Marciac (4): Le bien être de l'Emile
Didier Lockwood en scène pour la balance. Question d’un inconnu, baraqué, visage taillé à la serpe « Vous êtes le manager?…J’ai entendu qu’il va ce soir descendre dans le public. Je suis l’officier de sécurité. On va lui mettre 2 types devant et 2 derrière » Le talkie walkie grésille » D’une voix mâle « Ici Papa Charlie Tango… j’écoute »
D’habituels compagnons de jeu figurent au programme à sa suite mais Galliano, seul ce soir avec son accordéon « vous savez combien il pèse ? treize kilos ! »- fait face à la foule dans un halo de lumière bleue sous le chapiteau-terrain-de-rugby. Barbara évoquée d’entrée de jeu comme premier couplet. Suivent de longues minutes sans dire un mot mais passées à jouer, à « envoyer » comme on dit dans le sport habituellement pratiqué sur ce terrain. Il joue avec le public aussi, tente de le surprendre sur des motifs pourtant maintes fois entendus y compris sur les ondes (Tango pour Claude, Sertao, Libertango de Piazzolla) Richard Galliano dans sa solitude sur les planches fait tout tout seul. Sauf retenir son souffle. Il s’affiche en champion du new musette histoire sans doute de réactualiser l’héritage combiné de Marcel Azzolla, Astor Piazzolla et du jazz façon piano à bretelles. Sur la scène, gersoise ce soir, son panorama de musiques élargit encore son horizon. La javanaise de Gainsbourg comme une ritournelle. La mélodie douce de My funny valentine en hommage à Chet Baker, autre solitaire sans le vouloir. Odéon, parfum entre sucre et cachaxa, est comme il se plait à le rapeller « un air joué par tous les accordéonistes brésiliens » Nougaro dont il fut le musicien, filtré entre jazz et java. Et du Michel Legrand pour finir en mélodies du paradoxe: loin des rochers de Cherbourg, mais bien ancré en terre gersoise puisque le pianiste compositeur figure bien ce soir là au premier rang du chapiteau pour applaudir. l’accordéoniste En jouant son va-tout de mesures ouvertes, à Marciac, Richard Galliano oublie, le temps d’un soir, le poids de son instrument.
Didier Lockwood lui aime raconter. Et ne s’en prive pas. Au point de mettre chacun directement dans la confidence avant que d’entrer dans la danse « Nous allons vous offrir des morceaux tout neufs, jamais joués à ce jour. Nous les mettrons en boite bientôt dans un nouveau disque…cela faisait dix ans que je n’avais plus enregistré sous mon nom ! » Un bon teasing « isn’t it « ? Quark, titre emprunté à la physique quantique, pour débuter par des molécules plongées dans un bain de chaleur pris à quatre, sur le vif. Vient le moment d’une ballade, l’instant de l’émotion « Good morning Lady Sun est un thème dédié à ma femme, chanteuse d’opéra… » L’occasion de notes choisies aussi, soulignées avec délicatesse par la complicité des métiers conjugués de Sylvain Luc et Dédé Ceccarelli. Le guitariste et le violoniste sont de la lignée des manieurs de cordes volubiles, virtuoses au sens du terme donc capables -sinon adeptes au besoin- pour rester dans le vocabulaire sportif local adéquat, d’accélérations foudroyantes. On n’en apprécie que davantage les phrases ciselées sur tempo moyen, les notes égrenées façon main douce ou « slow hand » comme on aimait à qualifier dans les seventies Eric Clapton, oeuvrant sur des blues lents suintants bon le feeling. Didier Lockwood ou Sylvain Luc, on goûte aussi leur art au travers des notes choisies, des notes ainsi tenues (dans un gant de velours) pour dites. On goûtera moins sans doute chez le violoniste (au contraire du public, bien entendu, faut-il le souligner, puisque c’est bien lui qui se trouve directement ciblé) la mise en scène finale: Lockwood prépare des phrases séquencées balancées hot et fortissimo (!) dans la sono en frontal. Dès lors ils se précipite hors de scène, puis court dans les travées du parterre, violon futuriste en main, encadré par des body guards à oreillettes dignes de Jupiter, au milieu de de la foule l’acclamant dans l’arène paumes en feu comme s’il s’agissait d’un gladiateur barbare en plein péplum musical…Il y eut aussi heureusement et précédemment une Little bossa avec une intro musicale en diable signée Sylvain Luc. Plus, toujours le soutien plein de savoir faire, et judicieux et juste de la part de Dédé Ceccarelli. Lequel forme avec Diego Imbert une sacrée rythmique…jazz.
