ORLÉANS : RECENSIONS ET AUTRES SUJETS, EUROPA BERLIN ONJ, ALEXANDRA GRIMAL (KANKÜ)
J’ai laissé de trop nombreuses recensions derrière moi. Et pour commencer cette insistance des chauffeurs de bus de ville à me transporter gratuitement quand d’aventure, un peu las, je monte dans un bus pour un seul arrêt, qui me rapproche beaucoup des lieux de concert où je veux me rendre. A Strasbourg comme à Orléans, le phénomène s’est produit. Je rapporte ça en craignant quand même un peu que ça ne leur retombe dessus.
A Strasbourg, je recommande pour la troisième fois « L’occase de l’oncle Tom », presque au bout de la Grand Rue, à gauche quand on vient de la gare. À l’étage, les nouveaux arrivages de jazz (vinyles évidemment !) réservent toujours de bonnes surprises : l’état du disque est évalué de façon très stricte, les prix sont très convenables. J’ai même trouvé quelques 25 cm français des années 50 avec des pochettes de David Stone Martin entre 5 et 10 euros. Au rez-de-chaussée, les disques de musique classique sont dans un état irréprochable, et les prix, quoiqu’en augmentation, restent à des hauteurs que l’on peut franchir.
A Orléans, pas de grosses surprises, mais quelques bons disques le vendredi matin sur la place où Jeanne d’Arc brandit son épée. Le samedi, tout près du théâtre, un très agréable marché aux puces, avec des brocanteurs à l’ancienne, organisés, ni trop proches de l’antiquaire, ni trop identifiés aux ramasseurs de déchets. Belle ambiance, un peu comme à Perpignan. Et je termine sur une note gastronomique : tout près du « Jackhôtel » où je suis logé à Orléans, dans la rue de Bourgogne (au 126) et dans un quartier où dominent les kébabs, « Chez Jules » réserve un joli repas à 23 euros, la possibilité de boire un verre de Valencay tout à fait parfait, dans un décor, il est vrai, un peu baroque et de goût intermédiaire.
Je reviens à « Jazz Or Jazz », ainsi dénommé à cause du « Or » d’Orléans, reprise d’un festival déjà très ancien, sous la houlette du directeur de la Scène Nationale François-Xavier Hauville, avec le concours de Stéphane Cochoyan, conseiller artistique, et de l’association Ô Jazz. Des propositions artistiques qui doivent satisfaire le « grand public » (il faudra me dire un jour en quoi il mérite cette stature), mais aussi tous ceux qui restent assoiffés de nouveaux vins, même s’ils sont servis dans de vieilles bouteilles. Chaque soir donc ou presque, la possibilité de choisir entre la sécurité (Mélody Gardot, Lisa Simone) et l’aventure (le Tricollectif, Ève Risser, Jozef Dumoulin, l’ONJ d’Olivier Benoît, Alexandra Grimal, etc.). Choix cornélien parfois : car qui dit que, malgré ma réputation d’incorrigible freeman, je n’ai pas envie d’écouter aussi la fille de Nina Simone. Dont je me souviens, à Marciac : elle avait été « intronisé » l’après-midi même dans l’ordre des mousquetaires de l’Armagnac. Et d’arriver sur scène en montrant sa médaille tout en proférant : « je suis moustiquaire, je suis une moustiquaire !!! ». Cinq mille personnes écroulées de rire et de sympathie.
