Jazz live
Publié le 21 Juil 2017

RADIO FRANCE OCCITANIE MONTPELLIER : ANTONIO SANCHEZ & MIGRATION

Pour sa quatrième soirée de jazz, le festival accueille un groupe de la scène états-unienne : celui du batteur Antonio Sanchez, Migration, présent la veille à ‘Jazz à Junas’ dans le cadre d’une coproduction, comme le pratiquent les deux festivals depuis quelques années.

Grande affluence sous la pinède dès 20h, motivée sans doute par la présence, à 22h, d’un quintette international. Et comme chaque soir les dîneurs, pique-niqueurs et autres adeptes de l’apéritif musical tendent l’oreille vers la scène qui accueille les groupes du Languedoc et d’alentour. Aujourd’hui c’est le trio de la flûtiste Evlyn Andria, avec Jean-Luc Lehr à la guitare basse et Olivier Roman-Garcia à la guitare.

Evlyn Andria Trio

ANTONIO SANCHEZ & MIGRATION

Thana Alexa (voix), Seamus Blake (saxophone ténor & EWI), John Escreet (piano, piano électrique), Matt Brewer (contrebasse, guitare basse), Antonio Sanchez (batterie, composition)

Montpellier, Amphithéâtre du Domaine d’O, 20 juillet 2017, 22h

Juste avant de commencer à jouer, Antonio Sanchez s’adresse au public, pour dire le plaisir qu’il a d’être entouré de musicien(ne)s qui sont aussi des leaders, et qui composent et arrangent pour leurs propres groupes. Mais au sein de Migration, c’est lui qui conçoit, compose et dirige. Il présente ses partenaires en insistant sur le caractère cosmopolite de la formation : lui vient du Mexique, le bassiste du Nouveau Mexique (aux USA, entre l’Arizona et le Texas), la chanteuse de Croatie, le saxophoniste du Canada, et le pianiste d’Angleterre. Il dit aussi son goût pour toutes les formes de musique, de la pop au jazz en passant par la musique classique : il les connaît, les aime et les a pratiquées, mais il avoue sa frustration de ne pouvoir applaudir au concert symphonique après un premier mouvement qui se conclut par un fortissimo brillant et virtuose. Alors, après avoir annoncé que la groupe va jouer The Meridian Suite, publiée sur disque sous étiquette Cam Jazz voici deux ans, et qui comme toute suite va enchaîner ses mouvements (ils sont au nombre de cinq), il invite les spectateurs à ne pas réfréner leurs envies d’applaudir au fil du concert. Ce petit prêche initial a échappé à la radiodiffusion car le concert précédent (le pianiste Boris Berezosky) également en direct de Montpellier, s’est terminé avec un léger retard, et la retransmission commencera directement sur la musique.

Antonio Sanchez MigrationContrairement à ce qu’il fait dans certaines de ses autres prestations, Antnio Sanchez ne commence pas par un solo ; ici le leader est d’abord compositeur, installé à la tête d’un impressionnant set de batterie : trois caisses claires, deux toms basses, une seule grosse caisse mais une forêt de cymbales. Il use de tout cela avec discernement, finesse et musicalité, sans ostentation, même au cours des rares solos qu’il prendra au fil du concert. C’est bien d’une suite qu’il s’agit, une grande forme avec des moments différents qui s’enchaînent et s’intriquent avec cohérence. L’esthétique est celle des quatre dernières décennies : on sent que le batteur a joué avec Chick Corea, et dans l’emploi de la voix par exemple, resurgit chez l’auditeur le souvenir du groupe ‘Return To Forever’. On peut entendre dans le goût (parfois excessif) des unissons l’influence du rock progressif. Les mélodies mêlent chromatismes et intervalles distendus, on retrouve aussi à bien des reprises le souvenir des différentes formes de fusion ou de jazz rock, mais l’écriture et la texture instrumentale, comme une bonne partie des improvisations, rappellent que l’on est d’abord en territoire de jazz, fût-ce au sens large. On passe régulièrement du tout acoustique (voix, saxophone, piano, contrebasse) au tout électrique : l’Ewi, ce drôle de synthétiseur à bouche un peu tombé en désuétude ; la voix de la chanteuse, qui pilote elle-même un dispositif d’effets électroniques ; la guitare basse qui se substitue à la contrebasse ; et le piano électrique, augmenté d’une foule de pédales qui permettent une multitude de sons dont certains me rappellent le travail prospectif du cher Siegfried Kessler, qui vécut la fin de sa vie-et mourut- dans cette région, et qui fit entendre sur cet instrument à la fin des années soixante-dix des sonorités inouïes. Le fait que l’œuvre soit jouée en quintette et non en sextette (le CD accueillait le guitariste Adam Rogers) ne laisse ressentir nul manque. Les moments très technologiques alternent avec des incises typiquement jazz, comme un solo absolu de Seamus Blake, ou une sorte de chase entre la contrebasse et le saxophone ténor, ou un passage en trio acoustique avec un beau solo de Matt Brewer. Le pianiste fait beaucoup dans la pyrotechnie et l’énergie, sur ses deux claviers, tandis que la chanteuse sait aussi s’évader vers un scat expressif qui mêle l’esprit jazz et l’esprit fusion. Vers la fin du concert un crescendo vocal va se fondre dans un intense dialogue entre sax ténor et piano sur fond de tandem contrebasse-batterie des plus vibrants. Bref le paysage est escarpé, la musique intense, avec de belles couleurs d’écriture, et l’on en ressort ébloui, un peu groggy, mais heureux. A (re)découvrir sur le site de France Musique en suivant le lien ci-dessous, lequel est agrémenté d’une entretien de sortie de scène d’Antonio Sanchez avec Pascal Rozat.

