Schwartz-Bart, Privat, Troupé: Jazz vaudou à Oloron
Dread locks pendants jusqu’au bas du dos, gueule carrée barrée s’une barbe drue poivre et sel et fendue d’un regard noir ébène Bob Bovano lâche des incantations sourdes en langue créole tout en esquissant des pas de danse d’une souplesse toute féline. Le chanteur haïtien vivant en Bretagne, invité express de Jacques Schwartz Bart, fait vivre à sa façon les formules vaudous sur fond de tambours mis en écho.
Grégory Privat (p)
Sonny Troupé (tambour ka)
Jacques Schwartz-Bart (ts), Gregory Privat (p), Stéphane Kerecki (p), Sonny Troupé (dms), Claude Saturne (perc), Bob Bovano (voc)
Festival des Rives et des Notes, Salle Jéliote, Oloron Sainte Marie,
4 juillet
Lorsque sur scène il lui vient de tenter une définition de cette formule de duo, Grégory Privat en revient toujours au basique d’un titre figurant sur l’album (Luminescence/ Jazz Family) intitulé sobrement On ka avec piano. CQFD. Là se situe bien le pari. Ce couple clavier percussion traditionnelle guadeloupéenne est inédit. Originellement, dans la tradition la voix fait écho aux tambouyés dans les fêtes (lewoz) de la campagne de Grande ou Basse Terre. Et la danse se trouve être invitée en mode troisième dimension. Dans la formule réactualisée sur disque ou live ici par les deux musiciens antillais, le ka demeure bien le poto-mitan mais le piano lui, dépassant le simple vecteur voix unique se fait choeur, percussions au pluriel et orchestre à lui tout seul. Ainsi le toucher varié, subtil ou appuyé de Sonny Troupé sur la peau du tambour (Luminescence) se mut-il au besoin en mélodie à une ou plusieurs voix tandis que les accords en séquences, dédoublés et répétés du piano assurent alors le rôle du marqueur rythmique. Et vice versa. Pareille remise en forme d’une tradition culturelle tout en la respectant (Rainy day), ou la mise en représentation musicale de la pluie comme culture vivrière en zone tropicale), cette tentative d’élargissement, d’ouverture d’un propos musical initial par un enrichissement tant harmonique que rythmique situe bien le niveau du travail entrepris par des deux protagonistes. La version live donnée à Oloron prouve l’adhésion possible d’un public pas forcément averti d’une telle démarche. Question de potentiel, de force de la musique intrinsèque bien sur. Question de conviction aussi, d’envie et de talent conjugués de la part des deux musiciens. Racinées dans deux iles (Martinique, Guadeloupe), ventilé par jazz et impro, le matériau musical ainsi nourri, malaxé peut poursuivre son voyage.
De fait le rôle du duo Privat-Troupé ne s’avère pas fort différent au sein de l’orchestre de Jacques Schwartz Bart. Dans le contenu il insuffle en continu un principe moteur de dynamique. Soit au souffle naturel de la musique du musicien guadeloupéen installé à New York une diversification dans les moments d’intensité, une certaine fluidité sans doute aussi, Sans compter (avec la touch très fine du percussionniste haïtien Claude Saturne lui aussi) une capacité de rebond permanente. Quelle que soit la qualité des arrangements de l’album Racine Haiti (Motema) la scène offre une version resserrée, densifiée, mise à nu pour plus de relief des thèmes illustrants la musique vaudou (Kontredans avec un apport vocal plus brut) aussi bien que des compositions originales (Bade Zile) Se ressent dès lors un lyrisme très présent, une manière d’appel à la danse à partir d’un groove construit épais. Instrument par instrument chacun contribue à l’apport global. Jacques Schwartz Bart possède désormais, c’est évident, une sonorité bien à lui. Ténor fait de grain plus que de surfaces lisses, générateur d’inflexion naturelles vers le grave en mode d’accentuation de dramaturgie volontaire, de tempêtuosité ou à l’inverse de besoin de pétole. En tant que leader il s’y entend à tirer l’orchestre vers le haut, à cadrer le propos musical (ou recarder au besoin celui qui sort de son idée -claire- du chemin, à l’image du fantasque chanteur haïtien…) ou distribuer cartes ou cartouches aux solistes histoire de booster l’expressivité. A ce titre on découvre alors -on y revient-une autre facette du duo pré cité. Intéressant de découvrir la grinta de Grégory Privat bien assis sur une rythmique, livré à lui même pour construire son solo (inspiration, sens de la nuance, possibilité de furia) sur des espaces voir grilles estampillées jazz. Sonny Troupé lui endosse dès lors un costume de batteur de jazz qui parait naturellement taillé à sa mesure « J’ai rarement rencontré à New York ou ailleurs un batteur doté d’un tel sens de la précision » confie même le leader lors de la présentation de ses musiciens. Quelques instants auparavant le saxophoniste avait intentionnellement provoqué son batteur dans une longue séquence pour un sacré duel de montées dans les tours, de crescendos et autres chutes libres à donner le vertige. Reste dans ce contexte très connoté la place dévolue à Stéphane Kerecki. Celui de tour de contrôle, de garantie du coeur battant de l’orchestre avec son bagage de gros son bien rond. Et une solidité assumée sans faille.
