Pee Wee ! Une renaissance au Théâtre des Nouveautés
Hier 31 janvier, le label Pee Wee fêtait sa renaissance avec une affiche réunissant quelques-uns de ses artistes en une soirée multi-programme miraculeusement articulée.
Tout a commencé sans façon : dans la jolie salle, douillette comme un cocon, les lumières se sont éteintes découvrant un scène encombrée d’un capharnaüm d’instruments et de matériel de sonorisation. Ne goutant guère les concerts à affiche multiple où il faut attendre entre chaque artiste la réorganisation du plateau avant de subir quelques larsen, j’ai commencé par souhaiter l’entracte pour fuir à l’anglaise. Une contrebasse est apparue portée par Hubert Dupont et accompagnée de la guitare électrique à 8 cordes de Phil Reptil au pied duquel se trouvait un nombre à peu près égal de pédales, ainsi qu’un ordinateur à portée de main posé sur un pupitre. Contrebasse préparée, contrebasse balafon, contrebasse voltigeuse, accords et mélodies en nappes sur paysages sonores et dramatiques. On n’en était pas encore revenu que Dupont sortait, Phil Reptil s’emparait d’une mandole (à 8 cordes, une manie !), Andy Emler s’asseyait au piano rejoint par Patrick Bebey qui entamait un chant pygmée s’accompagnant de la flûte traditionnelle n’dehou, invitant bientôt le public à battre une clave au secours de laquelle Andy Emler fournira deux mains fermes. Mais déjà Phil Reptil a quitté la scène et Patrick Bebey a quitté sa flûte pour le piano à pouce – « l’ancêtre du synthétiseur ! » clame-t-il – tandis qu’Emler koralyse le piano rejoint par le violon de Mathias Lévy bientôt soliste débridé au sein d’un trio où Bebey a cédé la place au batteur Samuel Ber. Au départ de Lévy et Emler, ce dernier reste en scène, rejoint par Benoît Delebcq au piano, Hubert Dupont « r’à » la contrebasse et l’on se dit que voici Kartet au grand complet. Eh bien, non, car le saxophoniste habituel Guillaume Orti s’est fait mordre par le vilain petit Covid. Et on n’en voit qu’un seul qui pourrait reprendre son rôle… c’est évidemment Antonin-Tri Hoang qui entre en scène. Ça joue comme les arbres s’égouttent après la pluie, boîtes à musique détraquées, tempi qui prennent la clé des champs… et ça marche, rouages parfaitement huilés, métaphore de cet enchainement miraculeux qu’a constitué ce début de soirée, sans accroc, comme si régie et musiciens avait répété toute la semaine.
Du coup, je décide de rester, d’autant plus que je vois que l’on dresse les grands tournesols auxquels j’identifie les hautes cymbales fleurissant habituellement autour de la batterie de Simon Goubert. Son entrée en scène sera précédée d’un solo sans concession de Biréli Lagrène et d’un duo très libre de Benoît Delbecq (piano) et Sophia Domancich (Fender Rhodes), où j’ai cru reconnaître des accents à la Randy Weston. Puis c’est le duo Domancich-Goubert qui clôt la soirée avec l’obsédant Organum V de leur programme Twofold Head autour du cinéma de David Lynch, la grande suite qu’articule en son centre le Django de John Lewis – écoute mutuelle, surprises, ponctualité des rendez-vous et du parcours, écriture et pure connivence – et… « Qu’est-ce qu’on joue pour finir ? » demande Simon. « Une chanson pour finir. » répond Sophia.
Ainsi s’acheva la soirée donnée par le Label Pee Wee ! ce 31 janvier au théâtre des Nouveautés pour fêter la renaissance d’un Label créé en 1994 par Vincent Mahey et François Yvernat, qui se décline désormais en trois départements :
- “Pee Wee ! Music” pour les productions des années 1994 à 1999 progressivement remises à la disposition du public.
- “Pee Wee ! Collection” pour la réédition de « trésors oubliés » enrichis de nouveaux livrets, de resmasterisations et d’inédits.
- “Pee Wee !” tout court pour les productions nouvelles.
Le tout placé sous la direction artistique et Vincent Mahey et Simon Goubert, et sou la production exécutive de François Yvernat et Virginie Crouail. Peu de maketting lors de cette soirée au cours de laquelle Vincent Mahey fit une brève apparition devant la scène pour présenter la renaissance Pee Wee ! La musique d’abord, avec cette circulation des esthétiques sans heurts, comme à l’intérieur d’une bonne maison. Un autre aperçu dans “Pause”, série à suivre de séances filmées au Studio Sextan auquel se trouve historiquement rattaché Pee Wee ! Franck Bergerot