Junas (3): La "battle" jazz d'Emile avec ses solistes guerilleros
Ibiza plage, composition enlevée de Joachim Kühn démarre l’air de rien. C’est sans compter sur l’envie soudaine, éruptive, contagieuse des solistes. Une colonne d’air de folie souffle sur la scène. Un orage de notes explosives secoue les pierres des Carrières. Portal, Parisien, Codjia, Kühn guerrilleros jazz font la battle. Les photographes mitraillent à gogo.
Emile Parisien (ss), Michel Portal (bcl), Manu Codjia (elg), Joachim Kühn (p), Simon Taille (b), Mario Costa (dm)
Manu Katché (dm), Alex Tassel (bugl), Stéphane Chausse (as), Jim Watson (p, elp, keyb), Jérome Regard (b)
Jazz à Junas, Carrières, Junas (30250), 20 juillet
On ne le saura sans doute jamais car, par chance, il n’existe pas encore d’Institut de sondage jazz pour recueillir les avis d’un échantillon de spectateurs en mode sortie des urnes festivalières ! Mais bon s’il faut en croire l’expérience accumulée en matière journalistique sur la base des faits, ce que l’on a vu, entendu, à l’applaudimètre le premier concert de la seconde nuit de Junas dépassait nettement le second en intensité sonore.
Des moments forts, sur la performance de l’orchestre d’Emile Parisien il y en eut un bon lot. De quoi faire oublier in extenso les inquiétudes du jeune leader issu des classes jazz de Marciac à propos du son de la clarinette basse éprouvé lors de la balance, l’essai de son, dans le concert parallèle de chant de cigales cachées entre les pierres incandescentes des Carrières. Ces points culminants du concert ont sacralisé le rôle, ont correspondu à la montée en régime des solistes (Emile Parisien bien sur, mais aussi bien Portal, Kuhn, Codjia)…le jour de l’étape clef de l’Izoard pour les coureurs du Tour de France. Premier compétiteur en piste, Michel Portal, rapidement lancée dans une échappée belle sur sa clarinette dans le registre évocateur des basses. On sait le musicien bayonnais toujours prêt à assumer le risque d’un souffle singulier, discontinu, bousculant la norme sinon les habitudes pour mieux faire circuler la musique (Le clown tueur de la fête foraine) Ce groupe de jeunes, il le prend cash avec son enthousiasme, sa recherche de dérives sonores, son engagement. Portal accepte le défi. ll joue ès-qualité, avec son savoir faire, en pure transcendance de celui qui, expérience oblige, en a vu d’autres. Inclassable.
Joachim Kühn, l’autre ancien, se plait bien lui aussi dans ce bain de jazz libre monté par des « minots » Et vu le traitement qu’il inflige au clavier ( clusters claqués, accords martelés ) en alternance avec de pures phrases d’apaisement (Transmitting,, une de ses compositions porte la beauté intrinsèque d’une mélodie qui , définitivement, s’ancre dans les têtes) le pianiste allemand d’Ibiza, sur la scène de Junas, clairement pose sa marque. Manu Codjia, maintenant. Membre régulier de l’orchestre le guitariste trace un sillon personnel en notes saturées, piquées d’une tension permanente poussant jusqu’aux extrêmes aïgues. Une griffe hendrixienne. Emile Parisien à son habitude reste dans un élan d’énergie folle, dansant d’un pied sur l’autre. Du saxophone soprano jaillissent des salves chaudes, timbrées, innervées d’une saturation porteuse d’émotion forte. Et lorsqu’il en finit avec son tour de chorus, le saxophoniste se tourne vers le soliste suivant pour l’encourager, le soutenir, une lumière dans le regard. Au point de guider Portal vers les points chauds a venir dans sa partition. Attention de compositeur avisé, volonté de mettre le soliste dans du confort, geste de respect vis à vis du savoir faire et de l’expérience. Au beau milieu de ce théâtre d’interventions éclatées en solos successifs, basse et batterie font le lien, tiennent la barque sous les assauts répétés des vents et des cordes. Au final, conquis et comme eporté par le courant le public ne voudra pas plus lâcher l’équipage.
Difficile de prendre la scène après un moment pareil. Bien sur la batterie de Manu Katché sonne toujours terrible. Chaque coup donné, caisses ou cymbales, sort quand et comme il le faut. Filtré en niveau de couleur, en intensité. La musique du nouveau quartet vit au travers d’une gamme de jazz ambiancé (cf le rôle donné à l’EWI- sax version numérique de Stéphane Chausse, au bugle d’Alex Tassel) A l’image de ses enregistrements antérieurs, le son du groupe en live paraît « ECMisé », tamisé. Succédant à la décharge d’émotion précédente, il était prévisible que la réception de cette seconde partie par le public en fut quelque peu tiédi question ressenti.
