PETER BERNSTEIN 4tet à l’Ecuje
PETER BERNSTEIN 4tet à l’Ecuje
Deux personnes qui suivent régulièrement les chroniques de concerts et de festivals (et pas seulement les miennes) sur le site de Jazz Magazine m’ont fait remarquer que j’étais peu sorti depuis la fin du mois de mai. Exact. Ma seule chronique, sur l’Orchestre National de Jazz au Châtelet, concernait un concert à l’heure du déjeuner. La raison en est bien simple : depuis la fin de mai, et pour tout juin apparemment, en semaine, la ligne de RER qui dessert ma banlieue quitte Paris intra muros vers 21h : pas très pratique pour aller dans les clubs, ou plutôt pour en revenir…. Mais hier j’ai quand même bravé l’adversité pour la dernière soirée de la saison de ‘Jazz à l’Ecuje’
PETER BERNSTEIN QUARTET
Peter Bernstein (guitare), Olivier Hutman (piano), Aldo Zunino (contrebasse), Bernd Reiter (batterie)
Paris, Jazz à l’Ecuje, 15 juin 2023, 20h30
Après Stuttgart, et avant Genève, Valréas et Marseille, le quartette fait escale à l’Ecuje pour la dernière soirée de la saison jazz. Gad Ibgui, directeur de ce centre culturel, présente la soirée car le programmateur jazz du lieu, Olivier Hutman, sera ce soir sur scène. Et c’est au guitariste Thomas Curbillon qu’il confie le soin d’annoncer en avant-première le programme de la prochaine saison (prochainement sur le site https://www.ecuje.fr/jazz-a-lecuje/), puis de présenter le groupe que nous attendons avec impatience.
La salle est comble, il fait chaud, l’accord de la guitare a bougé, et après un faux départ de quelques mesures, et le retour au diapason, que la fête commence ! Bassiste italien, batteur autrichien, pianiste français : distribution européenne et bon choix du guitariste. Il a bon goût : pour son premier disque chez Criss Cross, enregistré en 1992, il avait choisi pour pianiste Brad Mehldau et pour batteur Jimmy Cobb…. Après un premier titre qui rappelle l’époque du soul jazz, le répertoire va conjuguer standards de Broadway (I Love You), standards du jazz (Con Alma) et compositions de Peter Bernstein. Au fil du concert on sent une prédominance de l’esprit du blues. Le guitariste aime aussi les intro-mystère. Ses phrases sont chantantes, l’énergie et le balancement sont vifs, pas de formules toutes faites et d’intervalles convenus : de la vraie musique en somme. Le guitariste et le pianiste ‘se tirent la bourre’ dans le registre de la volubilité, ça barde, mais ça n’est pas du sport : c’est toujours expressif, de la musique, vous dis-je. Succession assez rituelle de solos pour la basse et la batterie, mais il se passe plein de choses dans l’accompagnement, et quelques échanges en 4/4, puis en 2/2, avivent le goût du jeu. Pendant l’entracte j’ai une brève conversation avec Olivier Hutman, et je lui fais part de mon bonheur à les écouter, nourri par le plaisir que manifestement ils ont à jouer ensemble. Avec son esprit coutumier, légèrement caustique, il me dit que ceux qui ne savent quoi dire (ou quoi écrire?) diraient que c’est jubilatoire. Ce terme ressassé depuis quelques décennies décrit assez bien ce que je viens d’écouter. Les lexicographes rappellent que l’adjectif est apparu à la fin du 19ème siècle. Mon habitude est plutôt de dire (ou d’écrire) que c’est jouissif, même si la joie et la jouissance ne sont pas du même ressort. Bref ce fut une très belle soirée, conclue par un chaleureux rappel, et une musique encore teintée de blues. De quoi faire oublier au chroniqueur que le retour en banlieue sera laborieux : plus de RER, métro + bus régulier (en retard), bus SNCF de substitution (invisible), donc métro + tramway + marche à pied : la routine du joyeux mélomane jazzophile….
Xavier Prévost
Le quartette est en concert le 17 juin à Valréas et le 18 à Marseille