Ce « vaudou jazz » là revendiqué par le saxophoniste guadeloupéen comme faisant partie d’un « tout culturel né en Afrique et transporté dans les Amériques par les esclaves » est tout sauf un cliché.
Robert Latxague
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Dread locks pendants jusqu’au bas du dos, gueule carrée barrée s’une barbe drue poivre et sel et fendue d’un regard noir ébène Bob Bovano lâche des incantations sourdes en langue créole tout en esquissant des pas de danse d’une souplesse toute féline. Le chanteur haïtien vivant en Bretagne, invité express de Jacques Schwartz Bart, fait vivre à sa façon les formules vaudous sur fond de tambours mis en écho.
Grégory Privat (p)
Sonny Troupé (tambour ka)
Jacques Schwartz-Bart (ts), Gregory Privat (p), Stéphane Kerecki (p), Sonny Troupé (dms), Claude Saturne (perc), Bob Bovano (voc)
Festival des Rives et des Notes, Salle Jéliote, Oloron Sainte Marie,
4 juillet
Lorsque sur scène il lui vient de tenter une définition de cette formule de duo, Grégory Privat en revient toujours au basique d’un titre figurant sur l’album (Luminescence/ Jazz Family) intitulé sobrement On ka avec piano. CQFD. Là se situe bien le pari. Ce couple clavier percussion traditionnelle guadeloupéenne est inédit. Originellement, dans la tradition la voix fait écho aux tambouyés dans les fêtes (lewoz) de la campagne de Grande ou Basse Terre. Et la danse se trouve être invitée en mode troisième dimension. Dans la formule réactualisée sur disque ou live ici par les deux musiciens antillais, le ka demeure bien le poto-mitan mais le piano lui, dépassant le simple vecteur voix unique se fait choeur, percussions au pluriel et orchestre à lui tout seul. Ainsi le toucher varié, subtil ou appuyé de Sonny Troupé sur la peau du tambour (Luminescence) se mut-il au besoin en mélodie à une ou plusieurs voix tandis que les accords en séquences, dédoublés et répétés du piano assurent alors le rôle du marqueur rythmique. Et vice versa. Pareille remise en forme d’une tradition culturelle tout en la respectant (Rainy day), ou la mise en représentation musicale de la pluie comme culture vivrière en zone tropicale), cette tentative d’élargissement, d’ouverture d’un propos musical initial par un enrichissement tant harmonique que rythmique situe bien le niveau du travail entrepris par des deux protagonistes. La version live donnée à Oloron prouve l’adhésion possible d’un public pas forcément averti d’une telle démarche. Question de potentiel, de force de la musique intrinsèque bien sur. Question de conviction aussi, d’envie et de talent conjugués de la part des deux musiciens. Racinées dans deux iles (Martinique, Guadeloupe), ventilé par jazz et impro, le matériau musical ainsi nourri, malaxé peut poursuivre son voyage.
