Sylvaine Hélary et Sarah Murcia font leur Tête de Lark
Petit Faucheux (Tours) avant-hier, et au Triton (Les Lilas) hier 22 septembre 2022 où nous étions : la flûtiste Sylvaine Hélary et la contrebassiste Sarah Murcia présentaient “La Tête de Lark”, répertoire de leurs deux plumes pour un étrange quintette à deux bois, un cuivre et deux contrebasses.
Sylvaine Hélary (flûte, compositions, direction), Élodie Pasquier (clarinettes), Aloïs Benoit (euphonium), Sébastien Boisseau (contrebases), Sarah Murcia (contrebasse, composition, direction).
Avec cet effectif très singulier et ces personnalités d’exception, on a déjà beaucoup dit. Comment en dire plus ? Comment parler, écrire sur de telles musiques échappant aux références habituelles. Voyez comme l’habitude des crédits au dos des disques de jazz, m’a fait mentionner ci-dessus les instruments du plus aigu au plus grave, les vents précédant la rythmique. Rythmique ? On est pourtant bien loin de l’orchestre de jazz : ici nulle batterie, ni discrète ni efficace, pas de walking bass non plus. Ambiance chambriste, vient à l’esprit la musique français du tournant de siècle, voire plus tardive, Francis Poulenc, Jacques Ibert, Dutilleux ou même Olivier Messiaen … Peut-être faudrait-il même regarder au-delà des frontières et directement vers ces musiques de l’après, le John Cage des premiers quatuors, Morton Feldman, Giacinto Scelsi. Tout simplement à Syvlaine Hélary et Sarah Murcia elles-mêmes et telles qu’elles se sont associées pour créer ce programme, alternant leurs partitions du presque rien au tutti, de l’unisson à la consonance, voire la dissonance harmonisée avec une infinie délicatesse ou un art subtil de la tension, d’où émergent quelques solos dans un climat d’écoute maximale contribuant à ce qui ressemble à un petit théâtre de sons qui aurait été imaginé par un Tchekhov compositeur
On quitte la salle sans avoir encore trouvé les mots pour rendre compte d’un concert fort séduit. On traine autour du bar du Triton, en essayant de glaner quelque information, recueillir quelque propos éclairé que l’on pourrait s’approprier. Mais si l’accueil est unanime, ces retrouvailles de rentrée amènent d’autres sujets. Ah si ! Tout de même, ces propos de Sébastien Boisseau : « Sarah m’a appelé un jour pour me dire que j’étais son contrebassiste préféré. Je tombais des nues, mais ça m’allait plutôt bien parce que je l’admire beaucoup. Et j’ai accepté de partager les parties de contrebasse de ce projet qu’elle montait avec Sylvaine. C’est merveilleux, parce que tout en ayant des jeux totalement différents, nous avons le même tempo. » Ce dont nous ne doutions pas, pour savoir que l’une et l’autre ont pour partenaire privilégié à la batterie Christophe Lavergne.
Quelle coïncidence que de rédiger ce compte rendu dans le train qui me conduit à Marseille pour le festival Les Émouvantes où nous entendrons ce soir le trio de Bruno Angelini, le quintette d’Hélène Labarrière, demain le trio de Vincent Courtois et le Septet de Stéphane Payen. À n’en pas douter La Tête de Lark de Sylvaine Hélary et Sarah Murcia est éligible au titre d’Émouvantes. Franck Bergerot (photo © X. Deher)