Rien d’ailleurs, soyons honnêtes, ne m’empêche d’aller un peu vers l’une (Lisa) tout en ne négligeant pas les autres. Et nous y voici. J’espère que ces petites histoires ne vous ont pas trop ennuyé. Et au passage, signalons que le tremplin (concours d’orchestres) a été remporté par le Gauthier Toux trio, que nous avions déjà signalé à l’attention l’an dernier à Cully et plus récemment au « Caillou » à Bordeaux. Et aussi que, dans l’orbite du festival, sont présentées au Théâtre d’Orléans de nombreuses expositions, centrées sur la musique à l’honneur pendant ces journées, avec une bien intéressante série de photographies prises par Louis Sclavis. Varié dans son style, toujours pertinent, le clarinettiste vise juste, et il ne manque à cette série de photos en noir et blanc que les prix ! Je suis persuadé que Louis ne fait pas ça pour vendre, mais après tout pourquoi ne pas proposer ? Par exemple j’aime beaucoup la photo de Jacques Di Donato dans une atmosphère vieux style (Louis XV) à… Uzeste ! Pour des éditions futures, les « Jazz Box » de Cécile Léna (et moi-même) feraient bel effet, comme partout où elles sont présentées.
« Europa Berlin », ONJ : Olivier Benoit (g, comp, dir), Jean Dousteyssier (cl, b-cl), Alexandra Grimal (ts), Hugues Mayot (as), Fabrice Martinez (tp), Fidel Fourneyron (tb), Théo Ceccaldi (vln), Sophie Agnel (p), Paul Brousseau (keyboards), Sylvain Daniel (el-b), Éric Echampard (dm)
Kankü : Alexandra Grimal (ts, voix), Éric Echampard (dm), Sylvain Daniel (el-b)
Kankü est (pour l’instant) une œuvre pour trio « à la Rollins », avec des parties vocales assez surprenantes, plutôt décalées, une proposition percussive qui donne à Éric Echampard l’occasion de briller de mille fûts, de cent caisses et d’une bonne dizaine de cymbales, à Sylvain Daniel l’opportunité de se glisser dans les espaces restants, et à Alexandra elle-même l’occasion de faire entendre un son et un phrasé au ténor qu’on rapprocherait volontiers de celui de Sam Rivers. Pour le reste, une œuvre contrastée : la musique d’Alexandra reste encore pour moi une énigme.
Tout bien pesé, c’était en fait la première fois que j’entendais le programme « Berlin » de notre ONJ, et il était tentant de comparer les deux formations voisines, celle d’hier soir à dix (White Desert Orchestra) et celle de la soirée à onze. Présentations scéniques déjà très différentes, l’ONJ se donnant à voir comme un V très ouvert sur la salle avec sur une branche les soufflants et sur l’autre les « rythmiciens », cependant que l’orchestre d’Ève Risser offre le piano à gauche, les cuivres et les anches de face et la rythmique à trois derrière eux sur une estrade. Les pôles musicaux sont évidemment très différents, avec cependant quelques couleurs proches, ou sensiblement superposables dans les moments méditatifs. Le portait musical de Berlin est plus urbain que celui de l’Ouest américains – on n’en sera pas surpris – ne serait-ce que par l’omniprésence valeureuse d’Éric Echampard, qui emmène une rythmique surlignée, là où Éve Risser propose davantage d’échanges entre Darrifourcq, elle-même ou les autres solistes. Et comme on ne choisit pas entre deux belles équipes qui ont parfois des joueurs en commun, on les prend les deux, avec cette petite satisfaction cocardière qui nous fait nous rengorger, d’avoir aujourd’hui tant de talents dans le jazz français ! Et oui, dans le « jazz français », comme le soulignait Barney Wilen dans une de ses derniers concerts à Osaka en insistant bien sur l’expression.
Mais que fait Barney à revenir ainsi en toute fin d’une chronique consacrée à un festival « Jazz Or Jazz » en 2016 ? Je ne sais pas. Cette expression bizarre de « jazz français » sans doute. On souhaite que la manifestation puisse se prolonger à Orléans, et les premiers indices semblent indiquer que c’est en bonne voie. Si vous lisez ça aujourd’hui dimanche, vous avez encore le temps d’aller au Théâtre, où Guy Le Querrec se trouve avec Portal, Sclavis, Texier et Marguet. Vous en prendrez plein les yeux et pas mal aussi dans les cornets.