Xavier Prévost

https://www.francemusique.fr/emissions/jazz-montpellier/antonio-sanchez-migration-l-amphiteatre-du-domain-d-o-montpellier-2017-35481|Pour sa quatrième soirée de jazz, le festival accueille un groupe de la scène états-unienne : celui du batteur Antonio Sanchez, Migration, présent la veille à ‘Jazz à Junas’ dans le cadre d’une coproduction, comme le pratiquent les deux festivals depuis quelques années.

Grande affluence sous la pinède dès 20h, motivée sans doute par la présence, à 22h, d’un quintette international. Et comme chaque soir les dîneurs, pique-niqueurs et autres adeptes de l’apéritif musical tendent l’oreille vers la scène qui accueille les groupes du Languedoc et d’alentour. Aujourd’hui c’est le trio de la flûtiste Evlyn Andria, avec Jean-Luc Lehr à la guitare basse et Olivier Roman-Garcia à la guitare.

Evlyn Andria Trio

ANTONIO SANCHEZ & MIGRATION

Thana Alexa (voix), Seamus Blake (saxophone ténor & EWI), John Escreet (piano, piano électrique), Matt Brewer (contrebasse, guitare basse), Antonio Sanchez (batterie, composition)

Montpellier, Amphithéâtre du Domaine d’O, 20 juillet 2017, 22h

Juste avant de commencer à jouer, Antonio Sanchez s’adresse au public, pour dire le plaisir qu’il a d’être entouré de musicien(ne)s qui sont aussi des leaders, et qui composent et arrangent pour leurs propres groupes. Mais au sein de Migration, c’est lui qui conçoit, compose et dirige. Il présente ses partenaires en insistant sur le caractère cosmopolite de la formation : lui vient du Mexique, le bassiste du Nouveau Mexique (aux USA, entre l’Arizona et le Texas), la chanteuse de Croatie, le saxophoniste du Canada, et le pianiste d’Angleterre. Il dit aussi son goût pour toutes les formes de musique, de la pop au jazz en passant par la musique classique : il les connaît, les aime et les a pratiquées, mais il avoue sa frustration de ne pouvoir applaudir au concert symphonique après un premier mouvement qui se conclut par un fortissimo brillant et virtuose. Alors, après avoir annoncé que la groupe va jouer The Meridian Suite, publiée sur disque sous étiquette Cam Jazz voici deux ans, et qui comme toute suite va enchaîner ses mouvements (ils sont au nombre de cinq), il invite les spectateurs à ne pas réfréner leurs envies d’applaudir au fil du concert. Ce petit prêche initial a échappé à la radiodiffusion car le concert précédent (le pianiste Boris Berezosky) également en direct de Montpellier, s’est terminé avec un léger retard, et la retransmission commencera directement sur la musique.