Le bien être d’Emile
Emile Parisien est de retour ce soir à Marciac. Entouré d’invités de prestige pour le quarantième anniversaire de JIM (Jazz in Marciac), cela donne une sorte de mini big band. Et qui sonne comme tel, CQFD. Le programme correspond au disque qui l’a mis sur orbite et propulsé dans nombre de festivals depuis ( Sfumato, ACTMusic ) Pour célébrer l’anniversaire de Marciac festival quadragénaire, l’enfant des classes de jazz du collège dont le directeur devint un jour président (du festival), les guests de marque sont au rendez vous: Portal, Kuhn, Peirani font partie du gotha du jazz hexagonal. Emile Parisien lui ne change pas pour autant. Sur scène dans son costume habituel de jeune chef d’orchestre, petite veste serrée, jean aux ourlets retroussées et cravate rouge en mode de médaille, il figure entre un pierrot lunaire et un premier de la classe sage encore tout émerveillé d’en être arrivé là. Un brin timide dans la voix douce pour présenter son équipe savante. Mais déchainé dès qu’il lui faut emboucher son bec de soprano magique. Le clown tueur de la fête foraine, pièce en trois actes, démarre sur une introduction à trois souffles et soufflets (soprano, clarinette basse, accordéon) conjugués à l’unisson,. On jurerait entendre une valse lente qui aurait été orchestrée par Nino Rota pour un air de La Strada. Michel Portal prolonge le bal dans un long trait de clarinette basse générateur de vibrations de bois saturé à faire trembler une fosse d’orchestre, un ruedo d’arène (à propos de ce moment intime partagé par trois ou quatre mille spectateurs présents, une parenthèse sous forme d’interrogation légitime: pourquoi Michel Portal depuis plusieurs années ne figure-t-il pas à Marciac -question valable pour d’autres festivals d’été soit dit en passant- à l’affiche sous son propre nom, avec une de ses formations en leader ? Pas une question de dimension musicale tout de même ? Il n’est plus temps d’attendre, n’est-ce pas ? Fin de la parenthèse) A propos de petits séismes, de chocs de plaques tectoniques dans le piémont pyrénéen, les accords, les chevauchées, les emballements de Joachim Kühn restent de nature à faire monter la température ambiante sinon réveiller les VIP assoupis post combustion de cocktails partenariaux. Au piano certes il s’empourpre -au sens littéral du verbe- d’allant, de l’effort physique de l’offrande ou de la cavalcade. Mais en terme de douceur, d’apaisement il ne figure pas mal non plus. Manu Codjia se ballade sans mot dire, inspiré, sur ses crêtes de guitare. Vincent Peirani, toujours aussi fin joueur paraît ravi de revenir auprès de son complice de toujours.
On croyait donc la messe dite, et voilà que d’un coup d’un seul, costumé, cravaté, surgit l’invité surprise…Wynton, la divinité du lieu faite jazz à La Nouvelle Orléans. Il y a fort à parier que question souvenirs dans quarante ans de plus (date à laquelle You Sun Nah a dit hier vouloir encore être invitée à la table de Marciac !) ce moment aura été gravé dans les neurones, peut-être, dans les traces numérisées graphiques, images ou sonores plus surement. Marque d’un trio trompette/soprano/accordéon réécrivant à tour de rôle avec un certain goût certes, les mesures de Temptation Rag, titre immortalisé par Sidney Bechet. Les autres musiciens retirés sur le côté de la scène observent la séquence sans mot dire. Emile Parisien l’avouait après coup: il avait lui même pris soin d’inviter le trompettiste de New Orleans à l’occasion de l’anniversaire du festival, en mode de remerciement pour le travail, les conseils donnés durant sa formation à Marciac. Dont acte: ce que l’on doit à Marciac, ce que l’on doit à Marsalis, ce que l’on doit à Sidney Bechet et au sax soprano par la même occasion. Fermez le ban. Le plus intéressant vint ensuite. Tous les musiciens avaient repris leur place le temps de lancer Transmitting, superbe composition de Joachim Kûhn. Sur l’introduction du thème à la manière, fougueuse, enlevée du pianiste on était en droit de se demander si la figure tutélaire de Marciac savait que Joachim K avait fréquenté, avait enregistré d’égal à égal avec Ornette Coleman. Force était de constater tout de même le regard surpris mais intéressé de Wynton. Et à l’injonction d’Emile Parisien excité par l’évènement, le trompettiste se lançait alors dans une séquence que personnellement l’on n’avait pas vu depuis longtemps: un chorus de Wynton Marsalis hors (de ses) normes habituelles, lignes agitées, sonorité saturée, débords dans l’atonalité, entre poussée du souffle jusqu’à ses limites et trompette littéralement secouée…
JIM terminait cette nuit froide dans une catharsis. Emile affichait les signes d’un bien être rousseauiste. En serrant la main de Marsalis qui remerciait les musiciens un par un, Michel Portal comme Joachim Kûhn, vieux routiers du free, avaient le sourire.
Pendant ce temps là, à l’Astrada, derrière le clocher de l’ancien couvent, Daniel Humair, vieux compagnon de route de ces deux derniers avait sans doute terminé lui aussi son set à la tête d’un quartet très libre de jeu. Mais bon, à Marciac, catharsis ou pas, l’ubiquité n’est pas encore au programme.