Philippe Méziat
(les photos sont à créditer à Denis Rouvre et Jeff Humbert)|J’ai laissé de trop nombreuses recensions derrière moi. Et pour commencer cette insistance des chauffeurs de bus de ville à me transporter gratuitement quand d’aventure, un peu las, je monte dans un bus pour un seul arrêt, qui me rapproche beaucoup des lieux de concert où je veux me rendre. A Strasbourg comme à Orléans, le phénomène s’est produit. Je rapporte ça en craignant quand même un peu que ça ne leur retombe dessus.
A Strasbourg, je recommande pour la troisième fois « L’occase de l’oncle Tom », presque au bout de la Grand Rue, à gauche quand on vient de la gare. À l’étage, les nouveaux arrivages de jazz (vinyles évidemment !) réservent toujours de bonnes surprises : l’état du disque est évalué de façon très stricte, les prix sont très convenables. J’ai même trouvé quelques 25 cm français des années 50 avec des pochettes de David Stone Martin entre 5 et 10 euros. Au rez-de-chaussée, les disques de musique classique sont dans un état irréprochable, et les prix, quoiqu’en augmentation, restent à des hauteurs que l’on peut franchir.
A Orléans, pas de grosses surprises, mais quelques bons disques le vendredi matin sur la place où Jeanne d’Arc brandit son épée. Le samedi, tout près du théâtre, un très agréable marché aux puces, avec des brocanteurs à l’ancienne, organisés, ni trop proches de l’antiquaire, ni trop identifiés aux ramasseurs de déchets. Belle ambiance, un peu comme à Perpignan. Et je termine sur une note gastronomique : tout près du « Jackhôtel » où je suis logé à Orléans, dans la rue de Bourgogne (au 126) et dans un quartier où dominent les kébabs, « Chez Jules » réserve un joli repas à 23 euros, la possibilité de boire un verre de Valencay tout à fait parfait, dans un décor, il est vrai, un peu baroque et de goût intermédiaire.
Je reviens à « Jazz Or Jazz », ainsi dénommé à cause du « Or » d’Orléans, reprise d’un festival déjà très ancien, sous la houlette du directeur de la Scène Nationale François-Xavier Hauville, avec le concours de Stéphane Cochoyan, conseiller artistique, et de l’association Ô Jazz. Des propositions artistiques qui doivent satisfaire le « grand public » (il faudra me dire un jour en quoi il mérite cette stature), mais aussi tous ceux qui restent assoiffés de nouveaux vins, même s’ils sont servis dans de vieilles bouteilles. Chaque soir donc ou presque, la possibilité de choisir entre la sécurité (Mélody Gardot, Lisa Simone) et l’aventure (le Tricollectif, Ève Risser, Jozef Dumoulin, l’ONJ d’Olivier Benoît, Alexandra Grimal, etc.). Choix cornélien parfois : car qui dit que, malgré ma réputation d’incorrigible freeman, je n’ai pas envie d’écouter aussi la fille de Nina Simone. Dont je me souviens, à Marciac : elle avait été « intronisé » l’après-midi même dans l’ordre des mousquetaires de l’Armagnac. Et d’arriver sur scène en montrant sa médaille tout en proférant : « je suis moustiquaire, je suis une moustiquaire !!! ». Cinq mille personnes écroulées de rire et de sympathie.
