Jymie Merritt, mort d’un messager
L’ancien contrebassiste des Jazz Messengers d’Art Blakey est mort le 10 avril, à l’âge de 93 ans, un décès apparemment sans relation avec l’épidémie de Covid-19.
Né le 3 mai 1927 à Philadelphie, d’une mère pianiste et chef de chorale à l’église baptiste, James Raleight Merritt se mit à la contrebasse au retour de son service militaire en 1946, prenant des cours avec Carl Torello, contrebassiste au Philadelphia Orchestra, et à l’Ornstein School of Music de Philadelphia (également fréquentée par John Coltrane et Jimmy Smith). Il se produisait dès 1949 dans le groupe du saxophoniste Jimmy Oliver auprès de Red Garland et Philly Joe Jones.
Il est ensuite très actif dans le domaine du rhythm and blues, notamment avec Bull Moose Jackson chez qui il adopte une petite contrebasse électro-acoustique “Baby” de la marque Ampeg (semblable à celle utilisée par Andy Gonzalez auquel nous rendons hommage également ce jour dans ces pages) et avec qui il enregistre en 1951 en compagnie de Johnny Coles, Benny Golson et Tadd Dameron. Il retrouvera ceux-ci en 1953 à Atlantic City au sein de l’orchestre de Dameron qui comprend également Clifford Brown, Gigi Gryce, Cecil Payne et Philly Joe Jones… l’avant-garde du hard bop. Signalé auprès de B.B King de 1955 à 1957 (probablement lui sur I Need You So Bad de 1957), il rejoint alors New York et devient le contrebassiste des Jazz Messengers d’Art Blakey jusqu’en 1962, lorsqu’il cesse de tourner pour raison de santé. Il fonde alors The Forerunners à Philadelphie, coopérative constituée autour de ses principes en matière de langage harmonique et de composition, et qui comporta dans ses rangs notamment le saxophoniste Odean Pope et le batteur Donald Bailey. « Pour pouvoir jouer les compositions originales de Jymie, peut-on lire sur le site des Forerunners, les musiciens doivent se familiariser avec “Le Système” qui concerne le recours aux rythmes croisés et une notation des accords basée sur les intervalles de quarte. »
C’est au côté de Chet Baker qu’il fait son retour en 1964, puis rejoint Max Roach 1968 avant de se joindre à l’orchestre constitué par Dizzy Gillespie pour le Dick Cavett Show, mais il continua jusqu’à ses 90 ans à entretenir ses Forerunners. On peut le voir et l’écouter ci-dessous en 1958 prendre un long solo sur Moanin’ avec les jazz Messengers. Franck Bergerot