Antonio Sanchez MigrationContrairement à ce qu’il fait dans certaines de ses autres prestations, Antnio Sanchez ne commence pas par un solo ; ici le leader est d’abord compositeur, installé à la tête d’un impressionnant set de batterie : trois caisses claires, deux toms basses, une seule grosse caisse mais une forêt de cymbales. Il use de tout cela avec discernement, finesse et musicalité, sans ostentation, même au cours des rares solos qu’il prendra au fil du concert. C’est bien d’une suite qu’il s’agit, une grande forme avec des moments différents qui s’enchaînent et s’intriquent avec cohérence. L’esthétique est celle des quatre dernières décennies : on sent que le batteur a joué avec Chick Corea, et dans l’emploi de la voix par exemple, resurgit chez l’auditeur le souvenir du groupe ‘Return To Forever’. On peut entendre dans le goût (parfois excessif) des unissons l’influence du rock progressif. Les mélodies mêlent chromatismes et intervalles distendus, on retrouve aussi à bien des reprises le souvenir des différentes formes de fusion ou de jazz rock, mais l’écriture et la texture instrumentale, comme une bonne partie des improvisations, rappellent que l’on est d’abord en territoire de jazz, fût-ce au sens large. On passe régulièrement du tout acoustique (voix, saxophone, piano, contrebasse) au tout électrique : l’Ewi, ce drôle de synthétiseur à bouche un peu tombé en désuétude ; la voix de la chanteuse, qui pilote elle-même un dispositif d’effets électroniques ; la guitare basse qui se substitue à la contrebasse ; et le piano électrique, augmenté d’une foule de pédales qui permettent une multitude de sons dont certains me rappellent le travail prospectif du cher Siegfried Kessler, qui vécut la fin de sa vie-et mourut- dans cette région, et qui fit entendre sur cet instrument à la fin des années soixante-dix des sonorités inouïes. Le fait que l’œuvre soit jouée en quintette et non en sextette (le CD accueillait le guitariste Adam Rogers) ne laisse ressentir nul manque. Les moments très technologiques alternent avec des incises typiquement jazz, comme un solo absolu de Seamus Blake, ou une sorte de chase entre la contrebasse et le saxophone ténor, ou un passage en trio acoustique avec un beau solo de Matt Brewer. Le pianiste fait beaucoup dans la pyrotechnie et l’énergie, sur ses deux claviers, tandis que la chanteuse sait aussi s’évader vers un scat expressif qui mêle l’esprit jazz et l’esprit fusion. Vers la fin du concert un crescendo vocal va se fondre dans un intense dialogue entre sax ténor et piano sur fond de tandem contrebasse-batterie des plus vibrants. Bref le paysage est escarpé, la musique intense, avec de belles couleurs d’écriture, et l’on en ressort ébloui, un peu groggy, mais heureux. A (re)découvrir sur le site de France Musique en suivant le lien ci-dessous, lequel est agrémenté d’une entretien de sortie de scène d’Antonio Sanchez avec Pascal Rozat.

Xavier Prévost

https://www.francemusique.fr/emissions/jazz-montpellier/antonio-sanchez-migration-l-amphiteatre-du-domain-d-o-montpellier-2017-35481|Pour sa quatrième soirée de jazz, le festival accueille un groupe de la scène états-unienne : celui du batteur Antonio Sanchez, Migration, présent la veille à ‘Jazz à Junas’ dans le cadre d’une coproduction, comme le pratiquent les deux festivals depuis quelques années.

Grande affluence sous la pinède dès 20h, motivée sans doute par la présence, à 22h, d’un quintette international. Et comme chaque soir les dîneurs, pique-niqueurs et autres adeptes de l’apéritif musical tendent l’oreille vers la scène qui accueille les groupes du Languedoc et d’alentour. Aujourd’hui c’est le trio de la flûtiste Evlyn Andria, avec Jean-Luc Lehr à la guitare basse et Olivier Roman-Garcia à la guitare.

Evlyn Andria Trio

ANTONIO SANCHEZ & MIGRATION

Thana Alexa (voix), Seamus Blake (saxophone ténor & EWI), John Escreet (piano, piano électrique), Matt Brewer (contrebasse, guitare basse), Antonio Sanchez (batterie, composition)

Montpellier, Amphithéâtre du Domaine d’O, 20 juillet 2017, 22h

Juste avant de commencer à jouer, Antonio Sanchez s’adresse au public, pour dire le plaisir qu’il a d’être entouré de musicien(ne)s qui sont aussi des leaders, et qui composent et arrangent pour leurs propres groupes. Mais au sein de Migration, c’est lui qui conçoit, compose et dirige. Il présente ses partenaires en insistant sur le caractère cosmopolite de la formation : lui vient du Mexique, le bassiste du Nouveau Mexique (aux USA, entre l’Arizona et le Texas), la chanteuse de Croatie, le saxophoniste du Canada, et le pianiste d’Angleterre. Il dit aussi son goût pour toutes les formes de musique, de la pop au jazz en passant par la musique classique : il les connaît, les aime et les a pratiquées, mais il avoue sa frustration de ne pouvoir applaudir au concert symphonique après un premier mouvement qui se conclut par un fortissimo brillant et virtuose. Alors, après avoir annoncé que la groupe va jouer The Meridian Suite, publiée sur disque sous étiquette Cam Jazz voici deux ans, et qui comme toute suite va enchaîner ses mouvements (ils sont au nombre de cinq), il invite les spectateurs à ne pas réfréner leurs envies d’applaudir au fil du concert. Ce petit prêche initial a échappé à la radiodiffusion car le concert précédent (le pianiste Boris Berezosky) également en direct de Montpellier, s’est terminé avec un léger retard, et la retransmission commencera directement sur la musique.