De fait le rôle du duo Privat-Troupé ne s’avère pas fort différent au sein de l’orchestre de Jacques Schwartz Bart. Dans le contenu il insuffle en continu un principe moteur de dynamique. Soit au souffle naturel de la musique du musicien guadeloupéen installé à New York une diversification dans les moments d’intensité, une certaine fluidité sans doute aussi, Sans compter (avec la touch très fine du percussionniste haïtien Claude Saturne lui aussi) une capacité de rebond permanente. Quelle que soit la qualité des arrangements de l’album Racine Haiti (Motema) la scène offre une version resserrée, densifiée, mise à nu pour plus de relief des thèmes illustrants la musique vaudou (Kontredans avec un apport vocal plus brut) aussi bien que des compositions originales (Bade Zile) Se ressent dès lors un lyrisme très présent, une manière d’appel à la danse à partir d’un groove construit épais. Instrument par instrument chacun contribue à l’apport global. Jacques Schwartz Bart possède désormais, c’est évident, une sonorité bien à lui. Ténor fait de grain plus que de surfaces lisses, générateur d’inflexion naturelles vers le grave en mode d’accentuation de dramaturgie volontaire, de tempêtuosité ou à l’inverse de besoin de pétole. En tant que leader il s’y entend à tirer l’orchestre vers le haut, à cadrer le propos musical (ou recarder au besoin celui qui sort de son idée -claire- du chemin, à l’image du fantasque chanteur haïtien…) ou distribuer cartes ou cartouches aux solistes histoire de booster l’expressivité. A ce titre on découvre alors -on y revient-une autre facette du duo pré cité. Intéressant de découvrir la grinta de Grégory Privat bien assis sur une rythmique, livré à lui même pour construire son solo (inspiration, sens de la nuance, possibilité de furia) sur des espaces voir grilles estampillées jazz. Sonny Troupé lui endosse dès lors un costume de batteur de jazz qui parait naturellement taillé à sa mesure « J’ai rarement rencontré à New York ou ailleurs un batteur doté d’un tel sens de la précision » confie même le leader lors de la présentation de ses musiciens. Quelques instants auparavant le saxophoniste avait intentionnellement provoqué son batteur dans une longue séquence pour un sacré duel de montées dans les tours, de crescendos et autres chutes libres à donner le vertige. Reste dans ce contexte très connoté la place dévolue à Stéphane Kerecki. Celui de tour de contrôle, de garantie du coeur battant de l’orchestre avec son bagage de gros son bien rond. Et une solidité assumée sans faille.
Ce « vaudou jazz » là revendiqué par le saxophoniste guadeloupéen comme faisant partie d’un « tout culturel né en Afrique et transporté dans les Amériques par les esclaves » est tout sauf un cliché.
Robert Latxague
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Dread locks pendants jusqu’au bas du dos, gueule carrée barrée s’une barbe drue poivre et sel et fendue d’un regard noir ébène Bob Bovano lâche des incantations sourdes en langue créole tout en esquissant des pas de danse d’une souplesse toute féline. Le chanteur haïtien vivant en Bretagne, invité express de Jacques Schwartz Bart, fait vivre à sa façon les formules vaudous sur fond de tambours mis en écho.
Grégory Privat (p)
Sonny Troupé (tambour ka)
Jacques Schwartz-Bart (ts), Gregory Privat (p), Stéphane Kerecki (p), Sonny Troupé (dms), Claude Saturne (perc), Bob Bovano (voc)
Festival des Rives et des Notes, Salle Jéliote, Oloron Sainte Marie,
4 juillet
Lorsque sur scène il lui vient de tenter une définition de cette formule de duo, Grégory Privat en revient toujours au basique d’un titre figurant sur l’album (Luminescence/ Jazz Family) intitulé sobrement On ka avec piano. CQFD. Là se situe bien le pari. Ce couple clavier percussion traditionnelle guadeloupéenne est inédit. Originellement, dans la tradition la voix fait écho aux tambouyés dans les fêtes (lewoz) de la campagne de Grande ou Basse Terre. Et la danse se trouve être invitée en mode troisième dimension. Dans la formule réactualisée sur disque ou live ici par les deux musiciens antillais, le ka demeure bien le poto-mitan mais le piano lui, dépassant le simple vecteur voix unique se fait choeur, percussions au pluriel et orchestre à lui tout seul. Ainsi le toucher varié, subtil ou appuyé de Sonny Troupé sur la peau du tambour (Luminescence) se mut-il au besoin en mélodie à une ou plusieurs voix tandis que les accords en séquences, dédoublés et répétés du piano assurent alors le rôle du marqueur rythmique. Et vice versa. Pareille remise en forme d’une tradition culturelle tout en la respectant (Rainy day), ou la mise en représentation musicale de la pluie comme culture vivrière en zone tropicale), cette tentative d’élargissement, d’ouverture d’un propos musical initial par un enrichissement tant harmonique que rythmique situe bien le niveau du travail entrepris par des deux protagonistes. La version live donnée à Oloron prouve l’adhésion possible d’un public pas forcément averti d’une telle démarche. Question de potentiel, de force de la musique intrinsèque bien sur. Question de conviction aussi, d’envie et de talent conjugués de la part des deux musiciens. Racinées dans deux iles (Martinique, Guadeloupe), ventilé par jazz et impro, le matériau musical ainsi nourri, malaxé peut poursuivre son voyage.
