Lettres à Miles à la Maison de la Poésie
A l’occasion de la sortie de « Lettres à Miles », recueil de textes supervisé par Franck Médioni (Alter ego editions) quelques uns de ces textes furent lus samedi soir, avec le soutien pétaradant de Médéric Collignon et de son groupe.
Médéric Collignon (cornet), Stéphane Kerecki (b), Fabrice Moreau (dm), Yvan Robilliard (claviers) et des interventions de Zeno Bianu, René de Ceccaty, Jacques Darras, Sébastien Ortiz, Franck Médioni. Maison de la Poésie, 1er octobre 2016.
L’interaction textes et musique, chose toujours fragile et périlleuse, se met bien en place. Les textes sont très variés et reflètent bien la diversité du livre de Franck Medioni, dans lequel voisinent critiques et musiciens (le saxophoniste Jimmy Heath, qui fit partie du groupe de Miles Davis pendant un temps très court après Kind of Blue, raconte notamment, anecdote merveilleuse, comment le trompettiste lui avait « expliqué » So What: « Tu joues le thème comme si tu jouais sur les touches blanches du piano, et le pont comme si tu jouais sur les touches noires! »)
Le texte qui me touche le plus est celui du poète Jacques Darras, qui associe de manière inattendue le trompettiste avec Niki de Saint Phalle, avec un engagement corporel de toute sa personne, en scandant son poème de manière très vivante.
Mais c’est Médéric Collignon et son groupe qui font décoller la soirée. Ce musicien est si doué, capable en un claquement de doigts de se transformer en boîte à rythme, chanteur traditionnel zoulou, bruiteur, cirque Pinder, que l’on peut oublier parfois quel grand trompettiste ( ou cornettiste) il est. Samedi soir, pourtant, impossible de l’oublier. Il aurait fallu avoir la dune du pyla dans les oreilles, autrement dit les portugaises gravement ensablées.
Médéric Collignon, donc, a joué comme un fou. Quel son! Puissant, ferme, bien net, droit et stable dans les aigus. Admirable. Et les grincheux qui auraient pensé qu’une telle vigueur dans le son n’était pas idéale pour rendre hommage à Miles Davis, n’ont qu’à réécouter (par exemple) Bitches Brew. Médéric Collignon et ses partenaires ont choisi de rendre au trompettiste un hommage musical, c’est à dire filtré par la sensibilité de musiciens vivants, un vrai hommage, non pas un pastiche.
Ils ont picoré dans toute la carrière de Miles Davis, et suivi la logique de leurs caprices et de leurs sensibilités. Ils ont joué notamment Fran-Dance (admirable), Josuah, Eighty-one, All blues ( « un all blues minorisé » précise avec malice Collignon aprés le concert), So Near so Far, Splash (extrait de In a silent Way), Dual Mr Anthony Tillmon Williams Process (sur Water Babies) et pour finir Violet, emprunté au disque Aura, de 1984. On a entendu aussi quelques bribes, quelques réminiscences d’autres thèmes en contrepoint des textes quj étaient lus.
Tout au long de la soirée, Médéric Collignon donne, et donne sans compter. Son corps est comme une caisse de résonance des rythmes et des grooves installés par une section rythmique qui est aussi incandescente que lui-même. A un certain moment on a bien cru qu’il allait se mettre à faire des claquettes à force de marteler le rythme avec les deux pieds. Juste après le concert, Franck Médioni passe un enregistrement d’une ballade qui est comme un condensé de l’art davisien, it never entered my mind, avec un Red Garland d’une délicatesse inouïe. Mon regard flotte dans la salle, se pose sur une auditrice, vers ma gauche, qui semble s’illuminer de l’intérieur, Mona Lisa aux yeux clos. Mais c’est toute la salle de la Maison de la Poésie qui est recueillie dans l’écoute de ce morceau qui « remet l’église au centre du village » comme on dit dans le sud-ouest. Après le concert je bavarde avec Médéric Collignon (une conversation avec lui, c’est comme parler avec dix personnes à la fois). Il dit des choses aussi vraies avec sa bouche qu’avec sa trompette: « La musique, c’est le mouvement…C’est une leçon à distance que j’ai prise avec Miles Davis. Monsieur Miles Davis…Master Miles Davis (il rigole)…Je ne supporte pas les gens qui l’appellent « miles » comme s’ils lui avaient tapé sur l’épaule…. ».