Robert Latxague
@Jazz_in_Marciac
Marciac (32230), jeudi 10 aout,
Chapiteau, 21h
Manu Dibango & Africadelik; Orchestra Baobab
Astrada, 21 h
Jeane Sinett’s Quartet; Chano Dominguez trio
|
Didier Lockwood en scène pour la balance. Question d’un inconnu, baraqué, visage taillé à la serpe « Vous êtes le manager?…J’ai entendu qu’il va ce soir descendre dans le public. Je suis l’officier de sécurité. On va lui mettre 2 types devant et 2 derrière » Le talkie walkie grésille » D’une voix mâle « Ici Papa Charlie Tango… j’écoute »
D’habituels compagnons de jeu figurent au programme à sa suite mais Galliano, seul ce soir avec son accordéon « vous savez combien il pèse ? treize kilos ! »- fait face à la foule dans un halo de lumière bleue sous le chapiteau-terrain-de-rugby. Barbara évoquée d’entrée de jeu comme premier couplet. Suivent de longues minutes sans dire un mot mais passées à jouer, à « envoyer » comme on dit dans le sport habituellement pratiqué sur ce terrain. Il joue avec le public aussi, tente de le surprendre sur des motifs pourtant maintes fois entendus y compris sur les ondes (Tango pour Claude, Sertao, Libertango de Piazzolla) Richard Galliano dans sa solitude sur les planches fait tout tout seul. Sauf retenir son souffle. Il s’affiche en champion du new musette histoire sans doute de réactualiser l’héritage combiné de Marcel Azzolla, Astor Piazzolla et du jazz façon piano à bretelles. Sur la scène, gersoise ce soir, son panorama de musiques élargit encore son horizon. La javanaise de Gainsbourg comme une ritournelle. La mélodie douce de My funny valentine en hommage à Chet Baker, autre solitaire sans le vouloir. Odéon, parfum entre sucre et cachaxa, est comme il se plait à le rapeller « un air joué par tous les accordéonistes brésiliens » Nougaro dont il fut le musicien, filtré entre jazz et java. Et du Michel Legrand pour finir en mélodies du paradoxe: loin des rochers de Cherbourg, mais bien ancré en terre gersoise puisque le pianiste compositeur figure bien ce soir là au premier rang du chapiteau pour applaudir. l’accordéoniste En jouant son va-tout de mesures ouvertes, à Marciac, Richard Galliano oublie, le temps d’un soir, le poids de son instrument.
Didier Lockwood lui aime raconter. Et ne s’en prive pas. Au point de mettre chacun directement dans la confidence avant que d’entrer dans la danse « Nous allons vous offrir des morceaux tout neufs, jamais joués à ce jour. Nous les mettrons en boite bientôt dans un nouveau disque…cela faisait dix ans que je n’avais plus enregistré sous mon nom ! » Un bon teasing « isn’t it « ? Quark, titre emprunté à la physique quantique, pour débuter par des molécules plongées dans un bain de chaleur pris à quatre, sur le vif. Vient le moment d’une ballade, l’instant de l’émotion « Good morning Lady Sun est un thème dédié à ma femme, chanteuse d’opéra… » L’occasion de notes choisies aussi, soulignées avec délicatesse par la complicité des métiers conjugués de Sylvain Luc et Dédé Ceccarelli. Le guitariste et le violoniste sont de la lignée des manieurs de cordes volubiles, virtuoses au sens du terme donc capables -sinon adeptes au besoin- pour rester dans le vocabulaire sportif local adéquat, d’accélérations foudroyantes. On n’en apprécie que davantage les phrases ciselées sur tempo moyen, les notes égrenées façon main douce ou « slow hand » comme on aimait à qualifier dans les seventies Eric Clapton, oeuvrant sur des blues lents suintants bon le feeling. Didier Lockwood ou Sylvain Luc, on goûte aussi leur art au travers des notes choisies, des notes ainsi tenues (dans un gant de velours) pour dites. On goûtera moins sans doute chez le violoniste (au contraire du public, bien entendu, faut-il le souligner, puisque c’est bien lui qui se trouve directement ciblé) la mise en scène finale: Lockwood prépare des phrases séquencées balancées hot et fortissimo (!) dans la sono en frontal. Dès lors ils se précipite hors de scène, puis court dans les travées du parterre, violon futuriste en main, encadré par des body guards à oreillettes dignes de Jupiter, au milieu de de la foule l’acclamant dans l’arène paumes en feu comme s’il s’agissait d’un gladiateur barbare en plein péplum musical…Il y eut aussi heureusement et précédemment une Little bossa avec une intro musicale en diable signée Sylvain Luc. Plus, toujours le soutien plein de savoir faire, et judicieux et juste de la part de Dédé Ceccarelli. Lequel forme avec Diego Imbert une sacrée rythmique…jazz.