Robert Latxague
Jazz à Junas
Carrières, 21 h, Junas (30250) Nelson Veras; Chucho Valdes
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Ibiza plage, composition enlevée de Joachim Kühn démarre l’air de rien. C’est sans compter sur l’envie soudaine, éruptive, contagieuse des solistes. Une colonne d’air de folie souffle sur la scène. Un orage de notes explosives secoue les pierres des Carrières. Portal, Parisien, Codjia, Kühn guerrilleros jazz font la battle. Les photographes mitraillent à gogo.
Emile Parisien (ss), Michel Portal (bcl), Manu Codjia (elg), Joachim Kühn (p), Simon Taille (b), Mario Costa (dm)
Manu Katché (dm), Alex Tassel (bugl), Stéphane Chausse (as), Jim Watson (p, elp, keyb), Jérome Regard (b)
Jazz à Junas, Carrières, Junas (30250), 20 juillet
On ne le saura sans doute jamais car, par chance, il n’existe pas encore d’Institut de sondage jazz pour recueillir les avis d’un échantillon de spectateurs en mode sortie des urnes festivalières ! Mais bon s’il faut en croire l’expérience accumulée en matière journalistique sur la base des faits, ce que l’on a vu, entendu, à l’applaudimètre le premier concert de la seconde nuit de Junas dépassait nettement le second en intensité sonore.
Des moments forts, sur la performance de l’orchestre d’Emile Parisien il y en eut un bon lot. De quoi faire oublier in extenso les inquiétudes du jeune leader issu des classes jazz de Marciac à propos du son de la clarinette basse éprouvé lors de la balance, l’essai de son, dans le concert parallèle de chant de cigales cachées entre les pierres incandescentes des Carrières. Ces points culminants du concert ont sacralisé le rôle, ont correspondu à la montée en régime des solistes (Emile Parisien bien sur, mais aussi bien Portal, Kuhn, Codjia)…le jour de l’étape clef de l’Izoard pour les coureurs du Tour de France. Premier compétiteur en piste, Michel Portal, rapidement lancée dans une échappée belle sur sa clarinette dans le registre évocateur des basses. On sait le musicien bayonnais toujours prêt à assumer le risque d’un souffle singulier, discontinu, bousculant la norme sinon les habitudes pour mieux faire circuler la musique (Le clown tueur de la fête foraine) Ce groupe de jeunes, il le prend cash avec son enthousiasme, sa recherche de dérives sonores, son engagement. Portal accepte le défi. ll joue ès-qualité, avec son savoir faire, en pure transcendance de celui qui, expérience oblige, en a vu d’autres. Inclassable.
Joachim Kühn, l’autre ancien, se plait bien lui aussi dans ce bain de jazz libre monté par des « minots » Et vu le traitement qu’il inflige au clavier ( clusters claqués, accords martelés ) en alternance avec de pures phrases d’apaisement (Transmitting,, une de ses compositions porte la beauté intrinsèque d’une mélodie qui , définitivement, s’ancre dans les têtes) le pianiste allemand d’Ibiza, sur la scène de Junas, clairement pose sa marque. Manu Codjia, maintenant. Membre régulier de l’orchestre le guitariste trace un sillon personnel en notes saturées, piquées d’une tension permanente poussant jusqu’aux extrêmes aïgues. Une griffe hendrixienne. Emile Parisien à son habitude reste dans un élan d’énergie folle, dansant d’un pied sur l’autre. Du saxophone soprano jaillissent des salves chaudes, timbrées, innervées d’une saturation porteuse d’émotion forte. Et lorsqu’il en finit avec son tour de chorus, le saxophoniste se tourne vers le soliste suivant pour l’encourager, le soutenir, une lumière dans le regard. Au point de guider Portal vers les points chauds a venir dans sa partition. Attention de compositeur avisé, volonté de mettre le soliste dans du confort, geste de respect vis à vis du savoir faire et de l’expérience. Au beau milieu de ce théâtre d’interventions éclatées en solos successifs, basse et batterie font le lien, tiennent la barque sous les assauts répétés des vents et des cordes. Au final, conquis et comme eporté par le courant le public ne voudra pas plus lâcher l’équipage.
Difficile de prendre la scène après un moment pareil. Bien sur la batterie de Manu Katché sonne toujours terrible. Chaque coup donné, caisses ou cymbales, sort quand et comme il le faut. Filtré en niveau de couleur, en intensité. La musique du nouveau quartet vit au travers d’une gamme de jazz ambiancé (cf le rôle donné à l’EWI- sax version numérique de Stéphane Chausse, au bugle d’Alex Tassel) A l’image de ses enregistrements antérieurs, le son du groupe en live paraît « ECMisé », tamisé. Succédant à la décharge d’émotion précédente, il était prévisible que la réception de cette seconde partie par le public en fut quelque peu tiédi question ressenti.
Robert Latxague
Jazz à Junas
Carrières, 21 h, Junas (30250) Nelson Veras; Chucho Valdes