Rien d’ailleurs, soyons honnêtes, ne m’empêche d’aller un peu vers l’une (Lisa) tout en ne négligeant pas les autres. Et nous y voici. J’espère que ces petites histoires ne vous ont pas trop ennuyé. Et au passage, signalons que le tremplin (concours d’orchestres) a été remporté par le Gauthier Toux trio, que nous avions déjà signalé à l’attention l’an dernier à Cully et plus récemment au « Caillou » à Bordeaux. Et aussi que, dans l’orbite du festival, sont présentées au Théâtre d’Orléans de nombreuses expositions, centrées sur la musique à l’honneur pendant ces journées, avec une bien intéressante série de photographies prises par Louis Sclavis. Varié dans son style, toujours pertinent, le clarinettiste vise juste, et il ne manque à cette série de photos en noir et blanc que les prix ! Je suis persuadé que Louis ne fait pas ça pour vendre, mais après tout pourquoi ne pas proposer ? Par exemple j’aime beaucoup la photo de Jacques Di Donato dans une atmosphère vieux style (Louis XV) à… Uzeste ! Pour des éditions futures, les « Jazz Box » de Cécile Léna (et moi-même) feraient bel effet, comme partout où elles sont présentées.
« Europa Berlin », ONJ : Olivier Benoit (g, comp, dir), Jean Dousteyssier (cl, b-cl), Alexandra Grimal (ts), Hugues Mayot (as), Fabrice Martinez (tp), Fidel Fourneyron (tb), Théo Ceccaldi (vln), Sophie Agnel (p), Paul Brousseau (keyboards), Sylvain Daniel (el-b), Éric Echampard (dm)
Kankü : Alexandra Grimal (ts, voix), Éric Echampard (dm), Sylvain Daniel (el-b)
Kankü est (pour l’instant) une œuvre pour trio « à la Rollins », avec des parties vocales assez surprenantes, plutôt décalées, une proposition percussive qui donne à Éric Echampard l’occasion de briller de mille fûts, de cent caisses et d’une bonne dizaine de cymbales, à Sylvain Daniel l’opportunité de se glisser dans les espaces restants, et à Alexandra elle-même l’occasion de faire entendre un son et un phrasé au ténor qu’on rapprocherait volontiers de celui de Sam Rivers. Pour le reste, une œuvre contrastée : la musique d’Alexandra reste encore pour moi une énigme.
Tout bien pesé, c’était en fait la première fois que j’entendais le programme « Berlin » de notre ONJ, et il était tentant de comparer les deux formations voisines, celle d’hier soir à dix (White Desert Orchestra) et celle de la soirée à onze. Présentations scéniques déjà très différentes, l’ONJ se donnant à voir comme un V très ouvert sur la salle avec sur une branche les soufflants et sur l’autre les « rythmiciens », cependant que l’orchestre d’Ève Risser offre le piano à gauche, les cuivres et les anches de face et la rythmique à trois derrière eux sur une estrade. Les pôles musicaux sont évidemment très différents, avec cependant quelques couleurs proches, ou sensiblement superposables dans les moments méditatifs. Le portait musical de Berlin est plus urbain que celui de l’Ouest américains – on n’en sera pas surpris – ne serait-ce que par l’omniprésence valeureuse d’Éric Echampard, qui emmène une rythmique surlignée, là où Éve Risser propose davantage d’échanges entre Darrifourcq, elle-même ou les autres solistes. Et comme on ne choisit pas entre deux belles équipes qui ont parfois des joueurs en commun, on les prend les deux, avec cette petite satisfaction cocardière qui nous fait nous rengorger, d’avoir aujourd’hui tant de talents dans le jazz français ! Et oui, dans le « jazz français », comme le soulignait Barney Wilen dans une de ses derniers concerts à Osaka en insistant bien sur l’expression.
Mais que fait Barney à revenir ainsi en toute fin d’une chronique consacrée à un festival « Jazz Or Jazz » en 2016 ? Je ne sais pas. Cette expression bizarre de « jazz français » sans doute. On souhaite que la manifestation puisse se prolonger à Orléans, et les premiers indices semblent indiquer que c’est en bonne voie. Si vous lisez ça aujourd’hui dimanche, vous avez encore le temps d’aller au Théâtre, où Guy Le Querrec se trouve avec Portal, Sclavis, Texier et Marguet. Vous en prendrez plein les yeux et pas mal aussi dans les cornets.
