîtriser cet animal rétif s’appuie sur la délicatesse plus que sur la force. Les belles mélodies qu’il compose (Le Quatre-Quarts aux Pruneaux, This Place Where I’ve Never Been) y trouvent leur compte. Chacune baigne dans un climat particulier, avec, parfois, des réminiscences orientales. Lier fait une grande partie de sa carrière en Chine et en Extrême-Orient et ceci explique sans doute cela. Que ce trio attachant ne soit pas plus connu en France reste une des énigmes non résolues à ce jour.
Le festival bis se poursuit jusqu’au 15. Avec des perspectives on ne peut plus riantes. Y sont attendus, entre autres, le Swingtime de Claude Tissendier, le New Orleans Swing Sextet de Tommy Sancton et, cerise sur le gâteau, le Quartette de Virginie Teychené. Combien de « grands » festivals s’enorgueilliraient de telles affiches !
Jacques Aboucaya