Texte JF Mondot
Dessins: Annie-Claire Alvoët (avec le portrait de Miles Davis en ouverture, qui est l’un des trois dessins réalisés par l’artiste pour le livre de Franck Médioni). Autres dessins et peintures sur www.annie-claire.com |
A l’occasion de la sortie de « Lettres à Miles », recueil de textes supervisé par Franck Médioni (Alter ego editions) quelques uns de ces textes furent lus samedi soir, avec le soutien pétaradant de Médéric Collignon et de son groupe.
Médéric Collignon (cornet), Stéphane Kerecki (b), Fabrice Moreau (dm), Yvan Robilliard (claviers) et des interventions de Zeno Bianu, René de Ceccaty, Jacques Darras, Sébastien Ortiz, Franck Médioni. Maison de la Poésie, 1er octobre 2016.
L’interaction textes et musique, chose toujours fragile et périlleuse, se met bien en place. Les textes sont très variés et reflètent bien la diversité du livre de Franck Medioni, dans lequel voisinent critiques et musiciens (le saxophoniste Jimmy Heath, qui fit partie du groupe de Miles Davis pendant un temps très court après Kind of Blue, raconte notamment, anecdote merveilleuse, comment le trompettiste lui avait « expliqué » So What: « Tu joues le thème comme si tu jouais sur les touches blanches du piano, et le pont comme si tu jouais sur les touches noires! »)
Le texte qui me touche le plus est celui du poète Jacques Darras, qui associe de manière inattendue le trompettiste avec Niki de Saint Phalle, avec un engagement corporel de toute sa personne, en scandant son poème de manière très vivante.
Mais c’est Médéric Collignon et son groupe qui font décoller la soirée. Ce musicien est si doué, capable en un claquement de doigts de se transformer en boîte à rythme, chanteur traditionnel zoulou, bruiteur, cirque Pinder, que l’on peut oublier parfois quel grand trompettiste ( ou cornettiste) il est. Samedi soir, pourtant, impossible de l’oublier. Il aurait fallu avoir la dune du pyla dans les oreilles, autrement dit les portugaises gravement ensablées.
Médéric Collignon, donc, a joué comme un fou. Quel son! Puissant, ferme, bien net, droit et stable dans les aigus. Admirable. Et les grincheux qui auraient pensé qu’une telle vigueur dans le son n’était pas idéale pour rendre hommage à Miles Davis, n’ont qu’à réécouter (par exemple) Bitches Brew. Médéric Collignon et ses partenaires ont choisi de rendre au trompettiste un hommage musical, c’est à dire filtré par la sensibilité de musiciens vivants, un vrai hommage, non pas un pastiche.
Ils ont picoré dans toute la carrière de Miles Davis, et suivi la logique de leurs caprices et de leurs sensibilités. Ils ont joué notamment Fran-Dance (admirable), Josuah, Eighty-one, All blues ( « un all blues minorisé » précise avec malice Collignon aprés le concert), So Near so Far, Splash (extrait de In a silent Way), Dual Mr Anthony Tillmon Williams Process (sur Water Babies) et pour finir Violet, emprunté au disque Aura, de 1984. On a entendu aussi quelques bribes, quelques réminiscences d’autres thèmes en contrepoint des textes quj étaient lus.
Tout au long de la soirée, Médéric Collignon donne, et donne sans compter. Son corps est comme une caisse de résonance des rythmes et des grooves installés par une section rythmique qui est aussi incandescente que lui-même. A un certain moment on a bien cru qu’il allait se mettre à faire des claquettes à force de marteler le rythme avec les deux pieds. Juste après le concert, Franck Médioni passe un enregistrement d’une ballade qui est comme un condensé de l’art davisien, it never entered my mind, avec un Red Garland d’une délicatesse inouïe. Mon regard flotte dans la salle, se pose sur une auditrice, vers ma gauche, qui semble s’illuminer de l’intérieur, Mona Lisa aux yeux clos. Mais c’est toute la salle de la Maison de la Poésie qui est recueillie dans l’écoute de ce morceau qui « remet l’église au centre du village » comme on dit dans le sud-ouest. Après le concert je bavarde avec Médéric Collignon (une conversation avec lui, c’est comme parler avec dix personnes à la fois). Il dit des choses aussi vraies avec sa bouche qu’avec sa trompette: « La musique, c’est le mouvement…C’est une leçon à distance que j’ai prise avec Miles Davis. Monsieur Miles Davis…Master Miles Davis (il rigole)…Je ne supporte pas les gens qui l’appellent « miles » comme s’ils lui avaient tapé sur l’épaule…. ».