De fait le rôle du duo Privat-Troupé ne s’avère pas fort différent au sein de l’orchestre de Jacques Schwartz Bart. Dans le contenu il insuffle en continu un principe moteur de dynamique. Soit au souffle naturel de la musique du musicien guadeloupéen installé à New York une diversification dans les moments d’intensité, une certaine fluidité sans doute aussi, Sans compter (avec la touch très fine du percussionniste haïtien Claude Saturne lui aussi) une capacité de rebond permanente. Quelle que soit la qualité des arrangements de l’album Racine Haiti (Motema) la scène offre une version resserrée, densifiée, mise à nu pour plus de relief des thèmes illustrants la musique vaudou (Kontredans avec un apport vocal plus brut) aussi bien que des compositions originales (Bade Zile) Se ressent dès lors un lyrisme très présent, une manière d’appel à la danse à partir d’un groove construit épais. Instrument par instrument chacun contribue à l’apport global. Jacques Schwartz Bart possède désormais, c’est évident, une sonorité bien à lui. Ténor fait de grain plus que de surfaces lisses, générateur d’inflexion naturelles vers le grave en mode d’accentuation de dramaturgie volontaire, de tempêtuosité ou à l’inverse de besoin de pétole. En tant que leader il s’y entend à tirer l’orchestre vers le haut, à cadrer le propos musical (ou recarder au besoin celui qui sort de son idée -claire- du chemin, à l’image du fantasque chanteur haïtien…) ou distribuer cartes ou cartouches aux solistes histoire de booster l’expressivité. A ce titre on découvre alors -on y revient-une autre facette du duo pré cité. Intéressant de découvrir la grinta de Grégory Privat bien assis sur une rythmique, livré à lui même pour construire son solo (inspiration, sens de la nuance, possibilité de furia) sur des espaces voir grilles estampillées jazz. Sonny Troupé lui endosse dès lors un costume de batteur de jazz qui parait naturellement taillé à sa mesure « J’ai rarement rencontré à New York ou ailleurs un batteur doté d’un tel sens de la précision » confie même le leader lors de la présentation de ses musiciens. Quelques instants auparavant le saxophoniste avait intentionnellement provoqué son batteur dans une longue séquence pour un sacré duel de montées dans les tours, de crescendos et autres chutes libres à donner le vertige. Reste dans ce contexte très connoté la place dévolue à Stéphane Kerecki. Celui de tour de contrôle, de garantie du coeur battant de l’orchestre avec son bagage de gros son bien rond. Et une solidité assumée sans faille.
Ce « vaudou jazz » là revendiqué par le saxophoniste guadeloupéen comme faisant partie d’un « tout culturel né en Afrique et transporté dans les Amériques par les esclaves » est tout sauf un cliché.
Robert Latxague
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Dread locks pendants jusqu’au bas du dos, gueule carrée barrée s’une barbe drue poivre et sel et fendue d’un regard noir ébène Bob Bovano lâche des incantations sourdes en langue créole tout en esquissant des pas de danse d’une souplesse toute féline. Le chanteur haïtien vivant en Bretagne, invité express de Jacques Schwartz Bart, fait vivre à sa façon les formules vaudous sur fond de tambours mis en écho.
