NEVERS D’JAZZ : Céline et Laurent chez les scolaires
Le chroniqueur a manqué samedi le duo de Céline Bonacina et Laurent Dehors car il était encore à Paris pour écouter Flash Pig et Joe Lovano/Marcin Wasilewski Trio à la Maison de la Radio (compte-rendu dans une colonne voisine). Mais il voulait découvrir ce duo né à l’Europa Jazz du Mans en plein confinement pour un concert filmé, mais sans public. Comme une aubaine, le duo donnait deux jours plus tard, à 10h du matin, un concert pour des élèves de collège et de lycée
CÉLINE BONACINA – LAURENT DEHORS DUO
Céline Bonacina (saxophones baryton & soprano, voix, kayamb), Laurent Dehors (saxophones ténor & soprano, clarinettes, cornemuse, flûte à bec, voix)
Nevers, Café Charbon, 7novembre 2022, 10h
Dès l’abord, une sensation de liberté et de familiarité. Les deux artistes s’adressent à leur public, dont une partie suit une option musique. Mais pour la plupart ces jeunes ne sont pas des habitués de ces musiques que l’on rassemble sous l’appellation de jazz. Outre leurs instruments respectifs, leurs voix (et aussi leurs corps pour des percussions corporelles), Céline et Laurent ont un dispositif d’échantillonnage qui apporte parfois un soubassement orchestral à leur duo. Mais ces échantillons ont été fabriqués par leurs soins. À tour de rôle ils s’attribuent les lignes de basse (sax baryton, clarinettes basse et contrebasse) tandis que l’autre développe des lignes mélodiques, des improvisations, des cavalcades soudaines ou tout autre production sonore issue de l’inspiration du moment. Au fil du concert, la musique puisera à toutes les sources : le jazz traditionnel montre parfois le bout de son nez, comme les musiques du monde, le free jazz rôde entre les lignes, et à plusieurs reprises c’est une sorte de free funk qui s’installe et fait monter la pression et le groove. Beaucoup de nuances aussi, des contrepoints aussi ciselés que spontanés, bref de la musique, sans frontières ni œillères. C’est un festival d’invention, d’imagination et de liberté. Le jeune public semble parfois surpris, timide pour manifester son adhésion. Et pourtant l’écoute est attentive. Ce sera évident lors du dialogue final entre les artistes et le public : les questions sont nombreuses, diverses et pertinentes. Le but est atteint : une découverte pour beaucoup, et une curiosité féconde qui nous révèle qu’un public nouveau émerge à chaque génération. Pari tenu, et que l’on devine presque gagné.
Xavier Prévost