Le bien être d’Emile
Emile Parisien est de retour ce soir à Marciac. Entouré d’invités de prestige pour le quarantième anniversaire de JIM (Jazz in Marciac), cela donne une sorte de mini big band. Et qui sonne comme tel, CQFD. Le programme correspond au disque qui l’a mis sur orbite et propulsé dans nombre de festivals depuis ( Sfumato, ACTMusic ) Pour célébrer l’anniversaire de Marciac festival quadragénaire, l’enfant des classes de jazz du collège dont le directeur devint un jour président (du festival), les guests de marque sont au rendez vous: Portal, Kuhn, Peirani font partie du gotha du jazz hexagonal. Emile Parisien lui ne change pas pour autant. Sur scène dans son costume habituel de jeune chef d’orchestre, petite veste serrée, jean aux ourlets retroussées et cravate rouge en mode de médaille, il figure entre un pierrot lunaire et un premier de la classe sage encore tout émerveillé d’en être arrivé là. Un brin timide dans la voix douce pour présenter son équipe savante. Mais déchainé dès qu’il lui faut emboucher son bec de soprano magique. Le clown tueur de la fête foraine, pièce en trois actes, démarre sur une introduction à trois souffles et soufflets (soprano, clarinette basse, accordéon) conjugués à l’unisson,. On jurerait entendre une valse lente qui aurait été orchestrée par Nino Rota pour un air de La Strada. Michel Portal prolonge le bal dans un long trait de clarinette basse générateur de vibrations de bois saturé à faire trembler une fosse d’orchestre, un ruedo d’arène (à propos de ce moment intime partagé par trois ou quatre mille spectateurs présents, une parenthèse sous forme d’interrogation légitime: pourquoi Michel Portal depuis plusieurs années ne figure-t-il pas à Marciac -question valable pour d’autres festivals d’été soit dit en passant- à l’affiche sous son propre nom, avec une de ses formations en leader ? Pas une question de dimension musicale tout de même ? Il n’est plus temps d’attendre, n’est-ce pas ? Fin de la parenthèse) A propos de petits séismes, de chocs de plaques tectoniques dans le piémont pyrénéen, les accords, les chevauchées, les emballements de Joachim Kühn restent de nature à faire monter la température ambiante sinon réveiller les VIP assoupis post combustion de cocktails partenariaux. Au piano certes il s’empourpre -au sens littéral du verbe- d’allant, de l’effort physique de l’offrande ou de la cavalcade. Mais en terme de douceur, d’apaisement il ne figure pas mal non plus. Manu Codjia se ballade sans mot dire, inspiré, sur ses crêtes de guitare. Vincent Peirani, toujours aussi fin joueur paraît ravi de revenir auprès de son complice de toujours.
On croyait donc la messe dite, et voilà que d’un coup d’un seul, costumé, cravaté, surgit l’invité surprise…Wynton, la divinité du lieu faite jazz à La Nouvelle Orléans. Il y a fort à parier que question souvenirs dans quarante ans de plus (date à laquelle You Sun Nah a dit hier vouloir encore être invitée à la table de Marciac !) ce moment aura été gravé dans les neurones, peut-être, dans les traces numérisées graphiques, images ou sonores plus surement. Marque d’un trio trompette/soprano/accordéon réécrivant à tour de rôle avec un certain goût certes, les mesures de Temptation Rag, titre immortalisé par Sidney Bechet. Les autres musiciens retirés sur le côté de la scène observent la séquence sans mot dire. Emile Parisien l’avouait après coup: il avait lui même pris soin d’inviter le trompettiste de New Orleans à l’occasion de l’anniversaire du festival, en mode de remerciement pour le travail, les conseils donnés durant sa formation à Marciac. Dont acte: ce que l’on doit à Marciac, ce que l’on doit à Marsalis, ce que l’on doit à Sidney Bechet et au sax soprano par la même occasion. Fermez le ban. Le plus intéressant vint ensuite. Tous les musiciens avaient repris leur place le temps de lancer Transmitting, superbe composition de Joachim Kûhn. Sur l’introduction du thème à la manière, fougueuse, enlevée du pianiste on était en droit de se demander si la figure tutélaire de Marciac savait que Joachim K avait fréquenté, avait enregistré d’égal à égal avec Ornette Coleman. Force était de constater tout de même le regard surpris mais intéressé de Wynton. Et à l’injonction d’Emile Parisien excité par l’évènement, le trompettiste se lançait alors dans une séquence que personnellement l’on n’avait pas vu depuis longtemps: un chorus de Wynton Marsalis hors (de ses) normes habituelles, lignes agitées, sonorité saturée, débords dans l’atonalité, entre poussée du souffle jusqu’à ses limites et trompette littéralement secouée…
JIM terminait cette nuit froide dans une catharsis. Emile affichait les signes d’un bien être rousseauiste. En serrant la main de Marsalis qui remerciait les musiciens un par un, Michel Portal comme Joachim Kûhn, vieux routiers du free, avaient le sourire.
Pendant ce temps là, à l’Astrada, derrière le clocher de l’ancien couvent, Daniel Humair, vieux compagnon de route de ces deux derniers avait sans doute terminé lui aussi son set à la tête d’un quartet très libre de jeu. Mais bon, à Marciac, catharsis ou pas, l’ubiquité n’est pas encore au programme.