Philippe Méziat
(les photos sont à créditer à Denis Rouvre et Jeff Humbert)|J’ai laissé de trop nombreuses recensions derrière moi. Et pour commencer cette insistance des chauffeurs de bus de ville à me transporter gratuitement quand d’aventure, un peu las, je monte dans un bus pour un seul arrêt, qui me rapproche beaucoup des lieux de concert où je veux me rendre. A Strasbourg comme à Orléans, le phénomène s’est produit. Je rapporte ça en craignant quand même un peu que ça ne leur retombe dessus.
A Strasbourg, je recommande pour la troisième fois « L’occase de l’oncle Tom », presque au bout de la Grand Rue, à gauche quand on vient de la gare. À l’étage, les nouveaux arrivages de jazz (vinyles évidemment !) réservent toujours de bonnes surprises : l’état du disque est évalué de façon très stricte, les prix sont très convenables. J’ai même trouvé quelques 25 cm français des années 50 avec des pochettes de David Stone Martin entre 5 et 10 euros. Au rez-de-chaussée, les disques de musique classique sont dans un état irréprochable, et les prix, quoiqu’en augmentation, restent à des hauteurs que l’on peut franchir.
A Orléans, pas de grosses surprises, mais quelques bons disques le vendredi matin sur la place où Jeanne d’Arc brandit son épée. Le samedi, tout près du théâtre, un très agréable marché aux puces, avec des brocanteurs à l’ancienne, organisés, ni trop proches de l’antiquaire, ni trop identifiés aux ramasseurs de déchets. Belle ambiance, un peu comme à Perpignan. Et je termine sur une note gastronomique : tout près du « Jackhôtel » où je suis logé à Orléans, dans la rue de Bourgogne (au 126) et dans un quartier où dominent les kébabs, « Chez Jules » réserve un joli repas à 23 euros, la possibilité de boire un verre de Valencay tout à fait parfait, dans un décor, il est vrai, un peu baroque et de goût intermédiaire.
Je reviens à « Jazz Or Jazz », ainsi dénommé à cause du « Or » d’Orléans, reprise d’un festival déjà très ancien, sous la houlette du directeur de la Scène Nationale François-Xavier Hauville, avec le concours de Stéphane Cochoyan, conseiller artistique, et de l’association Ô Jazz. Des propositions artistiques qui doivent satisfaire le « grand public » (il faudra me dire un jour en quoi il mérite cette stature), mais aussi tous ceux qui restent assoiffés de nouveaux vins, même s’ils sont servis dans de vieilles bouteilles. Chaque soir donc ou presque, la possibilité de choisir entre la sécurité (Mélody Gardot, Lisa Simone) et l’aventure (le Tricollectif, Ève Risser, Jozef Dumoulin, l’ONJ d’Olivier Benoît, Alexandra Grimal, etc.). Choix cornélien parfois : car qui dit que, malgré ma réputation d’incorrigible freeman, je n’ai pas envie d’écouter aussi la fille de Nina Simone. Dont je me souviens, à Marciac : elle avait été « intronisé » l’après-midi même dans l’ordre des mousquetaires de l’Armagnac. Et d’arriver sur scène en montrant sa médaille tout en proférant : « je suis moustiquaire, je suis une moustiquaire !!! ». Cinq mille personnes écroulées de rire et de sympathie.