Antonio Sanchez MigrationContrairement à ce qu’il fait dans certaines de ses autres prestations, Antnio Sanchez ne commence pas par un solo ; ici le leader est d’abord compositeur, installé à la tête d’un impressionnant set de batterie : trois caisses claires, deux toms basses, une seule grosse caisse mais une forêt de cymbales. Il use de tout cela avec discernement, finesse et musicalité, sans ostentation, même au cours des rares solos qu’il prendra au fil du concert. C’est bien d’une suite qu’il s’agit, une grande forme avec des moments différents qui s’enchaînent et s’intriquent avec cohérence. L’esthétique est celle des quatre dernières décennies : on sent que le batteur a joué avec Chick Corea, et dans l’emploi de la voix par exemple, resurgit chez l’auditeur le souvenir du groupe ‘Return To Forever’. On peut entendre dans le goût (parfois excessif) des unissons l’influence du rock progressif. Les mélodies mêlent chromatismes et intervalles distendus, on retrouve aussi à bien des reprises le souvenir des différentes formes de fusion ou de jazz rock, mais l’écriture et la texture instrumentale, comme une bonne partie des improvisations, rappellent que l’on est d’abord en territoire de jazz, fût-ce au sens large. On passe régulièrement du tout acoustique (voix, saxophone, piano, contrebasse) au tout électrique : l’Ewi, ce drôle de synthétiseur à bouche un peu tombé en désuétude ; la voix de la chanteuse, qui pilote elle-même un dispositif d’effets électroniques ; la guitare basse qui se substitue à la contrebasse ; et le piano électrique, augmenté d’une foule de pédales qui permettent une multitude de sons dont certains me rappellent le travail prospectif du cher Siegfried Kessler, qui vécut la fin de sa vie-et mourut- dans cette région, et qui fit entendre sur cet instrument à la fin des années soixante-dix des sonorités inouïes. Le fait que l’œuvre soit jouée en quintette et non en sextette (le CD accueillait le guitariste Adam Rogers) ne laisse ressentir nul manque. Les moments très technologiques alternent avec des incises typiquement jazz, comme un solo absolu de Seamus Blake, ou une sorte de chase entre la contrebasse et le saxophone ténor, ou un passage en trio acoustique avec un beau solo de Matt Brewer. Le pianiste fait beaucoup dans la pyrotechnie et l’énergie, sur ses deux claviers, tandis que la chanteuse sait aussi s’évader vers un scat expressif qui mêle l’esprit jazz et l’esprit fusion. Vers la fin du concert un crescendo vocal va se fondre dans un intense dialogue entre sax ténor et piano sur fond de tandem contrebasse-batterie des plus vibrants. Bref le paysage est escarpé, la musique intense, avec de belles couleurs d’écriture, et l’on en ressort ébloui, un peu groggy, mais heureux. A (re)découvrir sur le site de France Musique en suivant le lien ci-dessous, lequel est agrémenté d’une entretien de sortie de scène d’Antonio Sanchez avec Pascal Rozat.

Xavier Prévost

https://www.francemusique.fr/emissions/jazz-montpellier/antonio-sanchez-migration-l-amphiteatre-du-domain-d-o-montpellier-2017-35481|Pour sa quatrième soirée de jazz, le festival accueille un groupe de la scène états-unienne : celui du batteur Antonio Sanchez, Migration, présent la veille à ‘Jazz à Junas’ dans le cadre d’une coproduction, comme le pratiquent les deux festivals depuis quelques années.

Grande affluence sous la pinède dès 20h, motivée sans doute par la présence, à 22h, d’un quintette international. Et comme chaque soir les dîneurs, pique-niqueurs et autres adeptes de l’apéritif musical tendent l’oreille vers la scène qui accueille les groupes du Languedoc et d’alentour. Aujourd’hui c’est le trio de la flûtiste Evlyn Andria, avec Jean-Luc Lehr à la guitare basse et Olivier Roman-Garcia à la guitare.