Robert Latxague
@Jazz_in_Marciac
Marciac (32230), jeudi 10 aout,
Chapiteau, 21h
Manu Dibango & Africadelik; Orchestra Baobab
Astrada, 21 h
Jeane Sinett’s Quartet; Chano Dominguez trio
|
Didier Lockwood en scène pour la balance. Question d’un inconnu, baraqué, visage taillé à la serpe « Vous êtes le manager?…J’ai entendu qu’il va ce soir descendre dans le public. Je suis l’officier de sécurité. On va lui mettre 2 types devant et 2 derrière » Le talkie walkie grésille » D’une voix mâle « Ici Papa Charlie Tango… j’écoute »
D’habituels compagnons de jeu figurent au programme à sa suite mais Galliano, seul ce soir avec son accordéon « vous savez combien il pèse ? treize kilos ! »- fait face à la foule dans un halo de lumière bleue sous le chapiteau-terrain-de-rugby. Barbara évoquée d’entrée de jeu comme premier couplet. Suivent de longues minutes sans dire un mot mais passées à jouer, à « envoyer » comme on dit dans le sport habituellement pratiqué sur ce terrain. Il joue avec le public aussi, tente de le surprendre sur des motifs pourtant maintes fois entendus y compris sur les ondes (Tango pour Claude, Sertao, Libertango de Piazzolla) Richard Galliano dans sa solitude sur les planches fait tout tout seul. Sauf retenir son souffle. Il s’affiche en champion du new musette histoire sans doute de réactualiser l’héritage combiné de Marcel Azzolla, Astor Piazzolla et du jazz façon piano à bretelles. Sur la scène, gersoise ce soir, son panorama de musiques élargit encore son horizon. La javanaise de Gainsbourg comme une ritournelle. La mélodie douce de My funny valentine en hommage à Chet Baker, autre solitaire sans le vouloir. Odéon, parfum entre sucre et cachaxa, est comme il se plait à le rapeller « un air joué par tous les accordéonistes brésiliens » Nougaro dont il fut le musicien, filtré entre jazz et java. Et du Michel Legrand pour finir en mélodies du paradoxe: loin des rochers de Cherbourg, mais bien ancré en terre gersoise puisque le pianiste compositeur figure bien ce soir là au premier rang du chapiteau pour applaudir. l’accordéoniste En jouant son va-tout de mesures ouvertes, à Marciac, Richard Galliano oublie, le temps d’un soir, le poids de son instrument.
Didier Lockwood lui aime raconter. Et ne s’en prive pas. Au point de mettre chacun directement dans la confidence avant que d’entrer dans la danse « Nous allons vous offrir des morceaux tout neufs, jamais joués à ce jour. Nous les mettrons en boite bientôt dans un nouveau disque…cela faisait dix ans que je n’avais plus enregistré sous mon nom ! » Un bon teasing « isn’t it « ? Quark, titre emprunté à la physique quantique, pour débuter par des molécules plongées dans un bain de chaleur pris à quatre, sur le vif. Vient le moment d’une ballade, l’instant de l’émotion « Good morning Lady Sun est un thème dédié à ma femme, chanteuse d’opéra… » L’occasion de notes choisies aussi, soulignées avec délicatesse par la complicité des métiers conjugués de Sylvain Luc et Dédé Ceccarelli. Le guitariste et le violoniste sont de la lignée des manieurs de cordes volubiles, virtuoses au sens du terme donc capables -sinon adeptes au besoin- pour rester dans le vocabulaire sportif local adéquat, d’accélérations foudroyantes. On n’en apprécie que davantage les phrases ciselées sur tempo moyen, les notes égrenées façon main douce ou « slow hand » comme on aimait à qualifier dans les seventies Eric Clapton, oeuvrant sur des blues lents suintants bon le feeling. Didier Lockwood ou Sylvain Luc, on goûte aussi leur art au travers des notes choisies, des notes ainsi tenues (dans un gant de velours) pour dites. On goûtera moins sans doute chez le violoniste (au contraire du public, bien entendu, faut-il le souligner, puisque c’est bien lui qui se trouve directement ciblé) la mise en scène finale: Lockwood prépare des phrases séquencées balancées hot et fortissimo (!) dans la sono en frontal. Dès lors ils se précipite hors de scène, puis court dans les travées du parterre, violon futuriste en main, encadré par des body guards à oreillettes dignes de Jupiter, au milieu de de la foule l’acclamant dans l’arène paumes en feu comme s’il s’agissait d’un gladiateur barbare en plein péplum musical…Il y eut aussi heureusement et précédemment une Little bossa avec une intro musicale en diable signée Sylvain Luc. Plus, toujours le soutien plein de savoir faire, et judicieux et juste de la part de Dédé Ceccarelli. Lequel forme avec Diego Imbert une sacrée rythmique…jazz.