Rien d’ailleurs, soyons honnêtes, ne m’empêche d’aller un peu vers l’une (Lisa) tout en ne négligeant pas les autres. Et nous y voici. J’espère que ces petites histoires ne vous ont pas trop ennuyé. Et au passage, signalons que le tremplin (concours d’orchestres) a été remporté par le Gauthier Toux trio, que nous avions déjà signalé à l’attention l’an dernier à Cully et plus récemment au « Caillou » à Bordeaux. Et aussi que, dans l’orbite du festival, sont présentées au Théâtre d’Orléans de nombreuses expositions, centrées sur la musique à l’honneur pendant ces journées, avec une bien intéressante série de photographies prises par Louis Sclavis. Varié dans son style, toujours pertinent, le clarinettiste vise juste, et il ne manque à cette série de photos en noir et blanc que les prix ! Je suis persuadé que Louis ne fait pas ça pour vendre, mais après tout pourquoi ne pas proposer ? Par exemple j’aime beaucoup la photo de Jacques Di Donato dans une atmosphère vieux style (Louis XV) à… Uzeste ! Pour des éditions futures, les « Jazz Box » de Cécile Léna (et moi-même) feraient bel effet, comme partout où elles sont présentées.
« Europa Berlin », ONJ : Olivier Benoit (g, comp, dir), Jean Dousteyssier (cl, b-cl), Alexandra Grimal (ts), Hugues Mayot (as), Fabrice Martinez (tp), Fidel Fourneyron (tb), Théo Ceccaldi (vln), Sophie Agnel (p), Paul Brousseau (keyboards), Sylvain Daniel (el-b), Éric Echampard (dm)
Kankü : Alexandra Grimal (ts, voix), Éric Echampard (dm), Sylvain Daniel (el-b)
Kankü est (pour l’instant) une œuvre pour trio « à la Rollins », avec des parties vocales assez surprenantes, plutôt décalées, une proposition percussive qui donne à Éric Echampard l’occasion de briller de mille fûts, de cent caisses et d’une bonne dizaine de cymbales, à Sylvain Daniel l’opportunité de se glisser dans les espaces restants, et à Alexandra elle-même l’occasion de faire entendre un son et un phrasé au ténor qu’on rapprocherait volontiers de celui de Sam Rivers. Pour le reste, une œuvre contrastée : la musique d’Alexandra reste encore pour moi une énigme.
Tout bien pesé, c’était en fait la première fois que j’entendais le programme « Berlin » de notre ONJ, et il était tentant de comparer les deux formations voisines, celle d’hier soir à dix (White Desert Orchestra) et celle de la soirée à onze. Présentations scéniques déjà très différentes, l’ONJ se donnant à voir comme un V très ouvert sur la salle avec sur une branche les soufflants et sur l’autre les « rythmiciens », cependant que l’orchestre d’Ève Risser offre le piano à gauche, les cuivres et les anches de face et la rythmique à trois derrière eux sur une estrade. Les pôles musicaux sont évidemment très différents, avec cependant quelques couleurs proches, ou sensiblement superposables dans les moments méditatifs. Le portait musical de Berlin est plus urbain que celui de l’Ouest américains – on n’en sera pas surpris – ne serait-ce que par l’omniprésence valeureuse d’Éric Echampard, qui emmène une rythmique surlignée, là où Éve Risser propose davantage d’échanges entre Darrifourcq, elle-même ou les autres solistes. Et comme on ne choisit pas entre deux belles équipes qui ont parfois des joueurs en commun, on les prend les deux, avec cette petite satisfaction cocardière qui nous fait nous rengorger, d’avoir aujourd’hui tant de talents dans le jazz français ! Et oui, dans le « jazz français », comme le soulignait Barney Wilen dans une de ses derniers concerts à Osaka en insistant bien sur l’expression.
Mais que fait Barney à revenir ainsi en toute fin d’une chronique consacrée à un festival « Jazz Or Jazz » en 2016 ? Je ne sais pas. Cette expression bizarre de « jazz français » sans doute. On souhaite que la manifestation puisse se prolonger à Orléans, et les premiers indices semblent indiquer que c’est en bonne voie. Si vous lisez ça aujourd’hui dimanche, vous avez encore le temps d’aller au Théâtre, où Guy Le Querrec se trouve avec Portal, Sclavis, Texier et Marguet. Vous en prendrez plein les yeux et pas mal aussi dans les cornets.