Texte JF Mondot
Dessins: Annie-Claire Alvoët (avec le portrait de Miles Davis en ouverture, qui est l’un des trois dessins réalisés par l’artiste pour le livre de Franck Médioni). Autres dessins et peintures sur www.annie-claire.com |
A l’occasion de la sortie de « Lettres à Miles », recueil de textes supervisé par Franck Médioni (Alter ego editions) quelques uns de ces textes furent lus samedi soir, avec le soutien pétaradant de Médéric Collignon et de son groupe.
Médéric Collignon (cornet), Stéphane Kerecki (b), Fabrice Moreau (dm), Yvan Robilliard (claviers) et des interventions de Zeno Bianu, René de Ceccaty, Jacques Darras, Sébastien Ortiz, Franck Médioni. Maison de la Poésie, 1er octobre 2016.
L’interaction textes et musique, chose toujours fragile et périlleuse, se met bien en place. Les textes sont très variés et reflètent bien la diversité du livre de Franck Medioni, dans lequel voisinent critiques et musiciens (le saxophoniste Jimmy Heath, qui fit partie du groupe de Miles Davis pendant un temps très court après Kind of Blue, raconte notamment, anecdote merveilleuse, comment le trompettiste lui avait « expliqué » So What: « Tu joues le thème comme si tu jouais sur les touches blanches du piano, et le pont comme si tu jouais sur les touches noires! »)
Le texte qui me touche le plus est celui du poète Jacques Darras, qui associe de manière inattendue le trompettiste avec Niki de Saint Phalle, avec un engagement corporel de toute sa personne, en scandant son poème de manière très vivante.
Mais c’est Médéric Collignon et son groupe qui font décoller la soirée. Ce musicien est si doué, capable en un claquement de doigts de se transformer en boîte à rythme, chanteur traditionnel zoulou, bruiteur, cirque Pinder, que l’on peut oublier parfois quel grand trompettiste ( ou cornettiste) il est. Samedi soir, pourtant, impossible de l’oublier. Il aurait fallu avoir la dune du pyla dans les oreilles, autrement dit les portugaises gravement ensablées.
Médéric Collignon, donc, a joué comme un fou. Quel son! Puissant, ferme, bien net, droit et stable dans les aigus. Admirable. Et les grincheux qui auraient pensé qu’une telle vigueur dans le son n’était pas idéale pour rendre hommage à Miles Davis, n’ont qu’à réécouter (par exemple) Bitches Brew. Médéric Collignon et ses partenaires ont choisi de rendre au trompettiste un hommage musical, c’est à dire filtré par la sensibilité de musiciens vivants, un vrai hommage, non pas un pastiche.
Ils ont picoré dans toute la carrière de Miles Davis, et suivi la logique de leurs caprices et de leurs sensibilités. Ils ont joué notamment Fran-Dance (admirable), Josuah, Eighty-one, All blues ( « un all blues minorisé » précise avec malice Collignon aprés le concert), So Near so Far, Splash (extrait de In a silent Way), Dual Mr Anthony Tillmon Williams Process (sur Water Babies) et pour finir Violet, emprunté au disque Aura, de 1984. On a entendu aussi quelques bribes, quelques réminiscences d’autres thèmes en contrepoint des textes quj étaient lus.
Tout au long de la soirée, Médéric Collignon donne, et donne sans compter. Son corps est comme une caisse de résonance des rythmes et des grooves installés par une section rythmique qui est aussi incandescente que lui-même. A un certain moment on a bien cru qu’il allait se mettre à faire des claquettes à force de marteler le rythme avec les deux pieds. Juste après le concert, Franck Médioni passe un enregistrement d’une ballade qui est comme un condensé de l’art davisien, it never entered my mind, avec un Red Garland d’une délicatesse inouïe. Mon regard flotte dans la salle, se pose sur une auditrice, vers ma gauche, qui semble s’illuminer de l’intérieur, Mona Lisa aux yeux clos. Mais c’est toute la salle de la Maison de la Poésie qui est recueillie dans l’écoute de ce morceau qui « remet l’église au centre du village » comme on dit dans le sud-ouest. Après le concert je bavarde avec Médéric Collignon (une conversation avec lui, c’est comme parler avec dix personnes à la fois). Il dit des choses aussi vraies avec sa bouche qu’avec sa trompette: « La musique, c’est le mouvement…C’est une leçon à distance que j’ai prise avec Miles Davis. Monsieur Miles Davis…Master Miles Davis (il rigole)…Je ne supporte pas les gens qui l’appellent « miles » comme s’ils lui avaient tapé sur l’épaule…. ».
