Le Thomas de Pourquery Express au départ de la Gare Jazz : récit d’un voyage
Le concept de la soirée était à lui seul suffisamment intriguant pour attirer une foule nombreuse, créant une queue à l’entrée de la salle dès les premières notes du concert. Le lieu contenait lui aussi son lot de suprises, et non des moindres : entrée et montant de la participation libres, ce qui le distingue déjà de nombre de clubs connus, et surtout un concept franchement inhabituel pour un lieu estampillé « jazz » celui d’un silence religieux pendant les morceaux, rappelé par plusieurs écriteaux explicites mais aussi par le patron et les habitués du lieu.
La plus grande surprise est pourtant venue de la scène. Visuellement, on découvre un Thomas de Pourquery coiffé d’une casquette et recouvert d’un hoodie noir pailleté, au micro derrière un clavier et des quelques effets, accompagné du batteur David Aknin et de Sylvain Daniel à la basse. Un peu déconcertante au début, la musique, toute en chansons passant de ballades mélancoliques aux airs pêchus semblant venus tout droit des 80’s jusqu’à des passages carrément dance floor irrésistibles, a rapidement séduit le public qui se pressait autour de la scène.
Finalement, le saxophone soprano, brillant de mille feux, que les murmures de la salle avaient annoncé même à ceux qui ne pouvaient pas le voir directement du fond de la salle bondée, n’a fait son apparition qu’au deuxième set, vers 23h30. De courtes mais intenses improvisations sont enfin venues ajouter la pièce manquante aux morceaux, sur lesquels on imaginait déjà volontiers de déchirants chorus. Certains motifs seront repris en chœur par la foule dans une communion qui, l’espace d’une coda grandiose, a fait oublier le jeu du roi du silence. Au four et au moulin, ou plutôt au chant, au clavier et au saxophone, Thomas de Pourquery, parfaitement à l’aise dans ce rôle d’ambianceur délirant, susurrait d’une voix suave des messages d’amour à son public aussi facilement qu’il haranguait la foule en se déhanchant avec le naturel d’une véritable rock star, au cœur des morceaux les plus intenses, sa tenue ajoutant au spectaculaire de cette vision.
Pour le plus grand plaisir du public, les morceaux ont duré et se sont transformés en voyages sonores grisants. Signe que la Gare Jazz n’a peut-être pas tout perdu des fonctions qui étaient, jusqu’en 1934 encore, les siennes.