Philippe Méziat
(les photos sont à créditer à Denis Rouvre et Jeff Humbert)|J’ai laissé de trop nombreuses recensions derrière moi. Et pour commencer cette insistance des chauffeurs de bus de ville à me transporter gratuitement quand d’aventure, un peu las, je monte dans un bus pour un seul arrêt, qui me rapproche beaucoup des lieux de concert où je veux me rendre. A Strasbourg comme à Orléans, le phénomène s’est produit. Je rapporte ça en craignant quand même un peu que ça ne leur retombe dessus.
A Strasbourg, je recommande pour la troisième fois « L’occase de l’oncle Tom », presque au bout de la Grand Rue, à gauche quand on vient de la gare. À l’étage, les nouveaux arrivages de jazz (vinyles évidemment !) réservent toujours de bonnes surprises : l’état du disque est évalué de façon très stricte, les prix sont très convenables. J’ai même trouvé quelques 25 cm français des années 50 avec des pochettes de David Stone Martin entre 5 et 10 euros. Au rez-de-chaussée, les disques de musique classique sont dans un état irréprochable, et les prix, quoiqu’en augmentation, restent à des hauteurs que l’on peut franchir.
A Orléans, pas de grosses surprises, mais quelques bons disques le vendredi matin sur la place où Jeanne d’Arc brandit son épée. Le samedi, tout près du théâtre, un très agréable marché aux puces, avec des brocanteurs à l’ancienne, organisés, ni trop proches de l’antiquaire, ni trop identifiés aux ramasseurs de déchets. Belle ambiance, un peu comme à Perpignan. Et je termine sur une note gastronomique : tout près du « Jackhôtel » où je suis logé à Orléans, dans la rue de Bourgogne (au 126) et dans un quartier où dominent les kébabs, « Chez Jules » réserve un joli repas à 23 euros, la possibilité de boire un verre de Valencay tout à fait parfait, dans un décor, il est vrai, un peu baroque et de goût intermédiaire.
Je reviens à « Jazz Or Jazz », ainsi dénommé à cause du « Or » d’Orléans, reprise d’un festival déjà très ancien, sous la houlette du directeur de la Scène Nationale François-Xavier Hauville, avec le concours de Stéphane Cochoyan, conseiller artistique, et de l’association Ô Jazz. Des propositions artistiques qui doivent satisfaire le « grand public » (il faudra me dire un jour en quoi il mérite cette stature), mais aussi tous ceux qui restent assoiffés de nouveaux vins, même s’ils sont servis dans de vieilles bouteilles. Chaque soir donc ou presque, la possibilité de choisir entre la sécurité (Mélody Gardot, Lisa Simone) et l’aventure (le Tricollectif, Ève Risser, Jozef Dumoulin, l’ONJ d’Olivier Benoît, Alexandra Grimal, etc.). Choix cornélien parfois : car qui dit que, malgré ma réputation d’incorrigible freeman, je n’ai pas envie d’écouter aussi la fille de Nina Simone. Dont je me souviens, à Marciac : elle avait été « intronisé » l’après-midi même dans l’ordre des mousquetaires de l’Armagnac. Et d’arriver sur scène en montrant sa médaille tout en proférant : « je suis moustiquaire, je suis une moustiquaire !!! ». Cinq mille personnes écroulées de rire et de sympathie.
Rien d’ailleurs, soyons honnêtes, ne m’empêche d’aller un peu vers l’une (Lisa) tout en ne négligeant pas les autres. Et nous y voici. J’espère que ces petites histoires ne vous ont pas trop ennuyé. Et au passage, signalons que le tremplin (concours d’orchestres) a été remporté par le Gauthier Toux trio, que nous avions déjà signalé à l’attention l’an dernier à Cully et plus récemment au « Caillou » à Bordeaux. Et aussi que, dans l’orbite du festival, sont présentées au Théâtre d’Orléans de nombreuses expositions, centrées sur la musique à l’honneur pendant ces journées, avec une bien intéressante série de photographies prises par Louis Sclavis. Varié dans son style, toujours pertinent, le clarinettiste vise juste, et il ne manque à cette série de photos en noir et blanc que les prix ! Je suis persuadé que Louis ne fait pas ça pour vendre, mais après tout pourquoi ne pas proposer ? Par exemple j’aime beaucoup la photo de Jacques Di Donato dans une atmosphère vieux style (Louis XV) à… Uzeste ! Pour des éditions futures, les « Jazz Box » de Cécile Léna (et moi-même) feraient bel effet, comme partout où elles sont présentées.