Le bien être d’Emile
Emile Parisien est de retour ce soir à Marciac. Entouré d’invités de prestige pour le quarantième anniversaire de JIM (Jazz in Marciac), cela donne une sorte de mini big band. Et qui sonne comme tel, CQFD. Le programme correspond au disque qui l’a mis sur orbite et propulsé dans nombre de festivals depuis ( Sfumato, ACTMusic ) Pour célébrer l’anniversaire de Marciac festival quadragénaire, l’enfant des classes de jazz du collège dont le directeur devint un jour président (du festival), les guests de marque sont au rendez vous: Portal, Kuhn, Peirani font partie du gotha du jazz hexagonal. Emile Parisien lui ne change pas pour autant. Sur scène dans son costume habituel de jeune chef d’orchestre, petite veste serrée, jean aux ourlets retroussées et cravate rouge en mode de médaille, il figure entre un pierrot lunaire et un premier de la classe sage encore tout émerveillé d’en être arrivé là. Un brin timide dans la voix douce pour présenter son équipe savante. Mais déchainé dès qu’il lui faut emboucher son bec de soprano magique. Le clown tueur de la fête foraine, pièce en trois actes, démarre sur une introduction à trois souffles et soufflets (soprano, clarinette basse, accordéon) conjugués à l’unisson,. On jurerait entendre une valse lente qui aurait été orchestrée par Nino Rota pour un air de La Strada. Michel Portal prolonge le bal dans un long trait de clarinette basse générateur de vibrations de bois saturé à faire trembler une fosse d’orchestre, un ruedo d’arène (à propos de ce moment intime partagé par trois ou quatre mille spectateurs présents, une parenthèse sous forme d’interrogation légitime: pourquoi Michel Portal depuis plusieurs années ne figure-t-il pas à Marciac -question valable pour d’autres festivals d’été soit dit en passant- à l’affiche sous son propre nom, avec une de ses formations en leader ? Pas une question de dimension musicale tout de même ? Il n’est plus temps d’attendre, n’est-ce pas ? Fin de la parenthèse) A propos de petits séismes, de chocs de plaques tectoniques dans le piémont pyrénéen, les accords, les chevauchées, les emballements de Joachim Kühn restent de nature à faire monter la température ambiante sinon réveiller les VIP assoupis post combustion de cocktails partenariaux. Au piano certes il s’empourpre -au sens littéral du verbe- d’allant, de l’effort physique de l’offrande ou de la cavalcade. Mais en terme de douceur, d’apaisement il ne figure pas mal non plus. Manu Codjia se ballade sans mot dire, inspiré, sur ses crêtes de guitare. Vincent Peirani, toujours aussi fin joueur paraît ravi de revenir auprès de son complice de toujours.
On croyait donc la messe dite, et voilà que d’un coup d’un seul, costumé, cravaté, surgit l’invité surprise…Wynton, la divinité du lieu faite jazz à La Nouvelle Orléans. Il y a fort à parier que question souvenirs dans quarante ans de plus (date à laquelle You Sun Nah a dit hier vouloir encore être invitée à la table de Marciac !) ce moment aura été gravé dans les neurones, peut-être, dans les traces numérisées graphiques, images ou sonores plus surement. Marque d’un trio trompette/soprano/accordéon réécrivant à tour de rôle avec un certain goût certes, les mesures de Temptation Rag, titre immortalisé par Sidney Bechet. Les autres musiciens retirés sur le côté de la scène observent la séquence sans mot dire. Emile Parisien l’avouait après coup: il avait lui même pris soin d’inviter le trompettiste de New Orleans à l’occasion de l’anniversaire du festival, en mode de remerciement pour le travail, les conseils donnés durant sa formation à Marciac. Dont acte: ce que l’on doit à Marciac, ce que l’on doit à Marsalis, ce que l’on doit à Sidney Bechet et au sax soprano par la même occasion. Fermez le ban. Le plus intéressant vint ensuite. Tous les musiciens avaient repris leur place le temps de lancer Transmitting, superbe composition de Joachim Kûhn. Sur l’introduction du thème à la manière, fougueuse, enlevée du pianiste on était en droit de se demander si la figure tutélaire de Marciac savait que Joachim K avait fréquenté, avait enregistré d’égal à égal avec Ornette Coleman. Force était de constater tout de même le regard surpris mais intéressé de Wynton. Et à l’injonction d’Emile Parisien excité par l’évènement, le trompettiste se lançait alors dans une séquence que personnellement l’on n’avait pas vu depuis longtemps: un chorus de Wynton Marsalis hors (de ses) normes habituelles, lignes agitées, sonorité saturée, débords dans l’atonalité, entre poussée du souffle jusqu’à ses limites et trompette littéralement secouée…
JIM terminait cette nuit froide dans une catharsis. Emile affichait les signes d’un bien être rousseauiste. En serrant la main de Marsalis qui remerciait les musiciens un par un, Michel Portal comme Joachim Kûhn, vieux routiers du free, avaient le sourire.
Pendant ce temps là, à l’Astrada, derrière le clocher de l’ancien couvent, Daniel Humair, vieux compagnon de route de ces deux derniers avait sans doute terminé lui aussi son set à la tête d’un quartet très libre de jeu. Mais bon, à Marciac, catharsis ou pas, l’ubiquité n’est pas encore au programme.