Evlyn Andria Trio

ANTONIO SANCHEZ & MIGRATION

Thana Alexa (voix), Seamus Blake (saxophone ténor & EWI), John Escreet (piano, piano électrique), Matt Brewer (contrebasse, guitare basse), Antonio Sanchez (batterie, composition)

Montpellier, Amphithéâtre du Domaine d’O, 20 juillet 2017, 22h

Juste avant de commencer à jouer, Antonio Sanchez s’adresse au public, pour dire le plaisir qu’il a d’être entouré de musicien(ne)s qui sont aussi des leaders, et qui composent et arrangent pour leurs propres groupes. Mais au sein de Migration, c’est lui qui conçoit, compose et dirige. Il présente ses partenaires en insistant sur le caractère cosmopolite de la formation : lui vient du Mexique, le bassiste du Nouveau Mexique (aux USA, entre l’Arizona et le Texas), la chanteuse de Croatie, le saxophoniste du Canada, et le pianiste d’Angleterre. Il dit aussi son goût pour toutes les formes de musique, de la pop au jazz en passant par la musique classique : il les connaît, les aime et les a pratiquées, mais il avoue sa frustration de ne pouvoir applaudir au concert symphonique après un premier mouvement qui se conclut par un fortissimo brillant et virtuose. Alors, après avoir annoncé que la groupe va jouer The Meridian Suite, publiée sur disque sous étiquette Cam Jazz voici deux ans, et qui comme toute suite va enchaîner ses mouvements (ils sont au nombre de cinq), il invite les spectateurs à ne pas réfréner leurs envies d’applaudir au fil du concert. Ce petit prêche initial a échappé à la radiodiffusion car le concert précédent (le pianiste Boris Berezosky) également en direct de Montpellier, s’est terminé avec un léger retard, et la retransmission commencera directement sur la musique.

Antonio Sanchez MigrationContrairement à ce qu’il fait dans certaines de ses autres prestations, Antnio Sanchez ne commence pas par un solo ; ici le leader est d’abord compositeur, installé à la tête d’un impressionnant set de batterie : trois caisses claires, deux toms basses, une seule grosse caisse mais une forêt de cymbales. Il use de tout cela avec discernement, finesse et musicalité, sans ostentation, même au cours des rares solos qu’il prendra au fil du concert. C’est bien d’une suite qu’il s’agit, une grande forme avec des moments différents qui s’enchaînent et s’intriquent avec cohérence. L’esthétique est celle des quatre dernières décennies : on sent que le batteur a joué avec Chick Corea, et dans l’emploi de la voix par exemple, resurgit chez l’auditeur le souvenir du groupe ‘Return To Forever’. On peut entendre dans le goût (parfois excessif) des unissons l’influence du rock progressif. Les mélodies mêlent chromatismes et intervalles distendus, on retrouve aussi à bien des reprises le souvenir des différentes formes de fusion ou de jazz rock, mais l’écriture et la texture instrumentale, comme une bonne partie des improvisations, rappellent que l’on est d’abord en territoire de jazz, fût-ce au sens large. On passe régulièrement du tout acoustique (voix, saxophone, piano, contrebasse) au tout électrique : l’Ewi, ce drôle de synthétiseur à bouche un peu tombé en désuétude ; la voix de la chanteuse, qui pilote elle-même un dispositif d’effets électroniques ; la guitare basse qui se substitue à la contrebasse ; et le piano électrique, augmenté d’une foule de pédales qui permettent une multitude de sons dont certains me rappellent le travail prospectif du cher Siegfried Kessler, qui vécut la fin de sa vie-et mourut- dans cette région, et qui fit entendre sur cet instrument à la fin des années soixante-dix des sonorités inouïes. Le fait que l’œuvre soit jouée en quintette et non en sextette (le CD accueillait le guitariste Adam Rogers) ne laisse ressentir nul manque. Les moments très technologiques alternent avec des incises typiquement jazz, comme un solo absolu de Seamus Blake, ou une sorte de chase entre la contrebasse et le saxophone ténor, ou un passage en trio acoustique avec un beau solo de Matt Brewer. Le pianiste fait beaucoup dans la pyrotechnie et l’énergie, sur ses deux claviers, tandis que la chanteuse sait aussi s’évader vers un scat expressif qui mêle l’esprit jazz et l’esprit fusion. Vers la fin du concert un crescendo vocal va se fondre dans un intense dialogue entre sax ténor et piano sur fond de tandem contrebasse-batterie des plus vibrants. Bref le paysage est escarpé, la musique intense, avec de belles couleurs d’écriture, et l’on en ressort ébloui, un peu groggy, mais heureux. A (re)découvrir sur le site de France Musique en suivant le lien ci-dessous, lequel est agrémenté d’une entretien de sortie de scène d’Antonio Sanchez avec Pascal Rozat.

Xavier Prévost

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