« Europa Berlin », ONJ : Olivier Benoit (g, comp, dir), Jean Dousteyssier (cl, b-cl), Alexandra Grimal (ts), Hugues Mayot (as), Fabrice Martinez (tp), Fidel Fourneyron (tb), Théo Ceccaldi (vln), Sophie Agnel (p), Paul Brousseau (keyboards), Sylvain Daniel (el-b), Éric Echampard (dm)
Kankü : Alexandra Grimal (ts, voix), Éric Echampard (dm), Sylvain Daniel (el-b)
Kankü est (pour l’instant) une œuvre pour trio « à la Rollins », avec des parties vocales assez surprenantes, plutôt décalées, une proposition percussive qui donne à Éric Echampard l’occasion de briller de mille fûts, de cent caisses et d’une bonne dizaine de cymbales, à Sylvain Daniel l’opportunité de se glisser dans les espaces restants, et à Alexandra elle-même l’occasion de faire entendre un son et un phrasé au ténor qu’on rapprocherait volontiers de celui de Sam Rivers. Pour le reste, une œuvre contrastée : la musique d’Alexandra reste encore pour moi une énigme.
Tout bien pesé, c’était en fait la première fois que j’entendais le programme « Berlin » de notre ONJ, et il était tentant de comparer les deux formations voisines, celle d’hier soir à dix (White Desert Orchestra) et celle de la soirée à onze. Présentations scéniques déjà très différentes, l’ONJ se donnant à voir comme un V très ouvert sur la salle avec sur une branche les soufflants et sur l’autre les « rythmiciens », cependant que l’orchestre d’Ève Risser offre le piano à gauche, les cuivres et les anches de face et la rythmique à trois derrière eux sur une estrade. Les pôles musicaux sont évidemment très différents, avec cependant quelques couleurs proches, ou sensiblement superposables dans les moments méditatifs. Le portait musical de Berlin est plus urbain que celui de l’Ouest américains – on n’en sera pas surpris – ne serait-ce que par l’omniprésence valeureuse d’Éric Echampard, qui emmène une rythmique surlignée, là où Éve Risser propose davantage d’échanges entre Darrifourcq, elle-même ou les autres solistes. Et comme on ne choisit pas entre deux belles équipes qui ont parfois des joueurs en commun, on les prend les deux, avec cette petite satisfaction cocardière qui nous fait nous rengorger, d’avoir aujourd’hui tant de talents dans le jazz français ! Et oui, dans le « jazz français », comme le soulignait Barney Wilen dans une de ses derniers concerts à Osaka en insistant bien sur l’expression.
Mais que fait Barney à revenir ainsi en toute fin d’une chronique consacrée à un festival « Jazz Or Jazz » en 2016 ? Je ne sais pas. Cette expression bizarre de « jazz français » sans doute. On souhaite que la manifestation puisse se prolonger à Orléans, et les premiers indices semblent indiquer que c’est en bonne voie. Si vous lisez ça aujourd’hui dimanche, vous avez encore le temps d’aller au Théâtre, où Guy Le Querrec se trouve avec Portal, Sclavis, Texier et Marguet. Vous en prendrez plein les yeux et pas mal aussi dans les cornets.
Philippe Méziat
(les photos sont à créditer à Denis Rouvre et Jeff Humbert)