Robert Latxague
@Jazz_in_Marciac
Marciac (32230), jeudi 10 aout,
Chapiteau, 21h
Manu Dibango & Africadelik; Orchestra Baobab
Astrada, 21 h
Jeane Sinett’s Quartet; Chano Dominguez trio
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Didier Lockwood en scène pour la balance. Question d’un inconnu, baraqué, visage taillé à la serpe « Vous êtes le manager?…J’ai entendu qu’il va ce soir descendre dans le public. Je suis l’officier de sécurité. On va lui mettre 2 types devant et 2 derrière » Le talkie walkie grésille » D’une voix mâle « Ici Papa Charlie Tango… j’écoute »
D’habituels compagnons de jeu figurent au programme à sa suite mais Galliano, seul ce soir avec son accordéon « vous savez combien il pèse ? treize kilos ! »- fait face à la foule dans un halo de lumière bleue sous le chapiteau-terrain-de-rugby. Barbara évoquée d’entrée de jeu comme premier couplet. Suivent de longues minutes sans dire un mot mais passées à jouer, à « envoyer » comme on dit dans le sport habituellement pratiqué sur ce terrain. Il joue avec le public aussi, tente de le surprendre sur des motifs pourtant maintes fois entendus y compris sur les ondes (Tango pour Claude, Sertao, Libertango de Piazzolla) Richard Galliano dans sa solitude sur les planches fait tout tout seul. Sauf retenir son souffle. Il s’affiche en champion du new musette histoire sans doute de réactualiser l’héritage combiné de Marcel Azzolla, Astor Piazzolla et du jazz façon piano à bretelles. Sur la scène, gersoise ce soir, son panorama de musiques élargit encore son horizon. La javanaise de Gainsbourg comme une ritournelle. La mélodie douce de My funny valentine en hommage à Chet Baker, autre solitaire sans le vouloir. Odéon, parfum entre sucre et cachaxa, est comme il se plait à le rapeller « un air joué par tous les accordéonistes brésiliens » Nougaro dont il fut le musicien, filtré entre jazz et java. Et du Michel Legrand pour finir en mélodies du paradoxe: loin des rochers de Cherbourg, mais bien ancré en terre gersoise puisque le pianiste compositeur figure bien ce soir là au premier rang du chapiteau pour applaudir. l’accordéoniste En jouant son va-tout de mesures ouvertes, à Marciac, Richard Galliano oublie, le temps d’un soir, le poids de son instrument.
Didier Lockwood lui aime raconter. Et ne s’en prive pas. Au point de mettre chacun directement dans la confidence avant que d’entrer dans la danse « Nous allons vous offrir des morceaux tout neufs, jamais joués à ce jour. Nous les mettrons en boite bientôt dans un nouveau disque…cela faisait dix ans que je n’avais plus enregistré sous mon nom ! » Un bon teasing « isn’t it « ? Quark, titre emprunté à la physique quantique, pour débuter par des molécules plongées dans un bain de chaleur pris à quatre, sur le vif. Vient le moment d’une ballade, l’instant de l’émotion « Good morning Lady Sun est un thème dédié à ma femme, chanteuse d’opéra… » L’occasion de notes choisies aussi, soulignées avec délicatesse par la complicité des métiers conjugués de Sylvain Luc et Dédé Ceccarelli. Le guitariste et le violoniste sont de la lignée des manieurs de cordes volubiles, virtuoses au sens du terme donc capables -sinon adeptes au besoin- pour rester dans le vocabulaire sportif local adéquat, d’accélérations foudroyantes. On n’en apprécie que davantage les phrases ciselées sur tempo moyen, les notes égrenées façon main douce ou « slow hand » comme on aimait à qualifier dans les seventies Eric Clapton, oeuvrant sur des blues lents suintants bon le feeling. Didier Lockwood ou Sylvain Luc, on goûte aussi leur art au travers des notes choisies, des notes ainsi tenues (dans un gant de velours) pour dites. On goûtera moins sans doute chez le violoniste (au contraire du public, bien entendu, faut-il le souligner, puisque c’est bien lui qui se trouve directement ciblé) la mise en scène finale: Lockwood prépare des phrases séquencées balancées hot et fortissimo (!) dans la sono en frontal. Dès lors ils se précipite hors de scène, puis court dans les travées du parterre, violon futuriste en main, encadré par des body guards à oreillettes dignes de Jupiter, au milieu de de la foule l’acclamant dans l’arène paumes en feu comme s’il s’agissait d’un gladiateur barbare en plein péplum musical…Il y eut aussi heureusement et précédemment une Little bossa avec une intro musicale en diable signée Sylvain Luc. Plus, toujours le soutien plein de savoir faire, et judicieux et juste de la part de Dédé Ceccarelli. Lequel forme avec Diego Imbert une sacrée rythmique…jazz.
