Pat Metheny triomphe à l’Olympia
Tout ou presque
La foule qui se presse devant les portes de la salle parisienne annonçait, c’est rare de nos jours, l’ampleur de ce concert évènement. Les gens se pressent à l’intérieur, beaucoup en courant pour ne pas rater le début. Photos et vidéo interdites, nous dit une annonce.« On n’a pas le droit de rentrer pendant les 5 premières minutes ! » chuchote l’ouvreuse en plaçant les retardataires les plus ponctuels. Les autres attendront la fin de l’introduction acoustique du maître qui s’est saisi de sa guitare Pikasso à 42 cordes. Et maintenant que va t-il jouer ? Tout, ou presque.
Arrive sur scène le reste du trio. Surprise, ça n’est pas le très prometteur James Francies qui occupe le poste de claviériste multifonction… Ceux qui (comme moi) espéraient le voir de plus près ont sans doute été un peu déçus, mais ça ne dure pas, car Chris Fishman s’impose très vite par sa fluidité, la finesse de sa réflexion harmonique et son aisance dans les impros. Il paraît qu’il a déjà joué avec Flying Lotus, Joshua Redman, Louis Cole ou encore Thundercat, et ça s’entend. A la batterie, c’est un roc d’une élasticité ravissante, Joey Dyson, qui lui était sur le dernier disque de Pat Metheny, l’excellent “Side Eye NYC V1.IV”.
Soudés comme jamais
On sent tout de suite que ces trois-là sont soudés comme s’ils se connaissaient depuis toujours, et que le leader peut s’appuyer sur eux pour se lâcher. Et il ne se prive pas, enchaînant les tubes dont les premières notes arrachent immanquablement quelques sifflets enthousiastes, forcément plus pour Bright Size Life ou Always And Forever que pour le tout récent It Starts When We Disappear. Le public est de toute les couleurs et de tous les âges, même si on devine c’est en bonne partie parce que les fans ont amené grand-mères, enfants, compagnons ou compagnes pour leur faire découvrir leur guitariste préféré. Acoustique, guitare-synthé, impros monstrueuses, grooves et swing du feu de Dieu, en duo ou en trio, “Pat” pioche généreusement dans sa discographie (tout le monde aura entendu au moins un de ses morceaux préférés) et révèlera même quelques instruments orchestrioniques cachés derrière Joey Dyson, qui deviennent le quatrième homme du trio.
Encore
Le set, qui commençait à prendre des dimensions pharaoniques (et on ne s’en plaint pas), touche à sa fin, mais le natif de Lee’s Summit accepte d’être rappelé sur scène, seul, pour un medley de ses plus beaux thèmes à la guitare acoustique, et sur le dernier accord, le Maître s’évapore dans la lumière mourante des projecteurs. Cet instant de magie est la fin parfaite, digne d’un conte fée musical. Mais le public ne veut pas le laisser partir. Et il ne le sait pas encore, mais Pat Metheny ne veut pas s’en aller non plus. Le trio revient pour Are You Going With Me, suivi de plus d’acoustique. Maintenant, c’est en courant que le guitariste revient sur scène. Plus tôt, un homme s’est précipité sur scène avant d’être fermement invité à redescendre. C’est la folie ! Combien de morceaux ont-ils ajouté dans ce quasi deuxième set ? Quatre ? Cinq ? Six ?! L’émotion efface la comptabilité. Je sais juste que, dans un dernier morceau acoustique, le Pat Metheny Group à enfin dit au revoir à Paris, marquant un peu plus encore de son empreinte l’histoire de l’Olympia et concluant trois heures de musique étourdissante de bonheur. Yazid Kouloughli