Grégory Privat (p)
Sonny Troupé (tambour ka)
Jacques Schwartz-Bart (ts), Gregory Privat (p), Stéphane Kerecki (p), Sonny Troupé (dms), Claude Saturne (perc), Bob Bovano (voc)
Festival des Rives et des Notes, Salle Jéliote, Oloron Sainte Marie,
4 juillet
Lorsque sur scène il lui vient de tenter une définition de cette formule de duo, Grégory Privat en revient toujours au basique d’un titre figurant sur l’album (Luminescence/ Jazz Family) intitulé sobrement On ka avec piano. CQFD. Là se situe bien le pari. Ce couple clavier percussion traditionnelle guadeloupéenne est inédit. Originellement, dans la tradition la voix fait écho aux tambouyés dans les fêtes (lewoz) de la campagne de Grande ou Basse Terre. Et la danse se trouve être invitée en mode troisième dimension. Dans la formule réactualisée sur disque ou live ici par les deux musiciens antillais, le ka demeure bien le poto-mitan mais le piano lui, dépassant le simple vecteur voix unique se fait choeur, percussions au pluriel et orchestre à lui tout seul. Ainsi le toucher varié, subtil ou appuyé de Sonny Troupé sur la peau du tambour (Luminescence) se mut-il au besoin en mélodie à une ou plusieurs voix tandis que les accords en séquences, dédoublés et répétés du piano assurent alors le rôle du marqueur rythmique. Et vice versa. Pareille remise en forme d’une tradition culturelle tout en la respectant (Rainy day), ou la mise en représentation musicale de la pluie comme culture vivrière en zone tropicale), cette tentative d’élargissement, d’ouverture d’un propos musical initial par un enrichissement tant harmonique que rythmique situe bien le niveau du travail entrepris par des deux protagonistes. La version live donnée à Oloron prouve l’adhésion possible d’un public pas forcément averti d’une telle démarche. Question de potentiel, de force de la musique intrinsèque bien sur. Question de conviction aussi, d’envie et de talent conjugués de la part des deux musiciens. Racinées dans deux iles (Martinique, Guadeloupe), ventilé par jazz et impro, le matériau musical ainsi nourri, malaxé peut poursuivre son voyage.
De fait le rôle du duo Privat-Troupé ne s’avère pas fort différent au sein de l’orchestre de Jacques Schwartz Bart. Dans le contenu il insuffle en continu un principe moteur de dynamique. Soit au souffle naturel de la musique du musicien guadeloupéen installé à New York une diversification dans les moments d’intensité, une certaine fluidité sans doute aussi, Sans compter (avec la touch très fine du percussionniste haïtien Claude Saturne lui aussi) une capacité de rebond permanente. Quelle que soit la qualité des arrangements de l’album Racine Haiti (Motema) la scène offre une version resserrée, densifiée, mise à nu pour plus de relief des thèmes illustrants la musique vaudou (Kontredans avec un apport vocal plus brut) aussi bien que des compositions originales (Bade Zile) Se ressent dès lors un lyrisme très présent, une manière d’appel à la danse à partir d’un groove construit épais. Instrument par instrument chacun contribue à l’apport global. Jacques Schwartz Bart possède désormais, c’est évident, une sonorité bien à lui. Ténor fait de grain plus que de surfaces lisses, générateur d’inflexion naturelles vers le grave en mode d’accentuation de dramaturgie volontaire, de tempêtuosité ou à l’inverse de besoin de pétole. En tant que leader il s’y entend à tirer l’orchestre vers le haut, à cadrer le propos musical (ou recarder au besoin celui qui sort de son idée -claire- du chemin, à l’image du fantasque chanteur haïtien…) ou distribuer cartes ou cartouches aux solistes histoire de booster l’expressivité. A ce titre on découvre alors -on y revient-une autre facette du duo pré cité. Intéressant de découvrir la grinta de Grégory Privat bien assis sur une rythmique, livré à lui même pour construire son solo (inspiration, sens de la nuance, possibilité de furia) sur des espaces voir grilles estampillées jazz. Sonny Troupé lui endosse dès lors un costume de batteur de jazz qui parait naturellement taillé à sa mesure « J’ai rarement rencontré à New York ou ailleurs un batteur doté d’un tel sens de la précision » confie même le leader lors de la présentation de ses musiciens. Quelques instants auparavant le saxophoniste avait intentionnellement provoqué son batteur dans une longue séquence pour un sacré duel de montées dans les tours, de crescendos et autres chutes libres à donner le vertige. Reste dans ce contexte très connoté la place dévolue à Stéphane Kerecki. Celui de tour de contrôle, de garantie du coeur battant de l’orchestre avec son bagage de gros son bien rond. Et une solidité assumée sans faille.
Ce « vaudou jazz » là revendiqué par le saxophoniste guadeloupéen comme faisant partie d’un « tout culturel né en Afrique et transporté dans les Amériques par les esclaves » est tout sauf un cliché.
Robert Latxague