Le bien être d’Emile
Emile Parisien est de retour ce soir à Marciac. Entouré d’invités de prestige pour le quarantième anniversaire de JIM (Jazz in Marciac), cela donne une sorte de mini big band. Et qui sonne comme tel, CQFD. Le programme correspond au disque qui l’a mis sur orbite et propulsé dans nombre de festivals depuis ( Sfumato, ACTMusic ) Pour célébrer l’anniversaire de Marciac festival quadragénaire, l’enfant des classes de jazz du collège dont le directeur devint un jour président (du festival), les guests de marque sont au rendez vous: Portal, Kuhn, Peirani font partie du gotha du jazz hexagonal. Emile Parisien lui ne change pas pour autant. Sur scène dans son costume habituel de jeune chef d’orchestre, petite veste serrée, jean aux ourlets retroussées et cravate rouge en mode de médaille, il figure entre un pierrot lunaire et un premier de la classe sage encore tout émerveillé d’en être arrivé là. Un brin timide dans la voix douce pour présenter son équipe savante. Mais déchainé dès qu’il lui faut emboucher son bec de soprano magique. Le clown tueur de la fête foraine, pièce en trois actes, démarre sur une introduction à trois souffles et soufflets (soprano, clarinette basse, accordéon) conjugués à l’unisson,. On jurerait entendre une valse lente qui aurait été orchestrée par Nino Rota pour un air de La Strada. Michel Portal prolonge le bal dans un long trait de clarinette basse générateur de vibrations de bois saturé à faire trembler une fosse d’orchestre, un ruedo d’arène (à propos de ce moment intime partagé par trois ou quatre mille spectateurs présents, une parenthèse sous forme d’interrogation légitime: pourquoi Michel Portal depuis plusieurs années ne figure-t-il pas à Marciac -question valable pour d’autres festivals d’été soit dit en passant- à l’affiche sous son propre nom, avec une de ses formations en leader ? Pas une question de dimension musicale tout de même ? Il n’est plus temps d’attendre, n’est-ce pas ? Fin de la parenthèse) A propos de petits séismes, de chocs de plaques tectoniques dans le piémont pyrénéen, les accords, les chevauchées, les emballements de Joachim Kühn restent de nature à faire monter la température ambiante sinon réveiller les VIP assoupis post combustion de cocktails partenariaux. Au piano certes il s’empourpre -au sens littéral du verbe- d’allant, de l’effort physique de l’offrande ou de la cavalcade. Mais en terme de douceur, d’apaisement il ne figure pas mal non plus. Manu Codjia se ballade sans mot dire, inspiré, sur ses crêtes de guitare. Vincent Peirani, toujours aussi fin joueur paraît ravi de revenir auprès de son complice de toujours.
On croyait donc la messe dite, et voilà que d’un coup d’un seul, costumé, cravaté, surgit l’invité surprise…Wynton, la divinité du lieu faite jazz à La Nouvelle Orléans. Il y a fort à parier que question souvenirs dans quarante ans de plus (date à laquelle You Sun Nah a dit hier vouloir encore être invitée à la table de Marciac !) ce moment aura été gravé dans les neurones, peut-être, dans les traces numérisées graphiques, images ou sonores plus surement. Marque d’un trio trompette/soprano/accordéon réécrivant à tour de rôle avec un certain goût certes, les mesures de Temptation Rag, titre immortalisé par Sidney Bechet. Les autres musiciens retirés sur le côté de la scène observent la séquence sans mot dire. Emile Parisien l’avouait après coup: il avait lui même pris soin d’inviter le trompettiste de New Orleans à l’occasion de l’anniversaire du festival, en mode de remerciement pour le travail, les conseils donnés durant sa formation à Marciac. Dont acte: ce que l’on doit à Marciac, ce que l’on doit à Marsalis, ce que l’on doit à Sidney Bechet et au sax soprano par la même occasion. Fermez le ban. Le plus intéressant vint ensuite. Tous les musiciens avaient repris leur place le temps de lancer Transmitting, superbe composition de Joachim Kûhn. Sur l’introduction du thème à la manière, fougueuse, enlevée du pianiste on était en droit de se demander si la figure tutélaire de Marciac savait que Joachim K avait fréquenté, avait enregistré d’égal à égal avec Ornette Coleman. Force était de constater tout de même le regard surpris mais intéressé de Wynton. Et à l’injonction d’Emile Parisien excité par l’évènement, le trompettiste se lançait alors dans une séquence que personnellement l’on n’avait pas vu depuis longtemps: un chorus de Wynton Marsalis hors (de ses) normes habituelles, lignes agitées, sonorité saturée, débords dans l’atonalité, entre poussée du souffle jusqu’à ses limites et trompette littéralement secouée…
JIM terminait cette nuit froide dans une catharsis. Emile affichait les signes d’un bien être rousseauiste. En serrant la main de Marsalis qui remerciait les musiciens un par un, Michel Portal comme Joachim Kûhn, vieux routiers du free, avaient le sourire.
Pendant ce temps là, à l’Astrada, derrière le clocher de l’ancien couvent, Daniel Humair, vieux compagnon de route de ces deux derniers avait sans doute terminé lui aussi son set à la tête d’un quartet très libre de jeu. Mais bon, à Marciac, catharsis ou pas, l’ubiquité n’est pas encore au programme.
Robert Latxague
@Jazz_in_Marciac
Marciac (32230), jeudi 10 aout,
Chapiteau, 21h
Manu Dibango & Africadelik; Orchestra Baobab
Astrada, 21 h
Jeane Sinett’s Quartet; Chano Dominguez trio