Texte JF Mondot
Dessins: Annie-Claire Alvoët (avec le portrait de Miles Davis en ouverture, qui est l’un des trois dessins réalisés par l’artiste pour le livre de Franck Médioni). Autres dessins et peintures sur www.annie-claire.com |
A l’occasion de la sortie de « Lettres à Miles », recueil de textes supervisé par Franck Médioni (Alter ego editions) quelques uns de ces textes furent lus samedi soir, avec le soutien pétaradant de Médéric Collignon et de son groupe.
Médéric Collignon (cornet), Stéphane Kerecki (b), Fabrice Moreau (dm), Yvan Robilliard (claviers) et des interventions de Zeno Bianu, René de Ceccaty, Jacques Darras, Sébastien Ortiz, Franck Médioni. Maison de la Poésie, 1er octobre 2016.
L’interaction textes et musique, chose toujours fragile et périlleuse, se met bien en place. Les textes sont très variés et reflètent bien la diversité du livre de Franck Medioni, dans lequel voisinent critiques et musiciens (le saxophoniste Jimmy Heath, qui fit partie du groupe de Miles Davis pendant un temps très court après Kind of Blue, raconte notamment, anecdote merveilleuse, comment le trompettiste lui avait « expliqué » So What: « Tu joues le thème comme si tu jouais sur les touches blanches du piano, et le pont comme si tu jouais sur les touches noires! »)
Le texte qui me touche le plus est celui du poète Jacques Darras, qui associe de manière inattendue le trompettiste avec Niki de Saint Phalle, avec un engagement corporel de toute sa personne, en scandant son poème de manière très vivante.
Mais c’est Médéric Collignon et son groupe qui font décoller la soirée. Ce musicien est si doué, capable en un claquement de doigts de se transformer en boîte à rythme, chanteur traditionnel zoulou, bruiteur, cirque Pinder, que l’on peut oublier parfois quel grand trompettiste ( ou cornettiste) il est. Samedi soir, pourtant, impossible de l’oublier. Il aurait fallu avoir la dune du pyla dans les oreilles, autrement dit les portugaises gravement ensablées.
Médéric Collignon, donc, a joué comme un fou. Quel son! Puissant, ferme, bien net, droit et stable dans les aigus. Admirable. Et les grincheux qui auraient pensé qu’une telle vigueur dans le son n’était pas idéale pour rendre hommage à Miles Davis, n’ont qu’à réécouter (par exemple) Bitches Brew. Médéric Collignon et ses partenaires ont choisi de rendre au trompettiste un hommage musical, c’est à dire filtré par la sensibilité de musiciens vivants, un vrai hommage, non pas un pastiche.
Ils ont picoré dans toute la carrière de Miles Davis, et suivi la logique de leurs caprices et de leurs sensibilités. Ils ont joué notamment Fran-Dance (admirable), Josuah, Eighty-one, All blues ( « un all blues minorisé » précise avec malice Collignon aprés le concert), So Near so Far, Splash (extrait de In a silent Way), Dual Mr Anthony Tillmon Williams Process (sur Water Babies) et pour finir Violet, emprunté au disque Aura, de 1984. On a entendu aussi quelques bribes, quelques réminiscences d’autres thèmes en contrepoint des textes quj étaient lus.
Tout au long de la soirée, Médéric Collignon donne, et donne sans compter. Son corps est comme une caisse de résonance des rythmes et des grooves installés par une section rythmique qui est aussi incandescente que lui-même. A un certain moment on a bien cru qu’il allait se mettre à faire des claquettes à force de marteler le rythme avec les deux pieds. Juste après le concert, Franck Médioni passe un enregistrement d’une ballade qui est comme un condensé de l’art davisien, it never entered my mind, avec un Red Garland d’une délicatesse inouïe. Mon regard flotte dans la salle, se pose sur une auditrice, vers ma gauche, qui semble s’illuminer de l’intérieur, Mona Lisa aux yeux clos. Mais c’est toute la salle de la Maison de la Poésie qui est recueillie dans l’écoute de ce morceau qui « remet l’église au centre du village » comme on dit dans le sud-ouest. Après le concert je bavarde avec Médéric Collignon (une conversation avec lui, c’est comme parler avec dix personnes à la fois). Il dit des choses aussi vraies avec sa bouche qu’avec sa trompette: « La musique, c’est le mouvement…C’est une leçon à distance que j’ai prise avec Miles Davis. Monsieur Miles Davis…Master Miles Davis (il rigole)…Je ne supporte pas les gens qui l’appellent « miles » comme s’ils lui avaient tapé sur l’épaule…. ».
Texte JF Mondot
Dessins: Annie-Claire Alvoët (avec le portrait de Miles Davis en ouverture, qui est l’un des trois dessins réalisés par l’artiste pour le livre de Franck Médioni). Autres dessins et peintures sur www.annie-claire.com